Le témoin invisible, de Carmen Posadas
Interprété par Marc-Henri Boisse pour Sixtrid (avril 2015)
Durée : 12h 35mn
Si la Russie et les Romanov vous fascinent, alors ce livre est fait pour vous. Il est richement documenté, instructif et passionnant. Tout simplement excellent.
Il vous entraîne de suite dans la Russie du tsar Nicola II, dans l'intimité de la famille Romanov et dans la fureur de la révolution bolchévique. L'histoire est racontée par un vieil homme malade, Léonid Sednev, réfugié à Montevideo. Entre la fatigue, les douleurs et le temps qui file, il rassemble au mieux ses souvenirs d'ancien ramoneur au palais impérial, petite ombre furtive et témoin invisible des terribles événements ayant conduit au massacre du 17 juillet 1918.
Je le dis, je le répète, c'est captivant. Rien n'échappe à son regard, la vie de famille dans un cadre préservé, la symbiose parfaite, l'exubérance des princesses, la fragilité du tsarévitch Alexis, la dévotion de l'impératrice Alexandra, l'influence trop prononcée de Raspoutine, son assassinat, la colère du peuple, la guerre contre l'Allemagne, la famine, l'abdication et l'exil...
J'ai trouvé dans ce récit une précision remarquable, couplée à un sens du romanesque grandiose. La combinaison des deux est une réussite. J'ai littéralement plongé au cœur de l'Histoire, j'avais la sensation de voyager dans le temps, de fureter dans les couloirs ou de me cacher dans les coulisses. J'étais spectatrice du bonheur et du malheur des Romanov.
Ce roman s'inspire donc de faits réels. Seule une personne est sortie vivante de la Maison à destination spéciale, soit Léonid Sednev, marmiton de quinze ans. Le matin du 17 juillet, celui-ci a été renvoyé chez lui sans explication. On ignore ce qu'il est devenu, car sa trace a été perdue, on ignore aussi s'il a rédigé ses mémoires, Carmen Posadas en a ainsi fait son héros, son “témoin invisible”, à qui elle prête une fascination amoureuse pour la grande-duchesse Tatiana et des émois balbutiants pour la délicieuse Maria.
Cette lecture s'ajoute sans doute à une longue liste, mais elle dégage un supplément d'âme qui en fait tout son charme. Une lecture foisonnante, poignante et palpitante. J'ai adoré. ♥
« Les grands secrets sont comme les sortilèges, ils s'évanouissent dès lors qu'on les expose. »
Trad. Isabelle Gugnon pour les éditions du Seuil - Disponible en Poche chez POINTS
La revanche de Kevin, par Iegor Gran
François-René Pradel traîne son spleen dans les rangées du Salon du Livre, lorsqu'il croise Alexandre Janus-Smith, un jeune élégant à la mèche rebelle, également lecteur pour une grande maison d'édition. Notre auteur de cinquante-cinq ans, ayant une dizaine de romans à son actif, lui confie alors son dernier manuscrit.
Le retour est dithyrambique, le comité de lecture est emballé, la direction empressée, mais exigeant quelques modifications à apporter, comme un nouveau titre et une préface pour bien notifier “sa sensibilité de gauche”.
Bref. François-René Pradel est aux anges. Son épouse et sa fille applaudissent à tout rompre. Mais les mois passent et les nouvelles se tarissent. Soudain, c'est la douche froide, le jeune hurluberlu a disparu de la circulation.
Pradel vient de subir la plus belle humiliation de sa carrière.
Sous la fausse identité d'Alexandre Janus-Smith, se cache Kevin H., commercial à la Radio, chargé de vendre des espaces publicitaires. C'est là que le bât blesse. Être ou ne pas être un Kevin. C'est tout le drame de notre escroc, qui entend laver des années de brimades et de frustration par la faute de son prénom.
Un concept farfelu, mais sensé. Après tout, la démonstration de la supercherie est limpide, percutante et hilarante. La lecture n'en est que plus truculente ! À s'en pourlécher les babines, miam.
Pour qui aime la satire et les sarcasmes, foncez. ☺
Collection Folio (n° 6189)
Parution : Octobre 2016