lectures de vacances #4
Afin d'éviter tout nouveau scandale (l'affaire Dreyfus a laissé plus qu'un parfum d'amertume dans les airs), le président Fallières convoque son conseiller, Raoul Thibaut de Mézières, et lui donne pour mission d'enquêter discrètement sur la mort de Pierre Curie, survenue accidentellement alors qu'il traversait la chaussée. Des détails troublants n'ont pas été étudiés plus longuement, et aujourd'hui sa veuve, Marie, voit sa carrière sous le feu des projecteurs, ce qui dérange une certaine classe politique. Les rumeurs les plus folles courent à son sujet, le président n'attend rien d'autre de Raoul qu'il étouffe tout ceci dans l'oeuf. La découverte d'une relation amoureuse entre Marie Curie et son assistant commence à mettre le feu aux poudres, notre conseiller culturel et scientifique, pourtant totalement dévoué à la cause de la veuve éplorée, ne sait bientôt plus à quel saint se vouer. J'ai immédiatement savouré l'ambiance et l'intrigue au contexte passionnant, même si les considérations politiques et scientifiques empiètent aussi le terrain romanesque. La lecture reste une fantastique plongée dans la IIIème république et la Belle Epoque. Bien vite, les détails fictifs se mêlent habilement aux faits historiques, malgré une narration parfois lourde et confuse, victime d'une volonté de trop bien faire. Malgré tout, je vais jeter un oeil sur les deux autres romans de la même série, curieuse que je suis de savoir si Raoul va conclure avec la belle Florence...
La mort de Pierre Curie - Jacques Neirynck
2007, coll. Grands détectives chez 10-18
Direction le Palais de la Berbie à Albi où deux toiles de Toulouse-Lautrec ont été dérobées, au nez et à la barbe du concierge et du gardien, lequel n'a d'ailleurs pas repris son service depuis le larcin. Le conservateur voit son petit monde s'écrouler, lui qui s'excitait comme un môme d'accueillir prochainement une exposition Monet... Séraphin Cantarel, conservateur en chef, arrive de Paris pour apporter son coup de pouce, soutenir son collègue et seconder la police. Son assistant Théo Trélissac le rejoint sans se faire prier, et c'est de façon tout aussi nonchalante et agréable que se déroule l'enquête. Le cadre est chaleureux, plutôt dépaysant, c'est reposant et vraiment délectable. On se promène dans ce livre comme un coq en pâte, d'autant plus que les personnages arrosent copieusement leurs ripailles d'un succulent gaillac qui fait baver d'envie. Nous n'avons pas une intrigue policière de grande envergure, ce qui n'est pas bien grave, l'élégance faisant preuve de séduction, j'étais donc tout à fait à mon aise. Ceci dit, la couche de confiture a été généreusement étalée, ce qui a pu noyer les détails romanesques au profit d'une envie de partager la vie et les détails sur Toulouse-Lautrec, et là encore, le dosage est délicat et peut déconcerter. Enfin bref, ce fut une jolie approche, jolie balade, jolie lecture... pas inoubliable, mais idéale pour un rendez-vous d'été.
Toulouse-Lautrec en rit encore - Jean Pierre Alaux
2010, coll. Grands détectives chez 10-18
Bretagne, 1886. La famille Rosmadec prend ses quartiers d'été à la Josselière, la demeure bourgeoise où règne Madame Mère "avec une présence très Régence". Le corps d'une pauvre fille est retrouvé étranglé, dans le bateau de Gildas, l'ami d'enfance de Clémence. Celui-ci étant également l'amant de la victime, il est aussitôt accusé du crime. Notre chère héroïne ne l'entend pas de cette oreille et compte bien découvrir le véritable coupable. Nous sommes à Pont-Aven, la station est prisée par les peintres, dont Paul Gauguin, et Clémence, également férue de peinture, apprécie énormément cette compagnie. Ceci plante un peu le décor, car il faut reconnaître à cette lecture un air de chronique familiale en goguette. C'est très chic et bohème, l'ambiance est à la fête, on s'amuse, on reçoit, on boit, on pique-nique au bord de la mer, on se baigne en toute insouciance, on joue du verbe élégant et on étale sa culture... C'est tout à fait charmant, pas désagréable pour un sou, à recommander pendant les vacances d'été justement !
Eté meurtrier à Pont-Aven - Yves Josso
2007, coll. Grands détectives chez 10-18
Six Jours. La fin d'un monde ou le début d'un nouveau ?
Cass appartient à une famille d'excaves et vit dans un Londres totalement dévasté, victime d'une guerre chimique quelques années auparavant, et pliant désormais sous la coupe des Vlads. Ces russes exercent un contrôle impitoyable sur la ville et ses rescapés, car ils sont, en fait, à la recherche d'un artefact, un objet dont on ignore tout, mais qui serait caché sous les décombres de la capitale britannique. Seule certitude, il serait la clef du conflit.
Cass a un petit frère, Wilbur, qui est passionné de bandes dessinées et qui pense haut et fort qu'on peut y trouver des indices pour retrouver le fameux artefact. Lors d'une mission, le frère et la soeur rencontrent Peyto, un garçon débarqué d'on ne sait où, au look improbable et aux manières tellement guindées que cela agacerait presque la jeune fille. Il n'est pas seul, il est accompagné d'Erin, sa soeur, qui va confier l'objectif de leur présence à Londres. Présence sur laquelle reposerait le sort de la planète !
Nous avons là un roman habile, mené sans esbroufe, où nous suivons une espèce de chasse au trésor dictée par un auteur de BD qui avait plus d'une corde à son arc. Cela avait tout pour me plaire, mais hélas j'ai été déçue par le résultat.
Côté emballage, l'univers dépeint est rustre, grisâtre, Cass parle elle-même un anglais proche de l'argot, c'est une nana habituée à vivre à la dure, aussi sa rencontre avec Peyto offre un joli contraste, surtout au début. Mais, pas le temps de batifoler car la menace est bien réelle. Peyto et Erin ont seulement six jours pour accomplir un miracle, ils seront aidés de Cass et Wilbur, apprendront à découvrir un monde nouveau et étranger, à parer aux trahisons, à découvrir des secrets, etc.
Certes, l'action ne manque pas, il y a énormément de détails dans l'histoire, on sent la volonté de l'auteur à vouloir partager ce qu'il avait à coeur de proposer, mais à tel point que le récit perd aussi un peu d'âme. Un bilan mitigé, donc, après ces 380 pages de lecture.
Six Jours - Philip Webb
traduit de l'anglais par Yves Sarda
La Martinière J. (2011) - 384 pages - 13,90€