Avec des bagues aux doigts, des nœuds dans les cheveux.
La vie de Sophie sans sa soeur Emily ne ressemble plus à rien. Juste du vide, un gouffre immense, impossible à combler. Toute communication avec la mère est rompue. Elles se fuient, l'une dans sa chambre pour maugréer ou se réfugier sur le toit d'une terrasse, l'autre dans son bureau, à bichonner sa collection d'objets perdus. Pourquoi tout ce gâchis ?
C'est en parcourant son journal intime, entamé exprès dans l'exercice de sa thérapie, que nous suivons Sophie dans sa vie de tous les jours. C'est triste, on s'attache à ses secrets, on a envie de comprendre ce qui la ronge, on aimerait lui venir en aide, mais à la place on la perd. Sophie fait des crises de panique, elle est émotive et instable, elle se fâche avec sa meilleure amie, tombe amoureuse, s'accroche à ses souvenirs et porte un fardeau trop lourd pour elle. Comment vit-on en se sentant coupable, responsable de la perte d'un proche ? Comment accepter l'inacceptable ?
Au milieu de ce brouillard, on trouve une petite éclaircie avec la poésie (et les cafés poétiques !). Sophie, qui pensait n'avoir aucune sensibilité artistique, découvre le pouvoir des mots. La poésie sert en effet à exprimer en quelques mots, quelques phrases, tout ce qu'on n'arrive plus à prononcer à voix haute. Et c'est ce long cheminement que le roman raconte, un travail de deuil, de reconstruction, de douleur et de remords que l'on absorbe (car ce n'est que vers la dernière partie du roman qu'on découvre exactement le drame qui a frappé cette famille). En attendant, c'est triste, c'est vrai, mais c'est une bonne tristesse pour tirer vers le haut, pour faire bouger les choses. Dans ce sens, cela fait du bien. J'ai juste pleuré à deux reprises, mais je ne pense pas que l'intention de l'auteur était de verser dans le pathos. C'est juste moi qui... Bref, après un premier roman bouleversant, cf. Ne t'inquiète pas pour moi, Alice Kuipers confirme avec ce roman doux et triste tout le bien que je pense d'elle.
2 Filles sur le Toit par Alice Kuipers
Albin Michel jeunesse, coll. Wiz, 2011. Traduit de l'anglais par Dorothée Zumstein.