12/10/16

Vendredi 13, de David Goodis

Vendredi 13Ce roman a tout d'une farce, bien crapuleuse, avec un pauvre type qui se glisse dans la peau d'un truand pour sauver la mise et participer au soit-disant braquage du siècle dans la nuit d'un vendredi 13. Un détail forcément prémonitoire. 
Et quel pied. J'ai tout de suite été interpellée par le cynisme du personnage central, Al Hart, qu'on croise en train d'errer dans les rues de Philadelphie, transi de froid, puis entrer dans une boutique pour voler un pardessus. Courant à toutes jambes pour échapper à la police, il va surprendre des coups de feu et tomber sur le corps d'un homme mourant, auquel il chipe le portefeuille rempli d'oseille avant de le planquer dans les fourrés et se livrer à ses poursuivants. L'entrée en matière est complètement dingue mais ne déroge pas aux règles du roman noir. Car c'est sanglant, violent et immoral. 
Face à Al, Charley et ses acolytes constituent une bande de malfrats peu commodes et néanmoins nigauds. Ils gobent l'histoire de meurtre que leur raconte Hart et l'adoptent comme l'un des leurs. Enfin, cela n'est pas aussi lisse et acquis car les gars se méfient de cette petite frappe et lui en font baver. Ces malfaiteurs sont en train de préparer leur prochain casse dans une grande propriété privée et glandouillent dans un appartement en jouant au poker. Hart fait profil bas, se fond dans le décor, répond aux jeux de séduction de Freida, la copine de Charley, et se tient à distance de Myrna, qui ne se console pas de la mort de son mec, par la faute de Hart (des mauvais coups filés dans le ventre et des blessures insoupçonnées). 
C'est assez proche de la comédie dramatique, sur fond d'humour noir, avec une vision charitable de la petite racaille. Ce sont tous de pauvres bougres paumés et coincés dans une vie de misère, qu'ils tentent d'enjoliver par leurs piètres moyens. Il y a du désespoir derrière leurs mines patibulaires, lequel va éclabousser les pages du livre par l'irruption du parasite Hart. Ce gars est un imposteur, on le sait, mais c'est sa seule porte de secours. Prétendre un rôle qu'il n'est pas. Lui aussi a son histoire tragique et déprimante qu'il fuit comme un dératé. Le destin l'a fait croiser Charley et sa bande, le reste appartient à David Goodis. 
Remis à l'honneur avec une traduction révisée et une présentation par Laurent Guillaume (auteur de 
Delta Charlie Delta & Black cocaïne), ce polar culte vaut clairement le détour. C'est loin des chimères et de la sensibilité naïve et romanesque. Et pourtant cette lecture a su me scotcher et me charmer. Une découverte inattendue et réjouissante.

Trad. de l'anglais par François Gromaire et révisé par Isabelle Stoïanov

Nouvelle édition présentée par Laurent Guillaume en 2016

Collection Folio policier (n° 279)

Parution : Septembre 2016


Satan était un ange, de Karine Giébel

Satan etait un angeAvec Karine Giébel, les livres se suivent et ne se ressemblent pas. Mes appréciations de lectrice non plus, hélas. Car cette lecture a été une énorme déception. Ni plus ni moins.
C'est l'histoire d'un gars en fuite, François, un avocat en pleine déprime après avoir appris qu'il était atteint d'une maladie incurable. Par fierté, il choisit de prendre le large, loin de son foyer, ne voulant pas imposer à sa femme sa prochaine déchéance. En route, il croise un jeune autostoppeur.
Paul rentre chez lui à Marseille. C'est un môme charismatique, et pourtant pas très honnête. Car François découvre vite que le garçon est un délinquant recherché pour meurtres et trafic de drogue. Cette réalité le fait sortir de ses gonds, d'autant plus qu'il est maintenant embarqué dans la même cavale, avec une bande de tueurs à leurs trousses. Et malgré tout, François se sent incapable de tourner le dos à Paul. 
Entre ces deux-là, existe désormais une relation semblable à celle d'un père et d'un fils. En dépit des disputes, des mensonges, des écarts sociaux et des différences culturelles, François et Paul ont extirpé de leur rencontre incongrue cette petite étincelle d'espérance en l'avenir. 
Ouhlàlà. J'ai vérifié plusieurs fois le nom de l'auteur sur le bouquin tant j'ai cru halluciner. On est loin, très loin des histoires poignantes et remarquables de K. Giébel. Il s'agit tout juste d'une histoire de traque semée de cadavres, qui ne conduit même pas à un final bluffant. C'est même surprenant de conformisme, gonflé de bons sentiments et louable pour la forme (à vouloir dénoncer le marché honteux des déchets nucléaires). C'est pour moi une franche déception. Une lecture longue et ennuyeuse, écrite de façon trop maniérée, et qu'on lit comme une éternelle errance vers le vide. 

Texte lu par François Tavares pour Audible FR (durée : 8h 19)

©2014 Univers Poche (P)2016 Audible FR

Satan était un ange | Livre audio

>> Ce livre audio en version intégrale est proposé en exclusivité par Audible et est uniquement disponible en téléchargement.

Posté par clarabel76 à 10:00:00 - - Commentaires [0] - Permalien [#]
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