Le Village des Monstres, de Hélèna Villovitch
Chaque lundi matin, un petit groupe d'enfants s'apprête à monter dans le mini-bus pour se rendre à l'école... qui se trouve à un kilomètre du village. Les parents redoublent d'indications à la prudence, couvrent leurs mômes et confient au chauffeur la prunelle de leurs yeux. Ils seront de retour à la maison une semaine plus tard, car tous doivent dormir sur place.
C'est ensuite au couple des Cormoran de prendre la relève en les bichonnant avec leurs plats préférés, en veillant à ne leur lire que des contes où tout finit bien, à éviter tout effort physique épuisant. Nos jeunes amis vivent sous cloche et s'en portent assez bien. Du moins, c'est avant que Bichon s'emporte contre ce voile cotonneux qui les enveloppe. Ce n'est plus possible de vivre dans l'illusion d'un monde sans heurt. Il se murmure même que les vraies histoires, lues le soir avant de s'endormir, sont beaucoup plus féroces : ils n'ont d'ailleurs jamais entendu l'existence du loup dans Le Petit Chaperon rouge ou de la sorcière dans Hansel et Gretel !
La bande se rebiffe et décide de retourner au village en pleine nuit pour découvrir ce que trafiquent leurs parents. A-t-on idée de se débarrasser de la marmaille en habitant si près ? Mais ce que nos enfants vont découvrir risque fortement de les glacer de terreur.
Choc traumatique droit devant. Cela va secouer votre imagination la plus débridée !
En fait, ce petit roman est extra car il vous embarque au-delà des limites de la simple divagation. C'est très, très drôle en plus d'être efficace. Votre esprit carbure à mille à l'heure à spéculer ce qui se trame dans cette étonnante histoire.
Le tout est bien troussé, malicieux et illustré avec tendresse par Lucie Durbiano. La mise en scène est soucieuse des détails et joue habilement avec les codes du suspense et de l'épouvante. Vos enfants vont frémir sous leur couette : franchement top !
bayard jeunesse (2018) - illustrations de Lucie Durbiano
Marabel et le Livre du Destin, de Tracy Barrett
Marabel est une jeune princesse qui a toujours eu conscience de son rang : vivre dans l'ombre de Marco, son frère jumeau. Même le Livre du Destin, qui dicte la politique du royaume de Magikos, est sans équivoque car il ne cite jamais son existence.
N'imaginez pas que notre jeune héroïne cultive une amertume à ce sujet, loin de là. Elle n'est soumise à aucune contrainte, mène une existence tranquille et entretient de bonnes relations avec ses proches. D'ailleurs, tous ont à cœur de célébrer leur 13ème anniversaire dans la joie et la bonne humeur. Cette cérémonie doit également sacrer l'Élu et consolider le Royaume de Magikos.
Malheureusement, la fête va sombrer dans le chaos, alors qu'un sortilège est lancé pour figer les convives et détourner leur attention. Marco est kidnappé sous les yeux de sa sœur, laquelle décide de voler à son secours.
En fait, notre demoiselle prend des leçons d'escrime en cachette et a du courage à revendre. Elle a soif d'action et de liberté, fonce droit devant en compagnie de sa servante, Ellie et de Floriano, une licorne capable de parler. Ensemble, ils vont s'aventurer hors des murs de leur cocon douillet, traverser une forêt hanté par des ogres, des trolls, des Monstres...
Franchement, cette lecture est un enchantement de péripéties en tous genres : un croisement entre le conte de fées et la comédie burlesque. C'est étourdissant. On passe un assez bon moment (j'ai un petit souci avec le rythme de cette histoire) et on se déconnecte du quotidien le temps de picorer ce livre qui s'adresse à « tous ceux qui ont le courage de créer leur propre destinée ».
Très positif et entraînant.
bayard jeunesse (2018) - traduit par Emmanuel Plisson
titre VO : Marabel and The Book of Fate
couverture illustrée par Sara Gianassi
Ensemble à minuit, de Jennifer Castle
À peine rentrée d'un semestre en Europe, Kendall traîne sa valise jusqu'à New York, chez son frère, pour réfléchir à son avenir. Elle a également donné rendez-vous à Jamie en espérant recoller les morceaux avec lui : six mois plus tôt, le garçon lui a fait comprendre qu'il n'avait aucun sentiment. Néanmoins, il n'a cessé de correspondre avec elle durant son voyage à l'étranger. Chemin faisant, elle retrouve Max, un ami de Jamie, qui séjourne chez son grand-père avant de se décider pour ses études. Max et Kendall ont déjà échangé un baiser l'été dernier. OK. Là je vous perds, mais moi aussi j'ai cru avoir loupé un épisode. Contentez-vous de suivre (la lumière) le mouvement, imprégnez-vous de l'ambiance, c'est tout ce que je peux vous conseiller. Car Kendall et Max sont témoins d'une dispute dans la rue : un type bouscule sa copine qui chute sur la chaussée, renversée par un bus. Les deux jeunes gens sont tétanisés et choqués de n'avoir rien pu faire. En se lamentant dans un café, la serveuse les accoste en leur proposant un défi : accomplir sept actions totalement détachées d'ici le 31 décembre. Kendall et Max s'y soumettent et vont ainsi passer les cinq prochains jours ensemble à déambuler dans les rues new-yorkaises, sous la neige, à la rencontre d'anonymes qu'ils vont secourir par des petits gestes, des attentions anodines mais non négligeables. En partant du principe que l'histoire laisse place à l'errance, la délicatesse et la bienveillance, il n'y aura absolument aucune déception à la clef. C'est un roman d'une grande douceur et empreint d'émotion... autant le dire. Par contre, j'espérais aussi un peu de magie dans cette histoire (très brouillonne au début) : des personnages vont et viennent, parfois sans grande utilité. Les relations de couple aussi sont très confuses et n'inspirent pas systématiquement une grande empathie. Ceci dit, je n'ai pas boudé mon plaisir à me perdre dans New York en cette saison festive et hivernale. La lecture invite à se poser et à réfléchir sur nos choix de vie. C'est plutôt bien vu et réconfortant.
Casterman (2018) - Traduit par Alice Delarbre
Titre VO : Together At Midnight