30/05/08

La mariée mise à nue - Nikki Gemmel

mariee_mise_a_nuLa mariée mise à nue se présente comme un journal retrouvé après la disparition mystérieuse de sa narratrice, une épouse comblée et mère d'un petit garçon, selon les apparences. La police a vite bouclé son enquête en concluant à un suicide, or la mère de cette jeune femme est persuadée du contraire. Sa fille a orchestré une mise en scène de sa disparition et ce manuscrit en détient certainement la clef. Que cache-t-il ? Des confidences, une vérité crue et sans fard, une absence d'épanouissement, une réalité amère et sinistre, bref un portrait qui brise le mythe du mariage et de la maternité. Pas brillant ? Non, je l'avoue.

Le roman est composé de chapitres courts, ou qui porteraient mieux le nom de leçons. Ces dernières sont inspirées d'ouvrages victoriens évoquant la sacro sainte science ménagère. Tout un programme ! Et le contraste est énorme, vaguement amusant, pour ne pas dire délibérément moqueur. Le journal s'ouvre sur le voyage de noces à Marrakech où déjà percent les premières failles. Le couple est mollasson, le mariage sans éclat, l'entente sexuelle déjà frelatée. L'homme et la femme partagent le même oxygène d'une bulle qui les asphyxie tout autant. Et l'image d'Epinal n'en finit pas de voler en mille morceaux. La routine du quotidien s'en donne à coeur joie, les concessions écoeurent, le manque de passion est flagrant. Chacun semble mijoter dans son jus, impossible de livrer sans ambages la somme de frustrations.

La jeune femme est fortement affligée, déçue, soupçonneuse et blessée dans son moi profond. L'idée d'écrire ce journal, dans le dos de son mari, lui viendra progressivement, au fil du changement de cap qui s'opérera dans sa vie. Car elle a décidé de bouger, de changer, d'aller au-devant de ses désirs et de ses envies. Il faut alors savoir que le sexe prendra une part prépondérante dans l'éclosion de sa sensualité et participera implicitement à guider cette femme d'une trentaine d'années à trouver sa voie.   

A la base, Nikki Gemmel avait souhaité publier ce roman anonymement, car elle pensait très honnêtement livrer dans ce livre des propos pouvant choquer et/ou heurter la sensibilité de ses proches. Pourtant, elle assume sans rougir chaque mot de ce livre, chaque pensée affichée de sa narratrice et n'en démord pas de briser les clichés rutilants qui s'imposent à toutes les femmes. Mais curieusement, la photographie de ce couple m'est apparue sordide, pathétique et flippante. Heureusement, elle n'est guère universelle ! Les tergiversations de cette jeune femme ont pour moi sonné comme autant de claques douloureuses pour qui croiraient encore aux contes de fées ! Ci et là, on peut trouver des propos vraisemblables, comme Le contraire de l'amour n'est pas la haine, mais l'indifférence. L'indifférence émotionnelle, l'indifférence physique. Mais je crois avoir trouvé ce livre trop long, trop enlisé dans des scènes assez glauques, avec des fantasmes humiliants et qui dérangent. La lecture, en général, ne gratouille pas, elle chatouille, elle pique, elle peut mettre mal à l'aise. Je n'ai pas non plus ressenti d'empathie pour les personnages, et ça vous place indiciblement en marge du roman. A voir, donc.

La mariée mise à nue, Nikki Gemmel.la_mariee_mise_a_nu_poche

Traduit de l'anglais (australien) par Alfred Boudry.

Au diable vauvert, 2006 - 357 pages - 22€

Disponible au Livre de Poche, Mai 2008.

Sur le site du Livre de Poche, on retrouve tous les blogueurs participants à cette opération autour de La Mariée mise à nu.

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Eloge du silence pendant l'amour - Lisa Azuelos

Quatrième de couverture

C'est passé 30 ans que les coeurs deviennent fragiles. Ce livre, entre réalité et fiction, est la chronique douce et drôle d'une trentenaire divorcée, mère de famille, dont le coeur s'est fracassé un soir de Noël quand son compagnon l'a quittée : « Avec mon coeur dans sa minable valise, pleine de mon minable passé avec lui, une brosse à dents, quelques caleçons et trois chemises dont une repassée par mes soins. » Pour se remettre à l'endroit, il faut marcher à l'envers. Du nouvel homme, arrivé par hasard, on ne veut rien savoir. On connaît l'odeur de son savon avant de connaître son nom. On fait parler les corps pour mieux taire les mots. Le silence est-il la clef des passions qui durent ?

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A la question : Le silence est-il la clef des passions qui durent ?, je réponds oui, sans hésiter. Ce roman en est le parfait exposé ! Sa narratrice, Lilli, est une jeune femme divorcée, mère de trois enfants, qui partage la garde alternée avec le cynique Noël, parti avec une valise le soir même de cette fête. Après ça, on vous ramasse à la petite cuillère, vos idéaux et vous. Vous ne croyez plus en grand-chose et vous attendez juste que le temps passe, au jour le jour. C'est fini de rêver éveillée ! Et puis, les vacances arrivent, vous êtes détendue et disponible, vous acceptez qu'un type vous drague et vous le suivez dans sa chambre, vous êtes consentante pour cette nuit sans lendemain. Aucun discours, juste du plaisir à saisir. Et ça marche plutôt, comme philosophie. Le retour à Paris, la grisaille ou l'été indien, et toujours votre amant connu en Corse vous "textote" (quel terme horrible!).

Ce n'est pas encore une liaison, ce n'est pas du tout une histoire d'amour. Cette histoire entre Lilli et Antoine s'est construite à l'exact opposé des schémas classiques, l'exposition du corps avant l'usage des mots. Le classicisme est rebattu et usé, la preuve est que Lilli a perdu ses illusions et ne croit quasiment plus au coup de foudre. Elle n'est pas amoureuse de cet Antoine, elle le voit épisodiquement, accepte qu'il en fréquente d'autres. Elle ne veut pas de scénario dans la tête, "de lui je ne veux que le bon, même si cela suppose parfois un grand vide. Le vide ne me fait pas plus peur que le silence, il permet de prolonger le deuil de ceux qui m'ont fait mal et qui m'habitent encore, malgré moi. Le silence guérit les maux, et je prends mon temps, sans pour autant dire d'Antoine qu'il est mon passe-temps. Il est juste mon autre temps, mon lien ombilical avec les choses de l'amour qui me font du bien."

Portrait d'une femme désabusée, qui cherche à panser ses plaies sans faire de plans sur la comète, cet Eloge du Silence se goûte sans appétit ni exigence. Le résultat est léger et spontané, livré sans fard. J'ai bien aimé l'histoire et l'idée, mais je n'ai pas trouvé l'écriture exceptionnelle, parfois un tantinet alourdie d'effets de style qui pénalisent la sensation (ou l'envie) de simplicité. Résultat, on passe un bon moment à lire ce court roman (150 pages), sans prétention. Et on est content d'accompagner cette femme dans sa guérison ! A suivre, par curiosité.

Plon, 2008 - 152 pages - 16,50 €

Les avis (positifs) de Cuné et Virginie

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