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Chez Clarabel
3 avril 2007

Des filles de la côte Est - Courtney Eldridge

des_filles_de_la_cote_estVoilà comment ça se passe : je rédige une première phrase, je lis ce que je viens d'écrire, et je l'efface aussitôt. Ensuite, je commence une histoire complètement différente et je rédige une autre première phrase. Puis la première phrase d'une autre histoire, et ainsi de suite. Toutefois, il m'arrive de ne pas effacer aussitôt après avoir écrit, il peut se passer une semaine, parfois plus, avant que cette phrase (ce paragraphe, cette page, ces vingt pages) ne commence à me déplaire. Au début, en général, j'ai l'impression que la phrase convient, je la trouve même bonne. Dans ces moments-là, comme je suis contente de ma phrase, je la lis et la relis en continuant à travailler sur l'histoire, j'avance, je progresse. Puis, à l'occasion, ce que je viens d'écrire me satisfait, je deviens enthousiaste, joyeuse, la vie est merveilleuse. Hélas, ça ne dure jamais...

J'ai été un peu déçue par ce 2ème livre de Courtney Eldridge, dont j'avais beaucoup apprécié le précédent "Record à battre". Cela pêche à cause d'un quelque chose non identifiable. Peut-être ce sentiment de lire des confessions diffuses, moins centrées, qui se délitent au fil des pages qu'on tourne, en réprimant un petit soupir ... J'ai lu le 1er texte en souriant, le 2ème un peu moins, le 3ème en fronçant les sourcils, etc... Pourtant il y a une vraie écriture chez cet auteur, un style qui rappelle les filles de Sex and the City, avec New-York en fond de course, du babillage interminable, et des névroses ... conséquentes !  Phébus - 235 pages

record_a_battreMON AVIS SUR RECORD A BATTRE : Ancienne championne de baisathlon, Christine est désormais mariée à Joel, un beau garçon du genre sportif. Lors de leur premier rendez-vous, au bowling, elle lui avoue tout de son passé, mais sans entrer dans les détails. Joel semble conciliant, lui est davantage passionné par les rencontres de bowling ou de base-ball. Mais au fil du temps et de leur vie à deux, ce passé refait surface, surtout lorsque Christine apprend qu'elle ne détient plus le record. Joel, frustré par une vie sexuelle de plus en plus transparente, se pose des questions sur sa jeune épouse et ses prestations antérieures; Christine préfère se taire mais souffre également de ne pouvoir communiquer avec son mari.  A partir d'un sujet des plus légers, Courtney Eldridge finalement creuse la couche superficielle pour révéler les failles d'un bonheur fragile, autour d'une héroïne sympathique, fraîche et rigolote. Le début est volage, bon-enfant, quand Christine croise dans la rue un ancien amant dont elle ne se rappelle plus le prénom. Découle son histoire, son premier rendez-vous avec Joel, leurs passions communes pour le bowling, le base-ball, puis les prouesses "sportives" de la jeune femme. C'est au fil de la lecture qu'on découvre un ton plus recherché, moins futile, les blessures secrètes de Christine. C'est franchement une très agréable lecture, un petit livre détonnant et dynamique, idéal pour les vacances, beaucoup de fraîcheur, de tonus et une héroïne attachante et charismatique !   (Cf. L'avis moins enthousiaste de Laure )

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27 mars 2007

L'amour est très surestimé - Brigitte Giraud

amour_est_tres_surestimeAvant de comprendre qu'il s'agit de 11 textes distincts, le lecteur est en droit de se demander s'il s'agit bien de la même narratrice qui, au fil des chapitres, égrène à la 1ère personne son triste constat de l'échec conjugal.
Personnellement j'ai eu quelques vagues de doute.
Une fois bien compris que rien n'était lié, à part le thème du couple et de la pérennité de l'amour, j'ai pu m'absorber dans cette lecture.
Brigitte Giraud est galante, elle écrit sur "la fin de l'histoire" avec un stoïcisme qui vous tire de votre léthargie. C'est bien simple, c'est terriblement évident : "Vous n'avez rien vu venir et vous ne l'aimez plus". A partir de là, l'auteur va broder sur l'attachement matériel, ou son inutilité flagrante quand surgit la cassure, sur l'importance donnée aux enfants, leur annoncer la nouvelle, les prévenir du meilleur comme du pire. Elle envisage aussi l'après, "la juste place", comment se débrouiller avec l'absence, se refaire et s'habiller d'une peau neuve, croiser l'autre et aller vers lui, le repas qu'on prépare pour tout recommencer, reprendre "l'habitude".
"J'avais face à moi un inconnu, cet inconnu avait ravivé l'amour et m'exposait à tous les dangers. J'avais peur d'aimer et de ne pas aimer, peur de me tromper, peur d'aller trop vite. Je ne savais plus comment être devant un homme, alors je baissai un peu les yeux"...
Et puis, comme un second souffle, "le temps a passé", et la narratrice dit merci à son amour, "on n'arrête pas le cours des choses pour dire qu'on est heureux", pour aller à contre-courant du "vertige des naufrages amoureux, l'illusion de la liberté tant convoitée, le fantasme de l'instant exalté, de la jouissance sans limites, (...) la douleur d'aimer ou de ne plus aimer (...), les stigmates de l'échec, l'esthétique de la perte" (...)
C'est sensible et si bien rapporté, parfois amer ou mélancolique, un peu frustrant aussi (il s'agit d'un petit livre de 90 pages) où les sujets sont si bien dressés sur un plateau qu'on aimerait en lire davantage ! Mais c'est comme ça, à prendre ou à laisser !  Stock - 90 pages.

22 mars 2007

La collecte des monstres - Emmanuelle Urien

collecte_des_monstresDans le club très prisé des "spécialistes de la nouvelle", où les demoiselles d'une trentaine d'années excellent avec leur bagout et un culot particulièrement jouissif, il faut vite inclure à la bande des Céline Robinet, Dorine Bertrand, Lola Gruber, Claire Castillon et Isabelle Sojfer, la "terrible" Emmanuelle Urien.
D'abord, bravo à elle pour avoir intégré l'écurie des éditions Gallimard, une belle récompense pour son talent déjà repéré par les surfeurs de la toile !
Passons.

"La collecte des monstres" est un recueil de 18 nouvelles dont on sort plus d'une fois abasourdie et sidérée par la note finale. Mais avant d'évoquer la conclusion, parlons d'abord du contenu : de beaux textes, faussement lisses, sur des personnages plus ou moins ordinaires, un peu toqués et frappés par le sort, et qui bouclent un chapitre en donnant le coup de massue sur l'infâme curieux qui a niché son nez dans ce livre !
Mazette, ça dépiaute !
Plusieurs histoires m'ont accroché, dont "L'homme qu'il me faut" où une jeune femme envoie des dizaines de lettres pour les journaux de petites-annonces, clamant qu'elle est une belle jeune fille parfaite qui cherche un homme avec les mêmes caractéristiques, la réponse ne se faisant pas attendre, la demoiselle s'émeut et se lance vers l'inconnu...
Le principe d'établir des règles et de vouloir s'en tenir fait écho à l'histoire de "Lilas ou les règles de l'art". Lilas est une jeune étudiante qui a du mal à joindre les deux bouts, elle décide de faire le trottoir avec les conditions qu'on lui connaît dans le quartier, "mille euros" dit-elle pour éconduire les indésirables, très bien !...
"Plaie d'agent" raconte le tic obsessionnel d'un homme qui pense être suivi et le vérifie sur le champ en se retournant brutalement, de son vice va naître la passion pour la photographie, puis le début de la gloire grâce au zèle exemplaire de son agent, mais bon...
Et je pourrais continuer d'en faire la liste, tant j'ai apprécié beaucoup des nouvelles de ce livre !

Pourtant, ce n'est pas gagné d'avance, il y a un fond méchant, un esprit terrible, un grain de folie et d'horreur, un compte à rebours qui va vous envoyer dans les roses ! C'est étonnant ce talent et cette facilité manifeste de mettre en place une situation qui varie, qui bouscule les idées et qui parvient sans cesse à nous surprendre.
Plus d'une fois, j'ai été ébahie par la chute. Tantôt je riais, tantôt je grinçais des dents, et même je me demandais s'il ne fallait pas me sentir (un peu) coupable de ricaner et de trouver ça drôle. Eh bien, non ! Le titre en lui-même annonce la couleur, et saviez-vous que dans certaines communes c'est ainsi qu'on nomme "le ramassage des encombrants" ?
"La collecte des monstres" est une peinture, ce n'est pas seulement dans un esprit de la laideur, celle-ci se décrit de bien différentes façons, on le constate, nous sommes cernés. Et comme disait Francis Bacon : "Si je rends les gens laids, ce n'est pas exprès : j'aimerais les montrer aussi beaux qu'ils le sont". Mais bon...
"Elle m'a dit un jour que connaître l'opinion des gens sur son compte, ça l'aidait à mieux les mépriser. C'est un besoin chez elle, le mépris, on dirait que ça l'aide à se tenir droit en l'absence d'autre soutien. Le mépris, c'est son tuteur à elle."
Vraiment pas mal du tout !

Gallimard, 155 pages.

13 mars 2007

Des nouvelles qui font du bien !

sainte_ritaVoici un petit livre tout à fait appréciable, à lire en deux coups de cuillère à pot, miam ! Pratique, efficace, divertissant. Il est composé d'une galerie de portraits percutants et plutôt originaux, depuis Josiane, 47 ans, éternelle célibataire et qui commence à s'en mordre les doigts, pitié Sainte Rita, faites quelque chose pour elle !... On passe ensuite à Monsieur Bernard, commerçant prospère d'une boutique d'Un peu de tout, mais qui serre les cordons de sa bourse en attendant de bâtir la maison de ses rêves, avec dix chambres et trois tourelles, attentif au moindre détail, un peu trop vigilant, prenez garde Monsieur Bernard, ça peut sentir le gaz !... On n'oublie pas le portrait d'un couple au bout de "Dix ans de mariage", un coup qui bâille mais s'éparpille dans leurs soirées mondaines, le type qui se croit tout permis et sa douce qui n'en loupe pas une... Aïe ! Un peu de tendresse avec les deux histoires "Le chat" et "L'enclave" : dans la dernière, une vieille femme se réconforte de rester bien au chaud chez elle, bien loin de toutes "ces vies gâchées, ces horreurs, tout ce qui manque et va de pair avec la modernité" ! Portrait très réaliste !
En quelques 110 pages, on apprécie avec douceur ces tableaux qui ne manquent jamais de mordant, ni d'humour et encore moins d'amitié et d'amour. La causticité de Claire Wolniewicz est chic, parfois il aurait été même intéressant de pousser davantage dans leurs retranchements les personnages de ces petites histoires. Mais bon, c'est déjà très bien et surtout cela offre un bon petit moment de lecture. Très léger, tout ça ! C'est bien.

Pocket - 110 pages

scalpelsLa honte, c'est un coup de scalpel, une plaie qui s'ouvre, le sang qui monte au visage, brûle le front et les joues. La respiration et le cœur s'affolent. Une lourdeur insupportable, un recroquevillé général de soi et, comme une pieuvre qui vous fondrait dessus, une solitude atroce. Le temps s'arrête et nous sommes nus devant l'univers qui ricane. Qui n'a pas connu ça ?
Ce n'est pas moi qui le dis, c'est l'auteur. Charles Gancel nous renouvelle le miracle du recueil de nouvelles en offrant à travers 10 exemples des situations totalement désopilantes.
Personnellement, je crois que l'histoire "Chouquette" qui ouvre ce recueil est la plus percutante et à pleurer de rire un peu jaune. Chouquette est une tortue minuscule qui a été offerte à une jeune fille pour son anniversaire, un petit repas est donné qui réunit la famille et le petit ami de la demoiselle, or c'est le gueuleton qui vire en joutes oratoires sur fond de convictions politiques et sociales... la tournure de la journée vaut son pesant d'or !
Les autres histoires, étrangement, n'ont plus le même poids. Il y a bien quelques-unes sympathiques et poilantes (God ou Le script par exemple) mais aussi surprenant que celui puisse paraître, les situations souvent racontées dans ces nouvelles ont un peu goût à vous glacer le sang (l'histoire du type qui perd la boule et envoie son poing dans la figure de sa femme, l'oncle incestueux, la bêtise insupportable de l'arrogant, ou le jeune lad et son cheval qui meurt dans sa m**de...).
J'ai un peu trouvé qu'on s'échappait du domaine du drôle pour mettre en situations des scènes où la honte est pire qu'une gêne, elle vous sidère, vous force à chercher un terrier, ou vous semble si pathétique qu'on hésite à en rire.
Dans son 1er recueil (Les Oeufs), Charles Gancel avait été époustouflant et pince-sans-rire. Cette fois-ci, il nous offre un nouveau panel de circonstances cocasses et dérangeantes, à travers lesquelles le comique n'est plus de mise. Avec son titre "Scalpels", il annonce clairement son intention d'être tranchant et radical. Tantôt, ça fonctionne à merveille, tantôt on grince des dents... mais c'est vrai qu'on oublierait presque c'est tout ça, la honte, aussi. Du rire, du malaise, de la déconvenue, du repentir... Buchet Chastel, 180 pages.

oeufsMON AVIS SUR LES OEUFS : Ce recueil, particulièrement corrosif et jubilatoire, nous entraîne dans l'univers de l'entreprise avec sa hiérarchie, son pouvoir, ses ambitions et ses coups bas. Tour à tour, les nouvelles sont surprenantes : comparer les hommes d'affaires à des étalons en rut, portraiturer une jeune employée de banque qui préfère démissionner de peur de se dépraver dans d'obscurs rendez-vous du vendredi soir dans le cagibi de l'imprimante, ou suivre un président harcelé par un mystérieux corbeau poète... Autant d'histoires cocasses, comiques et cruellement jouissives.
Le regard de l'auteur n'épargne personne. Sa fonction de dirigeant d'un cabinet de travail spécialisé dans l'intégration culturelle des grandes entreprises internationales expliquerait son acuité à dépeindre le monde de l'entreprise avec autant de détachement. C'est gentiment moqueur et pervers.
Revisitez le monde du pouvoir, du métier, des entreprises à travers le regard de Charles Gancel, votre vision en sera métamorphosée. Agréablement surprenant, bien écrit, "Les oeufs" rassemble des nouvelles percutantes. A lire.

22 février 2007

J'aide les taupes à traverser - Jean Louis Ughetto

j_aide_les_taupes_a_traverserJe ne me souviens plus pourquoi j'ai voulu lire ce livre, même si je reconnais au titre une accroche porteuse et qui invite à ouvrir cette galette brune sur le champ... Que peut cacher "J'aide les taupes à traverser" ? Des séquelles, pourquoi pas des nouvelles ?
J'aime beaucoup la définition de l'auteur : "Pour moi, la nouvelle est un genre littéraire à part entière pas un marchepied permettant d'accéder au roman. Le fait d'écrire des textes courts est un choix, la concision me paraît une vertu, d'ailleurs je ne sais pas faire long même pour une dédicace." Cela permet de rendre quelques lettres de noblesse à ce genre trop souvent boudé et à qui on reproche une légitime frustration !

Il y a donc 12 textes qui "traitent de l'adolescence ou de la maturité, des inventions du désir et ses multiples dérapages. Des personnages passent, hésitent, désorientés par la rudesse des rencontres et leur propre incapacité à décoder le regard d'autrui. Entre plaisir de la causticité et art de la concision, on retrouve les acteurs - sceptiques et crédules, cyniques et sentimentaux - de ces mini-drames, à jamais ancrés dans leurs contradictions." (4ème de couverture)

Il y a un petit goût fumeux derrière ces séquelles, une tendance à plonger dans le borderline, à filer un petit goût de bile au fond du palais. J'avoue, j'ai eu des doutes. J'ai aimé le style tonique, l'imagination fébrile et les coups de théâtre percutants, mais d'un autre côté quelques passages me donnaient la nausée... Un peu suspect, tout ça. Mais bon, c'est aussi une griffe qui fait son effet donc ce n'est pas mauvais dans le fond. Et ça promet même de susciter la curiosité !

La chambre d'échos

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12 février 2007

Cet imperceptible mouvement ~ Aude

Beaucoup de poésie dans ce recueil de 13 nouvelles, beaucoup de petites choses presque anodines et qui vont à l'essentiel : droit au coeur du lecteur ! Aude est une plume épatante ! Elle manie les mots avec grâce, amour et facilité. La séduction est immédiate ! Même si l'auteur décide d'aborder des thèmes délicats comme l'enfermement dans une prison ou un camp de concentration, une maison de santé ou un sanatorium, les sentiments d'amour ou la mort, il y a une sensualité omniprésente !

Un homme se trouble de "l'odeur fraîche des savons, poudres et parfums" d'une femme, un autre perd tous ses moyens de grand photographe face au regard mystérieux et l'aura envirant d'une jeune adolescente, un autre entre carrément dans la passion !... Ici point de grivoiserie ni de vulgarité. Les choses, les émotions sont très palpables. Comme cette femme, en plein acte sexuel, ce qu'elle ressent, "point de quatuor à cordes pour masquer le vide ni de paravents chinois derrière lesquels se dissimuler".

Le style d'Aude est époustouflant ! Dès la première page, on se sent prise au piège ! Moi qui souhaitais connaître cette auteur depuis quelques temps, je suis comblée, complètement sous le charme. Entre ce livre et moi, l'osmose fut sacrée ! Je regrette juste de n'avoir pas pris davantage de temps pour le savourer, tant le livre est trop court et se lit trop vite : le drame de l'obsession ! Et pourtant, j'avais souhaité faire mien cet extrait : "Les phrases lues tournent en moi des jours entiers, cherchant une tanière chaude où s'installer pour y faire des petits. Ce livre m'ensemence. Je ne le dévorerai pas, sans rien en garder, comme je l'ai fait de tant d'autres, autrefois."

lu en février 2006

25 janvier 2007

Les murs et autres histoires (d'amour) - Vaikom Muhammad Basheer

les_mursCathe et ses lectures préparent actuellement un dossier sur la littérature indienne, en l'honneur du salon du livre à Paris dont le pays vedette et invité n'est autre que ... l'Inde ! Avec ce livre, j'apporte donc ma petite pierre à son édifice.

Ce qui est fascinant dans l'univers de Basheer, c'est qu'on y entre tout de suite, avec une familiarité et un enthousiasme qu'on a tout de suite envie de faire partager. Composé de 5 courtes histoires, ce recueil de Basheer décline avec humour et causticité les clivages entre l'homme et la femme, la supercherie de l'un contre le bon esprit de l'autre, l'emprisonnement, la rencontre d'un parfum fleuri typiquement féminin, l'effroi glacial et même une petite bulle de fantastique ! L'auteur est doué pour créer son atmosphère : au coeur d'une prison, entre quatre murs, au pied de l'enceinte qui sépare le pénitencier des femmes, l'homme fait la rencontre d'une femme autour d'un pied de roses. C'est la 1ère des histoires qui ouvre ce recueil, le ton est donné : de la magie, de la poésie, du doute et de la perplexité, beaucoup de fantaisie et une pointe d'ironie. Voilà qui régale le lecteur !

On pourrait presque croire à des petits contes philosophiques, chacune des nouvelles ne manque pas de verve pour pointer le doigt sur le souci du groupe social, sur la dot féminine et le chagrin d'une femme privée de mariage. Il est moqueur, mais gentil et particulièrement charmeur, son regard sur les femmes dépasse l'image de la damoiselle qui se poudre le visage et court les boutiques avec un "flap-flap" sur l'épaule. D'ailleurs, celles-ci ne manquent jamais de réparties, elles ne sont pas de celles dont "la tête ne contient que des rayons de lune" (à voir dans les textes de L'anneau d'or & La lettre d'amour). Privilégiant beaucoup la séduction et la romance cajoleuse, faite d'humour parfois involontaire et facétieux, Basheer n'hésite pas à dénoncer (lui-même a tâté de la prison dans sa lutte pour l'indépendance de l'Inde), rapporte ses contes hérités au cours de ses longs et innombrables voyages, et boucle ce livre sur une touche surréaliste, "un des événements extraordinaires" qui lui sont arrivés. Quel autre nom donné à cette étrange "lumière bleue", une très belle histoire de fantôme et d'amour (toujours !). Le pouvoir de l'Inde a agi, j'ai été charmée. D'autres font danser les serpents, par la seule musique d'une prose simple et naturelle. A découvrir !

Zulma

16 janvier 2007

Hit-Parade - Arnaud Guillon

hit_paradeLa vie est ainsi faite qu'on garde toujours en mémoire des petits et grands instants parce que, par exemple, une chanson vous rappelle ce moment sacré, fouillant dans vos entrailles, pour votre mettre au pied du mur des souvenirs.

Arnaud Guillon est le jeune écrivain devenu "expert" en la matière, depuis ses premiers romans (Ecume Palace, 15 Août, Près du corps), il cultive la nostalgie qu'inspire toute réminiscence. Avec Hit-Parade, il s'inscrit pour la première fois à l'exercice laborieux de la nouvelle. Mais quand on sait qu'il était habitué aux petites histoires sensibles et délicates, on se doute que sa copie ne peut qu'être encourageante et remplie de ce charme suranné, autant d'effets de style qui sont désormais SON style.

Dans les 6 nouvelles, les personnages ressentent le flot des souvenirs leur tomber sur les épaules, car ils se trouvent soudainement plongés en arrière, dans un appartement fréquenté durant leur adolescence, à jamais associée aux notes de Jean Ferrat, ou un couple au bord de la rupture peut dédier à Françoise Hardy d'avoir été la coordinatrice secrète du début et de la fin de leur histoire. Il y a finalement dans "Les plus jolis pieds du monde" un hommage aux Beatles à travers les pensées rêveuses du narrateur, absorbé par son "Abbey Road" et la célèbre photo d'un 8 août 1969. Les autres nouvelles portent des tributs plus discrets, ou teintés d'humour léger, comme dans "Milano Centrale" où "life on Mars?" est "à jamais associé à l'un des épisodes les plus absurdes de ma vie".

Ainsi va la plume d'Arnaud Guillon, toujours au plus près de la nostalgie, des émotions léchées, du temps passé et des trémolos dans la gorge, c'est un peu trop mélo dans un texte en particulier ("Le chagrin d'une vie"), mais c'est dans l'ensemble d'une grande maîtrise dans l'élégance, dans le toujours trop-peu, jamais-assez. Le texte qui commence ce livre, "Blanc comme l'oubli", est tellement bouleversant qu'on aimerait un roman complet rien qu'avec cette idée !

Plon

15 janvier 2007

On n'empêche pas un petit coeur d'aimer - Claire Castillon

on_n_empeche_pas_un_petit_coeurDeuxième exercice de style pour Claire Castillon, après son 1er recueil de nouvelles particulièrement jubilatoire ("Insecte"), "On n'empêche pas un petit coeur d'aimer" est un livre plutôt attendu et qui finalement s'annonce un peu décevant, car beaucoup moins bien que "Insecte". C'est clair et c'est juste un peu dommage.

Dans ce 2ème livre, donc, il est plus question de couples et des gens qui s'aiment, mais aimer est un mot tellement grandiloquent, qui implique une exigence envahissante et ambitieuse, on le sent instinctivement. Les personnages de Claire Castillon reflètent la fragilité, la démence, l'hystérie et la mélancolie des sentiments.

Quelques nouvelles sont franchement réjouissantes, à la fois drôles, mordantes et caustiques, elles reprennent le style de Claire Castillon qui est une invitation à la folie douce. Des êtres fêlés et désabusés se croisent, des dialogues surréalistes pleuvent, c'est ainsi dans quelques nouvelles où on adore le mélange d'humour amer et de provocation gentille. C'est donc dommage que l'exploit connu avec "Insecte" ne se soit pas reproduit. On aime bien celui-ci, car c'est indéniablement une écriture particulière, un style incomparable et un univers déjanté, mais on n'aime pas jusqu'à la folie. C'est tout.

Fayard

11 janvier 2007

Comme tous les après-midi - Zoyâ Pirzâd

comme_tous_les_apres_midiElles sont jolies, ces femmes sur le rebord de leur fenêtre. Elles guettent les bruits de la rue, les cris des jeunes qui tapent dans le ballon, elles épient leurs voisines qui commettent les mêmes gestes répétitifs du quotidien, elles sont là, à humer le printemps, à s'extasier sur l'arbre en fleurs et elles ont le sourire aux lèvres...

Ce sont de jolies femmes qui vivent une existence ordinaire, auprès d'un mari, de leurs enfants, d'une mère ou d'une belle-fille qui peint quelques toiles excentriques en fumant comme un pompier. Elles frisent parfois la démence ou l'hystérie, sont sujettes à des actes impulsifs, comme acheter des bas et rencontrer un individu qu'on cache dans un cagibi.

Mais il n'y a pas que des femmes dans les histoires de Zoyâ Pirzâd, même si elles sont en majorité. Il y a des hommes assis sur un banc, à l'imagination fébrile et débridée, des hommes qui gagnent leur salaire et s'approchent de leur retraite dorée, des hommes qui confient leur paye à une épouse économe et fière de l'être, des hommes qui boudent le riz à la tomate. Et puis, au coeur de ces portraits familiers, il y a cette histoire d'un mug déniché dans une boutique des années 20 ou le mystère des fleurs brodées sur un couvre-lit, des pépites... et du saugrenu avec l'invasion imminente des sauterelles, à découvrir !

Zoyâ Pirzâd est iranienne et son langage respire un parfum d'ailleurs très délicat, à la fois poétique et qui fait tourner la tête et les sens. Ce qu'elle dresse dans ses petits textes de quelques pages fait écho à son style simple et imagé, "Zoyâ Pirzâd épingle comme un papillon rare les expressions sensibles de la fuite du temps, perçant d'un seul regard doux et précis la fine pellicule couvrant la surface des choses". C'est magnifique ! Il faut respirer cette odeur des pétunias, ce thé qui fume dans la cuisine d'une femme tantôt épuisée par son travail, éreintée par l'habitude du quotidien, ou effleurer le regard complice de cette épouse qui voulait sa paire de bas sans plus attendre, goûter ces raisins et ce riz pilaf aux lentilles... Un petit livre léger, tout rose, au charme ravageur !

Zulma

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