Rendez-vous à Estepona, par Åke Edwardson
Peter Mattéus mène une existence rangée et heureuse : un boulot de publicitaire à succès, une vie de famille épanouie, une maison coquette à l'abri des regards indiscrets... Nul ne se doute de son passé d'activiste durant ses années en Andalousie. Il a tout plaqué pour faire peau neuve en s'exilant en Suède, mais il semblerait que ses vieux amis se rappellent à son doux souvenir.
Le couple vient en effet de recevoir par surprise deux billets d'avion pour la Costa del Sol. Sa femme se réjouit d'une escapade amoureuse, tandis que Peter comprend aussitôt la menace et se sent pieds et poings liés. Tout est programmé pour leur départ imminent. Ses enfants placés chez leur grand-mère, il débarque donc dans un pays secoué par une série d'attentats à la bombe.
Et très vite, il retrouve ses contacts d'avant qui l'obligent à payer sa dette. Accusé de trahison, Peter doit désormais éliminer leur ancien complice, Jesùs Maria Montanas, le chef de la police d'Estepona, devenu un homme politique influent. Cet homme serait également responsable de l'assassinat du jeune frère d'Aitor Usetxe, leur chef de groupe. Les dix-neuf années passées en prison ont d'ailleurs entretenu sa rancune et sa soif de vengeance.
Ce livre ne s'inscrit pas dans la série à succès de l'auteur, celle mettant en scène le commissaire Erik Winter à Göteborg. Place à une aventure à part avec un homme confronté à son passé et résolu de préserver son présent. Svange Berger, alias Peter Mattéus, l'homme aux multiples casquettes, doit donc gérer le dilemme à coup de slaloms efficaces en plongeant dans les méandres d'une intrigue crapuleuse et dépassée.
Le type va cependant s'avérer mou et passif, même pas fichu de tenir une conversation cohérente. Il suit le mouvement sans conviction. Cherche au mieux à limiter les pots cassés et protéger sa famille. J'hésite à qualifier sa position entre intelligence et apathie.
Malgré une narration erratique, au style haché laborieux et lourd à digérer, l'histoire se laisse lire sans déplaisir mais se révèle finalement peu marquante. Une lecture un peu trop sommaire à mon goût.
Traduit du suédois (Möt Mig I Estepona) par Rémi Cassaigne pour les éditions JC Lattès
Repris chez 10-18, en Sept. 2015
Le Temps est assassin, de Michel Bussi
Durant l'été 1989, Clotilde passe ses vacances en Corse, sur les terres de la famille de son père. Elle a quinze ans, elle adore La Lambada, Le Grand Bleu et La Mano Negra. C'est une adolescente insouciante, dont le journal intime raconte ses exploits avec une spontanéité rafraîchissante. Sauf qu'au terme de cet été indolent, un accident de voiture va décimer le couple Idrissi et leur fils Nicolas, laissant orpheline la jeune Clotilde.
Vingt-sept ans plus tard, celle-ci est de retour sur les lieux du drame, avec son mari et son adolescente de fille. Son deuil est telle une plaie ouverte, impossible à combler. Aussi est-elle résolue à chasser ses fantômes et crever l'abcès en retrouvant tous les témoins de la tragédie, quitte à mettre en péril ses acquis.
Changement de cap pour l'auteur normand qui nous invite à poser notre serviette de plage sur l'île de beauté et se repaître de son caractère entier et farouche ! La presqu'île de la Revellata, entre mer et montagne, devient le théâtre de passions nombreuses et variées, de celles qui diabolisent une famille sur plusieurs générations, à celles qui ravivent des émotions et déterrent des secrets trop longtemps enfouis.
La construction du roman laisse de nouveau vagabonder notre imagination, entre passé et présent, la vigilance est de mise. Michel Bussi se joue du lecteur avec ses sempiternels chausse-trappes, exprès pour semer le doute et nous balader sur des fausses pistes. La pratique n'est pas nouvelle, mais nous abuse encore et toujours. C'est de bonne guerre.
Cette intrigue à suspense laisse donc entendre que la mère de Clotilde ne serait pas morte, d'après les improbables indices glissés sur son chemin (une lettre signée, un labrador du même nom, la table du petit-déjeuner dressée à l'identique du matin du drame). C'est suffisant pour rallumer la flammèche de l'espoir et l'entraîner sur des sentiers glissants.
Plus Clotilde s'obstine à fouiller le passé, plus ses proches se sentent délaissés et lui font des reproches, auxquels elle reste sourde. En comprenant que l'accident aurait sûrement des origines criminelles, que les apparentes infidélités de sa mère, trop belle et frivole, auraient servi à une triste mise en scène et précipité le drame que l'on sait, Clotilde n'envisage plus de rebrousser chemin mais redoute à plus forte raison de dévoiler la vérité (qui s'annonce à coup sûr poignante et bouleversante).
Le scénario est certes rocambolesque, mais tient en haleine et participe au sensationnel du récit. Une lecture idéale pour la détente (soleil, vacances, secrets de famille, premières amours et retour aux sources). Tous les ingrédients sont réunis pour concocter une bonne mixture appétissante !
Texte lu par Julie Basecqz pour Audiolib (Juin 2016) durée : 15h 16
Titre téléchargé sur la plateforme Audible
©2016 Michel Bussi et Presses de la Cité (P)2016 Audiolib