C'est le cuisinier lui-même qui donne de la saveur à sa cuisine : son caractère, ses rêves, ses sourires, ses larmes.
La boutique de Madame Pamplemousse est unique. Niché dans un quartier de Paris, à l'abri des regards curieux, l'endroit fait davantage penser à l'antre du sorcier, avec ses articles aussi bizarres que du salami de Minotaure à la sauge et au thym sauvage, des queues de vélociraptor salées, du tigre à dents de sabre fumé et du roulé de langue de tyrannosaure, mais aussi des rognons de crocodile au vin de myrtilles, du piranha rôti au coulis de framboises, et j'en passe.
Il y a incontestablement un grain de folie dans ce roman, un zest de magie, une pincée de gourmandise, une cuillerée de bons sentiments, et beaucoup d'autres ingrédients savoureux ! Madame Pamplemousse est un personnage bien mystérieux, aux allures de sorcière, avec son chat au pelage blanc, répondant au nom de Camembert, et qui crache tout le temps des boules de poil dès qu'il se sent dérangé dans ses petites habitudes.
Ce chat cache lui aussi ses petits secrets.
Et c'est par hasard que la jeune Madeleine croise leur chemin, qu'elle découvre leur boutique en manquant tomber à la renverse parce que tout lui semble extraordinaire. Mais cette rencontre va aussi bouleverser sa vie et celle de son oncle, monsieur Lard, un grippe-sou tyrannique, propriétaire d'un restaurant sans attrait et sans âme, tout bonnement parce que son gros tonton autoritaire maltraite son personnel et sa cuisine.
Résultat, c'est gras, c'est lourd, c'est répugnant.
C'est alors que s'invitent les Fabuleux Délices de Madame Pamplemousse, et la Bête se transforme...
C'est indubitablement une lecture fantastique et enchanteresse. Déjà rien que la couverture donne envie d'avoir le livre entre les mains. Et croyez-moi les illustrations de Sue Hellard ne déçoivent pas un seul instant. Tout est beau dans ce roman, tout est délicieux et original. On a même le sentiment de plonger dans un Paris tout droit sorti d'un film coquet, ça fait très carte postale, mais c'est charmant.
L'histoire ressemble également à un conte merveilleux, avec une jeune héroïne au coeur d'or, exploitée par un malotru, qui va se découvrir un don exceptionnel. De plus, l'écriture fait preuve d'élégance et de beaucoup d'imagination (l'inventaire des recettes et des délices fait tourner de l'oeil par exemple !). C'est dire le bonheur qu'on a de plonger dans l'univers de Rupert Kingfisher, et on ne le regrette pas.
Je connaissais la série dans sa version originale, et je suis très heureuse de la découvrir sur le marché français, c'est une découverte exquise, dont l'esthétisme vintage exerce un réel attrait. C'est à déguster sans attendre ! Le deuxième tome va paraître au mois de mai.
Madame Pamplemousse et ses Fabuleux Délices, par Rupert Kingfisher
illustrations de Sue Hellard - traduction par Valérie Le Plouhinec
Albin Michel jeunesse, coll. Witty, 2012
Où est l'escargot ?
Souvent, l’escargot se cache dans sa coquille. Mais cette coquille, où se cache-t-elle ? Derrière la queue en tire-bouchon d’un petit cochon ou dans la crosse d’un violon ? Sous les cornes bien enroulées d’un bouquetin ou à l’intérieur d’un serpentin ? Dans la crête des vagues, les volutes de fumée d’une pipe ? Les spirales dessinées par une patineuse sur glace ? Les bouts recourbés d’une paire de babouches ? C’est fou, le nombre de choses qui ont la forme d’un colimaçon !
UN ALBUM SANS TEXTE où l'on passe son temps à scruter les détails des illustrations pour retrouver la coquille de l'escargot. Procédé ingénieux, un peu rigolo, imaginé par monsieur Tomi Ungerer. Ce qui frappe aussi, c'est la diversité des dessins : soit bariolé, jovial, coloré, soit gris, austère, ombrageux, mystérieux... Un festival d'originalité pour le plaisir des yeux.
Où est l'escargot ? par Tomi Ungerer (Ecole des Loisirs, 2012)
Princesse Chipolata
Attention, lecture purement irrévérencieuse, mais tellement drôle. Les premières pages peuvent déconcerter, mais sitôt que le lecteur a bien saisi le second degré derrière l'histoire de cette princesse, c'est du plaisir assuré.
Alors nous avons une princesse, capricieuse et tyrannique, qui se plaint d'avoir des gros doigts qu'elle planque sous des moufles. Elle harcèle son serviteur, qui s'appelle Mon Chien (!), pour que cesse son calvaire. Il lui faut une solution, et vite ! Mon Chien suggère donc de se rendre dans la Forêt des Contes Perdus où se trouverait la Belle aux petits doigts parfaits et ainsi procéder à un échange de bons procédés. Hop, la princesse se rend aussitôt sur place et doit passer toute une série d'épreuves (des tests de stupidité, de débilité et de crétinerie ultime). Tout un programme.
Qu'est-ce que j'ai pu ricaner en lisant ce petit livre ! Chaque rencontre est désopilante, même les dialogues sont absolument poilants. L'ensemble est joyeux, décalé, subtil et saugrenu, c'est du très bon Colas Gutman, qui gratouille et qui donne le sourire, avec en bonus les ravissantes illustrations de Marc Boutavant, bref ce livre est un indispensable !
La princesse aux petits doigts, par Colas Gutman - illustrations de Marc Boutavant
Mouche de L'Ecole des Loisirs, 2012