Histoire(s) sans paroles
Après "Le Jacquot de M. Hulot" paru en 2006, on retrouve avec bonheur ce même personnage sorti tout droit des films de Jacques Tati dans une succession de gags et de références cinématographiques ou littéraires, cette fois-ci dans un format BD. Un vrai COUP DE COEUR pour cet album facétieux, classieux et intelligent.
Hello Monsieur Hulot - David Merveille d'après Jacques Tati (Rouergue, 2010)
Fièvre Fatale - Karen Marie Moning
A la fin de FaeFever, nous avions laissé MacKayla dans une situation critique. Le début de Dreamfever (Fièvre Fatale) ne nous laisse entrevoir aucun espoir. La jeune femme n'est plus elle-même, le monde d'ailleurs a basculé dans l'horreur, le contraste est énorme. La Mac 4.0 dit non au rose et ne porte que du cuir, du noir et du rouge. Elle a juré de se venger et ne fait plus confiance en personne. Elle s'associe néanmoins avec Dani, la plus jeune des sidhe-seers vivant à l'abbaye sous la houlette de Rowena, et décide de provoquer la vieille dame pour la faire sortir de ses gonds. Il est fini le temps des palabres, il faut agir et chaque heure compte.
Avant-dernier tome de la série, Dreamfever a fait monter d'un cran la pression. L'atmosphère est sombre, poignante et angoissante. MacKayla est une femme écoeurée et meurtrie. Autour d'elle, ce ne sont que mensonges, trahisons et convoitises qui esquintent ses dernières défenses. Barrons cultive toujours ses secrets, les quelques incursions de Mac dans son esprit laissent apercevoir un passé troublant, n'auréolant guère de gloire les intentions du libraire. Il veut le Livre Noir dans un but égoïste, il est menteur et dangereux, Mac n'est pas dupe mais continue de collaborer avec lui car cela sert également sa propre mission.
Est-ce que leur relation évolue un peu ? Oui, et non. Elle atteint un pic d'érotisme au début, mais très vite le souffle retombe. Barrons va s'en tenir à des provocations gratuites face à une Mac qui ne se pardonne pas d'avoir été abusée. C'est frustrant, tout le glamour lâché dans FaeFever s'est fait la malle dans ce tome 4. Même V'lane reste désespérément absent, ou trop peu présent. Tout comme Christian MacKeltar.
J'ai conscience que ce livre est aussi un tournant dans la série et que l'action a été davantage privilégiée parce que le monde est tombé dans un chaos indéfinissable. J'ai bien aimé ce tourbillon, j'admire la nouvelle Mac prête à bouffer de l'unseelie pour les renvoyer en enfer, et pourtant je reste sur ma faim. Frustrée, en fait. Je préfère quand Mac est en compagnie des *hommes* de sa vie ou avec Dani, l'humour ou la séduction ont la part belle, tandis que Mac en solo ne songe qu'à sa guerre. Par contre, elle avance, elle fait des découvertes sur ses propres origines, tente d'approcher le Sinsar Dubh, souvent elle tombe mais c'est pour mieux se relever.
Encore une fois, le dernier chapitre est une tuerie qui nous fait pousser des cris d'horreur, ce n'est plus une nouveauté, KMM a beau glissé une note en fin de livre pour nous rassurer, elle sait se montrer particulièrement sadique et perverse avec nous.
Le dernier tome - Shadowfever - paraîtra en janvier 2011 pour la VO !
Les Chroniques de MacKayla Lane #4
Traduit de l'anglais (USA) par Cécile Desthuilliez
J'ai Lu semi-poche (2010) - 590 pages - 12€
Fièvre, LA série de Karen Marie Moning !
Rappel : le 20 octobre, sort le 4° tome de la série de Karen Marie Moning !
Besoin de vous mettre au parfum ? Allons-y.
MacKayla Lane perd sa soeur Alina, victime à Dublin d'un assassinat aussi cruel qu'inexplicable. Devant la mollesse de la police locale, elle quitte le sud des Etats-Unis pour l'Irlande afin de mener sa propre enquête. Elle y découvre que sa soeur y vivait une double existence pleine de mystère au milieu de créatures démoniaques.
Sur place, elle fait la connaissance de Jéricho Barrons, libraire et bibliophile, un beau brun ténébreux, macho et goujat, qui lui secoue les puces en lui ordonnant de rentrer au pays, pauvre petite agnelle qu'elle est, à se jeter dans la fosse aux loups affamés. Et ce n'est pas qu'une image, car la suite promet des révélations toutes plus sordides et mortifiantes les unes que les autres !
Fièvre Noire est une lecture facile, agréable et distrayante, où l'on passe du rose au noir en toute impunité, sans ciller. Karen Marie Moning nous fait en effet pénétrer un monde obscur peuplé de faës et autres créatures délicieuses (ahem, ahem) avec une facilité qui ne nous laisse guère le temps d'être décoiffés ! Personnellement cela me convient tout à fait, car je déteste me triturer les méninges pour comprendre les intentions de l'auteur.
Bref, on ne fait pas que broyer du noir non plus... il y a aussi de la sensualité et un zest d'érotisme, entre MacKayla et le sombre Barrons, l'antagonisme est évident, cela provoque des étincelles, les échanges verbaux sont cinglants, mais dans le même temps il y a un truc comme une attirance physique pas bien définie, et là encore, c'est tant mieux car cela va permettre à l'histoire de mieux se développer.
Ah, et il y a aussi un autre personnage dont la fonction est d'être dotée d'une telle puissance sexuelle qu'il tue toute humaine avec qui il a des relations, à moins qu'il ne décide de la protéger de son érotisme mortel. Hiiiii ! La rencontre m'a bien fait rire, c'est un passage hallucinant et cocasse. Vivement la suite !
Tome 2 : Fièvre Rouge
Dans ce tome 2, assez riche en découvertes et en rebondissements, MacKayla continue d'approfondir ses connaissances sur sa condition de sidhe-seer, cherche à mieux cerner son adversaire pour assouvir sa vengeance, se découvre d'autres ennemis, rencontre la vieille femme qui la somme de choisir son camp, comprend aussi qu'elle est soupçonnée par la police dans une affaire de meurtre et se sent poursuivie par un spectre, en plus des autres Traqueurs ou rhino-boys qui courent les rues ou flottent dans les cieux de Dublin.
En somme, la série se révèle toujours passionnante. La personnalité de Mac continue de naviguer entre deux eaux, soit elle donne libre cours à son instinct primitif, soit elle se dévoile prude, cruche et naïve dans de nombreuses situations. Oui, cela m'agace ! Néanmoins, cela participe à la rendre attachante. A nous la rendre humaine et proche de nous. Car il fallait que la poupée Barbie évolue, cela la rendait si peu crédible dans son nouveau rôle (sans compter que cela aurait été insupportable). Loué soit Barrons !
Ce tome 2 se termine sur une note assez frustrante, il vous faut absolument le 3° tome à portée de main. Je sens que les zones d'ombre ne cessent de grapiller du terrain. Avec cela, de nouvelles personnalités sont apparues : Christian MacKeltar, V'lane le faë de la volupté fatale (déjà son titre, c'est tout un programme ! j'adore, je succombe, même si je ne devrais pas), Ryodan, Rowena, Dani ... Et Barrons, au centre, campe sur son socle. J'ai été frappée par de terribles soupçons, mais toutes mes théories partent souvent en éclat tant les révélations ne cessent de surprendre.
Un petit extrait :
Recevoir une marque de tendresse de la part de Jéricho Barrons est une expérience unique et inoubliable. Cela vous donne le sentiment d'être la personne la plus extraordinaire au monde. Imaginez-vous marchant droit vers le lion le plus puissant, le plus sanguinaire de la jungle, vous étendant devant lui, plaçant votre tête dans sa gueule... et, alors que vous vous attendez à être dévoré, l'entendre ronronner comme un gros chat avant de vous lécher affectueusement la joue. Voilà à peu près ce que je ressentis en cet instant.
Tome 3 : Fièvre Faë
MacKayla Lane est toujours à la recherche du fameux Livre Noir, lequel est déjà convoité par trop de monde, et toutes les intentions ne sont pas honorables. A ce sujet, Mac a bien du mal à accorder sa confiance, car elle a besoin de la protection de Barrons, des connaissances de V'lane et des archives de ses soeurs cachées à l'Abbaye. Et même l'inspecteur Jayne a mis un pied dans cet échiquier infernal, un peu sous l'impulsion pas très digne de la jeune femme. C'est un peu la cohue, car à l'instar de Mac on piétine, on tâtonne, on ne sait plus trop à qui se fier. Et tant de méfiance affichée rend le climat lourd, instable et proche du gouffre. Longtemps, MacKayla tente de manger dans toutes les gamelles, sauf qu'à ce petit jeu perfide on gagne difficilement la partie.
Comment vous décrire la chute de ce livre ? C'est incroyable, tout simplement aberrant et hallucinant. J'étais bouche bée, yeux ronds comme des billes, je relisais ce que je venais de lire, je n'avais pas l'impression que ça s'imprimait, je n'en croyais pas un mot, j'avais peur de louper des passages, j'étais tétanisée. C'est vous dire combien cette fin est inattendue ! De plus, elle vous abandonne sur cette immense frustration, cette sensation de vide et d'incompréhension. KMM est cruelle, sadique, faussement mielleuse, et même sa petite note au lecteur, pouah, elle peut bien la ranger dans ses tiroirs, merci, je n'en veux pas ! De qui se moque-t-on ?
J'ai donc beaucoup aimé ce tome 3 ! La série se peaufine et s'étoffe, certes ce n'est pas du grand style littéraire, ne nous emballons pas, mais c'est un petit monde sombre, qui se définit de plus en plus et qui ne cesse d'être captivant. C'est particulièrement effrayant aussi, de part les révélations qui se profilent, et même la nature de célèbre Jéricho Z Barrons reste un grand mystère et attise les plus folles spéculations.
C'est aussi beaucoup plus érotique, beaucoup plus sensuel, et la lecture n'en est que plus excitante ! Entre V'lane (oui je l'adore) et Christian MacKeltar (ohlala), sans oublier le ténébreux Barrons (brrr, c'est quoi son truc ?), la lectrice ne sait plus où donner de la tête. Par contre, c'est aussi plutôt frustrant, l'herbe est souvent coupée sous le pied, ou alors (argh) ça n'est pas du tout le scénario qu'on avait en tête ! Après avoir tourné la dernière page, j'avoue que je suis complètement paumée ! Toutes mes théories sont sens dessus dessous, c'est le bazar dans mes idées, je ne sais plus ... non, je ne sais plus.
traduit de l'anglais (USA) par Cécile Desthuilliers
J'ai Lu, 2010.
A suivre : Fièvre Fatale : Les chroniques de MacKayla Lane - 4 !!!
Pêle-Mêle Clarabel #10
Véritable COUP DE COEUR pour :
C'est écrit en couverture, entrez ! N'attendez plus, ça vaut le détour.
« Mon père et ma mère.
Et moi.
Qu'est-ce que j'ai oublié,
entre mon père et ma mère et moi ?
Le vent ? La lumière ? »
Cet album est MAGNIFIQUE : entre les illustrations de Joanna Concejo et le texte de Sébastien Joanniez, l'alchimie est juste parfaite ! Beaucoup de poésie, de douceur, au service de la rêverie, et une petite ritournelle qui revient en fond sonore... c'est tout simplement prodigieux. L'enfant se découvre au fil des pages, comme il découvre sa place dans le monde, l'approche est sensible, cernée avec tact, c'est même d'ailleurs une terrible injustice de tenter d'évoquer cette magie, car je ne trouve pas les mots équivalents à ce que j'ai pu ressentir. Il faut dire aussi que le lecteur n'est pas seulement spectateur pépère, juste bon à tourner les pages, à pousser des cris d'exclamation et de ravissement, il est également convié à compléter le tableau, oui, toi, toi qui me regardes, ta place est parmi tous. C'est FASCINANT !
Entrez ! de Sébastien Joanniez / Joanna Concejo (rouergue, 2010)
Chic ! Un nouvel album de Maurizio A.C. Quarello ! Un album qui mêle humour et moquerie en dénonçant l'hypocondrie, la surmédication, la posologie excessive, sans prendre note des effets secondaires, la manie de se rendre trop vite chez le médecin pour le moindre petit bobo.
Monsieur X se réveille et constate qu'il perd ses cheveux. Un premier docteur lui prescrit une lotion qui développe un effet secondaire. Le lendemain, Monsieur X. se découvre un conjonctivite et se rend chez l'ophtalmo. Il prend ses gouttes mais de nouveau un autre effet secondaire se manifeste et lui refile des boutons sur le visage. Un autre spécialiste lui conseille une pommade, Monsieur X s'en tartine et rebelote : encore des effets secondaires, encore des visites chez des docteurs et des remèdes qui n'en finissent pas de lui en faire voir de toutes les couleurs. Spectateur de ce ridicule manège, le chien de Monsieur X exprime tout ce que nous ressentons. C'est pathétique, et un peu triste d'en être rendu à ce stade, mais c'est drôle ! Et la fin n'est pas mal... Monsieur X revient à son point de départ, tant pis, il s'en contentera,
en fin de compte, cela aurait pu être pire.
Effets secondaires, Maurizio A.C. Quarello (Le Rouergue, 2010)
Nous avons également aimé La Tour de Léo, essentiellement pour ses illustrations.
Léo est un petit garçon qui aime entasser ses jouets et admirer la tour en contemplant son équilibre. Puis, il pousse le tout et redécouvre ses jouets. C'est tout simple. (En fait, je me suis amusée à reconnaître les titres des livres dans la tour de Léo.) J'aime beaucoup les illustrations de Julie Mercier. L'histoire n'a pas retenu mon attention (je pense que cet album s'adresse aux plus jeunes).
La tour de Léo, André Benchetrit / Julie Mercier (Le Rouergue, 2010)
et enfin, l'heure du drame a frappé...
le doudou de Lola a disparu !!!
panique générale, la maison est passée au peigne fin, mais le doudou reste introuvable !
aux grands maux les grands remèdes : un avis de recherche est lancé...
tout le monde se mobilise et très vite Lola se retrouve avec 22 petits carrés pour son doudou - patchwork, avec tous une odeur particulière : de rôti, de frites, de gratin doré, de cambouis, de terre séchée, de jasmin et d'oeillets. Maman lave et recoud ensemble tous les morceaux ...
« Mais Lola trouve que le doudou ne sent rien et qu'elle est trop grande maintenant. On range le doudou au fond de la grande armoire. Et Lola fait du vélo avec Lili, devant la maison, sur le trottoir. »
Cette fin m'a laissée sur ma faim. Je sais bien que l'histoire voulait aider la petite Lola à dépasser le manque et à retrouver son sourire en jouant avec ses camarades. Le doudou, c'est le compagnon idéal durant la petite enfance. Vivre sans, cela veut dire grandir, se joindre aux autres, accepter de perdre les dernières traces de l'enfance. Bref. Tout le monde est sensible à la perte d'un doudou, d'ailleurs les habitants du quartier se serrent les coudes pour lui venir en aide. C'est étrange, parfois, ce qu'on s'imagine et ce qu'on pense ... J'ai l'impression d'être passée à côté, je ne vois pas le lien entre la solidarité des uns et des autres et le détachement sec et brutal de la petite fille quand elle retrouve un doudou. J'ai besoin d'y réfléchir encore, cet album m'est bien sympathique mais me chiffonne aussi.
Le doudou de Lola, Irène Cohen-Janca / Natacha Sicaud (Rouergue, 2010)
NB : Natacha Sicaud avait illustré le roman d'Alex Cousseau, Prune et Rigoberto (que j'adore), c'est donc un vrai bonheur - et une surprise ! - de la retrouver ici !!!
Hex Hall #1
Enfin un roman qui ne se prend pas au sérieux ! Cela fait du bien de lire quelque chose de frais, tout en surfant sur la vague, mais disons que c'est un régal de trouver un roman qui a pris le parti d'être drôle, de jouer avec le genre et les codes, de doter l'héroïne d'un humour savoureusement sarcastique et de la farcir d'une aventure qui ne sort pas des sentiers battus, certes, mais qui demeure intéressante du début à la fin.
L'histoire, donc. Sophie Mercer est une sorcière, par son père. Elle ne le connaît pas, sa mère et elle ont voyagé de ville en ville, en subvenant à leurs besoins, fuyant dès que cela sentait le roussi, car il ne fallait pas attirer l'attention sur la particularité de Sophie (les humains détestent ce qui sort de l'ordinaire). Mais Sophie est une sorcière maladroite, qui commet imprudence sur imprudence, et qui se voit donc expédiée à Hex Hall (ou le Manoir d'Hécate), un établissement réservé aux jeunes gens de son espèce.
Or, contrairement à ses comparses, Sophie n'a qu'une connaissance minime de ses pouvoirs, et très vite elle se ridiculise ou s'attire les foudres des trois déesses de l'école, sous prétexte qu'elle n'a pas souhaité rejoindre leur clan ou parce qu'elle s'amourache du petit copain de l'une d'elles. Vu sous cet aspect, le roman ne casse pas des briques et la trame sent un peu le réchauffé. Ceci dit, il ne faut surtout pas s'attacher aux apparences.
Car en fait, le roman est drôle ! Il est divertissant, il nous embarque à droite et à gauche, il est joyeux et ça fait du bien. L'héroïne n'est pas une oie blanche qui se pâme devant le bellâtre, elle est pétillante, elle possède le charme, l'intelligence, la répartie et une bonne dose d'ironie. Et il lui en faut, c'est tout de même elle l'héroïne, donc tout tourne autour d'elle, le bon, le mauvais, le beau, le laid...
Mine de rien, l'intrigue nous réserve des tours et détours qui savent tenir la dragée haute. Et la fin, pour ainsi dire, ouvre les portes vers l'inconnu, toutes voiles au vent, la suite promet de nous réserver d'autres agréables surprises, j'espère. Pour l'heure, ce premier tome a su me combler, au-delà de toutes les attentes !
Hex Hall - Rachel Hawkins
Albin Michel jeunesse, coll. Wiz (2010) - 300 pages - 13,50€
traduit de l'anglais (USA) par Raphaële Eschenbrenner
Le Club des inadaptés
Martin du Traité sur les miroirs pour faire apparaître les dragons est de retour avec sa bande de potes ! Bakary, Fred, Erwan et lui sont au collège, ce ne sont pas les plus doués ni les plus populaires, ils sont connus pour être des inadaptés mais ils s'en fichent un peu. Et puis, tout va dérailler. Leur nouveau prof de maths est soudainement remplacé, Erwan est agressé dans la rue et le père de Bakary est viré. C'est la sinistrose, mais il ne faudrait pas baisser les bras. Erwan, encore chamboulé, annonce donc son intention de créer une machine qui va égaliser les bonheurs et les malheurs. Et il va atteindre son but ! Ses amis ne disent mot, mais n'en pensent pas moins. Il est fou !
Cela ne dure pas plus de 70 pages et c'est dommage car j'en aurais bien pris encore un peu ! L'humour de Martin Page ne se décrit pas, il se savoure, c'est délicieux, ironique, flegmatique et acide. Cela parle de l'adolescence alors qu'on a le sentiment que tout va de travers, qu'on porte des godasses trop grandes et des fripes froissées qui vous collent à la peau. C'est aussi le constat de la loi du plus fort, la bêtise des étiquettes et du classement selon les apparences. Être ou ne pas en être. Je pense que les ados les plus ordinaires, et déprimés de se sentir si ordinaires (car trop souvent associés à plats ou ennuyeux), apprécieront de suivre les pérégrinations de ce club des inadaptés, auquel on aimerait bien y trouver sa place aussi. Finalement !
Le Club des inadaptés ~ Martin Page
Médium de l'école des loisirs (2010) - 72 pages - 8,00€
en librairie le 14 octobre
un petit extrait :
Les années ne se ressemblent pas. Je dirais que chaque nouvelle année est l'occasion de découvrir une nouvelle forme de tristesse et d'humiliation. Si tristesse et humiliation étaient des diamants et de l'or, alors ni mes amis ni moi n'aurions plus besoin de travailler. Mais ce n'est pas le cas. J'en ai assez d'être riche de ces trésors tristes.
Nous grandissons et c'est pour nous apercevoir que nos parents ont l'air complètement perdus, que les professeurs sont fatigués et malheureux. Difficile de vouloir devenir adulte dans ces conditions.
Le merveilleux petit champignon atomique
** piqûre de rappel ! **
Coup de coeur pour ce Merveilleux petit champignon atomique de Sabrina Mullor, illustré par Catharina Valckx ! C'est une histoire incroyable qui débute sur une montagne alors que le champignon n'était qu'un spore. Il a grossi et est devenu un beau champignon, sauf qu'il était bourré de plutonium et qu'il se sentait prêt à exploser. Il s'est lié d'amitié avec la montagne, laquelle est boudeuse et grincheuse, elle en a assez qu'on lui marche dessus et voudrait qu'on en finisse grâce à un feu d'artifices. Mourir, pour elle, ça veut dire : confondre l'Amérique avec une chasse d'eau ! Hihihi.
Notre champignon est donc prêt à fissionner lorsqu'une demoiselle se pointe sur la montagne, ce n'est pas une inconnue, il s'agit de la petite Affabulatrice, et la montagne, cette cachotière, n'ignore pas qui elle est. Selon elle, c'est une raconteuse d'histoires. Car elle parle d'amour, donne des bisous et invente aussi des noms d'amour. La montagne et le champignon trouvent qu'elle est dingue, mais dans le fond, ils se sont attachés à l'Affabulatrice et attendent sa venue, chaque jour, avec impatience.
Ont-ils toujours envie de confondre l'Amérique avec une chasse d'eau ? Non, plus vraiment.
J'ai trouvé que derrière la tendresse et l'humour de ce texte se trouvaient aussi des messages sur le monde qui nous entourait : la terre, le soleil, la montagne, etc, des extraits de monde qu'on n'imagine pas, ou auxquels on ne prête plus attention, plus autant qu'on ne le devrait. Et même la fin de l'histoire m'est apparue un brin philosophique, et d'une grande sagesse !
* Le merveilleux petit champignon atomique - Sabrina Mullor
illustrations de Catharina Valckx
Mouche de l'école des loisirs (2010) - 75 pages - 8,50€
Crescendo, de Becca Fitzpatrick
Argh ! Pourquoi le roman se referme-t-il trop tôt, pourquoi cette dernière phrase, cette réplique qui vous achève, juste à un instant crucial !?! C'est inhumain !!! Un an à attendre avant de connaître la suite des aventures de Nora et Patch. Pff, je soupire. Immense, immense frustration.
Deux mois après la fin de Hush, Hush, nous retrouvons nos tourtereaux avec de nouvelles cartes entre les mains. Patch a choisi son camp, Nora flotte sur un petit nuage, elle est heureuse, tellement amoureuse, et elle le lui dit. Béatement. Las, notre sexy bad boy fait des siennes et prend la poudre d'escampette. Il se sent épié, sa protégée est menacée mais Nora est consternée et tire des conclusions hâtives, ce qui nous donne le premier gros clash du roman : la jeune fille décide de rompre. Elle veut reconstruire sa vie, son avenir avec Patch est vide, sans espoir. Il faut se ressaisir.
Deuxième claque pour notre héroïne : Patch colle aux basques de Marcie Millar, l'ennemie jurée de Nora. Son château de sable s'effondre, une autre réalité voit jour : Patch n'est qu'un coureur de jupons, fidèle à sa réputation, il collectionne les conquêtes et Nora, comme tant d'autres avant elle, n'a été qu'un chiffre dans son tableau de chasse. Amertume, quand tu nous tiens... Bonjour la désillusion !
Toute la première partie du roman est donc un condensé de tics - particulièrement agaçants - caractéristiques du genre adolescent. Nora est jalouse, blessée, stupide. Elle n'écoute pas sa petite voix intérieure, elle n'en fait qu'à sa tête, elle refuse l'évidence, elle est excessive et usante. Courage, le meilleur reste à venir ! Car vient aussi la partie où Nora nous fend le coeur, où sa relation avec Patch arrive à un tel point de non-retour que nous sommes tout aussi paumés qu'elle. C'est cruel, parfaitement incompréhensible, et comme l'histoire est racontée du point de vue de la jeune fille, l'objectivité n'est pas grande.
Aussi, la fin n'en finit pas de nous surprendre alors que se succèdent les révélations les plus invraisemblables, les vérités les plus sombres, les doutes les plus troublants. C'est finement joué, quelque peu prévisible aussi, mais pas totalement cousu de fil blanc non plus. Attendez-vous à un terrible cliffhanger, qui accentue la frustration accumulée au fil des chapitres. Attendez-vous, aussi, à connaître l'identité de l'assassin du père de Nora ! (Oui, oui.) Par contre, n'attendez pas trop de Patch ! Son personnage est, hélas, trop peu présent dans le roman. Oh oui, c'est vraiment dommage !
Bref, la série se termine sur une note à la fois excitante, dramatique et énigmatique. Elle nous offre ainsi une nouvelle perspective, j'ai hâte d'en apprendre davantage ! Jusqu'au bout, Becca Fitzpatrick a réussi à nous mener par le bout du nez, à jouer avec nos sentiments et nos émotions. C'est comme dans un grand huit, ça monte tout doucement, de quoi nous émoustiller, puis la chute est vertigineuse et on en sort complètement grisé ! Vivement le prochain rendez-vous !!!
" Everything had come into sharp focus : his smooth words, his black, glinting eyes, his broad experience with lies, seduction, women. I'd fallen in love with the devil. "
Mes petits démons
« Ils sont sales moches et bêtes et n'en font qu'à leur tête
Ils crachent ils rotent ils pètent et ils puent des pieds »
« Ils me font perdre mon temps
Et grincer des dents
Mais c'est comme ça
Ils restent là mes petits démons à moi »
Les petits démons de Claudine Desmarteau ont fière allure et ne sont pas sans rappeler les célèbres Crados (dans les années 80, ça vous dit ?). Il y en a pour tous les goûts, demandez le programme : Gertrude l'inquiétude, Clarence la méfiance, Virginie l'envie, Vincent le médisant, Marguerite l'hypocrite, Sidonie l'insomnie, Hortense la violence... Eh oui, autant leur donner un petit nom, c'est plus mignon, et puis on s'attache à ces petites bêtes ! ;o)
Ils nous empoisonnent la vie, ils vont et ils viennent, ils ne nous quittent plus, ils font partie de nous, ils sont nous ! Ce sont nos défauts - nos petits démons - et c'est infiniment plus drôle d'accentuer leurs traits, c'est beaucoup plus rock'n roll et cela permet de déculpabiliser un bon coup, je suis comme je suis (merci Jacques P.), ce n'est pas un drame et c'est bon aussi de rire de soi-même !
Claudine Desmarteau refuse le glamour et la complaisance. Elle revendique nos petits travers - les seuls, les vrais, les farouches, les immondes défauts. Et elle leur offre une vraie gloire, toute légitime. On s'incline, la main sur le coeur.
Mes petits démons, de Claudine Desmarteau
Albin Michel jeunesse (2010) - 15,90€
Damnés ~ Lauren Kate
Oui, la couverture est superbe ! Je ne vous cache pas qu'elle a contribué grandement à mon envie de lire ce roman, même si plusieurs avis déjà publiés laissaient entendre qu'il laissait à désirer, tant pis, je voulais juger par moi-même et j'ai bien fait !
Mode midinette en position on, s'il vous plaît !!!
J'ai plongé, j'ai été totalement captivée par cette histoire, au charme troublant et assez sombre. Sword & Cross est une école qui fiche les jetons, mais c'est le cadre parfait pour se mettre dans l'ambiance. Luce, dix-sept ans, y fait son entrée à la demande des médecins. On la juge folle et plus ou moins responsable du décès d'un camarade de classe. La jeune fille est complètement minée, depuis des années elle voit des ombres, elle étouffe, n'y comprend rien et se sent responsable des drames qui frappent sa petite vie.
En arrivant à Sword & Cross, c'est le choc. L'endroit est lugubre, délabré et blindé comme une prison. Les élèves sont vêtus de noirs, ils se fuient tous du regard, ils ne sont pas là par hasard, puisque l'école est un centre de réinsertion pour jeunes à problèmes.
A peine mis les pieds dans ce lieu, Luce a un autre choc : Daniel Grigori. Ce garçon est très beau, c'est indéniable, mais quelque chose d'autre se dégage de sa personne, indescriptible mais puissant, il exerce une attirance foudroyante sur Luce, c'est plus fort qu'elle. De son côté le garçon fait tout pour la repousser et se comporte avec elle de façon abjecte.
Et pourtant, il y a un truc. Une force irrésistible. Elle est poussée vers lui, elle a le sentiment de le connaître, ou de rêver de lui, mais pas de façon romantique et adolescente. Cela cache autre chose.
Comme Daniel ne cesse de la rejeter, Luce se sent de plus en plus mal dans sa peau, et en même temps elle est obsédée par lui. Profitant de son instabilité, Cam se faufile dans la brèche et commence à lui faire les yeux doux. Lui aussi est élève à Sword & Cross, il a un charme fou, il est plaisant, agréable, ouvert, compréhensif. Il est tout l'opposé de Daniel, et Luce n'y est pas insensible.
Amourettes adolescentes sur fond fantastique et limite gothique, me direz-vous ? Oui, et non.
J'ai senti un voile de séduction se poser sur cette histoire, du début à la fin, ça ne s'explique pas. C'est mystérieux, envoûtant, avec aussi le sentiment de connaître par avance les réponses, de deviner l'issue et de soupirer qu'on a déjà vu tout ça, non merci.
Pour ma part, j'ai complètement mordu à l'hameçon. J'ai cru être la plus forte, comprendre et anticiper les ressorts de l'histoire, mais je me suis carrément vautrée ! J'ai été agréablement surprise par l'intrigue, et par le dénouement, par les rebondissements et les ouvertures que la série nous offre.
Je n'exclus pas l'aspect mielleux et collant de la romance, la personnalité un tantinet crispante de l'héroïne, la face trop lisse de nos bellâtres, je le conçois, je compatis, je plaide coupable, car j'ai sincèrement beaucoup aimé en faisant abstraction du reste. Le cadre m'a totalement séduite, l'histoire est peut-être légère, je pense néanmoins que la suite va nous développer tout cela. J'ai bon espoir, oui !
La série débarque en France, sous le titre Damnés (Bayard jeunesse, 18 novembre 2010) !
Damnés - Lauren Kate
Bayard jeunesse (2010) - 440 pages - 16,90€
traduit de l'anglais (USA) par Elisabeth Luc
illustration de couverture : Fernanda Brussi Gonçalves
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