La double vie de Cassiel Roadnight, de Jenny Valentine
« Je n'ai pas choisi d'être lui. Je n'ai pas désigné Cassiel Roadnight, je ne l'ai pas fait sortir d'une file de personnes qui me ressemblaient comme deux gouttes d'eau. J'ai simplement laissé faire. Je voulais simplement que ce soit vrai. C'est le seul tort que j'ai eu, au début. »
Cassiel Roadnight a disparu de la circulation depuis deux ans, aussi sa famille n'en croit pas ses yeux lorsque les services sociaux leur signalent avoir retrouvé le garçon. C'est sa soeur Edie qui vient à sa rencontre. Très émue, la jeune fille lui tombe dans les bras et le ramène aussitôt à la maison. Le hic, c'est qu'il ne s'agit pas du vrai Cassiel Roadnight, mais d'un prénommé Chap, dont la ressemblance troublante avec le fugitif a confondu tout le monde.
Chap est aussi un adolescent en fugue, depuis quatre ans, il se débrouille par lui-même après avoir été séparé de son grand-père. Le garçon ne voulait pas duper les Roadnight en se faisant passer pour Cassiel, mais c'est suite à un malentendu et le voici maintenant prisonnier de cette mascarade. Il n'est pas fier de lui de tromper son entourage, il se sent même oppressé et songe à disparaître de nouveau du paysage.
Et pourtant, il continue de jouer la comédie. Un mystère plane sur la famille Roadnight et les causes du départ de Cassiel. Ce dernier semblait être un type arrogant et difficile à vivre, Chap tente de coller au moule, sans grande conviction. Il cherche alors à en savoir plus, il questionne, il rencontre les (mauvaises) personnes, il sonde les proches et il comprend assez rapidement qu'il est en danger.
Oui, parce que ce roman est tout de même ancré sur une solide base de mystère et de suspense. Non seulement on s'interroge sur le cas de Cassiel, mais on se demande aussi jusqu'où pourra tenir Chap dans son double rôle. C'est frustrant, très prenant, assez stressant aussi. Les doigts sont collés aux pages du livre, on n'en peut plus de savoir la vérité et on ne cesse de recevoir de nouvelles informations, toutes plus aberrantes les unes que les autres. (À ce propos, la fin est tout de même abusée. Trop facile.)
Ce titre a reçu la Pépite du Roman pour ados décerné lors du dernier Salon du livre et de la presse jeunesse à Montreuil. C'est totalement justifié. On plonge dans sa lecture avec une curiosité qui ne cesse d'être alimentée et grandement récompensée au fil des chapitres. L'histoire est pesante et mélancolique, sans frôler le désespoir absolu. C'est tout bonnement poignant de voir les liens qui se tissent entre les êtres, le portrait de la famille Roadnight qui est complètement brinquebalante et qui ne va pas forcément se reconsolider avec le retour du fils disparu.
C'est définitivement une ambiance qui envoûte et une histoire qui vous happe pour ne vous relâcher qu'à la toute dernière ligne. Très bon !
École des Loisirs, septembre 2013, traduit par Diane Ménard - illustration de couverture : Gabriel Gay.