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Chez Clarabel

17 mars 2009

Embrasse-moi - Bart Moeyaert

embrasse_moiDans une atmosphère énigmatique et moite, Molly et la Fausse Blonde (oui, c'est comme ça qu'on l'appelle !) se rendent sur une colline au bord d'un lac pour échanger leurs secrets. Mais toutes confidences sont inenvisageables car ni l'une ni l'autre ne concèdent un petit bout de terrain et le tête-à-tête vire à l'empoignade. Depuis toujours, elles se détestent et, entre nous, cette histoire de secrets à partager est singulière, un peu bizarroïde à comprendre. Molly, sur qui notre intérêt s'attache plus particulièrement, est une jeune fille trop forte, et qui se juge trop moche. Elle se sent discriminée, toujours mise à l'écart, et pourtant elle porte en elle un secret bouleversant, qui fait battre son coeur.

Pour rendre ce roman captivant, il ne faut pas chercher à découvrir les secrets des adolescentes, ou alors il n'y a plus d'intérêt ! Certes, le talent narratif de Bart Moeyaert fait son effet, puisqu'il nous propose un texte troublant, presque envoûtant. Toutefois j'avoue m'être souvent perdue en chemin, avoir froncé les sourcils parce que je ne comprenais pas systématiquement les actes manqués des personnages. Et puis la portée des secrets n'est finalement pas si retentissante, c'est simplement la conséquence des révélations qui devient plus intriguante.

On découvre une Molly susceptible et à fleur de peau, ce n'est pas sorcier de comprendre l'origine du mal, mais c'est son antagonisme avec ladite Fausse Blonde qui va en prendre un coup, lorsque les voiles tombent. La fin pourrait paraître presque mielleuse, si j'étais intransigeante. (Mais je ne le suis pas ! Enfin, pas en littérature !) Un camarade de Molly - Bruno Goujon - est un peu la tête pensante du groupe, le sage de la bande. Il n'a pas un physique de tombeur, on le houspille un peu pour sa placidité, alors que sa sagacité devrait le rendre bougrement attirant. Il est le seul à expliquer que les secrets sont nombreux et différents, il y en a des beaux, des grands, des honteux, des précieux. Mais il ne faut pas tous les ranger à la même enseigne. Et plus ils sont importants, plus il faut les conserver pour soi.

On a tous quelque chose à cacher, nous dit Bart Moeyaert dans ce texte enivrant et ambigu. Et la force du secret est justement de le préserver, c'est un peu ce qu'on découvre. Le roman se présente ainsi : l'histoire s'étend sur une journée, il fait très chaud, les esprits sont enflammés, les sens aiguisés et les émotions multiples (on y trouve, pêle-mêle, mensonge, trahison, honte et désir). C'est un très bon livre, pas facile à aborder et pas évident non plus à partager, parce que l'ambiance est vraiment particulière, mais captivante.
A tenter.

Rouergue, coll. doAdo, 2009 - 128 pages - 7,50€
traduit du néerlandais par Daniel Cunin

Du même auteur : Frères

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16 mars 2009

Les Carnets de Douglas - Christine Eddie

carnets_de_douglasRomain Brady est né avec une cuillère d'argent dans la bouche mais il a aussi eu une enfance malheureuse. A dix-huit ans, il décide de quitter son palais doré, s'enfuit dans la forêt et ne donne plus signe de vie à sa famille qui le croit mort. De son côté, Eléna Tavernier est la fille unique d'un couple qui se chamaille souvent, la mère décède très tôt et l'enfant va trouver refuge dans un monastère avant de prendre son envol en travaillant près d'un médecin où elle cultive son amour des plantes. Un jour, dans la forêt, elle rencontre Romain  qui se fait appeler Létourneau, avant d'adopter le nom de Douglas (qui symbolise l'arbre le plus solide), suggéré par Eléna.
De leur amour, va naître une petite Rose. Puis une tragédie vient les frapper. Douglas va retourner dans ses bois, confier son amour à un mélèze et parcourir le monde. De son côté, Rose va grandir auprès du docteur Patenaude et d'une institutrice juive, Gabrielle Schmulewitz. Et j'arrête d'en dire plus !

C'est comme un conte qu'on nous raconte, il était une fois deux pères, deux mères, un enfant et un arbre. Une histoire qu'on pourrait nous lire le soir, qui parlerait donc d'amour, de nature et de musique. Le rythme, soutenu par des chapitres courts, rend la lecture agréable et virevoltante. (Et l'expression 'comme dans un film' est d'ailleurs très appropriée !)

En fait, le roman de Christine Eddie est tendre, beau et dramatique, il cache aussi une profonde richesse. J'avoue qu'au début j'étais moyennement emballée, j'avais un peu le souffle court d'entrer dans cette histoire qui dégainait son débit à cent à l'heure. D'ailleurs j'ai largement préféré la deuxième partie du roman, une fois les présentations faites, les personnages échappés de leur prison et enfin installés à Rivière-aux-Oies (j'adore ce nom !), un petit coin perdu, qui a aussi son importance, et qui va connaître son lot de mutations.

J'ai aimé également le côté sauvage, fou et amoureux des personnages. Leur choix. Leur sacrifice. Leur abnégation. Car finalement ce livre est une agréable surprise, un roman captivant, sans parfum à l'eau de rose, où l'histoire est simple, et en même temps elle est épanouissante, elle apaise et elle donne des envies de déployer les ailes. C'est un ouvrage qui ne manque pas de charme, et qui se révèle un compagnon idéal pour quelques heures de lecture-plaisir.

Editions Héloïse d'Ormesson, 2009 - 188 pages - 18€

- Gagnant - Prix France-Québec
Le roman de la québecoise Christine Eddie recevra jeudi 19 mars le Prix littéraire France-Québec remis par Patrick Poivre d'Arvor.
Créé en 1998, le prix littéraire France-Québec souligne l'excellence du roman contemporain québecois.

- Finaliste - Prix des libraires du Québec
- Finaliste - Prix de création littéraire de la Ville de Québec
- Finaliste - Prix des abonnés du réseau des bibliothèques de la Ville de Québec

 

Les avis (nombreux) de Caro[line], Venise, l'Abeille virevolte de page en page, GeishaNellie (qui ont lu l'édition québecoise)... Paul Proulx parle de Love Story sylvestre pour couventines sentimentales ! :))

16 mars 2009

Délit de fuite - Dominique Dyens

delit_de_fuiteAnne Duval, trente-six ans, est une femme accomplie, qui a réussi sa carrière professionnelle. Hélas, sur le plan sentimental, c'est le désert. Douze ans auparavant, elle croyait encore en ses chances mais ses échecs successifs ont fini par assécher son coeur. Elle se donne une dernière occasion d'espérer, elle jette toutes ses affaires dans un sac et roule vers l'inconnu.
Extrêmement fragilisée, épuisée aussi, Anne fuit ses souvenirs, sa mère malade et son père qui s'est suicidé quand elle n'était qu'une petite fille. On commence alors à apercevoir une autre femme, moins sûre d'elle, plus trouble. Car Anne est une mythomane, elle s'est construite une vie rêvée qu'elle raconte à sa mère pour la consoler, mais toutes deux sont tenues par des liens retors et qui datent de la mort du père.
Tout est mêlé, moins clair qu'au début. Et surtout un autre profil fait son apparition, un médecin qui écrit un roman, en s'inspirant d'un fait divers des années 90, il est marié à une femme déséquilibrée, il a une maîtresse qui est aussi son éditrice. Sans effet de style, ni brouillard apparent, un roman dans le roman est en train de se créer.
C'est au départ l'histoire d'une femme qui approche de la quarantaine, qui souffre du manque d'amour et qui associe la passion à la mort. Progressivement, le roman s'étoffe et laisse naître une autre trame plus machiavélique. Le mélange donne un bon livre, facile à lire, qui ne pose aucun problème de compréhension. Intriguant, sans être trop étouffant. La psychose des personnages est bien étalée, bien rendue. Et puis la fin est piquante, du genre à chatouiller le lecteur...

Editions Héloïse d'Ormesson, 2009 - 184 pages - 17€

L'avis de Laure

15 mars 2009

Vingt fragments d'une jeunesse vorace - Xiaolu Guo

vingt_fragmentsFenfang a dix-sept ans lorsqu'elle quitte sa campagne pour vivre à Pékin asseoir son ambition de vie moderne et devenir actrice. A la place, elle trouve déception et désoeuvrement. Elle ne décroche que des petits boulots, ou fait de la simple figuration, elle loge dans des appartements communautaires, elle est épiée par des voisins qui cohabitent avec des poules, et elle connaît sa première aventure amoureuse avec un type qui aime la sauce de soja et qui a un caractère de jaloux despotique et violent. La mélancolie gagne peu à peu Fenfang, qui a soif de réussite, et forte du soutien de quelques camarades, elle commence à écrire ses propres scripts.

C'est un portrait original sur la jeunesse chinoise qui, de nos jours, se heurte à affirmer son individualisme et son désir de fortune dans une société dressée à penser collectif. Fenfang ne fait pas exception à la règle, elle s'est échappée de sa campagne car elle ne voulait pas finir plouc, mais dans la mégalopole chinoise, elle découve aussi son lot de misères. C'est ainsi que la jeune femme appréhende la notion abstraite de la solitude, et plus le temps passe et plus elle va se sentir démoralisée et abattue. Pourtant le roman ne sombre pas dans la morosité, le spleen n'empiète pas sur la lecture, sans pour autant affirmer qu'il y règne une pleine allégresse.
Xiaolu Guo est brillante, son Petit dictionnaire chinois-anglais pour amants avait été une révélation, un mélange d'humour et de réflexion sur la complexité culturelle et émotionnelle entre l'orient et l'occident. Ses Vingt fragments d'une jeunesse vorace laissent entrevoir une nouvelle génération pleine de contradictions, à l'image de Fenchang, intelligente et belle, mais qui comprend que son pays ne sait pas ce qu'est le romantisme alors qu'il revendique la communion d'esprit et le culte patriotique. C'est différent, mais intéressant. Et cette fois, la langue est moins tarabiscotée, c'est simple, limpide et évident.

Le mantra du jour : « Le café bien chaud, c'est comme un homme à 37°2. Ça vous donne le courage d'affronter la journée. »

Buchet Chastel, 2009 - 185 pages - 17€
traduit de l'anglais (Chine) par Karine Lalechère

l'avis de cocola

15 mars 2009

L'assassinat - Christophe Dufossé

assassinatMe voici bien en peine, car j'ai été déçue par le roman de Christophe Dufossé. Je m'attendais à un semblant de thriller, un roman captivant, bourré de suspense... en fait j'ai eu droit à une fiction politique, un texte court et rapide, où j'ai senti grimper une réaction épidermique à cause du caractère principal. Le personnage du roman, un homme dont on ignore le nom, cela pourrait être monsieur-tout-le-monde donc, est un individu froid, obstiné. Déçu et dégoûté par l'homme qui été élu à la présidence, il a choisi de l'éliminer, au nom de tous les opprimés qui souffrent en silence et qui entendent les discours sans pouvoir lever le petit doigt. L'homme est convaincu de marquer l'Histoire par son geste, il s'identifie également à d'autres criminels comme Lee Harvey Oswald, et il se sent porter par l'assentiment (muet) de l'opinion publique (croit-il). Il est donc en visite au salon de l'agriculture, l'arrivée du président est annoncée pour seize heures tapantes, le compte à rebours a commencé (il est 15 heures, en début de roman). Le type a un colt dans sa poche, et là je me demande comment a-t-il pu entrer dans le salon, lors d'une journée classée à risques, sans avoir été inquiété par les vigiles ?
En fait, je suis plutôt déçue de moi-même parce que j'avais vraiment attendu ce roman avec impatience. Rendez-vous loupé, pour cette fois. Mais ce n'est que partie remise. Je vous conseille aussi de lire les romans de Christophe Dufossé comme L'Heure de la sortie (prix du premier roman 2002), Dévotion ou La Diffamation (celui que j'ai préféré !).
Ce fut un roman court, efficace mais agaçant.

Buchet Chastel, 2009 - 138 pages - 13€

l'avis plus positif de Lily

C'est tout. Je ne me foule pas trop aujourd'hui, désolée. Sur ce, je retourne me plonger dans The Tudors.
Au revoir !

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14 mars 2009

Scotchée aux enceintes !

En fait, aujourd'hui est une journée que je place sous le signe des bulles ! ... Je suis invitée à un salon très spécial, non pas celui du livre... ce serait trop sérieux, je vous parle de bulles, des vraies. Pas celles dans les bandes dessinées ou les manga, mais cela pourrait aussi coller car je vais en lire un peu ce week-end, pour redoper mes pannes de lecture rencontrées durant cette semaine mouvementée.

Voici un peu de musique pour accompagner ce samedi tout gris et pluvieux ! Et flûte, en plus j'arbore mes nouvelles bottines en daim d'un joli gris souris... ça ne va pas le faire. :/ 

A très vite ! Je ne suis pas loin...

13 mars 2009

Des contes détricotés !

Qui es-tu, Isabelle Sojfer ? En 2006, déjà tu avais commis un premier recueil intitulé A conserver au frais et je t'avais découverte ainsi, totalement scotchée par ton aplomb et ton indécence jamais honteuse. Tu mettais en scène sur un ton ironique des parodies de contes de fée ou de classiques de la littérature. Et le résultat était désopilant ! Cendrillon n'a pas trouvé chaussure à son pied, par contre elle en collectionne des paires. Le roi Lear est chassé de sa tour capitaliste et devient un vieux fou aigri. Le Père Noël est sérieusement déprimé, le Chaperon rouge a perdu de sa candeur et Poucet a été abandonné au royaume du Bon Marché...

sojfer1sojfer2

En 2007, tu récidives avec Cent quinze romans-fleuves, un autre recueil d'histoires très courtes, à peine dix lignes au maximum. Cela défile, comme un flash continu, et ça débite des histoires insensées, toujours drôles, cruelles et parfois choquantes. Ce n'est pas la volonté de mousser qui se cache derrière, c'est juste l'envie de débroussailler des idées trop belles et qui correspondrait mieux à cette désinvolture. Tu as trempé ta plume dans l'humour noir, il ne faut pas y voir du mal. J'ai lu quelque part que tes textes courts se veulent saugrenus ou méchants, avec tes victimes préférées : les princesses, les personnages de contes ou de littérature, et même des membres de la famille ou d'anciens amants. Un avant-goût : Robinson Crusoé rencontre Vendredi en surfant sur Internet, les rescapés d'un naufrage tirent au sort pour savoir lequel sera mangé, une jeune femme pond des crottes en vrai chocolat... mais il y a du talent dans chaque page. On croirait un carnet rose, à voir cette délicieuse couverture, laissez-vous berner. Cela me plairait infiniment ! ;o)

Restaurant
Le loup n'a pas envie de manger le Petit Chaperon rouge : c'est trop téléphoné, il voudrait se démarquer. Il l'invite à dîner dans un restaurant végétarien. Il commande des haricots blancs, du vin biologique. Il parle de son métier. Il évoque même la psychothérapie grâce à laquelle il a trouvé sa véritable identité. Vers la fin du repas, il tente de poser sa grosse patte poilue sur la main du Petit Chaperon rouge mais la main se dérobe, il se fait tard, demain le Petit Chaperon rouge se lève tôt.

Union
La Belle et le prince sont mariés depuis deux mois. Leur union n'est toujours pas consommée. A la Cour, on s'inquiète. On les interroge en privé pour démêler la cause de leur abstinence. C'est la Belle qui se refuse au prince. Elle le trouvait sexy quand il était la Bête, avec ses poils partout.

Trop tard
Le loup est marié, il ne laisse pas son numéro de téléphone au Petit Chaperon rouge, c'est toujours lui qui appelle. Il lui fixe des rendez-vous au coin du bois à la tombée de la nuit, il arrive en retard. Parfois même il ne vient pas. Un soir, il trouve un épouvantail revêtu d'une pèlerine rouge, avec un mot épinglé sur le col : "Trop tard ! Je donne ma langue au chat."

Les videurs
Cendrillon regrette d'avoir filé comme une voleuse. Rien ne la forçait à partir si tôt. Elle essaye de regagner le bal mais les videurs ne la laissent pas entrer. Elle n'a plus son invitation. Elle a l'air d'une souillon à claudiquer avec une seule chaussure.

Les Petits Matins, 2007 - 128 pages - 15€

http://sojfer.canalblog.com/

# Pas dupe, de Jeanne Balibar http://www.deezer.com/track/224545

Nota Bene : je trouve que A conserver au frais mériterait une deuxième chance en format poche. La personne qui s'occupe de la collection Nouvelles Voix chez Pocket, par exemple, ne pourrait-elle pas faire un petit effort ??? Ou le milieu éditorial est définitivement un royaume inconnu pour moi, ok je sors.

12 mars 2009

Sur les trois heures après dîner - Michel Quint

sur_les_troisEtudiante en terminale, Rachel a choisi le théâtre, sa grande passion, et les cours de Thomas Bertin, tout jeune professeur qui fait son entrée sur les planches, « pas si grand, la trentaine à peine passée, des allures d'aventurier revenu de toutes les élégances, tout le cheveu blond en tempête, ce type était un immense sourire. » (...) « Ça m'a fait vlan au creux de la poitrine, du chaud aux joues, un picotis partout partout et une bête envie de pleurer... »
Rachel tombe amoureuse, même si Thomas reste inacessible, un rêve éveillé et douloureux. C'est son professeur, il vit avec Babette, qui est également son assistante pendant les cours. Elle est belle, n'est pas dupe du charme qui s'opère entre l'élève et l'enseignant. Thomas exerce un attrait, il joue un jeu de séduction dangereuse, il pointe le doigt sur Rachel, cerne chez elle des talents de grande tragédienne. Il va la pousser, lui donner du terreau, arroser la plante et devenir soleil pour faire éclore la plante.
Et puis, tout s'arrête. Thomas est victime d'une attaque cérébrale. Les deux femmes amoureuses se font face, comme des tigresses autour d'une proie. Brusquement, les rôles s'inversent. Il faut accompagner le malade, lui redonner confiance, le conduire vers la guérison, et dans le même temps il faut supporter un duel de sourds, panser ses blessures infligées par la jalousie.

La passion amoureuse de Rachel est décrite en des termes exaltés, qui éclatent comme des bulles, là on reconnaît le talent de Michel Quint dont la langue est belle, ronde, chaloupée et volupteuse. C'est une histoire qui ressemble fort à une éducation sentimentale, en plus du drame cornélien. Il n'y a pas que la relation triangulaire entre Rachel, Thomas et Babette. Car Rachel a également un amoureux transi, Kader, qui souffre, qui est jaloux et qui est prêt à tout pour ravir le coeur de la donzelle qui l'ignore. Les passions adolescentes sont maladroites, mais touchantes. Chacun sent l'urgence d'aimer l'autre, même s'il faut passer par du n'importe quoi, de l'exagération et des larmes.

Dans ce court roman de 100 pages, on apprend à se casser les dents, à grandir et à choisir, c'est en somme un roman d'apprentissage où « on a peur et envie de grandir, de l'irrémédiable, où on ne sait pas qui on est mais qu'on veut devenir quelqu'un de bien, de digne, et qu'on se fabrique des faux modèles, et qu'on aime qui on doit pas, qui on peut pas, et qu'on entre, éblouis et terrifiés, dans le bref parcours de la vie ». Et toute l'intrigue se dessine dans les grandes lignes de Cyrano ou d'Hedda Gabbler, ce qui parfois me rappelle un autre roman de Michel Quint, Et mon mal est délicieux, où l'auteur démontre également l'importance du théâtre dans ses livres.
De toute façon, il faut tout lire de Michel Quint ! Il est remarquable.

Gallimard, coll. Scripto, 2008 - 106 pages - 7€
Belem éditions, 2004

12 mars 2009

Comment j'ai cru devenir libraire !!!

Leslie Plée est l'auteur du blog : http://vuedelaprovince.canalblog.com/  -  Une adresse à connaître et découvrir. Cela n'est d'ailleurs pas tombé dans l'oreille d'un sourd puisqu'un éditeur a choisi de publier ses mésaventures de libraire débutante.

leslie_pleeTout commence comme dans un rêve : le début d'une nouvelle vie, dans une ville en Bretagne, un amoureux, un bel appartement, un premier job avec CDI et 35 heures. Leslie a décroché le job de ses rêves, être libraire ! Mais le château de cartes va vite s'écrouler quand elle découvrira qu'en fait il lui faudra juste vendre des livres dans une méga enseigne de produits culturels, avec des étiquettes à scotcher à longueur de journée, des conseils bidons à donner, des commandes à passer sans rien y comprendre, des livres à retourner à cause d'un stock en surnombre puis à recommander à cause d'un stock en sous-effectif ^__^, des opérations monstrueuses sur tel auteur ou telle thématique, des livres et des livres, pas de place pour tout ranger, du matériel qui bidouille... C'est un cauchemar, les collègues sont sympas (enfin, y'a bien ce type à l'humour bizarre), mais les chefs sont des demi-tyrans qui n'accordent aucune pause, qui veulent du chiffre, de la présence, de la compétence, de la motivation, de l'organisation, du zèle. (Au secours !) 

Cette BD offre une vision qui dépasse totalement l'idée naïve qu'on peut se faire du métier de libraire, ici c'est un travail à la chaîne, harassant et totalement abrutissant, il n'y a plus d'étincelles, aucune passion... mais ça n'est pas du tout déprimant. Leslie Plée réussit à tourner son expérience pourrie en une succession d'anecdotes dérisoires et humoristiques. Qu'est-ce qu'on rigole ! Je recommande ! 

Un extrait ICI !

Moi, vivant, vous n'aurez jamais de pauses (ou comment j'ai cru devenir libraire) par Leslie Plée
Chez Jean-Claude Gawsewitch Editeur, 2009 - 95 pages - 15€
Collection dirigée par Pénélope Bagieu !

bagieuA souligner :


Ma vie tout à fait fascinante de Pénélope Bagieu
est disponible en poche !
(pour 5,50€)
 

11 mars 2009

Et qu'on m'emporte - Carole Zalberg

31_N_nEp21L__SS500_Emma, coincée sur son lit de malade, sent que la vie est en train de la quitter. A bout de souffle, et de forces, elle s'adresse à sa fille disparue et lui raconte son parcours, ses choix, sa vie de femme, d'épouse et de mère. Mariée très jeune, mère dans la foulée, Emma a longtemps eu le sentiment de traîner un boulet, alors qu'elle était ivre d'une chose : de liberté. Ivre d'amour, également. D'aventures en aventures, Emma va rencontrer un homme qui lui donnera le coup de pouce pour tout quitter et tout recommencer. Sans un mot, sans une explication, elle va prendre la fuite. Son amour en bandoulière. Abandonner ses enfants. Ni remords, ni regrets.

Emma incarne la femme féminine, sensuelle, animale par excellence. C'est un portrait qui fait sortir les griffes, qui inspire l'admiration ou l'incompréhension, car en tant que mère, elle est à blâmer. Egoïste et amoureuse, tout le temps dans la démesure, incapable de sacrifice, à fond dans ses goûts et ses choix, n'hésitant jamais une seconde, Emma a toujours foncé. Traumatisée par une mère qui n'était pas exemplaire, et l'image du couple usé que renvoyaient ses parents, Emma s'est jurée d'en finir, d'en sortir, de ne jamais abdiquer. Ne jamais plier.

Sa liberté, précieuse et choyée, lui sera longuement reprochée par sa propre fille, la disparue. Il aura fallu que celle-ci soit également à l'article de la mort pour qu'Emma retrouve son amour in extremis, pour que le miracle se produise. Non, elle n'a jamais été maternelle, ce n'est pas un secret. Mais qui sommes-nous pour juger ? Aujourd'hui Emma est en train de mourir, elle ne s'apitoie pas sur son sort, elle lance un regard par-dessus son épaule et elle ne regrette rien. Elle reste toutefois fixée sur le petit caillou rose, symbole de sa relation conflictuelle avec sa fille. Mais impossible de le retrouver. Comme si, de toute façon, il était impossible de renouer avec le passé, de réparer les erreurs. Elles ont été bues et jugées, en somme.

C'est en cela un roman profond, sensible, parfois délicat, qui ne verse jamais dans le pathos. Carole Zalberg reprend le miroir d'une histoire déjà racontée dans La mère horizontale, que je n'ai cependant pas lue. Il doit être très intéressant d'avoir ce jeu des miroirs, de prendre un bout d'histoires et de le revoir sous un autre jour. Le récit d'Emma a su me toucher en même temps qu'il est venu me troubler, la femme en moi est bouleversée par ce portrait d'une féminité pleinement endossée, d'un choix de vie qui ne se discute pas, « le sacrifice, le renoncement au nom de l'amour, au nom de la responsabilité à l'égard de ses enfants, merci bien ». Le titre dit déjà beaucoup, « Et qu'on m'emporte », envie d'aller voir ailleurs, de rêver grand. Pourquoi pas ? N'être femme, après tout.

Albin Michel, 2009 - 130 pages - 12€

Léthée en parle...

J'avais lu :  Chez eux, un autre roman de Carole Zalberg (Phébus, 2004)

http://www.carolezalberg.com/

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