Ragdoll, de Daniel Cole
Éprouvé par son enquête contre le Tueur Crématiste, l'inspecteur William Fawkes, alias Wolf, tombe fou à l'énoncé du jugement. Et pour cause... Quatre ans plus tard, le type a une solide réputation de teigne au sein de sa brigade, mais il s'en moque. Car une nouvelle mission l'attend lorsqu'il découvre au pied de son immeuble un magma de corps rapiécés et six victimes à recenser. Un autre tortionnaire dérangé vient jouer avec les nerfs de la police, en diffusant une liste des prochaines têtes à tomber, précisant la date de leur assassinat. En dernière place, se trouve le nom de Wolf.
Annoncé comme le phénomène du moment en matière de thriller, RAGDOLL aurait ainsi pompé Seven et cloné Jack Bauer pour émoustiller le lecteur, c'est dire l'ambition affichée du roman ! Ma foi, j'ai trouvé le rythme efficace, car soutenu et addictif. Par contre, le contenu se révèle plutôt bancal à force d'avoir été calibré exprès pour répondre aux attentes. Les effets de style, le suspense, les rebondissements, le boum final... tout est déjà lu, déjà vu, et on ne bondit plus de notre siège. C'est bien, c'est tordu, on suit l'intrigue avec attention, et on obtient ce qu'on espère. Il n'y a pas de déception là-dedans, juste une absence de surprise.
Techniquement, la lecture de Damien Ferrette pêche en variation. L'écoute est monotone, l'interprétation souvent caricaturale. C'est supportable, mais cela aurait pu être mieux. Conséquence ou pas, je n'ai pas su m'attacher aux personnages - Wolf incarne l'archétype du flic bourru, sa partenaire Emily Baxter serait son amoureuse éconduite, Edmunds un stagiaire très perspicace, et Andrea, l'ex versatile, journaliste aux dents longues, forcément... On a donc un ensemble ordinaire et convenu, avec le dosage évalué au plus juste de séquences fortes entrecoupées de périodes sinueuses. L'enquête s'organise autour de fulgurances assez grossières, mais le tout fait illusion.
And last but not least, William Fawkes will be back.
©2017 Audiolib / Daniel Cole. Éd. originale : Orion Books, an imprint of The Orion. Publishing Group Ltd, an Hachette UK company, Londres. Traduction française : Natalie Beunat pour les Éditions Robert Laffont
Texte lu par Damien Ferrette - Durée : 12 h 24 (P)2017 Audiolib
Ça, Tome 1 de Stephen King
« C'était le clown. Il essayait de se faire passer pour George.
- Exact. Tout comme il essayait de se faire passer pour la momie dans l'histoire de Ben. Et pour le clochard malade dans celle d'Eddie.
- Le lépreux ?
- Oui.
- Mais est-ce que c'est vraiment un clown ?
- C'est un monstre, répondit carrément Richie. Une sorte de monstre. Qui se trouve quelque part ici, en plein Derry. Et qui tue les gosses. »
Au mois d'octobre 1957, dans la ville de Derry, un garçon de six ans, George Denbrough, est tué par un clown qui se cachait dans les égouts. Son frère, Bill, profondément marqué par la tragédie, a rapidement conscience qu'une entité maléfique se terre dans les rues de la ville. Avec ses nouveaux camarades, Ben Hanscom, Eddie Kaspbrak, Stan Uris, Richie Tozier, Mike Hanlon et Beverly Marsh, ils forment le Club des Ratés et vont ensemble partager leurs sinistres expériences, car tous ont été témoins de phénomènes surnaturels inquiétants. Comprenant qu'ils sont les seuls capables d'affronter « ça », ils vont unir leurs forces pour le traquer et l'éliminer. Mais une vingtaine d'années plus tard, leur cauchemar est de retour et le Club des Ratés doit retourner dans le Maine pour achever leur mission.
Grand classique de l'horreur, Ça est aussi un roman effroyablement long et lent, peut-être trop ambitieux, avec ses 1500 pages de lecture (en deux tomes). J'avoue avoir été mise k-o. En optant pour le format audio, téléchargé sur Audible, soit 26 heures d'écoute pour une plongée en enfer, je n'ai pas choisi la facilité non plus. Le jeu d'acteur d'Arnaud Romain est pourtant impeccable, dosant l'intensité dramatique ou émotionnelle aux moments propices. Cela devient vite palpable de réalisme, comme une séance de cinéma, avec l'imagination galopante pour se projeter les images dans la tête. Fichtrement glaçant, c'est sûr. Mais voilà... c'est long, terriblement long. Et je trouve dommage que Stephen King privilégie autant la densité, le cheminement tortueux, la mise en place pointilleuse, etc. pour coller le lecteur à son fauteuil. Résultat, c'est éreintant à suivre, ça casse le rythme, on alterne les séquences au rythme soutenu à des phases de creux, il y a une multitude de détails rébarbatifs, de longs palabres inutiles, des passages graveleux... En bref, c'est passablement poussif et lassant. Un brin déçue, je ne me lance donc pas dans la deuxième partie.
>> Ce livre audio est proposé en exclusivité par Audible et est uniquement disponible en téléchargement.
©1988 Albin Michel & © 2017 ™ Warner Bros. Entertainment Inc. (P)2016 Audible FR
Lu par : Durée : 26 h 26 min / Éditeur : Audible Studios
Les héritiers de la mine, de Jocelyne Saucier
La famille Cardinal, ce sont 21 enfants vivant avec leurs parents à proximité d'une mine désaffectée à Norco, en Abitibi, au Québec. Une tribu soudée, qui ne s'apitoie jamais sur son sort et qui se braque dès qu'on cherche à les jauger. Avec leurs surnoms à la gomme (LesJumelles, Tintin, ElToro, LeGrandJaune, Zorro, Mustang, LaPucelle, Geronimo ou LeFion), les Grands, les Moyens et les Titis ont grandi dans les rêves du père, convaincu de trouver un gisement au fond des mines et assurer leur richesse. En attendant, ils se dépatouillent dans la crasse, la poussière, la misère, malheur à celui qui chercherait à renier ses racines ! Devenus adultes, ils ont pourtant tous pris la poudre d'escampette, ils vivent aux quatre coins du globe et ne se voient quasiment plus. Il a suffi d'une cérémonie spéciale pour leur père, à qui l'on va remettre la médaille du prospecteur de l'année, pour que tous rentrent au bercail. Avec la peur au ventre, le cœur en vrille, la honte chevillée au corps... Car tous savent qu'ils ne pourront plus taire le grand drame de leur vie, à savoir la disparition d'Angèle, l'une des jumelles. Des années plus tôt, celle-ci a péri dans l'effondrement d'une mine piégée par la dynamite. Qui, comment, pourquoi ? Les langues ne se sont jamais déliées, la fratrie s'est désunie et a emporté tous ses secrets. Ces retrouvailles vont donc crever le mensonge qui couve depuis trop longtemps.
J'ai tout simplement adoré ce roman ! Je l'ai commencé en toute innocence, pas très rassurée par le décor qui se dessinait - un cadre rudimentaire et miséreux, avec des mômes en mode survie, qui ne laissent filtrer aucune sensibilité, aucune tendresse. Et bim, cette histoire de famille a finalement eu toute mon adhésion, car au fil des pages, on découvre des non-dits qui ont gangrené la tribu, déjà ravagée par la perte d'une des leurs et à jamais prostrée sur un sentiment de culpabilité. Au détour de leurs résurgences, apparaît la jolie Angèle, “le plus pur joyau de la famille”. Son crime ? Avoir trahi les siens en acceptant les fanfreluches d'un couple désirant l'adopter. Angèle partait en vacances, portait de belles robes, se rendait au collège, mais demeurait une Cardinal convaincue et acceptait les pires brimades et les reproches piquants. L'intensité des sentiments qui animent les frères et sœurs révèle aussi toute la tragédie du roman - l'analyse des émotions et des actes est forte, saisissante et poignante. Le style de l'auteur est également très évocateur, comme une petite musique captivante qui vous entraîne jusqu'au terrible dénouement. C'est dur et brillant. Un petit bijou de finesse et de maîtrise. Je conseille fortement. ♥
Collection Folio (n° 6196) - 2016
Préalablement paru aux éditions Denoël