“Je m'ennuie au milieu de ces cotes toujours à la même place. Ça finit par me taper sur le système.”
Ce récit m'est apparu comme la logorrhée inépuisable d'une bibliothécaire aigrie par son travail. Un matin, au moment de prendre son poste, elle tombe sur un lecteur qui a passé la nuit dans la bibliothèque. Elle est surprise et rouspète, puis se met à lui parler, parler, parler. C'est long ! D'autant plus, qu'à aucun moment, son interlocuteur ne va intervenir, aussi se demande-t-on si cet individu existe vraiment !
Aussitôt la femme embraie sur son métier, son fonctionnement, expliquant ainsi la fameuse classification décimale de Dewey (cf. le titre du livre). Puis elle s'échappe dans de nombreuses digressions, ses réflexions deviennent acerbes, elle ne supporte pas ses collègues, elle vilipende la direction, trouve qu'ils ont mauvais goût, elle est frustrée d'être au sous-sol, rayon géographie, elle aurait préféré l'histoire.
Et puis, elle se sent transparente, inexistante, elle fait partie des murs, même les rares lecteurs qui descendent jusqu'à elle ne lui prêtent aucune attention, elle soupire, elle grince des dents, parfois elle se venge, elle fait aussi une fixation sur un certain Martin. Sauf que tout ceci ne la console pas de sa détresse. En gros, elle ne trouve aucun épanouissement dans son travail, elle le sait, et nous aussi. A peine les premières pages lues, on le ressent tout de suite.
Ce petit livre m'a donc semblé déconcertant, très amer et un peu lassant. Son flot de paroles, qui apparaît comme un gros bloc interminable et sans chapitre, a été pour moi un enfermement, c'est étouffant, tour à tour usant et agaçant. Je me suis sentie totalement étrangère au désarroi de la bibliothécaire, sa hargne contre le monde extérieur a fini par me gonfler, je n'ai jamais trouvé ça piquant, ou acide, ou drôle. Tant pis.
La cote 400, par Sophie Divry
10/18 (2013) ou aux éditions Les Allusifs, 2010