Une fille presque banale
Peu de gens le savent. En apparence, j’ai tout d’une fille banale. Rien de particulier à signaler sur mon compte, je ne suis pas du genre à me faire remarquer, bien au contraire ! Je fais tout pour être comme il faut, le but étant bien sûr qu’on « me donne le bon Dieu sans confession ».
Pourtant, j’ai un secret. Je vole, je tire, je pique, je choure, je dérobe.
Romane cultive en secret le vice de voler (des meringues, des gommes, des stylos, bref des bricoles). C'est une petite voix dans la tête qui la pousse à agir sur l'instinct, alors qu'elle jure à chaque fois de ne plus s'y laisser prendre. Elle veut s'acheter une nouvelle conduite, ne se risque plus à rôder dans les allées des magasins, et en veut à sa mère de l'obliger à faire des petites courses, en somme c'est un peu la faute des autres si elle est tentée.
Un jour, grosse révélation : sa tante préférée lui révèle qu'elle est une chapardeuse patentée, elle dispose même d'un aimant spécial pour chiper des articles de mode sans complexe. C'est un jeu, ou ça y ressemble. Romane, elle, a conscience de mal agir, elle redoute le jour où l'agent de sécurité posera sa lourde main sur son épaule, un simple geste qui condamne tout, mais malgré cette pensée obsédante, elle chipe sans vergogne.
Parce qu'elle est invitée chez Mattéo, le garçon qui fait battre son coeur, Romane a choisi de sortir le grand jeu. De belles fringues tape à l'oeil, le cadeau d'anniversaire qui fait plus que plaisir, bref l'adolescente se lâche... mais à quel prix ! La chute sera rude, douloureuse, bonjour la honte ! Toutefois, l'heure de la rédemption va enfin sonner, et cette prise de conscience, bien que tardive, sera merveilleusement récompensée, et c'est tant mieux car l'histoire se termine sur une belle morale, sans avoir l'air de donner des leçons.
C'est un très beau texte de Raphaële Frier, un titre tiré de la collection Le feuilleton des Incos, qui veut que l'auteur entre en contact avec ses lecteurs au moment de l'écriture du livre, je me sens toujours étrangère à ce principe de bon échange, même si je trouve l'idée généreuse. Néanmoins, je ne boude pas le plaisir de découvrir des petits romans de grande qualité, celui-ci ou celui de Gaia Guasti par exemple.
Volé plané, par Raphaële Frier
éditions Thierry Magnier, coll. Le Feuilleton des Incos, 2012
"Puisque je te demande d'abandonner l'ordinaire, je ne compte t'offrir rien de moins que l'extraordinaire."
Le roman d'Amy Plum raconte une très jolie histoire d'amour romantique, entre Kate, inconsolable depuis la mort accidentelle de ses parents, et Vincent, un garçon très beau mais tout aussi énigmatique. Exilée à Paris, chez ses grands-parents, Kate tente de reprendre goût à la vie, mais avec difficulté. Sa rencontre avec Vincent signe le début d'un espoir, vite douché par la réalité de la situation. Car la nature secrète de Vincent rappelle trop douloureusement à Kate la fragilité d'une vie humaine, de l'étincelle qui peut s'éteindre en un souffle, sans prévenir, et son âme meurtrie n'est pas encore prête à se risquer à un tel tourbillon d'émotions.
C'est à partir de cette vision idyllique et très romanesque que l'histoire se construit, tout en délicatesse. C'est savoureux à déguster, l'action n'est pas très présente puisque l'univers se dessine et fait apparaître certains enjeux, et même si la menace se profile, le dénouement se joue sans frémir. Ce premier tome ne fait que se consacrer à l'intrigue amoureuse entre Kate et Vincent (rencontre, éblouissement, séduction, prise de conscience du fossé qui les sépare, panique à bord, distance réparatrice, obsession, etc. etc.). On connaît la chanson ! Ce n'est pas désagréable à lire non plus, les personnages sont mignons, bien que le couple interprète trop souvent la sérénade de l'amour impossible avec une naïveté touchante, il ne faut pas hésiter à se tourner vers les personnages secondaires pour s'arracher un sourire canaille (Jules, notamment, figure en pôle position).
Ancrée dans ses clichés jusqu'au bout, l'histoire campe son intrigue à Paris, dans ses quartiers chics qui font presque passer la ville pour un village carte postale, en soulignant bien le charme et le sentiment de sécurité de la capitale, ahem. Tant de candeur inspire naturellement une sensation de bonheur, et c'est ce que je retiendrai de cette lecture (ou relecture, devrais-je dire, car j'ai lu le roman en VO la première fois) : c'est une lecture sentimentale et sensible, teintée d'une note mélancolique, pour toutes les âmes romantiques qui se respectent. La suite est déjà disponible, Until I die, mais pas encore traduite.
Plus encore que la vie, par Amy Plum
Milan jeunesse, coll. Macadam, 2012 - traduit par Marie Cambolieu