C'était marrant, au début, de se balader dans le temps et surtout on n'avait rien de mieux à faire au présent...
Un parfum d'autrefois, des illustrations aux petits oignons, un goût d'enfance et d'adolescence, un air de ne pas y toucher, des confidences, des rires et des clins d'oeil partagés, c'est ce que nous réserve cette lecture gracieuse et délicate, une belle lecture, en fait.
Par la magie d'un roman (Les aventures de Nelly Olson), Edie, Frankie, Paula et Lili vont devenir amies et comparer leur mode de vie. Toutes les quatre ont dix ans, ne vivent pas dans les mêmes quartiers, mais surtout pas à la même époque. L'histoire se passe de 1890 à 1960, l'occasion de faire un petit tour d'horizon sur les différentes moeurs d'un autre temps (danser le twist, manger des gâteaux, passer du temps avec maman, ou pas, échapper aux leçons, guetter les soirées des adultes...). Au fil des saisons, le voile se désépaissit et d'autres vérités apparaissent : en fait nos héroïnes forment les quatre générations d'une même lignée familiale où, de mère en fille, le livre magique s'est transmis.
Cette lecture évoque la transmission, mais surtout l'évolution de la femme dans la société... A sa façon, délicate et sensible, Nine Antico nous fait partager des pans de vie en toute intimité. On ne se contente pas d'admirer les belles façades des demeures, on peut soulever les fenêtres à rabat pour apercevoir les filles dans leur salle de bains ou dans leur chambre, dans le couloir près de la rambarde de l'escalier ou dans la cuisine au coin du feu. C'est une sensation extrêmement douce et conviviale, parce qu'on a encore plus le sentiment de partager les confidences des quatre filles. En cela, c'est une jolie réussite ! Et puis le trait de Nine Antico est l'élégance même. Comment ne pas être admirative ?
Quatre Filles : Journaux croisés 1890 - 1960, par Nine Antico
Albin Michel jeunesse, 2012
De toute façon, ça devenait trop compliqué ; on ne faisait plus que se disputer. C'était marrant, au début, de se balader dans le temps et surtout on n'avait rien de mieux à faire au présent... Mais on s'est lassées, chacune est occupée de son côté.