George, d'Alex Gino
Ne vous fiez pas aux apparences, même si sa mère l'appelle Gigi et pense à son avenir de “jeune homme”, ou lorsque son frère Scott le taquine en pensant qu'il reluque des magazines pour se rincer l'œil, George est une fille. George se sent une fille. George veut jouer le rôle de Charlotte dans la pièce de l'école. George a besoin d'être prise au sérieux. Seule sa meilleure amie Kelly est prête à la soutenir et lui propose d'échanger son rôle, ni vu ni connu, pour que la vérité éclate devant tout le monde, sur la scène. Mais George doit convaincre sa famille, se battre contre les garçons de son école qui se moquent d'elle, trouver le mot qui correspond à son état d'esprit, “transgenre”, et avancer à tâtons dans cette existence où rien n'est simple et où les gens ne voient les choses que comme ils croient qu'elles sont.
Ce petit roman a la délicatesse d'aborder un sujet sensible en visant un public jeune. Et comme c'est assez rare, on ne peut qu'encourager l'initiative. On suit donc l'histoire en nous glissant dans la peau d'un enfant de 8 ans, avec déjà des questions à la pelle dans la tête, concernant son identité et son genre, et heureusement une famille épatante, qui encaisse la nouvelle avec stoïcisme, non par souci des convenances, mais par crainte de la violence et du refus de la société figée dans ses préjugés. Pour George, “ce qui est vraiment difficile, c'est de faire semblant d'être un garçon”. D'où son acharnement à obtenir le premier rôle féminin de la pièce de théâtre et de balayer de la main les principes de catégories fermées. Le monde n'en est que plus injuste. Pour Kelly, son amie, être une fille revient à porter des jupes, des paillettes et du gloss. C'est un peu exagéré, mais si George a enfin le sentiment d'être bien dans sa peau... pourquoi pas ? Le texte lui-même joue avec l'ambivalence, évoquant George par le pronom personnel féminin (elle), brouillant les pistes et soulignant la frontière floue entre l'être et le paraître, ce qui rend sa lecture pointilleuse et intelligente.
On a là un rendez-vous de douceur, avec un roman qui véhicule un vrai message de tolérance et qui ne doit pas s'excuser de renvoyer une impression de sexisme par l'utilisation de clichés. Les jeunes enfants retiendront essentiellement le cheminement de George dans sa volonté d'être acceptée en tant que fille dans un corps de garçon.
L'école des Loisirs, 2017