Rencontrer un véritable super-héros dans la vraie vie peut se révéler une expérience inoubliable
Jack Vandal est le rejeton d'un couple de super-méchants, dont les projets de détruire la planète sont souvent contre-carrés par le Capitaine Justice, l'idole de toute une génération. Jack, lui, tente de mener une vie de collégien ordinaire, sous une fausse identité. Mais les choses se compliquent avec l'apparition de son Don (la combustion spontanée), mais surtout de Sophie Martin, la nouvelle élève qui semble aussi avoir un secret à préserver !
En fait, il s'agit de la fille du Capitaine Justice. Jack en reste bouche bée mais ne lui parle pas du poids de son héritage, seulement de son statut de super-héros. Certes, il doit choisir son camp mais ce n'est pas gagné. Être un super-méchant, pour lui, ce n'est pas une sinécure non plus. Ses parents ne le forcent pas, même s'ils le conduisent au Salon annuel du Super-Méchant, en tout bien tout honneur.
Cette lecture est extrêmement drôle et bien rythmée, cela a été une vraie bonne surprise au moment de la découvrir (je n'aime pas beaucoup la couverture). Les personnages sont étonnants, de pures caricatures, mais le trait est forcé exprès, sans jamais être lourd. L'auteur s'amuse à dépeindre un super-héros en véritable businessman en terme de marketing, tandis que les méchants font doucement rigoler (on les aime d'être si redoutables !). L'intrigue est simple, mais sait tenir en haleine. Il y a sans cesse de l'action, du rebondissement et beaucoup d'humour aussi.
Les enfants apprécieront, sans nul doute. Les parents également, en lecture orale notamment.
Jack Vandal, par Lee Bacon
Milan jeunesse, 2013 - traduit par Amélie Sarn
illustration de couverture : Sébastien Telleschi
“Avoir dix-sept ans et ne pas avoir peur des mots.” (Contre courants)
Sur les conseils de sa psy, Jérôme, dix-sept ans, tient un journal pour y raconter tout ce qu'il lui passe par la tête. Cela va de ses rapports conflictuels avec son frère aîné ou avec son père, du silence de sa mère, spectatrice impuissante de la débâcle familiale, de son goût des mots et des livres, de son obsession pour une fille croisée dans la rue, surnommée Alcyone, de sa passion pour le plongeon, de sa solitude, son ennui, son errance...
Jérôme est un adolescent paumé, complètement en rade, qui se défoule à coup de mots et de formules lapidaires, à défaut de sortir ses poings pour calmer son entourage. Enfin, c'est plus que ça, c'est compliqué aussi, c'est un engrenage infernal, mais puissant, atterrant, inimaginable. La force du texte vient justement de la véhémence du garçon dans sa manière de s'exprimer, façon poète maudit, à la Rimbaud.
Qu'est-ce que ça cogne ! qu'est-ce que ça colle aux doigts et au cœur ! Le texte aussi est violent, frappant, percutant. Mais surtout, il est surprenant, vers la fin, il vous réserve une sacrée claque... J'ai reconsidéré toute ma lecture, songeuse, admirative, j'ai frissonné et j'ai refermé tout ça en m'ébrouant. Très belle lecture coup-de-poing !
Contre courants, par Richard Couaillet (Actes Sud junior, 2011)
Teaser Tuesday #48
Il m'a dit : “Tu vas aller faire un tour chez les fous, ça va t'apprendre à vivre !”
Parce que les spécialistes sont là pour ça. Ils ont la formation pour formater, en douceur et en cachets aussi. La chimie des molécules pour rétablir les connexions, le droit chemin des sentiments. Alors il m'a dit : “Va chez le psy !” En consultation pour ado en perdition. Ado paumé, à la ramasse, ado en panne, panne de sourire et panne d'amour. Ado cliché, ado fourre-tout.
Temps regretté des belles croisades pour occuper les désoeuvrés, pour leur donner un idéal. Un sang bien rouge et bien impie à faire couler, ça vous occupe, très loin du diable et ses orgies.
Il paraîtrait qu'on a perdu le chant du monde. Que moi aussi, comme beaucoup d'autres. Alors ma psy m'a suggéré de prendre ma lyre pour faire pleurer les pierres, de me fendre le coeur à coups de hache pour épancher ma bile toute noire, pour retrouver le chant colchique dans les prés, parfum pour papier-cul. Elle veut du vrai, de la tripaille bien étalée, parce qu'écrire ça fait du bien, tout le monde le dit, comme un lavement, un bon “clystère d'extase”. Ça, c'est Rimbaud ; pas de moi. Trop beau.
Contre courants, par Richard Couaillet (Actes Sud junior, 2011)