08/04/10

Je me présente : Big Foot, seulement depuis trois jours, parce que jusque-là je m'appelais Odette !

ODETTE_OU_LES_TRIBULATIONS_D_UNE_PIGEONNEOdette ou les tribulations d'une pigeonne est un roman absolument irrésistible !
Lu d'une traite, témoin de grands éclats de rire et de sourires attendris, ce livre se veut frais, drôle, attachant, sérieux et généreux. C'est beaucoup et pas du tout prétentieux, car la barre est tenue haute, la dragée aussi. Je ne vous raconte pas les nombreux passages qui m'ont donné du baume au coeur, j'étais souvent poilée de suivre les élucubrations de cette pigeonne rebaptisée Big Foot par une fillette qui vient de lui sauver la vie et qui s'imagine qu'elle est de sexe masculin, avant de rectifier et de songer qu'elle est en fait un pigeon homosexuel...
Bref Odette est une pigeonne au rythme de vie plutôt pépère, mais sa rencontre avec Clara va la catapulter vers une brillante carrière de pigeon-voyageur. Sa mission : retrouver la grand-mère de l'enfant. Mamie Pomme séjourne en effet dans un établissement où Clara n'a pas le droit de se rendre. Et pour cause : sa mamie souffre de la maladie de la petite bulle qui, en atteignant son cerveau, lui fait carrément perdre la tête. Clara ne le sait pas encore, Odette le découvre avec des yeux ahuris, notre pigeonne s'est engagée dans une galère, pense-t-elle, mais c'est plus fort qu'elle et elle va s'investir auprès de la grand-mère et de la petite-fille en les aidant à être le trait d'union d'une relation très forte.
Comment trouver les mots qui expliquent sans faire peur ?
Sans le savoir, ce roman a fait tilt. Il répond aussi à une autre question abordée dans le roman d'Agnès de Lestrade, Mon coeur n'oublie jamais. Donc, oui on peut parler de la vérité, de toute la vérité, avec les plus jeunes, aborder les sujets qui fâchent, dire les choses sans peur et sans maladresse car les enfants ne sont pas des demeurés non plus !
Grâce à Odette la pigeonne, qui est la narratrice de l'histoire, tout nous apparaît plus simple, plus vrai, plus poétique et plus drôle, sans dénaturer l'importance de la maladie.

Alzheimer. On dirait le nom d'un général des armées ou un gros mot dans une langue étrangère mais en fait c'est comme un ver dans une pomme, qui grignote tout sur son passage, jusqu'au trognon !
Dans le cas de Mamie Pomme, le ver mange sa mémoire petit à petit et il n'y a rien qui puisse l'arrêter. A en croire papa, un jour elle ne se souviendra de rien, ni de lui, ni de moi... et un jour encore plus loin, elle oubliera même de respirer !
Il dit que c'est très triste de la voir quand elle a des crises d'oubli et que c'est pour cette raison qu'il n'a rien voulu me dire... pour m'éviter d'avoir de la peine.

(...) Je trouve ça plus que nul, parce que Mamie Pomme et moi, on s'aime tellement fort, que rien que de se voir, on a tous les souvenirs qui nous reviennent en tête ! Mais papa dit que c'est plus compliqué que cela. C'est marrant quand les adultes restent sur leurs positions, ils les légitiment toujours par : "c'est plus compliqué que ça !" comme si j'étais trop débile pour comprendre ! Moi ce que j'en dis, c'est qu'il se trompe et que Mamie Pomme aussi se trompe et que si papa ne veut pas m'emmener la voir, je continuerai à lui écrire parce que mes lettres l'obligent à se souvenir et que ça rend plus difficile le chemin de cette saleté de bestiole qui lui mâchouille le cerveau et que personne, pas même les médecins, ne peut se rendre compte de tout l'amour qu'il y a entre elle et moi ... Et qu'elle m'a toujours dit que c'était une force et qu'avec ce cadeau-là, on pouvait tout affronter...

Cet extrait n'est qu'un petit aperçu, assez vague, il ne rend même pas compte de l'humour qui est très présent dans le récit. Car Odette est une pigeonne qui vous réconcilie avec l'espèce volatile, vous ne regarderez plus les pigeons du même oeil, croyez-moi ... Et les lois de la physique vous apparaîtront également d'une autre extrême nécessité (dans un sens).

Le roman se conclut sur le manifeste des personnages imaginaires - une dernière petite lubie d'Odette qui règle ses comptes avec Mamz'elle Je-sais-tout (l'auteur).

Odette ou les tribulations d'une pigeonne ~ Lili Pissenlit
illustré par Marie-Claire Roux
éditions MiC_MaC (2009) - 138 pages -  7,50€

avait été conseillé par Gawou (merci !)

 

Posté par clarabel76 à 18:30:00 - - Commentaires [15] - Permalien [#]
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Tall Jack, emmène-moi.

IMGP7348A lire comme ça, l'incantation semble sortir d'un film d'horreur ! Et c'est presque cela.
Tall Jack, emmène-moi. Ou Malice, la bd maudite. Ce sont des mythes, passés sous le manteau, qui évoquent un univers proche de la légende urbaine. Malice n'existerait que dans les rêves les plus fous, et Tall Jack ne serait qu'une farce pondue un matin par un petit plaisantin.
Oui, d'accord. Mais tout ceci excite l'imagination et fait naître une véritable légende.
Aussi, lorsque Luke met la main sur LA bd interdite - Malice - son sang ne fait qu'un tour. Il continue d'enfreindre les règles en la lisant - des planches où règne une atmosphère étrange et horrible - et il met en scène le rituel pour appeler Tall Jack. Ce soir-là, dans sa maison plongée dans l'obscurité, rien ne se passe. Néanmoins, Luke est rongé par la peur et les doutes. Ses amis, Seth et Kady, se font du souci et apprennent très vite pourquoi. Mais trop tard, car Luke disparaît sans laisser de traces.
L'enquête commence - Seth va retrouver la librairie où son ami Luke a plongé en enfer, puis va accomplir le cérémonial maudit tandis que Kady servira d'agent sur le terrain.

Tout paraît très confus à expliquer, mais l'univers de Malice est proprement sombre, mystérieux et envoûtant. Je comprends la fascination qu'elle exerce sur les adolescents, alors qu'elle est à double tranchant. Malice est un monde parallèle d'où on ne revient jamais complètement indemne. Si seulement on en revient... Car il faut survivre contre les abominations lancées par Tall Jack. Le pire, on le découvre grâce à un procédé ingénieux, c'est de lire en direct sur les planches de bande dessinée le funeste destin que vivent ceux qui ont franchi la limite. De découvrir donc ce qui est arrivé à Luke et ce que va connaître Seth à son tour.

Palpitations assurées !

Quand j'évoque un procédé ingénieux, c'est en rapport avec l'esthétisme de l'ouvrage. Un petit prodige à lui tout seul ! La couverture, d'un beau rouge sanglant, montre en relief le redoutable personnage de Tall Jack. A l'intérieur, le roman flirte avec des pages de bande dessinée. Au sens le plus strict, le lecteur est donc véritablement plongé dans l'histoire. Cette mise en scène participe activement à capturer l'intérêt et à nous condamner à lire jusqu'au bout cette histoire de fantasy sombre et terrifiante. A conseiller aux jeunes amateurs d'histoires à sensations.

le site : http://www.malice-lelivre.com/

Malice ~ Chris Wooding
illustration de Dan Chernett
traduit de l'anglais par Faustina Fiore
Casterman, 2009 - 410 pages - 14,95€

La suite RAVAGE devrait paraître au printemps 2010. La série est en deux tomes.

Posté par clarabel76 à 12:00:00 - - Commentaires [16] - Permalien [#]
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