La Belle et la Bête, de Cécile Roumiguière & Aurélia Fronty
Un marchand de soie et d'étoffes perd toute sa fortune en apprenant que sa marchandise a disparu sur les mers. Dépité, l'homme s'inquiète pour l'avenir de ses trois filles : les aînées ont la rage au cœur, alors que la cadette, surnommée la Belle, propose de se retrousser les manches pour subvenir à leurs besoins.
Lors d'un voyage à Venise, le marchand se perd sur une route noyée sous la brume et découvre un magnifique palais où il s'installe pour se sustenter. Il ne croise nulle âme qui vive et s'aventure dans le jardin où il cueille une rose, le cadeau promis pour sa Belle.
Alors, une créature affreuse surgit et grogne de colère. Il fera du marchand son prisonnier à vie ! Au lieu de quoi, sa fille se sacrifie et se rend seule chez cette Bête. C'est elle qui a voulu la rose, c'est à elle de prendre sa place.
« Ne vous inquiétez pas, père. Ce monstre n'est pas si méchant s'il aime les roses.
- Ma fille, tu ne sais pas ce que tu dis. Sa voix est terrible...
- Bien. Je ne lui demanderai pas de chanter, voilà tout.
- Mais son aspect est plus terrible encore ! On ne sait s'il porte des écailles ou du poil, ses mains gantées sont énormes, propres à étrangler.
- Qu'importe. Parfois, les arbres les moins beaux donnent les meilleurs fruits. Et de grandes mains peuvent être utiles au jardinage.
- Oh, la Belle, si tu savais... Il salivait. Son museau doit cacher des dents affreuses, des crocs propres à déchiqueter les viandes les plus dures.
- Calmez-vous, mon père. Je serai prudente, je vous le promets. Et, qui sait ? Peut-être ne me tuera-t-il point ?
- Ma fille, c'est un monstre, je te dis.
- Allons... Tout ira bien. Je sais parler aux bêtes sauvages, je l'apprivoiserai, voilà tout. »
Cécile Roumiguière nous livre ici sa version revisitée du célèbre conte de La Belle et la Bête, dans le décor féérique de la Sérénissime, où le style vigoureux et élégant d'Aurélia Fronty y trouve une harmonie extraordinaire. Les couleurs sont éclatantes et mises en valeur par le format de l'album (qui s'ouvre comme un portefeuille), on y plonge avec délice et stupéfaction.
Poésie, force et tendresse font donc de cette adaptation une brillante réussite.
Belin jeunesse, novembre 2013