Dans l'appartement d'Elisa Pratte, sévit un dégât des eaux. Elle attend la visite d'un expert en assurances, qui se présente sous le nom de Philippe Dumont. Or, la personne en face d'Elisa a les traits d'une femme, porte une jupe, bref la confusion n'est pas possible et éveille le trouble chez Elisa.
Elle décide d'adresser un courrier à ce Monsieur Dumont pour partager son émotion et sa solidarité vers l'envie de transformation, mais ce dernier lui répond qu'elle est cinglée, qu'elle se trompe haut et fort.
Toutefois l'idée a fait son chemin, dans la tête et l'imagination des deux personnages. La suite du roman prend la tournure d'une campagne de conquête de l'autre et de soi, "réfléchir, se réfléchir tel qu'on se voit dans son miroir intérieur, être au plus près possible d'une réalité ressentie, voilà ce qui me semble être la quête de tous ceux qui ne se ressemblent pas, de tous ceux qui pensent qu'il est une évidence : le miroir ment".
"Un bras dedans, un bras dehors" est le 1er roman d'Emmanuelle Peslerbe, un roman déconcertant. Je n'ai pas foncièrement adhéré à l'histoire en général, mais l'idée d'un mirage acoquinée à une situation de quiproquo était séduisante.
Le thème de l'androgynie rappelle le roman de Virginia Woolf, "Orlando", même si Emmanuelle Peslerbe adopte d'emblée un ton et un univers bien à elle. On suit à la fois son héroïne, Elisa Pratte, jeune femme insaisissable, peintre à ses heures et à l'imagination débordante, et d'un autre côté Philippe Dumont, employé modèle, marié, des activités à la pelle pour remplir ses journées... Or, il faut croire que l'ennui pointe son nez car le courrier d'Elisa lui donne la clé des champs, l'invite à déborder de ses sentiers battus et emprunte la voie du fantasme.
Emmanuelle Peslerbe a une très jolie écriture qui laisse planer le doute. Son choix d'être concise et de laisser la porte ouverte aux pointillés renforce le sentiment de polir les angles, de ne donner aucune solution, d'introduire le doute... L'imagination mérite son appellation de "folle du logis" dans cette histoire pour adultes qui s'ennuient.
Ce 1er roman en appelle d'autres, car même si j'ai trouvé l'histoire nébuleuse, avec des passages abscons, le style et l'univers de l'auteur gagnent à être retrouvés, redécouverts. A suivre...
Editions du Rouergue