La Sorcière de la cité, de Karine Bride
«Leïla, sorcière berbère, nourrie exclusivement au couscous, en passe de se transformer en paquet de semoule, spécialisée dans le désenvoûtement et le retour d'affection, cherche prince charmant pour lui dire qu'elle est belle, lui faire un bon café et lui laver ses jeans. Chômeur accepté, mais travailleur à mi-temps non exclu - les autres si pas trop cultivés, car je suis allergique aux désherbants. »
Oh qu'il était bien, ce petit roman ! Avec sa jolie couverture illustrée par Joëlle Jolivet, il se propose de nous embarquer dans une folle aventure où la sorcellerie côtoie la clairvoyance, la bonne fortune et les petites combines. C'est tout mignon, simple et craquant. Voyez donc.
Vivant dans un quartier défavorisé, au cœur d'une cité qui la désespère, mais envers laquelle elle reste très attachée, Leïla bénéficie d'une réputation de bonne copine, prompte à résoudre les petits bobos de ses voisins, contre un bol de couscous ou une pizza gratuite en guise de rémunération. Sa bonté la perdra, lui serine sa mère qui fait fortune à Paris-Barbès auprès d'une clientèle aisée.
Cette dernière cherche également à la caser pour assurer une descendance, car être sorcière-cartomancienne, c'est un don qui se transmet de mère en fille. Leïla rêve d'amour, mais refuse que sa propre mère s'immisce dans sa vie privée. Elle vient d'ailleurs de passer une petite annonce dans le journal et a déjà reçu pas moins de quarante-sept réponses, dont celle d'un châtelain esseulé, sensible à son humour et prompt à lui ouvrir son cœur.
Dans le même temps, la vie dans la cité est en plein émoi : le jeune Mourad, huit ans, a disparu. Sa mère est effondrée, son grand frère a mis Leïla au défi d'activer son folklore de sorcière pour retrouver l'enfant au plus vite. Notre héroïne affûte aussitôt ses armes. Du bon sens, du bon sens et encore du bon sens. “Les gens en sont tellement dépourvus que c'en devient magique, le bon sens.”
Qu'elle est drôle, cette Leïla ! Elle tourne souvent en dérision sa vie faite de petites misères et son désert affectif, non sans une pointe de mélancolie. “Les sorcières n'ont pas droit aux sentiments. Et moi, j'ai appris à me retenir d'éprouver quoi que ce soit en toute circonstance.” Toujours sur la défense, donc. Aussi, notre Leïla n'ose pas s'émouvoir de l'intervention providentielle d'un bon samaritain au volant de sa Saab qui va conduire la jolie sorcière et le frère rasta aux trousses du fugueur. La course s'annonce mouvementée, rocambolesque et déjantée. Yes. ^-^
J'ai beaucoup, beaucoup aimé. Les jeunes lecteurs ont tout intérêt à se retrouver dans cette histoire d'une sorcière de vingt ans qui cherche l'amour et qui rêve également de changer le monde. Pour ma part, ce roman a été un franc coup de cœur. Il est court, trop court, mais riche d'une histoire merveilleuse, tendre et farfelue. On s'amuse énormément, on craque pour les personnages, on monte à bord d'une aventure magique. C'est simple et ça virevolte à chaque coin de page, c'est débordant d'optimisme et ça procure un bien fou. Une lecture parfaite ! ♥
Seuil Jeunesse, Septembre 2016