Paul a quinze ans, c'est un garçon doué, intelligent, qui aime la philosophie et la poésie. Il est beau, avec des boucles blondes, affublé d'un physique athlétique. C'est un adolescent qui se sait exceptionnel et qui cherche à atteindre la perfection, confortée par une famille - à ses yeux - sensationnelle. Paul a tout pour être heureux, mais ce n'est pas le cas. Trop conscient de sa différence, il traîne un spleen rasoir pour son meilleur ami Florent et casse-pieds selon sa soeur, Lou. Tous deux l'encouragent à déclarer sa flamme à Camille, la plus jolie fille de l'école, qui est raide dingue de lui et n'attend qu'un signe de sa part.
Mais le garçon ne veut pas, il ne peut pas. Il refuse la banalité et ne se suffit pas à lui-même. Le combat intérieur que Paul se livre est cruel, très paradoxal, il est tantôt partagé entre le don de sa personne et effrayé par la facilité avec laquelle on tombe dans la généralité. Ses sentiments pour Camille sont ambigus, il est touché par sa beauté, ému par les sensations qu'elle fait naître en lui mais dégoûté par sa propre mascarade.
"On est simple quand on aime. Je ne sais pas aimer. Je prends trop de place en moi. Je ne la quitte pas, mais je suis déjà parti. Elle ne me retient pas, c'est pour ça que je reste."
Paul est un adolescent compliqué, rempli d'états d'âme. Peut-être. Mais son histoire nous fait plutôt réfléchir sur la délicate fonction que représente l'adolescence, passage obligatoire avant de devenir adulte. Le roman nous demande un peu de considérer ce cap difficile où il faut à la fois appréhender son corps, son rapport avec les autres, son bon vouloir, son désir d'être accepté pour ce qu'on est, son refus de rentrer dans le rang. A quinze ans, on est lâche et on se plie trop facilement à l'attente des autres, on veut de l'amour mais on a du mal à l'exprimer, le contenir. Parfois ça déborde et ce trop-plein nous submerge.
Mais qu'arrive-t-il dans la tête d'un garçon qui, malgré tous ses efforts, n'arrive pas à faire semblant, à être comme les autres et qui se sent continuellement un étranger ? La plume délicate de Blanche de Richemont nous livre cette torture mentale, cet état de désespoir et d'espérance sans cesse en conflit. Au début c'est grinçant, limite agaçant. Ne serait-ce point du caprice qu'on perçoit chez Paul ? Hélas non. Même si le roman n'est pas bien épais (122 pages), il évolue facilement et fait comprendre ce que vit l'adolescent, son mal-être et le drame personnel qu'il s'inflige (son cousin Max, qui avait tout pour lui, est mort à l'âge de 30 ans, au sommet de sa gloire).
Par ce livre, je découvre un auteur - Blanche de Richemont - à travers une histoire sensible et quasi universelle (on a tous eu quinze ans et connu son lot d'atermoiements !). J'ai été profondément touchée, réceptive au désarroi de ce garçon et perturbée par la fin (inéluctable ?). Il s'agit d'un premier roman, je vous le conseille.
Robert Laffont, août 2008 - 122 pages - 14€