Pour l'amour d'une île, d'Armelle Guilcher & lu par Marie-Eve Dufresne
En retournant vivre sur la petite île bretonne où elle est née et a grandi, Marine n'espérait guère un accueil en grandes pompes. Désormais seule médecin sur l'île, elle n'attend pas moins des habitants d'oublier les vieilles rancunes pour lui accorder sa confiance. Or, le temps passe et la résistance persiste. Serait-ce son passé familial qui lui colle à la peau ?
Car Marine a perdu ses parents dans le chaos de l'après-guerre et ne soupçonne en rien les drames et les enjeux autour. Confiée aux bons soins de son grand-père, avec son frère aîné Yves, la jeune fille a roulé sa bosse en toute innocence, mais a vite pris conscience du climat vindicatif sur l'île, avec ses rumeurs et ses jugements hâtifs. Son amie Marie-Anne a justement payé un lourd tribut pour avoir trop parlé lors d'une soirée arrosée, avant de regretter amèrement ses paroles qui vont mettre le feu aux poudres.
Les accusations murmurées deviennent vite un poids à supporter car elles ne dévoilent jamais le fond de leurs pensées. On prend ainsi vite la température qui règne sur l'île, que ce soit dans le passé ou le présent, les bonnes vieilles habitudes ont la dent dure ! Silences pesants, regards en coin, fantômes du passé, trahisons et dénonciations, désespoirs en pagaille, hontes indélébiles...
Ce roman va donc extraire tout le drame qui couvre l'île et forcer les non-dits à se dévoiler. Marine aussi va se confronter à des vérités pas toujours bonnes à entendre, lesquelles vont mettre son cœur à mal et ses émotions à fleur de peau.
Globalement, ce n'est pas une lecture déplaisante dès lors qu'on se tient à fouiller les vieilles histoires de famille et à divulguer leurs secrets. Toutefois, l'histoire a tendance à s'éparpiller et à se complaire dans le sentimental. D'où ma déconfiture. Par contre, si vous raffolez des ambiances isolées, des figures solitaires et des paysages préservés, vous ne serez pas déçus du voyage. Cette petite île bretonne, noyée dans ses brumes et ses courants d'air, procure une sensation de dépaysement vivifiant et donne envie de s'installer pour écouter davantage ce qu'elle renferme.
Très bonne lecture de Marie-Eve Dufresne, très classique et pleine d'élégance. J'aime beaucoup cette comédienne, que j'ai principalement découvert via la Trilogie Joséphine & les Muchachas de Katherine Pancol. On trouve beaucoup de sensibilité, de distinction et de noblesse dans son jeu.
©2015 Nouvelles Plumes / POCKET 2016
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Texte lu par 9 h 48) pour (P)2017 Audible Studios
Quand le destin s'emmêle, d'Anna Jansson
Angelika n'est pas seulement coiffeuse, à Visby, petite ville pittoresque de l'île de Gotland. Elle se sert aussi de son salon pour sonder sa clientèle et composer des couples potentiels en provoquant des rencontres.
Veuve depuis plusieurs années, Angelika compense son vide affectif par la réalisation du bonheur des autres. Et cela lui réussit bien ! Avec son jeune assistant Ricky, elle ne chôme pas pour recruter des âmes esseulées, en quête d'amour etc., et oublie de penser à son bien-être personnel.
C'est en croisant un individu, déguisé sous le profil d'Arsène Lupin, que son cœur va faire boum. Ce bel inconnu lui fait tourner les sens et l'entraîne dans un périple nocturne complètement abracadabrant. Seulement, quelques jours plus tard, c'est la douche froide. Ce gentleman-cambrioleur n'aurait-il pas abusé de son charme pour usurper son titre de propriété ? Car en rentrant chez elle, Angelika surprend avec horreur un inconnu dans son lit. Ce même loustic prétend être le nouveau propriétaire de sa maison !
Un vent de panique souffle sur la paisible communauté de Visby et frappe de plein fouet notre entremetteuse qui ne sait plus à quel saint se vouer. S'ensuit une course folle pour retrouver le bellâtre masqué, tout en maintenant le statu quo dans son salon. Le quotidien d'Angelika se résume à courir après les clients, sauver sa maison, rembourser son crédit auprès de ses sœurs et venger l'honneur de toutes les victimes d'une escroquerie à la chaîne !
Ce rendez-vous ne manque ni de pep's, ni de légèreté, pour qui attend une histoire guillerette et distrayante à souhait. J'ai beaucoup aimé l'ambiance générale, les personnages fantasques, la bonne humeur contagieuse, le tourbillon émotionnel et les petits arrangements faciles, pas forcément prévisibles, avec la vérité. Même le dénouement est bluffant, malgré quelques longueurs pour y parvenir, j'ai au final été grisée par cette invitation généreuse, pleine de fraîcheur et d'allégresse, qui permet de passer un vrai bon moment.
Encore une découverte éclatante au cœur de mon été - une lecture parfaite pour se changer les idées. ☺
POCKET - 2017
Traduit du suédois par Anne Karila
Les Jonquilles de Green Park, de Jérôme Attal
Quel joli roman sur l'enfance - pourtant mise à mal par la violence du Blitz qui chamboule le quotidien des londoniens en cette année 1940 - roman qui parvient à s'extirper du chaos pour nous plonger dans la vie turbulente et facétieuse de la famille Bratford !
L'histoire s'attache avant tout au jeune Tommy, 13 ans. Un chic môme amateur de comics et de Mila Jacobson, la fille la plus formidable de Londres. On suit donc ses folles escapades en ville, souvent avec son pote Oscar, qui vient de Pologne et dont le père a rejoint la Royal Air Force. Tous deux s'échappent de la réalité avec leurs jeux et leurs lectures, craignent un prochain exil à la campagne mais ne s'étonnent plus d'interrompre leur réveillon de Noël pour se planquer dans une cave en écoutant la nouvelle radio de son père. Dans la famille Bratford, on compte aussi un joli panel de personnalités excentriques et attachantes - il y a d'abord le père, qui passe son temps à inventer des choses farfelues, comme un tatou de la taille d'un brontosaure, censé protéger la population des bombardements, son épouse s'en va pédaler en chantant jusqu'à son usine d'ampoules électriques, et Jenny, leur fille de seize ans, est en quête du grand amour, à défaut de rencontrer Clark Gable.
Ce portrait de doux-dingues est coloré, charmant, joyeux et insolite, ce qui rend la lecture radieuse et espiègle. Mais sous l'humour, l'insouciance et la légèreté, on ne traite pas moins des heures sombres de cette guerre effroyable, qui éprouve les familles dans un contexte de sursis. J'ai été séduite par la plume de Jérôme Attal, par son exercice à jongler entre le rire et les larmes, par son hommage voilé à la désinvolture des jeunes années, par sa poésie à chasser le gris des bombes en évoquant les jonquilles de Green Park.
En bref, c'est un roman lumineux, très touchant. Une très belle découverte, lue dans le courant de mon été... d'où mes souvenirs un peu vagues, si ce n'est d'avoir aimé fort, fort, fort. ♥
POCKET, 2017
En poche ! Au-dessus de tout soupçon, de Declan Hughes
Danny et Claire Brogan vivent avec leurs deux filles dans une belle propriété du Wisconsin. Ils y mènent une existence douce et heureuse, selon toutes les apparences. Mais au retour d'un weekend à Chicago - pour y retrouver son amant - Claire tombe des nues en découvrant une maison vide, sans nulle trace de son mari ni de ses enfants, et hurle d'effroi en tombant sur le cadavre de son chien. Lorsque les enquêteurs interviennent, ils trouvent à leur tour le corps d'un ami d'enfance de Danny.
Coup de projecteur sur le passé - à l'âge de onze ans, Danny et trois copains ont incendié une maison avec ses occupants à l'intérieur. Un geste accidentel et malheureux. Et une tragédie qui vient se télescoper sur la famille Brogan, trente ans après.
Au départ, le roman surprend par son style narratif tarabiscoté - humour grinçant, tendance à blablater droit devant, mode sarcastique dérangeant. Cela a rendu mon début de lecture difficile et peu engageant. J'ai finalement passé outre pour connaître le dénouement de l'intrigue, alléchée par une entame franchement très bonne - imaginez une soirée de barbecue assez flippante, des personnages douteux, des secrets longtemps enfouis et une vengeance concoctée dans les règles de l'art. Du suspense, du flou, des meurtres sanguinaires, une jouissance déplacée à tout nous raconter... Un roman surprenant et inclassable, qui se lit avec une curiosité aiguisée.
Traduit par Cécile Leclère (All The Things You Are)
POCKET 2017