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Chez Clarabel
16 novembre 2007

Faites du bruit pour Kiki !

C'est un mélange de bonheur, gratitude, frustration et peur panique qui se mêle à vos émotions lorsque vous recevez une petite demande gentillette de l'irrésistible Kiki qu'on ne présente plus ...

Une Kiki redoutable et qui sait soudoyer non pas la lectrice mais la fille avec des étoiles dans les yeux, celle qui se pâme devant les sans-façons d'une certaine actrice aux initiales doubles ...

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I wanna be loved by you, semble me sussurer son livre ... Car oui notre délicieuse Kiki vient de publier son deuxième livre, un livre en quête de lecteur(s), me glisse-t-elle sans rougir. Alors moi, oui moi qui suis un être doué d'une grande gentillesse et d'une compréhension sans bornes (oui, c'est la fête des fleurs !), je ne sais pas résister, je ne me vois pas refuser une demande si sympathique de la non moins facétieuse Kiki ! ...

C'est l'une des principales caractéristiques de Christine Spadaccini, pour la présenter plus sérieusement. D'emblée, la dame qui s'est faufilée entre les commentaires de ce blog, sous le pseudo de Kiki, a su gagner mon coeur et mon affection car elle me paraissait toujours espiègle, virtuose et toujours avec le mot pour rire ou pour adoucir un moral en berne... C'est bien son truc, d'avoir toujours sous le coude le mot adéquat, qui fait mouche et qui touche. Comment elle fait ?

Cette chère Kiki a donc son petit monde, son univers tout aussi rose (les murs peints aussi joliment que chez moi, ça compte !!!) et que vous pouvez (re)découvrir à cette adresse : http://christinespadaccini.hautetfort.com/

Chez elle, j'ai toujours l'impression d'être dans une ruche où ça grouille de belle énergie, d'échanges vivants et de jolis clins d'oeil d'amitié. La reine Kiki a une conception de l'écriture qui est juste et étonnante, une dévotion pour les écritures qui crient leur amour des mots mais, décomplexés, savent en jouer, à la fois les sublimer et les malmener, comme autant de célébrations païennes à un éternel poétique...

Forte d'une telle déclamation, je me doutais que lire son livre allait avoir un effet dévastateur, et j'en ai pris plein mon grade ! C'est pas malin... Cette Kiki m'apprend ainsi qu'elle sait faire mal, qu'elle sait bouleverser et envoyer un uppercut rien qu'avec des mots ! Ah, c'est vraiment pas malin ! (bis) ... Et je me sens comme une quiche parce que je n'arrive pas à évoquer ce livre dans son fond, à fouiller ce qu'il vous propose et à vous donner une lueur d'envie (dites ... ça vous émoustille, n'empêche ?). Parce que c'est un livre qui parle d'un tas de choses, et qui vous embrouille parce que, justement, les pistes deviennent vite nombreuses et embrouillées. C'est fait exprès, cela va sans dire ! ...

On dit de ce livre ... Entre le début et la fin, il y a ce fil tendu : le fil de la vie. On fait ses premiers pas, funambule timide, une ombrelle fragile entre les mains, faite de rêves et d'espoirs. Mais l'exercice est périlleux. Souvent, on hésite, on tremble, on flanche, on bascule, on se rattrape in extremis. Et on tombe aussi. Parfois il y a un filet. D'autres fois non. Chaque pas compte. Chaque pas est le premier. Chaque pas peut être le mauvais. On croit savoir. On avance. On ne sait rien. On avance. Sur le fil, toujours. De l'horizon, en rêvant. Du rasoir, en se coupant. De l'histoire, en survivant. Les protagonistes des treize récits rassemblés dans ce recueil tentent de garder l'équilibre sur ce fil cassant. Ils se croisent, s'aiment, s'ignorent, se cherchent, se percutent, se blessent, se frôlent, s'interrogent. Tombent. Se relèvent, une fois, deux fois, dix fois, ou pas, artistes fragiles du quotidien qui se cherchent un but, un horizon, une réponse, une raison... Existe en ciel.

existe_en_ciel

Moi qui ne suis ni une funambule et qui souffre atrocement du vertige, je n'avais qu'une issue en me plongeant dans ce livre : c'était d'avoir le tournis. J'ai eu beau avoir le ricanement bête et le grincement facile à l'évocation d'amours salopées, de murs bleus et de k-way nommé désir, de lire le blog de Carmina Burinée et d'en tirer un sadisme épouvantable ( ... ), je pense toutefois que rien n'aura plus d'impact que la lecture du rat de Laura et que son sujet du désir d'enfant aura raison de moi ! Entre les barquettes Lu et Axel Bauer, non merci ... j'ai le coeur au bord des lèvres. Quelle histoire ! Mazette, ça vous chamboule plus que de raison !!!

La Kiki a l'esprit retors et jouissif à vous tirer les vers du nez, non ce n'est pas ça ! en fait, elle est simplement heureuse de vous attirer jusqu'à elle et de vous faire mariner dans son jus. C'est un succès pour elle, un bonheur inavouable ... mais pourtant un crime reconnu !  ;o)

« Vous me lisez, je vous dépouille, ouille, couinez pas, ce ne sont que quelques instants, vous-même faites ça tout le temps avec les autres, allez t'as bien cinq minutes ! Non ? Oui, c'est vrai, le principe est terroriste et vous, mes victimes, innocentes. Allons donc, on est tous des bouffeurs de temps, du berceau au déambulateur. Des voraces. Mais y'en a des plus rapaces. Et des plus ingrats. Je prends la monnaie de ma pièce, c'est tout. Mon piège fonctionne à merveille même si y'a des trucs que je ne peux pas trop maîtriser dans cette technique à la pointe du crayon... Je sais quand j'amorce mon engin de guerre, une petite histoire avec de bons sentiments leurres pour vous appâter, Viva Za-pâte à papier, c'est ma tactique. Par contre, j'ignore quand vous allez mettre le pied sur la mine et vous perdre dans mes pirou-lettres de graphite. Ça peut durer très longtemps, c'est de l'éditeur ensuite que dépendent lesdites heures qui s'écouleront entre le moment où j'aurais pleuré ces lignes et celui où je viendrai éponger le temps que vous passerez à les lire pour ma petite cagnotte...De l'éditeur qui a un coup de coeur et vous met une couverture toute belle toute chaude sur le dos pour aller affronter ce monde glacial dans lequel on se retrouve catapulté, marché du livre (...). On est nombreux sur les rangs des étagères à vouloir sortir du néant et à concourir pour votre temps, votre argent, ce qui, paraît-il, revient au même. Bref, mettons que j'arrive enfin à vous, mon livre entre vos mains, vous ouvrez, vous lisez, j'encaisse ! Cash à la lecture et parfois même un petit paiement différé pour les pensées que vous accorderez à mon histoire, plus tard, si elle était bien ficelée... Ne soyez pas trop triste, vous n'avez pas tout perdu puisque, en échange, je vous file un bonus, la recette de ma grand-mère. Elle aussi prenait le temps. De s'occuper des autres. Et ça, vous verrez, ce n'est pas de la tarte... »

Existe en ciel, par Christine Spadaccini - Editions MiC_MaC - 170 pages.  16,50 €

Dans ma grande mansuétude, j'envoie ce livre à la première personne qui le demande ! !  :))

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6 novembre 2007

Court, noir, sans sucre - Emmanuelle Urien

court_noir_sans_sucre_2Ce n'était pas une surprise pour moi, lire Emmanuelle Urien après avoir déjà découvert son récent livre "La collecte des monstres" était une continuité depuis ma grande satisfaction de son univers noir, cynique et tout de même délicieux (pour ne pas dire, jouissif) !

Sa signature est de parvenir à lâcher le coup de guillotine en fin de nouvelle, même si généralement la chute est sans surprise et attendue. Cela reste étonnament scotchant, époustouflant et cela vous tire des hoquets d'angoisse et d'horreur. Bah oui ! la demoiselle ne fait pas la fine bouche, elle vous triture votre conscience et votre âme en paix sans vergogne. Avec ses petites histoires qui ne font de mal à personne, en toute apparence, l'auteur parvient insidieusement à créer le doute, à révéler la laideur mais sans jamais soulever des bouffées d'aversion.

C'est vicieux, distillé en 13 nouvelles plutôt courtes. C'est tranchant, indécrottablement noir et vraiment sans sucre ! Le petit goût d'amertume qui se glisse hors des lignes de ce livre est imperceptible, piquant mais indolore ! Serait-ce alors de l'insensibilité, du sadisme et l'attirance vers l'innommable ? Oh non, c'est juste la reconnaissance d'un talent hors pair, d'une griffe nette et assassine. C'est un mélange d'humour grinçant, de cynisme et de cruauté bien placée. Cela peut déranger, mais ce serait bien dommage de se passer de cette touche qui ne fait pas dans la dentelle !

Commencez donc par ce livre, "Court, noir, sans sucre", avant de vous jeter sur "La collecte des monstres" (qui reste, pour moi, meilleur et plus vif que celui-ci !). C'est dire le potentiel de la jeune demoiselle ! ... A suivre.

court_noir_sans_sucreL'être minuscule, 118 pages.  11 €

www.letreminuscule.com

Prix de la Nouvelle du Scribe

Place aux Nouvelles - Lauzerte 2006

www.emmanuelle-urien.org

Ceci est un livre-voyageur ... Pour vous inscrire, sonnez la cloche chez Fashion Victim !

D'autres lectures (Flo, Jo Ann, Cathulu)

Le lien de Fashion : http://happyfew.hautetfort.com/archive/2007/10/07/contes-cruels.html

10 septembre 2007

Ils s'en allaient faire des enfants ailleurs ~ Marie Ange Guillaume

La narratrice a une façon bien à elle de décrire la débandade des hommes de sa vie : "ils s'en allaient faire des enfants ailleurs". Ainsi soit-il ! Depuis sa petite enfance, cette jeune femme avoue un appétit d'ogresse pour les amourettes, cela lui a pris très jeune, pendant l'été, à la colo. Et son parcours n'a jamais cessé d'être parsemé de rencontres, d'envies d'y croire, de culbutades d'un soir, de tromperies et autres illusions sentimentales. Les hommes, c'est simple, n'ont jamais cessé d'être cette engeance indispensable dans son existence ordinaire, mais fuyante, lâche et fielleuse. "Les hommes avaient l'air vivants, forts, taillés dans une matière crédible (...) Ils m'aimaient à leur manière, ils en avaient les larmes aux yeux, mais ils ne pouvaient rien pour moi". Déjà la figure du père est égratignée, quel est-il cet homme qui part un matin avec la boulangère, en laissant ses livres et ses Mozart ?... Tous les mêmes, finalement.

En bref, le tableau de chasse de cette croqueuse d'hommes est impressionnant. Le livre est un court condensé de ses expériences en 110 pages, sur des chapitres filiformes et elliptiques. Cette boulimie d'aventures donne le tournis, mais c'est la conclusion de cette série qui fournit une tentative d'explication et clame l'indulgence. Cette jeune femme, donc, est une victime, une forcenée de l'amour, ni plus ni moins naïve : "je regarde cette agitée, cette affamée, avec toute l'affection qu'elle mérite. Elle m'amuse. Et c'est un peu grâce à elle, si je suis heureuse. Elle m'a fabriqué des souvenirs. Vu de loin, tout en vrac, il n'y a pas que du grandiose, mais l'essentiel y est, entre les lignes, entre les nuits : un bruit sourd, fragile et obstiné, comme un battement de coeur dans ta poitrine". Drôle et cocasse, ludique et coquine, cette narratrice a finalement su s'en tirer par une belle révérence. Et puis, si l'on revient à la dédicace du roman, elle l'a trouvé son amour : l'homme de la page 70 !

septembre 2006

3 juillet 2007

Zoo - Marie Darrieussecq

zoo"Zoo" est un recueil de nouvelles publié courant 2006, mais les 15 textes de son sommaire ne sont guère des épreuves originales car ils ont tous déjà été publiés dans des magazines ou des collections. Inutile de penser que Marie Darrieussecq va au casse-pipe, tout au contraire ! Le style de la nouvelle est un genre qui lui convient parfaitement car c'est véritablement dans la forme courte que son univers alambiqué prend un sens tout à fait cohérent !

Bien entendu, on aborde dans ces histoires le thème du fantastique, des fantômes, du clônage aussi ; et pourtant ce n'est jamais rébarbatif. J'avoue même que certaines nouvelles m'ont scotchée, comme "My mother told me monsters do not exist" et "La randonneuse". Si lire du Edgar Allan Poe vous file quelques frissons, vous pouvez donc sans attendre vous précipiter sur ces deux titres !

Naturellement, il y a deux, trois nouvelles absconses. Marie Darrieussecq ne serait pas ce qu'elle est si on échappait à ses sempiternelles turpitudes sur les sciences inexactes, les théories fumeuses et les délires quasi incompréhensibles. Bref, il faut bien en passer par là, peut-être est-ce aussi la signature d'une carrière débutante, certains textes ont été écrits vingt ans auparavant, bien avant son premier roman "Truismes", et ont servi à la genèse de celui-ci.

Autre chose qu'on ignore sur cet auteur, c'est qu'elle est plutôt drôle et très originale. Dans "Le voisin" elle raconte l'histoire du voisin de John Lennon qui vit cette cohabitation comme un enfer, à tel point qu'il prie pour qu'un malheur survienne et que son quartier retrouve sa tranquillité. A plusieurs reprises, également, M. Darrieussecq explore le sentier de l'érotisme, affiche son féminisme et étale un discours honnête sur la sexualité des femmes et des genres (cf. Célibataire et Simulatrix, par exemple). J'ai également éprouvé beaucoup d'attachement pour l'histoire de "Plage" et "Noël parmi nous" qui offre une chute particulièrement troublante. Et le dernier texte "Encore là" a été publié dans "Naissances", un livre que j'ai déjà recommandé. Ce sont 8 femmes écrivains qui prennent leur plume pour narrer l'expérience bouleversante de la maternité.

Pas de bouleversement dans "Zoo", mais un bon moment sympa à partager. Avec des découvertes très intéressantes, aussi. Le fait que ces nouvelles soient étalées sur les années révèle également une qualité inégale mais confirme la bonne santé de l'écriture de la dame Darrieussecq !

POL - 250 pages.

29 juin 2007

La petite fille brune (et autres nouvelles du Sud) - Elizabeth Spencer

la_petite_fille_brune_brocheC'est suite à la récente découverte de Kaye Gibbons, grande voix de la littérature américaine, que j'ai choisi de lire ce recueil d'Elizabeth Spencer. A son tour, elle est présentée comme s'inscrivant dans la grande tradition de la littérature du Sud, entre Faulkner et Flannery O'Connor, bien qu'elle ne bénéficie pas de la même notoriété. Avec ce recueil de nouvelles, il est donc permis de mieux apprécier l'univers de cette dame âgée de 80 ans, qui nous présente une société du Sud des USA du temps où ses histoires furent écrites, dans les années 60, il me semble.

Ce sont donc six nouvelles qui sont au sommaire, des courtes et des plus longues, comme "Ship Island" ou "L'entreprise". Le point commun entre ces deux nouvelles est cette impression de décrire un milieu, celui de la bonne société, qui est un cercle fermé et sûr de ses goûts, mais où on introduit un petit grain de poussière pour enrayer la machine. Dans "Ship Island", c'est la liaison d'un beau parti avec une jeune fille de condition inférieure, et dans la deuxième on y croise un groupe d'amis qui "respire à l'unisson" et qui a les mêmes réactions, les mêmes idées, etc. Du moins, c'est ce qu'ils pensent, car l'association de Nell Townshend avec un employé noir va fissurer de toutes parts cette belle façade. La question raciale est le principal thème de cette histoire, qui est foncièrement la plus réussie du recueil.

J'ai beaucoup aimé l'ensemble, de toute façon. Essentiellement parce que le style d'Elizabeth Spencer est très élégant, très gracieux et laisse à penser à du Edith Wharton ou du Henry James. L'auteur prend aussi beaucoup d'inspiration dans la prise de conscience qui guide les personnages, il y a finalement une action lente et beaucoup de mystères derrière les faits. "Ship Island" est un bon exemple, "La petite fille brune" également. La petite Maybeth se persuade de croire que l'employé de ses parents, un certain Jim Williams, a une fille de son âge qui souhaite devenir son amie. Toutefois elle a honte de sa pauvreté. Maybeth donne alors de l'argent à Jim pour lui payer une belle robe jaune, tout en n'ignorant pas que Jim a la réputation d'être un ivrogne invétéré. Jusqu'au bout, tout comme Maybeth, le lecteur se demande qui dit vrai, qui dit faux...

la_petite_fille_brune_pocheLe gros souci de cette lecture reste donc cette immense frustration qui frappe le lecteur. Parfois cela manque de clarté, parfois le ton mystique pénalise l'enthousiasme et parfois c'est un peu trop court (cf. Une éducation chrétienne, où la fillette découvre un monde nouveau, interdit par les parents, mais ouvert grâce au grand-père qui s'en moque !). Toutefois je ne regrette pas du tout cette découverte ! Je pense me diriger davantage vers un roman la prochaine fois, pour mieux apprécier cette plume qui s'exprime franchement dans la longueur. On parle d'humour et de lucidité, à propos des héroïnes, mais cela convient également aux histoires. Un livre plus attachant qu'on ne le pense !

242 pages - Publié au Quai Voltaire en 2003 - Disponible en format poche chez Folio depuis Avril 2006.

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12 juin 2007

Petites soupes froides ~ Helena Villovitch

Le truc de Hélèna Villovitch, c'est ça : "J'ai peur qu'elle se moque de moi. Qu'elle parle de moi dans un de ces trucs qu'elle écrit, où il paraît qu'elle se contente de raconter les histoires de ses amis, sans leur demander leur avis et en donnant les vrais noms." Ainsi s'expriment les craintes du narrateur d'une des nouvelles de ce dernier recueil de H. Villovitch, "Petites soupes froides". Ce narrateur de "L'autodidacte amoureux" a parfaitement raison : Hélèna Villovitch adore raconter ses amis, ses amours, ses aventures désopilantes et parfois navrantes. En un ingénieux tour de main, elle va étaler tout ce qui l'entoure : l'emménagement d'une jeune actrice de cinéma très connue dans le même immeuble, ses tenues uniformes et monochromes, la liaison amoureuse d'une amie avec un jeune chauffeur de taxi allemand, qui débarque à Paris et harcèle au téléphone, sonne à la porte et s'endort sur le paillasson, ses essais de cinéma expérimental, la recherche d'emploi de son amoureux, tout ce qu'elle sait à propos de tout et essentiellement de rien, et son sagace avis sur Loft Story seconde saison... Bref, un melting-pot d'histoires, treize au total, savamment dosées à la sauce piquante, d'une écriture toujours mutine... Ce qui me fait penser que Hélèna Villovitch est un joyeux cabri qui sautille allègrement. L'auteur est un personnage déjà faramineux : excentrique, fantaisiste et qui pense que "Stéphanie de Monaco et moi avons des destins parrallèles" (et d'en illustrer sa superbe démonstration par A+B ).
"Petites soupes froides" reprend le même procédé que "Je pense à toi tous les jours". Un cocktail dynamique, qui sonne un peu moins spontané que la première fois, mais ça n'en demeure pas moins plaisant.

juin 2004

17 mai 2007

Pour qui vous prenez-vous ? ~ Geneviève Brisac

L'influence anglo-saxone est grande dans le recueil de nouvelles de Geneviève Brisac ! Tour à tour les ombres de W. Auden, Virginia Woolf, Isabelle Archer et Henry James survolent ces pages au léger goût de soufre. Geneviève Brisac écrit le désespoir, la douleur et la presque-folie. Ses personnages valsent de nouvelles en nouvelles, d'une page à l'autre on les retrouve transportés dans d'autres histoires et états d'âme. Car Geneviève Brisac nous parle de ces choses simples et tranchantes: la peur de voyager, la peur de mourir, la peur de ne plus aimer ou être aimé. En onze nouvelles, elle plante son lecteur dans ce décorum qui laisse parfois perplexe, enchanté ou cynique. L'auteur a une plume vive et incisive, elle nous transperce ainsi que ses personnages de papier. La narratrice est soit fâchée de ne pouvoir ouvrir une fenêtre dans un taxi pour cause d'air conditionné, s'offre des vacances et rencontre une gardienne qui jure de venger sa soeur battue par son compagnon, ou tremble de perdre l'homme qu'elle aime et qui se noit sous ses yeux, s'envole en Louisiane pour des vacances d'envers du décor ou à Cancun en compagnie d'un cercle de poètes qui sentent la bière et l'huile solaire... Le monde de Geneviève Brisac n'est pas édulcoré, tout est souvent sinistre et railleur. Ils s'appellent Max, Gerbert, Melissa Scholtès, Mélinée ou Madame Archer. Ce sont des êtres qui souffrent (en silence), qui frisent la folie ou le désespoir. Ils témoignent d'une société qui vote l'inconscience, téléphone par mobile, part skier près d'un pays en guerre ou part un week-end à la campagne. Au fil des pages, la narratrice, aidée par l'auteur très en verve, regarde le monde et nous ouvre les yeux. Avec elle, on sent la honte de la puérilité, le trouble de la mort et on regarde ces oiseaux noirs de malheurs : les corbeaux. ("C'est l'un des animaux les plus proches de l'être humain. ça les rend intelligents, névrosés, cruels, intéressants, tendres aussi.") Le livre de Geneviève Brisac est tout ça aussi : tendre, violent, intelligent et attachant. La lecture n'en laisse pas moins perplexe mais "Pour qui vous prenez-vous?" recèle un charme indicible, un peu poète et beaucoup désespéré. "Dans l'eau, je me suis mise à pleurer sans crier gare. Des litres de larmes dans des litres d'eau. Les larmes faisaient des trous dans la mousse, comme des puits creusés par des puces de sable, par des lombics. Des tunnels de larmes pour aller nulle part."

mai 2004

12 mai 2007

Mariés, pères de famille ~ Tatiana de Rosnay

L'auteur nous met en garde: l'époux est une espèce à surveiller scrupuleusement ! Celles qui se sentent en sécurité et sûres d'elles, eh bien méfiez-vous !! Qu'ils soient bons pères de famille, maris exquis et charmants, tous succombent au démon de midi. L'âge n'a pas d'importance, la situation sociale non plus. Dans son recueil de nouvelles, Tatiana de Rosnay brosse le portrait de couples confrontés à l'adultère. Son message est clair : il n'y a plus de morale, les maris trompent leurs femmes, sans exception.
Fichtre ! Autant en ricaner, plutôt qu'avoir des frissons dans le dos !.. Onze nouvelles pimentent "Mariés, pères de famille" (roman d'adultères). Onze histoires placées sous le signe de l'humour grinçant et sur la dérision. Interrogée, l'auteur s'explique: "Une dizaine de femmes découvrent qu'elles sont trompées. Leurs points communs : elles sont jeunes, 30 ans, sont mariées depuis moins de 10 ans, et ont des enfants. Sinon, elles sont toutes différentes, par leur milieu social, leur métier, et surtout leur façon de réagir à l'adultère de leur mari. C'est cette réaction qui m'a intéressée et qui constitue le pivot du livre."
C'est finement écrit, analysé et conduit. Amenées par de pertinentes citations, toutes les histoires laissent un goût doux-amer. Souvent prévisibles et cocasses, les nouvelles de "Mariés, pères de famille" restent effarantes. Un cauchemar pour certaines, un bon plan de rigolade pour d'autres. C'est un livre qu'il est préférable de lire au lieu d'en être acteur !

mai 2004
Merci l'auteur pour ce cadeau.

8 mai 2007

Des créatures obstinées - Aimee Bender

des_creatures_obstineesJe ne vais pas vous mentir mais les 15 nouvelles d'Aimee Bender sont étranges, tordues, elles flirtent avec le bizarre, l'irrationnel, le fantastique et la folie. Oui, c'est presque absurde (un individu va acheter un petit homme dans une animalerie, ou un couple à tête de citrouille a un enfant avec une tête de fer à repasser, et une femme ouvre chaque matin sa porte à 7 pommes de terre fidèles au rendez-vous et qui grandissent avec des ongles, des pieds, des paupières, etc...).
"Des créatures obstinées" sont décrites comme baroques, sexy et inquiétants, des contes cruels et fantaisistes.
Ah je me doute que vous n'êtes guère convaincus par un sujet un peu tiré par les cheveux. Alors l'argument imparable est cette plume légère et sibylline qui donne le sentiment de glisser et qu'on lit sans peine, avec délectation, et trop vite presque !
Bien entendu, on sort très souvent des chemins de l'ordinaire, mais cela fait partie de l'humour, c'est le signe d'un acte de courage même et cela nous renvoie à un sentiment humiliant sur notre société insolite. L'extravagance d'Aimee Bender parvient aussi à être "raisonnable", comme pour cette jeune femme invitée à une fête où elle décide d'embrasser trois hommes : un brun, un roux et un blond. Elle finira dans un placard sous une pile de manteaux, un peu plus éperdue mais chichement émouvante.
Non mais, je crois que c'est cette singularité qui est fascinante, servie par une excellente plume, traduite par Agnès Desarthe. Alors pour un dépaysement assuré, plongez votre nez dans ce livre !  Cela s'appellerait même de l'audace !

Editions de L'Olivier, 188 pages  (mars 2007)

7 mai 2007

Le cheval impossible - Saki

cheval_impossible"Le cheval impossible" est un fort appétissant plat principal qui regroupe 39 textes parmi les nouvelles écrites par le prolixe Saki, encore un digne représentant de cet humour anglais qu'on ne présente plus ! Comme bon nombre de ses pairs, Saki avait le sens de la formule, propre, lisse et élégant, et savait déployer un humour jubilatoire et mordant.
Parmi ces textes où la pédanterie se dispute à la dérision, Saki présente deux personnages imparables : Reginald (qu'on suit dans 14 péripéties), cruel dandy héros qui pourfend par le sarcasme la société mondaine édouardienne, pétrifiée dans les conventions, à laquelle il appartient pourtant de toutes ses fibres, et son jumeau Clovis, jeune homme de la bonne société britannique, oisif, insouciant, portant sur tout ce qui l'entoure un regard subtilement cynique. (présentation de l'éditeur)
Beaucoup de cynisme, certes, accompagné d'un humour ravageur, bref Saki offre à vos heures de blues un bien bel échappatoire et une porte ouverte aux éclats de rire !

De quoi avoir des envies :  - Vous avez bien dit que c'était votre mère et vous qui nous offraient ce cadeau ? demandèrent presque à l'unission Mr et Mrs Pigeoncote.
Le Voleur était orphelin depuis de nombreuses années.
- Oui, ma mère est au Caire actuellement et elle m'a écrit à Dresde d'essayer de vous trouver un objet à la fois joli et original, comme de l'argenterie ancienne, et j'avais choisi une jatte d'argent.
Le couple Pigeoncote était devenu d'une pâleur mortelle. Le nom de Dresde avait brusquement jeté une lumière nouvelle sur la situation. C'était donc Wilfrid l'Attaché, un jeune homme supérieurement doué qui ne fréquentait guère leur propre milieu et qu'ils avaient reçu sans le connaître, en lui prêtant les caractéristiques de Wilfrid le Voleur. Lady Ernestine Pigeoncote voyageait beaucoup ; ses relations étaient nettement hors de leur portée et de leurs ambitions ; son fils serait probablement un jour ambassadeur. Et ils avaient fouillé et pillé sa valise ! Le mari et la femme se regardèrent d'un air stupéfait et désespéré. (...)

* Mrs Pentherby s'entendait assez bien avec les hommes, sans être le type de femme qui ne s'épanouit que sous le regard masculin. Elle ne manquait pas non plus des qualités courantes qui font qu'une personne sait se rendre utile et agréable en tant que membre d'une communauté. Elle n'essayait pas de s'adjuger de petits avantages, ni d'échapper totalement à la participation équitable requise par la vie en société, pas plus qu'elle n'ennuyait les gens par son snobisme pour se faire valoir par des souvenirs personnels. Elle jouait au bridge avec une excellente efficacité et une correction parfaite. Mais dès qu'elle était en contact avec des personnes de son propre sexe, la flamme du combat commençait à brûler. Son talent pour exciter l'animosité tenait vraiment du génie.
L'objet de son intérêt pouvait être peu susceptible ou très sensible, irascible ou accomodant, Mrs Pentherby s'arrangeait pour obtenir le même résultat. Elle soulignait les points faibles, appuyant légèrement sur les endroits douloureux et éteignait toute manifestation d'enthousiasme. Dans les discussions, elle avait généralement raison ; et quand elle avait tort, elle s'arrangeait pour que son adversaire paraisse stupide et entêté. Elle faisait et disait des horreurs sur un ton banal et innocent ; et elle faisait et disait des choses banales et innocentes sur un ton horrible. Bref, les femmes rendirent un verdict unanime : elle était impossible. (...)

* - Voilà qui nous laisse le champ libre, dit Strudwarden, mais malheureusement j'ai le cerveau totalement vide dès qu'il s'agit d'un projet de meurtre. Cette petite bête est si monstrueusement passive... je ne peux pas prétendre qu'il a sauté dans la baignoire et qu'il s'est noyé, ni qu'il a engagé contre le gros dogue du boucher un combat inégal qui l'a transformé en viande hachée. Sous quelle forme la mort peut-elle se présenter à l'occupant perpétuel d'un panier ? Nous croirait-on si nous inventons un raid des suffragettes envahissant le boudoir de Lena ? Il faudrait faire beaucoup d'autres dégâts, ce qui serait très désagréable, et les domestiques trouveraient bizarre de n'avoir pas vu les envahisseuses.
- J'ai une idée, dit Elsie, achète une boîte avec un couvercle bien hermétique et perce un tout petit trou, juste assez grand pour laisser passer un tube de caoutchouc. Fourre Louis et la niche et le reste dans la boîte que tu fermes. Fixe l'autre extrémité du tube à l'arrivée du gaz. Le résultat est assuré. Tu pourras mettre la niche près de la fenêtre ouverte après, pour dissiper l'odeur du gaz. Tout ce que Lena trouvera quand elle rentrera, tard dans l'après-midi, sera un Louis paisiblement défunt.
- On a écrit des romans sur des femmes comme toi, dit Strudwarden, tu as l'âme d'une parfaite criminelle. Allons chercher une boîte. (...)

* - Un personnage important, et qu'il ne faut contredire sous aucun prétexte, a prétendu qu'il faut avoir réussi à trente ans, ou jamais.
- Bah, dit Reginald, avoir trente ans, n'est-ce pas déjà un échec ?

Robert Laffont, Pavillons poche, 290 pages  (Mai 2006)

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