L'année brouillard ~ Michelle Richmond
« un petit mystère âgé de six ans, une magnifique réplique féminine de son père »
C'est l'histoire d'une petite fille, elle s'appelle Emma, elle marche sur la plage. Abby détourne les yeux, quelques secondes passent. Quand elle regarde de nouveau, l'enfant a disparu. Elle va ressasser inlassablement ce court laps de temps, ne pas en croire ses yeux, filer appeler son fiancé qui est le père de la fillette, avertir la police, courir sur la plage, chercher dans les toilettes publiques, fouiller les poubelles. Aucune trace d'Emma. La police pense à une noyade, Abby est convaincue d'un enlèvement. Jake, lui, est anéanti.
Au fil des jours, des semaines et des mois qui passent, le couple est cassé. Dans le regard de l'homme, brillent la douleur et la rancune muette. Abby ressent tout cela. Aussi, pour combattre le mauvais sort, elle s'accroche à son espoir, force sa mémoire à se rappeler le moindre détail, fait même appel à l'hypnose pour chercher un indice quelconque.
C'est le cauchemar de tout parent raconté avec une minutie stressante mais captivante. C'est très long, le roman est lourd de 500 pages, c'est trop, mais d'un autre côté cela rend compte de l'attente, de l'angoisse, celle de ne pas savoir, de ne pas comprendre.
L'histoire est racontée d'après le vécu de la jeune femme, Abby, qui est photographe de métier. Très vite on sent une grande sensibilité chez elle, à travers son histoire d'amour avec Jake, son enfance et ses rapports avec sa soeur Annabel, de même on la comprend lorsqu'elle s'estime impuissante, incapable, coupable, déconcertée. Elle sait désormais qu'elle représente celle qui a perdu Emma, même si elle va déployer une énergie démentielle pour la retrouver à tout prix, elle ne pourra pas effacer les quelques secondes durant lesquelles elle a détourné son regard de l'enfant. Faute d'inattention, faute impardonnable.
Et puis elle n'est pas la maman d'Emma, juste une pièce rapportée. Est-ce que cela lui ôte davantage de légitimité ? La mère, Lisbeth, est partie depuis trois ans, sans jamais donner de nouvelles. L'enquête aidant, Lisbeth refait son apparition et c'est le choc pour Abby qui comprend que, contrairement à elle, Lisbeth restera, aux yeux de Jake, celle qui lui a donné Emma. Envers et contre tout.
Ce roman réussit l'exploit de soulever toutes les tensions complexes créées par la disparition d'un enfant. Mais qu'est-ce que c'est épuisant à lire, nerveusement ! C'est simple, le lecteur est à cran. Et il faut reconnaître que 500 pages, c'est beaucoup trop. C'est un soulagement d'en voir la fin, d'avoir la solution, même si une nouvelle fois on reste surpris et abasourdi par ce qu'on apprend. Quelques pages plus loin, rebelote, la fin n'en finit pas de finir. Ça manque de punch et de perspective, c'est le brouillard - et ce n'est pas qu'une image !
Pourtant, ne vous méprenez pas, j'ai beaucoup aimé ce roman. Malgré son poids et son nombre de pages, j'ai trouvé qu'il était haletant, parfaitement intraitable avec nos nerfs, mais bougrement scotchant.
Buchet Chastel, 2009 - 512 pages - 25€
traduit de l'anglais (USA) par Sophie Aslanidès
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