29/09/15

Le Secret de la manufacture de chaussettes inusables, d'Annie Barrows

LE SECRET DE LA MANUFACTURE

Fâchée avec son sénateur de père, qui souhaitait la fiancer contre son gré, Layla Beck accepte le premier job venu - écrire l'histoire de Macedonia, une petite ville de Virginie-Occidentale, pour le compte d’une agence gouvernementale. Contre toute attente, cette expérience va s'avérer grisante et pleine de surprises ! Layla s'installe chez les Romeyn, dans la moiteur d'un été caniculaire, et découvre chez cette famille un passé cerné d'ombres et de fantômes. À force de fouiller dans les archives de la ville et les anecdotes des habitants, la jeune femme va se connecter avec un secret familial, doublé d'un drame sentimental, qui a plongé Jottie, son frère Félix et leurs proches dans un silence pesant et expliquerait leur mode de vie engourdie.

Ce roman, très attendu depuis que j'avais été enchantée par Le Cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates, co-écrit par Annie Barrows et sa tante Mary Ann Shaffer, ne lui arrive sans doute pas à la cheville, mais offre malgré tout un instant de lecture absolument réjouissant. L'histoire nous balade gentiment, au cours des 600 pages pour 18 heures d'écoute, à travers les rues de Macedonia et en compagnie d'une brochette de personnages attachants, qui se plaisent à colporter toutes sortes de fables et dressent ainsi un tableau de la ville particulièrement cocasse.

On se sent vite comme un coq en pâte, pas mécontent de notre visite. À côté de ça, le secret de la famille Romeyn nous taraude. Et c'est grâce à la curiosité insatiable de la jeune Willa, douze ans, que certains mystères du passé vont se lever. Pourquoi Jottie se refuse d'aimer à nouveau ? que fabrique Félix dès lors qu'il s'échappe de la maison pour revenir les poches pleines d'argent ? quels mensonges Vause Hamilton a-t-il emportés dans sa tombe ? qu'est-ce qui a pu briser leur amitié avec Sol McKubin ?

Même si le rythme est lent et le roman copieux, la lecture ne m'a inspiré aucun ennui. J'ai été charmée par l'ambiance, captivée du début à la fin. J'avais l'impression de décrocher avec la réalité qui m'entourait pour voyager dans un décor dépaysant mais chaleureux. Cela m'a beaucoup plu. Les histoires de famille et les petites villes américaines n'ont pas fini d'exercer leur attrait sur moi ! Claire Tefnin (Audiolib) prolonge cette sensation de bien-être grâce à une voix agréable et apaisante. 

Audiolib / Septembre 2015 ♦ Texte lu par Claire Tefnin (18h 26) ♦ Traduit par Claire Allain et Dominique Haas pour Nil éditions (The Truth According To Us)


Teaser Tuesday #63

« Elle a retiré ses lunettes pour les essuyer et j'ai regardé ses yeux. Ils étaient plissés comme sous l'effet d'un rayon de soleil trop fort. Au coin de l'œil droit, une petite larme traçait son chemin dans un réseau de minuscules rides, comme un filet d'eau dans le désert. Soudain, j'ai eu l'impression qu'une main invisible m'étranglait. Tout ce que j'ai trouvé à dire, c'est ce truc complètement nul : 
- Mais pourquoi ?
Dans ma tête, ça voulait dire : « Comment t'as chopé ça ? » Mais aussi : « Pourquoi toi et pas une autre ? » La maman d'Élodie qui fume comme un pompier, par exemple. La nouvelle femme de papa qui est pleine de silicone dans les seins, tiens. Mais, dans ma bouche, ça sonnait comme une question de bébé : « Pourquoi le ciel est bleu, pourquoi il pleut, pourquoi on a des cheveux, pourquoi la neige est froide, et pourquoi les gens meurent ? » Pourquoi, pourquoi, pourquoi ?
- Je ne sais pas. Ils n'ont pas pu me dire. Ils disent que c'est un ensemble de facteurs. Je crois surtout que c'est la faute à pas-de-chance...
Elle a remis ses lunettes et m'a pris la main entre les deux siennes avant de m'annoncer d'un ton presque enjoué :
- Enfin, voilà, je suis malade. Mais j'ai bien l'intention de guérir, tu sais ! »

Ma mère, le crabe et moi - Anne Percin (Rouergue, 2015)

ma mère

Tania, 14 ans, apprend que sa mère est atteinte d'un cancer du sein. Je vois d'ici votre mine apeurée à l'évocation de la maladie, mais inutile de craindre les violons et les pleureuses en coulisses car l'histoire se révèle étonnante d'humour et d'optimisme. Comme un pied-de-nez au destin. Et c'est tant mieux (y'en a marre de ces bouquins qui nous font pleurnicher exprès). Anne Percin a choisi pour narratrice une ado crâneuse et caustique, qui aime tourner le monde en dérision et se blinde derrière les sarcasmes pour encaisser l'onde de choc et soutenir du mieux qu'elle peut sa maman dans son combat (la chimio, les nausées, les gros coups de pompe, la perte des cheveux, le désespoir et l'isolement). On ne va pas se mentir - Tania est naturellement morte de trouille mais refuse de baisser les bras. Elle se lance alors pour défi de rejoindre l'équipe de cross du collège - elle qui a longtemps considérait que l'EPS signifiait « ensemble de pratiques sadiques » - et va exorciser sa frustration et sa colère sur la piste de course.

Le roman est court (127 pages), mais livre avec justesse, sensibilité, tendresse et fantaisie deux parcours de combattantes, en clin d'œil aux mythiques amazones, et dessine une relation mère / fille attachante et riche en complicité. L'histoire fait fi des clichés et du pathos, grâce au choix de dédramatiser la maladie, sans en négliger l'aspect barbare et médical. Un parfait équilibre entre prévention et émotion. ♥

 

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Posté par clarabel76 à 08:30:00 - - Commentaires [5] - Permalien [#]
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