Les Royaumes du Nord ♦ 3, de Stéphane Melchior & Clément Oubrerie
Ainsi donc se termine le premier cycle de la fabuleuse trilogie de Philip Pullman (À la croisée des mondes).
Entourée d'alliés précieux et dévoués, Lyra est toujours à la recherche de son père, à qui elle veut remettre l'aléthiomètre. En survolant l'ancien royaume de l'ours Iorek Byrnison, le dirigeable de Lee Scoresby est surpris par une tempête et attaqué par un monstre des falaises. Dans la panique générale, Lyra tombe par-dessus bord et se retrouve seule, perdue au milieu de Svalbard, où les troupes de Iofur Raknison, l'usurpateur du trône, conduisent la fillette jusqu'à celui-ci. Pour tromper sa vigilance, Lyra invente une histoire de daemon humain mais précipite également son ami Iorek vers un duel d'une extrême violence.
Que de séquences fortes à la lecture de ce dernier volume ! On assiste à un dénouement d'une grande sensibilité, très poignant et néanmoins abscons, car l'histoire se termine sur une note de mystère et un grand point d'interrogation. La lecture n'en demeure pas moins entraînante et elle virevolte d'un point à un autre, d'une rencontre à une révélation, d'un choix à une trahison, enchaînant ainsi les pertes et les fracas. Les masques tombent, certains pions sont avancés et d'autres viennent pulvériser l'échiquier.
La fin est ainsi bouleversante, même si l'aventure est relancée vers une plongée dans cet univers toujours plus intense et passionnant. En attendant, ce premier cycle se conclut sans ménagement. C'est sombre, solennel, dramatique et saisissant. Lyra et ses acolytes affrontent coups bas et coups durs dans une quête complexe et riche en alternatives.
Totale réussite pour l'adaptation en bd ! Stéphane Melchior et Clément Oubrerie ont transcendé l'univers de Pullman à travers une vision prodigieuse et une mise en scène grandiloquente des Royaumes du Nord. Personnages et décors prennent vie dans cette magistrale orchestration de la folie humaine et des expériences scientifiques, avec ses dangers et ses sacrifices. Bref. La lecture est aussi remarquable que palpitante. Excellente série à découvrir.
Gallimard Bande Dessinée - Octobre 2016
source : http://www.oubrerie.net/
Dans la forêt sombre et mystérieuse, de Winshluss
Avis aux amateurs d'aventure insolite et d'humour loufoque, cette bd de Winshluss va vous régaler !
Avertie de la mauvaise santé de la grand-mère, la famille d'Angelo part en catastrophe pour se rendre à son chevet, mais en cours de route, après une courte pause-pipi, la voiture repart dans l'urgence en oubliant le garçon sur le bas-côté. Angelo est terrorisé, puis prend la décision de poursuivre le chemin à pied, en traversant « la forêt sombre et mystérieuse ».
L'ambiance dans les fourrés est clairement angoissante. Le garçon y croise des créatures toutes plus bizarres les unes que les autres (une luciole obèse, Fabrice l'écureuil qui se prenait pour un oiseau, un crapaud, une chenille, un chimpanzé camelot...), certaines cherchant à lui venir en aide, d'autres à le croquer tout cru. On puise aussi dans le folklore des contes pour enfants qui font frissonner plus que de raison (l'ogre, la maison de poupée, les bons petits plats pour endormir la proie...). C'est drôle comme ça frise le ridicule et ça ne loupe pas de faire ricaner !
Cet art de la dérision rend l'histoire grinçante et cocasse, mais aussi tellement amusante. Il faut suivre Angelo dans ses péripéties improbables et s'imprégner de l'absurde de chaque situation pour en apprécier tout le sel. C'est, de plus, follement distrayant. On stresse à chaque coin de page, on glousse, on tremble de peur, on s'interroge et on éprouve de la compassion. Autant d'émotions fortes et exaltantes qui attendent le lecteur au tournant.
J'inscris cette bd parmi les incontournables pour rire, trembler et halluciner tout en même temps. Une lecture inattendue pour une aventure enfiévrée et délirante. Vraiment, une très bonne découverte.
Gallimard Bande Dessinée / Octobre 2016