Je ne suis pas un auteur jeunesse, de Vincent Cuvellier
Vincent Cuvellier aime bien, de temps en temps, faire le point sur ses débuts, son métier, son parcours, son style, ses envies (cf. La fois où je suis devenu écrivain). Et plus largement sur la littérature jeunesse, son manque d'estime, sa faible rémunération, son circuit, ses branches, sa morale...
Il l'exprime à sa manière, simple et décomplexée, racontant ici sa vie dans les salons ou les salles de classe, avouant parfois son ras-le-bol ou ses frustrations, reconnaissant ses attentes ou ses doutes. Évoquant enfin son horizon, comme explorer davantage la période de la Seconde Guerre mondiale “parce que son souvenir s'estompe, il faut l'accepter” et néanmoins continuer d'en parler “sans pathos, sans chantage affectif, sans grandes phrases toutes faites”.
C'est donc un Vincent Cuvellier caméléon qui se livre : à la fois le joyeux drille qui raconte ses petites histoires rigolotes, avec des gros mots et des idées folles à l'intérieur, mais aussi le type touchant et attachant, aux émotions qui se barrent dans tous les sens, le cowboy solitaire qui assume ses défauts, l'écrivain qui a fait son chemin et qui pense à son papa pas peu fier de son cancre attitré.
En bref, tout ce qu'on lit est infiniment intéressant (sur la prescription, le monde éditorial, les fonds publics, la transmission etc.). On est d'accord ou pas avec lui, mais on apprécie grandement son honnêteté et son authenticité. Car pour finir, c'est aussi une lecture qui prête à sourire, où l'on se rend compte que Vincent Cuvellier n'est pas tout seul dans sa tête - hello Claude François, Lino Ventura ou tiens ! le général de Gaulle himself... Et c'est justement cette petite touche d'impertinence qui fait la différence.
En bref, on pioche copieusement des envies de lecture ou de relecture dans cet exercice de style réjouissant !
Gallimard jeunesse Giboulées (2017) - illustrations de Robin