Qu'était devenue ma cité médiévale, son charme pittoresque, ses allées sombres et tortueuses ?
Cela faisait trop longtemps que je repoussais le moment de lire Rose, je ne m'explique pas pourquoi, car tout de suite, dès les premières notes au son de la voix de Nathalie Hons (également la voix d'Aibileen dans La couleur des sentiments), j'ai été captivée par cette histoire.
Nous sommes au cœur de Paris, sous le Second Empire. Un certain baron a décidé de moderniser les petites rues de la capitale, en rasant des quartiers entiers, ce qui forcément suscite la grogne des habitants. Dans la rue Childebert, nous découvrons Rose Bazelet, une veuve d'une soixantaine d'années, qui est farouchement attachée à sa maison et à ses souvenirs. La plupart de ses voisins vont se résoudre à partir, seule Rose va résister et se cacher dans la cave, avec la complicité d'un chiffonnier. Dans l'attente de la destruction de sa demeure, Rose écrit son journal et nous raconte l'histoire de sa maison, inévitablement attachée à celle de sa vie.
Rose écrit à son époux, Armand, un homme bon et amoureux, frappé trop tôt par la maladie. Elle revoit leur rencontre et leur félicité conjugale, la naissance de leurs enfants, puis la déchéance et la mort. Elle raconte aussi comment elle a pu survivre à son deuil, notamment grâce à sa passion dévorante pour la lecture et son amitié avec Alexandrine Walker, une jeune fleuriste.
J'ai, très sincèrement, aimé cette histoire pleine d'élégance et nimbée d'un charme délicatement suranné. J'ai eu le sentiment d'être littéralement transportée à cette époque, de partager cette petite vie pimpante de la rue Childebert. La plume de Rose est douce, pudique et sensible. C'est un bonheur d'écouter une telle histoire. Seul le secret, qu'elle nous dévoile sur la fin, me laisse quelque peu perplexe. Cette anecdote m'est apparue sordide au cœur de cette lecture qui était pour moi simple, mais sophistiquée. Un léger bémol qui n'enlève strictement en rien tout le bien que j'ai pensé de ce très beau roman !
Rose, par Tatiana de Rosnay
éditions Héloïse d'Ormesson / Audiolib, 2011 - traduit par Raymond Clarinard
Texte intégral lu par Nathalie Hons (durée d'écoute : 4 h 55)
"... en tant que lecteur, il faut faire confiance à l'auteur, au poète. Ils savent comment s'y prendre pour nous extirper de notre vie ordinaire et nous envoyer tanguer dans un autre monde dont nous n'avions même pas soupçonné l'existence."
Billy Dent’s First Commandment was “Thou shalt not leave evidence.”
Jazz Dent est un adolescent de dix-sept ans, tristement célèbre pour être le fils de l'un des tueurs en série les plus redoutés du pays. Bon, ce dernier croupit en prison. Le fils vit désormais chez sa grand-mère, mais a passé toute son enfance auprès de son paternel psychopathe, lequel l'a donc initié à ses us et coutumes, lui demandant de contribuer à rassembler ses petits trophées et en lui expliquant bien comment on procède pour être le meilleur serial killer.
Un autre gamin aurait probablement pété un câble, ou fini tout aussi taré, mais pas Jazz. Le garçon a su se distinguer, c'est un garçon droit, honnête et très intelligent. Son esprit vif et aiguisé le conduit souvent dans les pattes du shérif, surtout lorsqu'une enquête criminelle pointe son museau. La petite ville de Lobo's Nod, réputée tranquille, n'a pas coutume d'être le théâtre des horreurs... sauf qu'un cadavre de femme, aux doigts sectionnés, vient d'être découvert.
Jazz est convaincu que c'est la signature d'un tueur en série. Il reconnaît tous les signes, il supplie le shérif de l'enrôler dans son équipe, lui seul est capable de se glisser dans la peau et la tête d'un maniaque sanguinaire. Toutefois, il doit combattre les préjugés, certifier qu'il est innocent (eh oui ! cette enquête va révéler que le coupable s'est fortement inspiré de Billy Dent), mais aussi lutter contre des pulsions que son père estimait naturelles. Tel père, tel fils, voyons !
Amateurs d'histoires sombres, macabres et angoissantes, vous allez vous régaler ! Si, de plus, vous ne loupez pas un épisode de la série Dexter, je pense que cette lecture comblera toutes vos attentes. Pour ma part, je suis un peu restée en retrait, je n'ai pas trop adhéré à la mécanique trouble et grinçante de l'intrigue, mais j'admets que l'ambiance est particulièrement excitante. Etonnamment, il y a aussi beaucoup d'humour dans le récit - Jazz est un garçon pragmatique, parfois cinglant mais bougrement sarcastique. Il est entouré de son meilleur ami Howie, qui est hémophile, mais qui est surtout caustique et délirant, sans oublier Connie, sa petite copine folle de lui et prête à tout pour montrer à la face du monde qu'il est formidable et digne de confiance.
La fin vous glacera les sangs et laisse présager qu'un autre tome verra jour prochainement ! Game: The Sequel to "I Hunt Killers" sortira courant avril 2013 aux USA.
I hunt killers, par Barry Lyga
Coll. Msk pour les éditions du Masque, 2013 - traduit par Marie Cambolieu
Super packaging pour encadrer la promotion du livre, pour preuve :
Avec en bonus le fameux petit doigt ... brr !
Pas râleurs, s'abstenir !
Le gros ralbum de tous les y'en a marre !
Sont réunis dans ce petit album, à la couverture rouge (la couleur de la colère, de la révolution !), tous les ras-le-bol des enfants : marre de faire semblant d'aimer un cadeau, marre d'entendre des questions idiotes, marre d'attendre un an pour fêter son anniversaire, marre de ne pas pouvoir prendre son doudou pour aller à l'école, marre de ne pas pouvoir se salir ou d'être inscrit à des activités que seule votre mère trouve formidables, marre d'être puni pour une bêtise faite par un autre, marre des menaces méchantes, marre de compter pour du beurre au moment de faire les courses ...
Les exemples sont nombreux, très drôles et sont l'occasion pour les jeunes lecteurs de se défouler en tournant les pages avec avidité. Ils penseront, obligatoirement, qu'ils sont enfin compris, décryptés, exposés. Peut-être leurs parents, ou les adultes, y verront-ils un signe et se montreront plus compréhensifs à l'avenir.
Le gros ralbum de tous les y'en a marre ! par Elisabeth Brami et Gilles Rapaport (Seuil jeunesse, 2013)
Quelques extraits pour illustrer mon propos :
«Mon domaine à moi, ce sont les bibliothèques et les librairies...»
«Entendons-nous bien, je ne rêve pas de me fondre dans la masse, ni d'adopter les loisirs de mes pairs... Certains rêvent d'une console de jeux, d'un poney ou d'un prince charmant... Mon domaine à moi, ce sont les bibliothèques et les librairies...»
Louise est élève en Cinquième ... et ne se prend pas pour de la crotte ! Elle est très sûre d'elle, dans le sens où elle n'a jamais manqué d'amour, ses parents sont aux petits soins pour elle, ni d'accès à des loisirs comme la danse classique, la lecture, la chorale et le théâtre. Notre demoiselle est, en quelque sorte, élitiste. Même ses meilleures amies doivent la conforter dans son statut de fille brillante et admirable.
Détestable, la Louise ? Même pas. Car l'histoire va soudainement la malmener, avec l'arrivée d'une nouvelle élève dans sa classe. Elle s'appelle Manon, elle est douée et très intelligente. Par contre elle est issue d'un milieu modeste, Louise le sait, car les parents de Manon ont acheté sa robe de communion le jour du vide-grenier et depuis elle ne fait que la porter pour aller à l'école (comble du comble, elle joue aussi au foot avec !).
Louise est très snob, très prout-prout. Elle a pour habitude de mettre tous les adultes dans sa poche, d'être l'objet de leur admiration, une fille si jeune et déjà si cultivée... Battement de sourcils frénétique. Sauf qu'avec l'arrivée de Manon, on lui vole la vedette. Leur prof décide de lancer un projet d'opéra, en montant Carmen, un rôle sur mesure pour Louise, pense-t-elle... Han, han, c'est le début de la dégringolade !
Louise, donc, va perdre confiance en elle. Et comme c'est une jeune adolescente, sensible et vulnérable, elle ne va pas gérer la situation et donner à chaque petit événement une proportion démesurée. Tout le talent de Fanny Chiarello réside dans le fait d'avoir toujours su guider notre façon de penser, de ne pas détester cette héroïne bien prétentieuse, de cerner son mal-être, d'avancer dans cette histoire à tâtons, au rythme de la narratrice, et de savoir sourire devant ses raisonnements, parfois, saugrenus.
Encore une fois, l'histoire cherche à nous montrer que la culture est accessible à tous, non pas réservée à une élite, et qu'il ne faudrait surtout pas juger Louise, piquée de jalousie qu'une fille comme Manon soit son égale. Il y a chez elle un mélange de tendresse et de naïveté, pas seulement de la pédanterie, et puis de toute façon elle va apprendre à redescendre sur Terre. Bizarrement, avec son tempérament insupportable, Louise donne à cette lecture un caractère pétillant !
Prends garde à toi, par Fanny Chiarello
Medium de l'Ecole des Loisirs, 2013 - illustration de couverture : Gabriel Gay
"Je suis devenu un lecteur."
Comme à son habitude, le père de Kévin Pouchin a mis les bouts sans crier gare, et cela dure depuis deux semaines. La mère est à cran, entre colère et dépression elle ne supporte plus rien, ni les enfants, ni le chien qui pisse sur le paillasson, elle met tout le monde dehors, qu'importe s'il gèle à pierre fendre. De plus, ce sont les vacances, Kévin n'a nulle part où traîner, alors il se décide à pousser la porte de la bibliothèque, là où il pourra se réchauffer.
Chez lui, les livres n'ont pas droit de cité. C'est pour les intellos, les têtes d'ampoule, pour ceux qui parlent de façon maniérée, bref ce n'est pas de leur monde. La famille de Kévin passe uniquement du temps ensemble lorsqu'il faut laver la BMW du père ou regarder une émission débile à la télévision. D'abord, le garçon hésite. Il redoute d'être mis à la porte, dénoncé comme étant un imposteur, qu'ici non plus il n'est pas à sa place.
Puis il croise une fille de sa classe, Laurie, qui le prend pour un poète. Mais surtout, il rencontre une mamie révolutionnaire, Dame Chamallow, qui lui colle entre les mains "L'attrape-cœur" avec ordre de lui faire un compte-rendu de sa lecture. A partir de là, la vie de Kévin va se dédoubler : d'un côté, il voit en secret ses nouvelles copines de bibliothèque, de l'autre il est le fils de personne, dans une maison où ça braille tout le temps, où les blagues sont crasses, où les penchants culturels sont inexistants.
Ce livre m'a fait énormément soupirer, de dépit et de désespoir. Heureusement, le jeune héros est un garçon formidable. Il en bave, mais c'est tout de même un môme qui comprend peu à peu qu'il a le droit de sortir de sa condition. Qu'il n'est pas dit qu'il appartenait à un milieu et se devait d'y rester. Alors, oui c'est grâce à la lecture qu'il va prendre confiance en lui. Toutefois, son apprentissage se fait aussi dans la violence, parce qu'on se moque de lui d'aimer lire ou de passer du temps à la bibliothèque, pour autre chose que bécoter sa petite copine.
Les clichés ont la dent dure, vous verrez que l'histoire est loin d'être mielleuse ou niaise, par contre il y a aussi beaucoup de dérision, de l'humour et du cynisme pour sauver les apparences, pour se protéger et pour rendre les coups. Il y a vraiment de belles réflexions de la part de Kévin en tant que lecteur qui découvre le pouvoir des mots et la force des histoires. D'ailleurs, pour moi, le cap le plus important, c'est lorsqu'il reconnaît enfin qu'il est devenu un lecteur. Que cette passion lui dure !
Holden, mon frère - par Fanny Chiarello
Medium de l'Ecole des Loisirs, 2012 - illustration de couverture : Séverin Millet
"Drôle d'idée que de lire des romans, quand on y pense bien : on s'attache à des personnages qui n'existent pas, on se sent moins seul alors qu'il suffirait de lever la tête de sa page pour constater qu'on l'est toujours autant dans le vrai monde, et après, tout est fini. Chacun rentre chez soi..."
"Come on, girl. Don't cry."
C'est au son de la voix grave de la très belle Anna Mouglalis, un choix qui a été approuvé par Toni Morrison elle-même, que j'ai donc choisi de me laisser bercer, pour mieux découvrir l'univers de l'auteur qui m'était peu familier. A peine les premières notes ont retenti, l'histoire a jailli de nulle part et j'ai tout de suite été transportée dans un ailleurs fait de poussière, de rage, de désespoir, dans un paysage lavé de couleurs. Un monde terne et âpre.
C'est donc l'histoire de Franck, vétéran de la guerre de Corée, qui s'échappe de son asile dès lors qu'il apprend que sa jeune sœur Ycidra est gravement malade. On sait très peu de choses sur lui, pour commencer. On devine son désarroi, son désespoir et sa détermination à quitter Seattle pour arriver en Géorgie. Son but : la petite ville de Lotus, où il a grandi sans une étincelle de bonheur. Son univers tournait autour de sa sœur et de ses meilleurs potes. Puis il est parti à la guerre, lui le soldat noir, fier de servir le drapeau américain.
Après quoi, le retour a sonné le début de sa descente aux enfers, trop de cauchemars, d'images immondes, de sacrifices, de meurtres et de massacres viennent le hanter. Il tente d'oublier dans l'alcool, ou dans l'amour, mais c'est un homme brisé. C'est finalement au cours de son voyage, pour sauver sa sœur, qu'il comprendra tout ce qu'il a tenté de camoufler, ce qui a bien failli l'étouffer.
De son côté, Ycidra aussi a connu sa douleur, ses rêves brisées et ses illusions perdues. Car c'est un peu le tour de piste que nous offre ce court roman, un panel de vies démantibulées, d'existences fracassées. Des corps usés. Des esprits hantés. C'est dur, oui. Par contre, ce n'est pas le champ de mines dont on pourrait en sortir avec la tête à l'envers. En fait, on se surprend à avaler tout ce qu'on nous raconte comme sous l'effet d'hypnose. La langue est belle, pure et sophistiquée. Pas un pas de travers. L'image toujours impeccable. L'auteur tranche dans le vif, crac, et ça ne fait même pas mal.
La forme courte réussit très bien à ce récit, pour son état d'urgence et de sauve-qui-peut. Seule la dernière ligne droite m'aura laissé un goût amer, chiffonnant presque la très belle appréciation que j'avais de cette rencontre, et c'est bien parce que j'ai aimé les 3/4 du livre que je lui octroierai donc mon plein assentiment ! A digérer, à méditer, à ruminer.
Home, par Toni Morrison
Christian Bourgois éditeur, 2012 / Audiolib, 2013 - Traduit par Christine Laferrière
Texte intégral lu par Anna Mouglalis
durée : 4 heures seulement !
“Write about what disturbs you, particularly if it bothers no one else.”
Quelle magnifique histoire ! J'avais vaguement suivi le buzz autour du roman au moment de sa parution, encore une fois j'avais préféré attendre avant de me faire ma propre opinion, et puis j'ai opté pour l'audio-livre, qui a fini de planter le clou dans mon appréciation plus qu'enthousiaste ! Les trois comédiennes nous transportent littéralement dans leur monde, dans leur histoire, c'est un délice pour les oreilles.
Nous plongeons donc dans le Sud des Etats-Unis, à Jackson, dans le Mississippi, dans les années 60, et nous découvrons la vie des bonnes noires, qui élèvent les enfants des familles blanches, lesquelles ne se conduisent pas toujours de façon charitable ou honorable avec elles. Nous sommes aux balbutiements des droits civils, de Martin Luther King et du président Kennedy, ça fourmille, ça grouille, ça songe mais ça n'ébranle pas cette petite société sudiste, rétrograde et endormie sur elle-même.
Alors, nous faisons connaissance avec plusieurs bonnes, dont Aibileen et Minny. La première a déjà une longue expérience derrière elle, c'est une femme sage, un peu usée, mais qui n'aime pas faire de vagues. Elle est folle de la petite Mae Mobley, la fillette rondouillette dont elle s'occupe, mais envers laquelle sa propre mère, Miss Leefolt, est souvent maladroite et exigeante. Minny, elle, est une tigresse, elle n'a pas sa langue dans sa poche, elle dit tout haut ce qu'elle pense, ce qui lui fait souvent perdre sa place. Elle a un sérieux contentieux avec Miss Hilly, une redoutable mégère qui mène tout le monde à la baguette et qui interdit quiconque de l'embaucher dans tout le Mississippi !
Heureusement, Minny va rencontrer Miss Célia, un clone de Marilyn Monroe, jeune femme douce, complètement à côté de ses pompes, qui ne sait rien faire de ses dix doigts et qui voudrait apprendre à cuisiner, sans que son mari en sache quelque chose. Alors Minny doit travailler en cachette. Quelle farce ! Le nombre de fois où la bonne se retrouvera dans des situations saugrenues est aussi l'occasion de bonnes séances de gloussements... Sans quoi, ce duo est foncièrement attachant. J'ai beaucoup aimé leurs séquences.
Bref, parmi les amies de Miss Leefolt et Miss Hilly, nous avons Miss Skeeter, qui est pourtant tout le contraire de ces dames. C'est une grande branche, à la coiffure rebelle, toujours célibataire, au grand dam de sa mère. Elle rêve de mener une carrière dans le journalisme ou l'édition. En attendant, elle rédige des conseils de ménagère pour la gazette locale (une blague !), avant de se lancer dans son grand projet qui va la réunir, elle et Aibileen, puis toutes les bonnes de la région, autour de leurs conditions de travail et du regard qu'elles posent sur leur situation.
Cette ébauche de livre est un futur brûlot. Et pourtant, toutes vont s'y consacrer, d'abord avec maladresse et la peur au ventre, puis animées d'une foi véritable, d'une envie d'en découdre, de parler, de raconter, de se libérer. Car elles ont toutes une histoire poignante, révoltante, attachante à partager. Et c'est fascinant avec quelle simplicité, quel amour et quelle passion nous adhérons à leur incroyable parcours. Ce sera comme une gestation dans la douleur, avec un voile de folie et d'insouciance, mais quel acte de courage aussi !
Sincèrement, je n'ai pas vu le temps passer. Tout de suite, j'ai été absorbée par cette formidable aventure humaine, parsemée d'anecdotes très drôles (le premier rendez-vous entre Miss Skeeter et Stuart, le moment où Minny se planque dans les toilettes, la pathétique collection de trônes éparpillés dans le jardin pour protester contre la loi sur les WC, sans oublier la fameuse tarte au chocolat ... un potin tout bonnement hilarant, même s'il est tout sauf appétissant !). Il y a donc matière à sourire, rire, soupirer aussi, face à tant de bêtises, d'injustice et de discrimination, mais globalement il en sort un message très positif et une sensation jubilatoire. Je recommande fortement !!!
La couleur des sentiments, par Kathryn Stockett
éditions Jacqueline Chambon, 2010 / en poche, Babel pour Actes Sud, 2012 / Audiolib, 2011
Traduit de l'anglais (USA) par Pierre Girard
Texte intégral lu par Nathalie Hons, Nathalie Hugo, Cachou Kirch et la participation de Valérie Lemaître
durée : 17 h 50
Ah, Twitter ! Haïku pour les semi-analphabètes !
Abigail Donovan a publié un premier roman qui a connu un joli succès, mais son éditrice menace de la lâcher si elle ne parvient pas à lui fournir un nouveau livre. Depuis quelques mois, Abigail sèche devant son ordinateur et découvre par hasard Twitter. Aussitôt elle rencontre un certain Mark Baynard et s'amuse à flirter en ligne avec lui.
Moi qui ne crois pas trop à ces dragues sur internet (cf. Quand souffle le vent du nord de Daniel Glattauer ou Attachement de Rainbow Rowell), j'ai eu la très grande surprise de m'enthousiasmer complètement pour cette histoire ! Les échanges entre Abigail et Mark sont drôles, alertes, ponctués de nombreuses références à la pop culture (un vrai régal de deviner à quelle série ils pensent au moment de se dire au revoir), en somme c'est une véritable bouffée d'air pur !
Fatalement, l'auteur a maladroitement glissé un petit élément dont on aurait pu se passer, parce qu'on n'avait pas besoin de notre dose de mélo dans cette lecture pétillante. Sans quoi, vraiment quelle bonne tranche de rigolade ! de plaisir ! de surprise ! Par principe, je suis complètement hermétique aux cuicuis du petit oiseau bleu, un simple détail au final, car le réseau est juste un prétexte pour que deux personnes se rencontrent, et puis ... chabadabada !
Pour un Tweet avec toi, par Teresa Medeiros
Milady romance, coll. Central Park, 2012 - traduit par Emmanuelle Ghez
- Un petit clic vers le billet de Mlle Pointillés, qui donne des extraits de sa lecture, de quoi vous donner envie de tenter le coup !
“The past is history. The future is a mystery. The present is a gift.”
L'histoire se situe dans la proche banlieue de New York, aux Hollows, petite bourgade réputée tranquille et silencieuse, cerclée par des bois qu'il faut éviter de traverser, à cause des mines souterraines. Une vingtaine d'années plus tôt, une femme a disparu, abandonnant son mari et ses deux jeunes enfants. C'était la première grosse enquête de Jones Cooper, aujourd'hui flic à la retraite et occupant ses journées à bichonner les jardins de ses voisins.
Lorsque Michael Holt est de retour en ville, pour vider et vendre la maison de ses parents, il souhaite également rouvrir le dossier sur la disparition de sa mère. Il a embauché un détective privé, lequel est assisté d'une médium, Eloise Montgomery, qui fait des rêves sur les morts suite à un tragique accident de voiture. Sans comprendre pourquoi, elle a eu une vision de Jones Cooper et vient le lui signaler. Ce dernier est intrigué, mais a d'autres chats à fouetter.
En effet, Jones a été sollicité par la très discrète Paula Carr, mariée et mère au foyer, qui s'inquiète à propos de la première femme de son mari. Celle-ci a envoyé son fils Cole en vacances chez eux, mais depuis n'a plus donné de nouvelles. Kevin prétend qu'elle a mis les voiles, mais Paula est quelque peu perplexe. Personne ne doit être au courant de cette enquête que Cooper tient à cœur de conclure, pour se réconcilier avec ses vieux démons.
Cette lecture n'est finalement composée que d'action lente et d'introspection, avec une ribambelle de personnages dont les destins vont finir par se croiser, ou disons qu'on s'en doute, sinon à quoi servirait cette galerie de portraits interminable ? Bref, l'auteur déroule son fil sur un rythme nonchalant, en entretenant l'idée que l'on se fait du suspense, c'est psychologique, pas éclaboussant.
Il faudra attendre la deuxième partie, au bout de 300 pages, pour enfin s'offrir un début de frisson. C'est dommage d'avoir cherché à tout décortiquer, dans la présentation des lieux, des personnages et dans l'analyse de leurs sentiments, leurs secrets et leurs pensées, c'est beaucoup trop touffu, trop long. Le dénouement, finalement, n'est qu'une suite de décompression après toutes les fausses angoisses perçues. Je vous jure, rien que le prologue promettait une histoire plus stressante.
Ce n'est pas une déception, juste une frustration. C'est moins un thriller, et davantage une sombre histoire de vies ordinaires bousculées par les désordres amoureux et les non-dits, avec pour cadre la parfaite petite ville américaine, théâtre fabuleux des drames intimes.
Les voix du crépuscule, par Lisa Unger
Livre de Poche, 2013 (éditions du Toucan, 2012) - traduit par Yoko Lacour
-SELECTION POUR LE PRIX DES LECTEURS-
Emile, le petit fifre de Anne de La Boulaye et Sébastien Mourrain
Voici les aventures imaginaires du jeune Émile, modèle du célèbre tableau de Manet.
Émile est orphelin et, à dix ans, fait partie des jeunes musiciens de la Garde impériale. Un jour, alors qu'il est puni et doit rester seul dans la caserne pour récurer le réfectoire, on lui demande d'accompagner le commandant Lejosne chez un peintre... Émile prend peur. Que va-t-il donc lui arriver ?
L'histoire est belle, mais c'est surtout la reproduction du tableau de Manet qui interpelle et impose le respect. Je signale au passage que la véritable histoire du peintre et de son chef-d'oeuvre est accessible dans un mini-livre, en début d'ouvrage. La version proposée ici par Anne de La Boulaye n'est qu'imagination folle et débordante... mais classieuse.
Un album assurément classique et très élégant. Le travail de Sébastien Mourrain est remarquable !
Emile, le petit fifre (d'après le tableau d'Edouard Manet) de Anne de La Boulaye et Sébastien Mourrain (Seuil jeunesse, mars 2013)