Shaker Monster #2 : Zigotos incognito, de Mathilde Domecq & Mr Tan
Pour Justin et Gwen, la relation entre frère et sœur ressemble à une perpétuelle partie de taquineries qui se soldent sur d'inévitables chamailleries. Il faut dire aussi que le petit frère n'en loupe pas une pour se mettre dans le pétrin, comme introduire en douce le shaker magique à l'école ! Gwen a les sens en alerte et prédit une mauvaise journée. Bim, cela ne loupe pas, une fâcheuse manipulation plus tard, un monstre dévoreur de livres est en roue libre dans les couloirs de leur école. Panique à bord, le voilà qui se rue vers la bibliothèque où il se met à croquer des rayons entiers sans se soucier du monde alentour. Le plus drôle, c'est qu'à force d'avaler des encyclopédies, notre monstre se transforme en érudit et va changer du tout au tout son comportement !
Ce deuxième tome est toujours aussi réjouissant à parcourir, cf. le tome 1 (Tous aux abris) pour se rafraîchir la mémoire. On retrouve dans cette bande dessinée le pep's, la bonne humeur et le rythme endiablé qui avaient déjà su nous séduire. Cette fois, on croise de drôles d'énergumènes sous forme de monstres bibliovores ! Et malgré leurs bisbilles, nos deux héros doivent encore se serrer les coudes pour que tout rentre dans l'ordre en toute discrétion, mais c'est vite dit, car la situation dégénère en un clin d'œil et les créatures du Shaker Monster ont tôt fait de semer la zizanie.
La lecture est définitivement virevoltante, ça court, ça crie, ça glousse à chaque coin de page. Cela se lit de gaieté de cœur et c'est tout à fait charmant !
GALLIMARD - Collection Bandes dessinées hors collection
Date de parution Octobre 2017
GRUPP, de Yves Grevet
Stan et ses parents tombent des nues en apprenant l'arrestation de Scott, l'aîné de dix-sept ans, soupçonné d'être à la tête du GRUPP. Ce mouvement, constitué de protestataires pacifiques, cherche à s'émanciper de la société LongLife qui a la mainmise sur leur vie grâce à des implants qui gouvernent non seulement leurs pensées et leurs actes, mais qui traquent aussi les moindres faux pas. C'en est trop pour ces jeunes gens épris de liberté et d'indépendance. Ils ont donc choisi de mener leur rébellion en sortant en douce et en organisant des fêtes clandestines, tout en dessinant des graffitis sur les murs. Rien de méchant, jusqu'au jour où un des garçons de la bande décède accidentellement. Scott est envoyé en prison, sa famille est effondrée. En premier lieu, son frère Stan cherche à comprendre et à obtenir des réponses. Il fouille, il piste, il enquête sans relâche. Par contre, il sent également le danger poindre. Des individus lui collent au train, s'introduisent dans la maison et envoient des messages de mise en garde. De son côté, Scott se ferme comme une huître et refuse de parler à ses proches. Sa vie en prison est un enfer. Et malgré une libération anticipée, le garçon est marqué à vif et n'est plus que l'ombre de lui-même.
C'est toujours grisant de plonger dans un roman de Yves Grevet, car on ne sait jamais d'avance ce qui nous attend. Cette fois encore, le rendez-vous a été à la hauteur des espérances - ce sont 520 pages d'une densité époustouflante. On se glisse dans un monde d'espionnage et de suspense en tâtonnant à l'aveugle. C'est lent, c'est bon, c'est excitant. On ne pressent rien des pistes à venir, on explore et on goûte à toutes les éventualités d'une intrigue rondement menée. Car, de fil en aiguille, le lecteur se remet en cause et étudie la perspective d'un avenir qui prône la sécurité au-dessus de la liberté. Du Yves Grevet pur jus. Avec sa construction minutieuse, ne laissant rien au hasard, le roman nous absorbe donc avec avidité et nous entraîne dans un dédale de décryptages autour d'une organisation secrète et d'une société ultra sécuritaire. Les clans s'opposent, les enjeux aussi. Très bon point pour cette lecture riche et pénétrante !
Syros, 2017
Pour rappel, Yves Grevet est notamment l’auteur de Méto et l'un des auteurs de la série U4 (Koridwen). Les thèmes qui traversent ses ouvrages sont les liens familiaux, la solidarité, la résistance à l’oppression, l’apprentissage de la liberté et de l’autonomie. La trilogie Méto, qui l’a fait connaître, a été récompensée par 14 prix littéraires.