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Chez Clarabel

6 janvier 2008

La déclaration - Gemma Malley

la_declarationDans le cadre d'une Angleterre de l'an 2140, l'histoire d'Anna raconte un avenir sombre où l'économie peu florissante a misé sur un programme de Longévité pour permettre à la société une vie éternelle et figée (ceci permettant aussi à la Nature de ne plus puiser dans ses ressources affaiblies). Mais trop de population menace la survie de l'espèce humaine, alors la Déclaration est promulguée et interdit quiconque de procréer (on accorde toutefois un héritier par foyer). S'Affranchir de cette loi est une condamnation à l'emprisonnement, le fruit de cette rebellion aussitôt envoyé dans une pension de Surplus. (Entendez par Surplus, "indésirable" et "impropre" à respirer le même air que tout Légal ! Le seul but dans leur vie est d'être le domestique de la caste supérieure.)

Grange Hall est un bâtiment austère et gris, où il fait vraiment misère de vivre. Il fait partie de ces lieux lugubres où on recueille les enfants des hors-la-loi, et Anna, jeune fille de 15 ans, en est du nombre. Elle ne sait quasiment rien de son passé, mise à part que des Rabatteurs sont venue l'enlever de sa cachette pour vivre son existence de Surplus à Grange Hall. Elle n'avait pas trois ans, alors. Appliquée et consciencieuse, Anna a acquis la certitude que ses parents étaient des égoïstes, que sa place n'est qu'un concours de soumission et de brimades répétées. La directrice, Mrs Pincent, a réussi là un lessivage du cerveau absolument prodigieux.

Puis, débarque un jour Peter, un adolescent récalcitrant, trop âgé pour atterrir à Grange Hall, trop vif et intelligent pour être tombé entre les griffes des troupes des Rabatteurs. Alors, pourquoi est-il dans ce pensionnat ? Il s'approche d'Anna et lui murmure qu'elle est l'enfant désiré de parents aimants, qu'elle porte un nom de famille et qu'elle n'a pas sa place chez les Surplus. Autant de propos qui ne peuvent qu'ébranler une jeune fille résolue de sa pitoyable condition...

Savamment, le roman déroule le fil de son histoire et parvient sans conteste à nous toucher et nous émouvoir. Ceci est une fiction futuriste, et pourtant le récit est truffé d'éléments auxquels on ne peut résister et s'empêcher d'y croire ! C'est bluffant. Cela fait froid dans le dos. Imaginez un monde où l'on peut vivre sans fin, mais au prix de sacrifier la jeunesse. Renier l'importance du renouvellement souligne la profondeur de l'égoïsme et de la bêtise du programme de la Déclaration. Et c'est avec un soupçon de profondeur que s'écrit l'histoire d'Anna, personnage très attachant, qui s'entête avant de comprendre ce que signifient l'endoctrinement et l'amour ! Et puis il y a aussi beaucoup d'émotion, du suspense (un peu de précipitation vers la fin, mais les violons peuvent entreprendre leur mélopée avec passion !). C'est captivant du début à la fin, sensible, inquiétant et intelligent. Une lecture brillante !

Naïve, collection naïveland - 366 pages. Traduit de l'anglais par Nathalie Peronny.  16 €

A été lu par Mélanie aussi !

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5 janvier 2008

Janvier, mois des étrennes ! En poche ! #10

Et des sorties en format poche ... pour tous les goûts ! (Comme d'habitude, je n'évoque que les livres que j'ai personnellement lus !)

Carla on my mind, Cyril Montana : Une nouvelle fois, pas facile d'entrer dans l'histoire de Cyril Montana - on y saute à pieds joints et, instantanément, on se sent largué. Tout comme le héros débonnaire et réfractaire de ce roman. Un jeune parisien, tout ce qu'il y a de plus contemporain et caractéristique à son époque. Débauché et déprimé, speedé et floué, il sort d'une relation mal décatie. La source de son mal : Carla, "moitié beur, moitié italienne. Des grands yeux noirs, un charme incroyable et une tendance très nette à vouloir masquer sa féminité". Ces deux-là s'aiment, mais mal. Leur relation connaît des hauts et des bas, surtout des bas. Et cette fois-ci, la rupture semble franche et durable. Or, pas facile d'avaler la pilule et de consommer l'absence de sa dulcinée. Donc, pour tenter de l'effacer de son disque dur, il entreprend plusieurs magouilles, dont s'inscrire à un club de rencontres sur internet. Mais les cyber-liaisons sont autant d'épisodes cocasses et saugrenus qui peuplent la série de déconfitures qui sont le lot quotidien du jeune héros. Que ce soit au boulot, avec sa colocataire ou au coeur du métro parisien, le narrateur rame sec. Même s'il s'échine à voler des vélos, il n'en sort pas moins qu'il pédale dans la semoule !

Pour la grande littérature, on repassera. "Carla on my mind" équivaut à du pur divertissement, avec un langage et un style très modernes, une tonalité à faire jeune et branché envers et contre tout. Les séquences sexe et drogues côtoient les épisodes d'amertume et déconfiture, à croire que ce soit indissociable. C'est juste ce que je trouve reprochable : la tendance trop facile à parler cru. Pourtant, comme pour "Malabar trip", j'aime beaucoup, je trouve que la lecture est agréable, plaisante et drôle, malgré tout.  * J'ai Lu, 4.20 € *

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fenetre_sur_hudsonUne fenêtre sur l'Hudson, Brian Morton : Nora, une jeune nouvelliste de trente-cinq ans, a cessé d'écrire. Ses textes, inspirés des expériences de ses proches, lui ont valu de se brouiller avec eux. Pourtant, elle ne peut se résoudre à renoncer à sa vocation. Un soir d'insomnie, elle appelle le seul être qui puisse la comprendre : Isaac, l'homme qu'elle a quitté cinq ans auparavant. Ce dernier, photographe, traverse lui aussi une crise : il a perdu l'inspiration. Aussitôt renaît leur ancienne complicité, et avec elle son lot de doutes et de peurs.

Brian Morton vient de signer un roman à la fois simple et prenant. C'est une histoire de sentiments, de rapprochements entre deux êtres qui pensaient être faits l'un pour l'autre. Les obstacles pour leur belle idylle sont d'ordre artistique, ils sont tous deux au pied du mur et l'essor de Nora fait vaciller le statu-quo d'Isaac. Ils sont complices, se croyaient invicibles, et pourtant... une nouvelle peut tout ruiner. S'ajoute aussi la maladie de Billie, la tante de Nora, le dernier pilier de la jeune femme. La perte de celle-ci fait tout voler en éclats, Nora et Isaac se retrouvant soudainement face à face, pour de vrai. Pas facile, même s'ils pensaient bien se connaître, avec le temps. Ce roman est magnifiquement écrit, il y a peu d'élans, beaucoup d'introspection, et une mine d'anecdotes littéraires pour chaque circonstance. Une petite pépite !  * 10-18, 9.30 € *

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les_autres__ferneyLes autres, Alice Ferney : "Personnes susceptibles s'abstenir" était la règle préconisée par ce nouveau jeu de société qu'a offert Niels à son frère Théo, lors de sa soirée d'anniversaire. Sont réunis leur mère, les amis et fiancées. Tous s'engagent dans ce jeu brûlant qui a pour but de délier les langues et mettre à jour les vérités cachées. Que pensent les uns et les autres, les uns sur les autres, les uns des autres ?
Ce roman délie la parole, ouvre la boîte de Pandore. Il est décomposé en trois parties, d'abord on lit les pensées des protagonistes, puis on assiste à la joute verbale, puis on prend le pas du narrateur, de l'auteur qui décrit ce repas suicidaire avec toute l'élégance et la subtilité qui caractérise l'écriture d'Alice Ferney. C'est d'une poésie inqualifiable, tant sur la valeur des sentiments, sur le poids de la maternité et la féminité (thèmes abordés dans le roman).
Au cours de cette soirée, certaines paroles auront été lâchées et ne pourront plus être rattrapées. Les personnages ont tous bien conscience de cet enjeu mais ils foncent tête baissée. Un peu abasourdis, écoeurés, révoltés mais exaltés "d'être avec les mots comme des poissons dans l'eau". Ce roman donne enfin le pouvoir au langage, aux mots et à la langue éclatante et qui s'exprime, se libère. Il ne met pas en péril le sentiment de l'amitié car, après tout, un personnage le souligne : "Sans amitié, pas de confidences ni d'aveux ou de révélations, pas de critique profonde et transparente. En ce sens les amis, pour le bien qu'ils essaient de nous faire, sont aussi cruels que les ennemis qui nous souhaiteraient quelque mal.".
En un mot comme en cent, ce roman est magnifique, tout en grâce et dénuement, et dont le point final sera : "Qui peut croire que les mots servent la vérité ? Qui sait ce qu'ils tranforment vraiment en nous ? Quel est ce pouvoir qu'on leur prête ?". (La réponse est cachée dans ce livre !)    * Babel, 9.50 € *

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aupr_s_de_moiAuprès de moi toujours, Kazuo Ishiguro : Je ne reviens pas sur l'histoire du roman qui doit garder son aura de mystère pour préserver son intérêt. La quatrième de couverture est elle-même judicieusement rédigée : ni peu, ni trop. Le bon dosage ! Donc, de manière plus poussée, j'ai du mal à m'avouer complètement séduite par ce nouveau livre de Kazuo Ishiguro. J'adore cet auteur, je suis admirative de son style et surtout de sa maîtrise à mener son sujet, à ne pas sortir des sentiers battus, à diriger son lecteur en le bichonnant vers une volonté de connaître et tourner la page suivante. C'est du grand art, un grand classicisme déjà prouvé dans ses précédents ouvrages, bref un orfèvre romanesque ! Et "Auprès de moi toujours" est du même acabit : rien à redire.

En fait, j'ai plus été embêtée par le fond du problème, le fond caché de cette histoire. Le pourquoi de ces trois personnages, Kathy, Ruth et Tommy, et leurs années passées dans un centre appelé Hailsham. Au fur et à mesure qu'on en découvre davantage, d'abord on se pose de plus en plus de questions, et lorsque la fin apporte toutes les réponses, j'étais décontenancée, un peu au bord du malaise. Le sujet dont traite Ishiguro ici est très délicat et sensible. Il me rappelle un roman de Philippe Claudel ("J'abandonne"). Donc, à la fois perplexe et émue, j'ai basculé d'un instant à l'autre dans de troublants sentiments. Je ne reproche rien au roman en lui-même, il est excellent. La traduction est assez bonne, à part le titre ("Never let me go" est ici traduit en "Auprès de moi toujours") qui laisse penser à une bluette faussement sentimentale. La portée du roman bouleversera tout lecteur, du moins moi je ne suis pas restée insensible.

Je conseillerai à tout ceux qui aimeraient découvrir ce roman de ne pas chercher à trop connaître son contenu avant de l'ouvrir et donc d'aborder la lecture de manière très neutre. Puis, de mettre un peu de côté les critiques dithyrambiques pêchées dans la presse, le présentant audacieusement comme "un chef d'oeuvre". L'attente au tournant risque de faire mal ! A lire !  * Folio, 7.20 € *

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personnages_desesperesPersonnages désespérés, Paula Fox : Otto et Sophie Brentwood sont un couple marié, d'une quarantaine d'années, habitant un pavillon cossu d'une banlieue bourgeoise, sauf que le spectacle dans la rue oscille par moments à la débauche (vagabonds, vomissures, déchets, etc.). Ils n'ont pas d'enfants mais une mercedes et la collection complète des oeuvres de Goethe. Leur histoire vascille suite à la morsure d'un chat errant, Sophie lui offre de la nourriture, compatissante, le caresse et tente de l'amadouer, en souriant, presque fière d'elle et de son acte de grande humanité, et puis, frappée "de stupeur et d'horreur", elle manque s'écrouler, étouffe un cri... Le chat a planté ses dents dans le dos de la main !

Cette morsure produit un effet cataclysmique dans le couple, révélant fêlures et zones d'ombre. Otto s'est brouillé avec son associé, et ami de longue date, Charlie Russel, pour cause de conservatisme aigu. Sophie repense à son amant, Francis Early, se fâche avec une amie célibataire, reçoit un coup de fil anonyme, peine à se motiver pour traduire un roman français, pense écrire une lettre à sa mère... Trois jours passent, dans un suspense assez morbide : Sophie a-t-elle attrapé la rage par ce chat errant ?

"Personnages désespérés" est un roman solidement construit, aux dialogues incisifs, aux détails permanents dans la prose et la structure du texte. Paula Fox s'attarde sur le couple Bentwood, homme et femme. Même si l'intrigue semble tourner principalement autour de Sophie, l'époux n'est pas mis de côté, il est même un élément incontournable dans l'émergence des drames (si l'on exclut le chat, bien sûr). En trois jours, le couple s'analyse et la fin semble réparatrice, du moins, tout comme le suggère Jonathan Franzen en préface. Pas moins de six à sept lectures hantent l'auteur des "Corrections" qui cherche encore et encore la réponse à toutes ses questions !  * Folio, 6.80 € *

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samediSamedi, Ian McEwan : Cela m'est difficile de le reconnaître, mais je n'ai pas aimé ce nouveau roman de Ian McEwan. Difficile pour moi d'admettre cet échec car j'apprécie beaucoup les histoires de cet écrivain, un auteur que je trouve admirable et dont le talent littéraire est d'emporter son lecteur dans des situations étouffantes et proches du délire obsessionnel... Pour "Samedi", j'ai eu le sentiment qu'il venait d'écrire son "Mrs Dalloway". Or je n'ai jamais aimé ce roman de Virginia Woolf, peinant à suivre les pérégrinations d'une dame élégante dans les rues de Londres... Ian McEwan vient de reproduire mon cauchemar avec son personnage Henry Perowne, un neurochirurgien réputé qui approche de ses cinquante ans et mène une vie merveilleuse : mariage heureux qui dure depuis vingt ans avec Rosalind, la femme qu'il aime et avec qui il a eu deux enfants, Theo, jeune musicien talentueux, et Daisy qui rentre de Paris suite à la prochaine publication de son recueil de poèmes. Ce samedi, il se réveille quelques heures avant l'aube et aperçoit par la fenêtre un avion en feu. Des bouffées d'angoisse le prennent, nous sommes en février 2003, les spectres du terrorisme sont dans les rues de toutes les capitales du monde.

Le roman raconte donc une journée dans la vie d'Henry Perowne, le 15 février 2003, plus exactement, un samedi comme les autres : câlins dans le lit conjugal, partie de squash avec un confrère anesthésiste, courses dans les beaux quartiers, visite à sa vieille mère dans un hospice de la banlieue et dîner en famille. Puis les clashes surgissent : un avion en feu, une manifestation contre la guerre en Irak, un banal accrochage et la violence qui s'introduit dans son foyer protégé. "Henry aura beau tenter de reprendre le fil de sa journée, ses vieux démons et le chaos du monde le rattraperont sans cesse durant ces vingt-quatre heures, au terme desquelles plus rien ne sera jamais comme avant." (quatrième de couverture).

Il faut attendre longtemps avant que ne surgisse l'action capitale, d'où mon amertume. En attendant, les nerfs sont mis à rude épreuve, on attend beaucoup, et on espére autant. J'ai donc une certaine déception avec ce roman, partout qualifié comme étant l'oeuvre où "le romancier parvient à la plénitude de son talent". La qualité est effectivement incomparable, mais l'intérêt lui se fait un peu mousser... Juste un peu dommage.   * Folio, 7.70 € *

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une_promesseUne promesse, Sorj Chalandon : Une maison en Mayenne, apparemment vide, silencieuse et inhabitée, reçoit la visite de sept personnes qui viennent à tour de rôle pour ouvrir les volets, dresser la table, mettre des fleurs, remonter l'horloge, lire de la poésie à haute voix, etc. Cette maison est celle de Fauvette et Etienne. Ce sont les deux âmes sombres du lieu, maintenues présentes par la lampe et les visites. Les mois passant, la promesse faite par les sept amis commence à peser. Le mystère doit s'éclaircir et la parole donnée doit être revue, analysée, corrigée... oubliée ? Pour faire le point, chacun y va donc de sa petite histoire, qui seule suffira à maintenir en vie le souffle des disparus. Tel est donc le propos de ce deuxième roman de Sorj Chalandon, auteur du "Petit Bonzi". C'est une histoire à la fois émouvante et attendrissante, qui met en lumière les rapports d'amitié et les liens sacrés qu'ont su créer le couple de Fauvette et Etienne avec leurs proches. Les rites qu'accomplissent religieusement les uns et les autres répondent à une exigence secrète, un pacte obscur pour retarder le deuil. D'un côté, on pense à des personnages spectraux, d'un autre on lit l'hymne d'une prodigieuse amitié et d'un amour éternel. Ce roman est un mélange bouleversant entre le beau, le sacré mais aussi la maladresse. Il y a, à certains égards, quelques moments d'étrangeté qui pénalisent le lecteur à être pleinement touché, mais "Une promesse" reste un joli roman...  * Le livre de poche, 5.50 € *  Prix Médicis 2006.

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puisque_rien_ne_durePuisque rien ne dure, Laurence Tardieu : Un couple se retrouve après quinze ans de séparation, provoquée par la disparition de Clara. L'amour de Vincent et Geneviève était lié par leur enfant, mais en partant cette dernière a tout emporté... Le roman est un message pudique du drame causé par la perte d'un enfant, qui ravage tout. A chacun sa façon de surmonter cette épreuve, à sa manière Laurence Tardieu a su imposer un style simple, bouleversant et sans pathos, même si le sujet flirte bien souvent avec les cordes sensibles. Le thème de la maternité et de la perte de son enfant avait été abordé dans le deuxième roman de l'auteur, "le jugement de Léa". "Puisque rien ne dure" affronte plus franchement les zones d'ombre et de lumière, place le lecteur à la place des personnages. De prime abord sombre, mais jamais mélo, le roman se termine sur quelques notes de poésie fort appréciables. A parcourir, sans retenue.  * Le livre de poche, 4.50 € *

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Café Viennois, Michèle Halberstadt : Frieda convie sa fille Clara à la suivre dans son périple qui la ramène à Vienne, une ville qu'elle a quittée avec sa famille en 1938, pour échapper aux persécutions antisémites. C'est pour Frieda un retour rempli d'émotions, de tourbillons pour cette femme dont la joie de vivre ne cesse d'étonner la fille. Cette dernière, plus morose, laisse supposer qu'elle traverse une période sombre et mélancolique.
On le découvre sur le tard, après avoir deviné qu'un mal la rongeait, que ce voyage à Vienne allait également la bousculer et lui donner une autre conscience de son identité, de son appartenance à une société.

"Café viennois" est un roman composé de plusieurs morceaux d'histoire : celle de Frieda qui revient à Vienne, celle où Frieda se rappelle son départ précipité en 1938 et les années d'errance pour fuir les nazis, puis celle de Clara, minée et désespérée, qui effectuera seule une nouvelle escapade à Vienne sur les traces du film avec Orson Welles, "Le treizième homme".
Ce roman est une bonbonne à échos, tant de voix se lancent, racontent leurs anecdotes et se culbutent entre elles. La construction est impeccable et rigoureuse. De plus, Michèle Halberstadt a su demeurer très sobre et pudique, au-delà de l'étalage du faste un peu baroque de la capitale autrichienne. On perçoit très bien les failles des façades de rêve, c'est d'ailleurs une peinture de Vienne dessinée sans oeillères : "Vienne majestueuse, baroque, crépusculaire, mais aussi coquette, insouciante, frivole. Vienne indécise, influençable, provinciale, étriquée et mesquine. Vienne exaltée, romanesque, excessive et fatale". Vienne aux deux visages, étalée sans concessions de la part de cette femme non pas remplie de rancoeur ou d'amertume, mais réaliste et désabusée.
Le ton du roman a parfois tendance à frôler le laconisme avant de se ressaisir, et offre des chapitres sur les souvenirs d'une Frieda adolescente fort touchants et captivants. Il y a aussi un goût pour la cuisine viennoise, à travers son chocolat et sa pâtisserie à déguster chez Demel. Oui, on s'y croit, l'eau nous vient à la bouche !
Bref, ce roman est un beau moment de lecture, plutôt agréable, même s'il a tendance à s'éparpiller et emprunter plusieurs directions. J'en garde le souvenir d'avoir lu de très bons passages.   * Le livre de poche, 5.50 € *

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n_attendez_pas_trop_longtempsN'attendez pas trop longtemps, Agnès Marietta : Lors de sa sortie, ce roman avait été poussé par des éloges de la presse, le comparant au roman d'Anna Gavalda "Ensemble c'est tout". C'est autour d'une maison à vendre dans le Vexin que quatre personnes vont se rencontrer, se connaître et voir leurs petites existences évoluer, trembler, bref prendre un nouveau tournant. François Delbreuve est le propriétaire d'une maison qu'il ne souhaite pas céder à n'importe qui et réserve l'exclusivité de la vente à un agent immobilier, Jacques Verniot. Celui-ci est marié à Michèle, ils ont deux filles et la visite de la maison dans le Vexin le bouleverse - c'est la maison de ses rêves ! Clara Miniot, romancière à succès, est la première potentielle acheteuse de la maison. Elle est célibataire, mère d'un grand garçon qui la désespère par son aspect trop conventionnel. La maison dans le Vexin n'est pas son coup de coeur, en fait elle est plutôt troublée par sa rencontre avec Verniot. Puis, débarque en grandes pompes Nathie Desmarets, mariée avec des enfants, un peu débordée par sa vie, entre trop travailler et ne plus travailler... c'est une femme qui a besoin d'événementiel, de "poésie" !

La maison dans le Vexin cristallise tous les désirs cachés des uns et des autres. Elle devient un catalyseur de sentiments enfouis qui doivent, comme par enchantement, exploser et voir le jour. Ce roman, tant comparé à celui d'Anna Gavalda, n'a finalement en comparaison de procurer un bien gentil plaisir de lecture. Je n'ai pas trouvé dans celui d'Agnès Marietta ces dialogues qui font mouche, ce style alerte, faussement simple et percutant. C'est honnêtement une belle histoire, même si les personnages sont un tantinet bêtas (je pense au couple de Jacques et Clara). Certains noeuds se défont un peu trop vite à mon goût. Mais l'ensemble est très agréable à lire, cela fait rêver à un coin de campagne mais ne me porte pas non plus à tout lâcher pour vivre l'aventure. "N'attendez pas trop longtemps" est un roman plaisant et attachant dans lequel on peut y trouver sa place, mais il a aussi certains aspects agaçants et décevants si l'on s'entête à le comparer à un autre. Bref, mettez tout de côté et lisez-le pour vos vacances !  * Pocket,  6.30 € *

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A perte de vue, Amanda Eyre Ward : Trois soeurs grandissent dans la petite ville de Holt, près de New York, en se serrant les coudes. Leur vie de famille n'est pas rose : le père boit et la mère a perdu tout sens de la réalité en planant à dix mille pieds. Un jour, elles décident de changer de vie et font le projet de fuguer vers le sud. Cependant, au moment de partir, Ellie, la plus jeune âgée de cinq ans, disparaît. Seize ans plus tard, Madeline, la cadette, tente de convaincre sa soeur Caroline et leur mère de déclarer la jeune fille morte, pour les besoins d'une autre affaire criminelle. Les deux femmes refusent, elles ont chacune l'espoir de retrouver Ellie. D'ailleurs, leur mère pense avoir retrouvé la trace d'Ellie dans le Montana. Elle supplie Caroline de partir à sa recherche.

"A perte de vue" est un roman où l'on parle d'amour, de drame et de mystères. A partir de la disparition d'une gamine de cinq ans, une famille va apprendre la dissolution et la reconstruction. Deux soeurs, pourtant unies dans leur enfance, vont se séparer et ne plus se comprendre. Leur vie d'adulte est opposée, l'une vit dans un monde de rêves et l'autre est plus pragmatique. Au centre, leur mère tente d'apporter un équilibre familial, jusque là fragile et bancal, mais elle est elle-même terriblement dévastée. La disparition d'Ellie est restée une plaie béante, un mystère, un drame secret, qu'il faut soit étouffer et ne plus évoquer, soit entretenir pour ne pas oublier. Ce roman est une leçon d'espoir, d'espérance. L'héroïne principale, Caroline (on suit longtemps ses monologues) est une attachante célibataire de 32 ans, qui cherche également à fonder sa propre vie, sur les décombres du passé familial. Roman d'apprentissage ou, tel un road-movie, l'histoire va se construire pas à pas, avec des flashbacks, "A perte de vue" est un roman étonnant, accrocheur et construit avec intelligence. Ce livre a été une agréable surprise pour moi, je vous le conseille !  * Pocket, 6.30 € *

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la_voixLa voix, Arnaldur Indridason : Dans un grand hôtel de Reykjavik, le corps du Père Noël a été retrouvé mort poignardé. Cet homme était en fait le portier et portait accessoirement le costume rouge pour le goûter d'enfants organisé par le directeur. Il logeait depuis des années dans un cagibi dans les sous-sols de l'établissement, ne faisait pas de vagues et pourtant son sort semble ne préoccuper personne. Voilà une chose qui intrigue le commissaire Erlendur, s'installant au coeur de l'hôtel pour mieux enquêter, fuyant également l'esprit des fêtes qui galope autour de lui.
Erlendur cherche, questionne, s'interroge. Il découvre que le mort n'était pas celui qu'on pensait, qu'il était une vénération dans sa jeunesse, et que son passé peut donc figurer parmi l'élément clef de son homicide.
Comme toujours, les fouilles d'un autre temps permettent d'alimenter l'intrigue présente. On croise, cette fois, les ombres des sévices entre un père et un fils, un harcèlement moral et une récente enquête sur laquelle travaillent ses collègues et qui fait étrangement écho à ce meurtre inquiétant.

Arnaldur Indridason a été révélé grâce au succès époustouflant de "La femme en vert" et il confirme avec "La voix" son incroyable potentiel à mener son lecteur dans des chemins troubles, boueux et glauques. Sa maîtrise de la trame policière est impressionnante, jamais ennuyeuse car les rebondissements surgissent très facilement. L'intérêt est maintenu du début à la fin. A cela, s'ajoute le charisme des personnages, Erlendur et ses inspecteurs, plus les silhouettes d'Eva Lind, qui tente de surmonter le trauma de la perte de son bébé, et du frère d'Erlendur (un drame dans l'enfance qui continue de hanter le commissaire). C'est en bref un roman noir et policier très haletant, où l'ambiance oppressante côtoie l'opacité des âmes humaines. En étant à la fois sinistre et émouvant, ce genre de roman vous aggrippe pour ne plus vous lâcher avant la dernière page.  * Points policier,  7.50 € *

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Bonnes lectures, amis lecteurs !

22 décembre 2007

Notre chouchoute de l'année 2007 !

L'année fut définitivement divine et idyllique ! ...

Voici deux chansons qui figurent parmi le top 5 de nos préférées !

Elles deviennent - sans conteste - l'hymne de ce blog tout rose ...

Les mots sont, les mots font, les mots disent
Les mots coulent, les mots roulent sur un fil
Moi, je laisse ces microbes, ces missiles
Aux bavards, aux poètes si possible

...

Vous avez saisi c'est fusionnel
L'un a ses idées et l'autre ses ailes
Alors les séparer devient criminel
A se faire incendier sur la grande échelle

21 décembre 2007

Charlotte & Anne Brontë

Dans leur presbytère à Haworth, les enfants Brontë avaient pris goût à l'écriture de petites sagas d'un genre exaltant. Charlotte et Branwell, par exemple, avaient inventé un royaume imaginaire, Angria, d'où l'épisode L'Hôtel Stancliffe a été rédigé vers l'époque 1837-1839.

hotel_stancliffeIl est important de lire la préface pour comprendre le contexte. Angria est en fait un comté divisé en sept provinces, qui a connu un début de soulèvement depuis la tentative d'insurrection d'un ex-allié de Zamorna, actuel roi de Glass Town. Au moment de L'Hôtel Stancliffe, Zamorna a repris le pouvoir, tandis que Northangerland, son gendre et ancien Premier Ministre, vit en exil, il est vieux et malade, ne sort plus de sa propriété campagnarde. L'histoire est racontée par Charles Townshend, jeune dandy cynique et flegmatique.

L'Hôtel Stancliffe est en fait une suite de tableautins, un genre très courant dans les années 1830, et qui donne une impression de successions d'esquisses qu'on lit sur le pouce, sans réelle passion. Je ne témoignerai pas d'un vif intérêt pour ce petit texte inédit, qui aura toutefois le bon goût d'agrémenter ma collection sur les soeurs Brontë. Sans cela, amère déception.

Editions du Rocher - 160 pages. Traduit de l'anglais par Philippe Mikriammos.  16,90 €

A été lu par Lilly aussi !

J'ai aimé ce passage : 

« ... je remarquai les mouvements d'une belle femme qui semblait atendre quelqu'un à la porte du magnifique magasin d'un marchand de tissus, juste en face. Écartant le store vert, je tentai d'attirer son regard en sortant une tabatière en or sous prétexte de prendre une pincée et en exhibant du même geste deux ou trois bagues voyantes dont s'ornait mon aristocratique main. Son oeil fut attiré par le scintillement. Elle me regarda entre une profusion de boucles, brillantes et soyeuses, quoique de l'authentique teinte angrienne. Puis son regard, me quittant, revint à sa robe de soie verte et à ses jolis pieds chaussés de sandales. J'eus l'impression qu'elle avait souri. Qu'elle l'eût fait ou non, je ne manquai pas de lui retourner le compliment par un sourire des plus séduisants. Elle rougit. Encouragé par ce signe de connivence, je lui envoyai un baiser de la main. Avec un petit rire nerveux, elle battit en retraite dans le magasin. Pendant que je m'efforçais vainement de suivre sa silhouette, dont n'était plus visible que le vague contour à l'intérieur de la boutique assombrie par des rubans de soie qui voletaient et des échantillons d'indienne accrochés à la porte, on me toucha le bras. Je me retournai. »

Pour compenser cette frustration, je vous suggère de passer à autre chose. Dans la famille Brontë, je demande la petite soeur Anne et vous encourage la lecture de ce classique méconnu...

agnes_greyAgnes Grey est la cadette d'un couple de pasteur dont les revenus financiers ont été réduits drastiquement, suite à une sombre affaire de déshéritage (à cause d'un mariage entre classes différentes). Le presbytère où la famille demeure est situé au coeur des landes anglaises, dans une petite ville qu'Agnes devra bientôt quitter. En effet, elle décide de devenir gouvernante et part chez une famille, les Bloomfield, qui mettra à rude épreuve sa confiance, sa foi et sa croyance en des préceptes élémentaires (je vous laisse le bonheur de les découvrir !).
L'expérience qui suivra sera un tantinet différente, lui faisant côtoyer un univers plus raffiné, certes, mais hélas pourri en gâteries, effronteries et mesquineries de la part des enfants dont elle a la charge. Fort heureusement, notre Agnes fera vite l'apprentissage des rouages de la vie, auprès de la jeune Rosalie Murray, une jeune et ravissante intrigante, qui cherche à se parfaire dans le mariage (pas de commentaire, c'est l'époque !).
L'existence très ordinaire d'Agnes Grey se veut sans charme et sans attraits, jusqu'à l'apparition du suffragant du pasteur, Mr Weston. C'est sans compter sur la sainte espiéglerie d'Anne Brontë, qui décide savamment que la route pavée vers l'amour est diantrement cahotique !..

Agnes Grey rassemble donc tous les ingrédients délicieusement désuets de ces romans romantiques anglais, qui ont fait la gloire de Jane Austen et des soeurs Brontë. Anne, la moins connue des trois, signe un très pertinent roman avec Agnes Grey empreint d'une ironie mutine, d'une fraîcheur sans égale et d'un ton décalé qui fait plaisir à lire à l'heure actuelle. Plus jamais on ne lit ces accès de pudibonderie, de réserve, de tourmentes intérieuses en proie aux feux de la passion ! Il fut un temps où les jeunes filles rosissaient de confusion, faisaient commerce avec des galants hommes, étaient "rongées par l'affliction, harcelées par l'inquiétude, ou durablement oppressées par des sentiments puissants" et se refugiaient dans la poésie. Un temps où la littérature portait une lettre majuscule, où l'on encensait les sentiments purs, la nature et les vicissitudes de la condition féminine - qu'on soit pauvre ou riche, belle ou laide. Un très, très bon roman, tout en raffinement !

Gallimard, coll. L'Imaginaire. 298 pages. 8,00 €

20 décembre 2007

De quoi se changer les esprits

Quelques emplettes de dernière minute, des suggestions en dernier recours pour des lecteurs impatients et gourmands d'un genre de plus en plus en vogue...

susan_cooperWill Stanton, un enfant de onze ans, voit sa vie bouleversée lorsqu'il découvre qu'il est le dernier né des Grands Anciens, ces immortels au service de la Lumière qui luttent contre les Ténèbres, et qu'il lui faut retrouver les Six Signes de la Lumière pour sauver le monde. Ce livre avait déjà été publié en 2005 et ressort aujourd'hui en même temps que l'adaptation cinématographique  « Les portes du temps » ; il fut par ailleurs édité dans les années 70, rencontrant un énorme succès auprès des lecteurs américains.  « A l'assaut des Ténèbres », connu sous le titre de The Dark is rising, s'inscrit dans une série de cinq tomes (qui n'ont jamais été traduits jusqu'à présent !).

Les ouvrages de Susan Cooper s'alignent à la tradition des histoires de Tolkien ou C.S Lewis (qui furent les professeurs de l'auteur). On pénètre un univers truffé de magie, de fantastique et partagé entre le bien et le mal. Les chevaliers des ténèbres, dont le Cavalier Noir, rappelle ceux du Seigneur des Anneaux. Et plus de nos jours, ce livre pourra également faire penser à la série de Joseph Delaney et son Epouvanteur (on retrouve l'idéologie du septième fils d'un septième fils, par exemple).

L'histoire a de quoi séduire les adolescents férus de ce genre d'action car reconnaissons que le roman de Susan Cooper réunit tous les canons de la littérature fantastique.

Folio junior - 395 pages -   7,00 €  (existe en Hors-Série, pour le prix de 15 €)

Traduit de l'anglais par Philippe Morgaut. A partir de 10 - 11 ans.

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Place à une petite merveille qui a déjà eu le don de me surprendre ! ...

L_alphabet_des_revesDans une grotte de la cité des Morts, vivent Ramin et son jeune frère Babak. Ce sont les descendants d'une famille royale, qui connaissent aujourd'hui l'exil décrété par le roi Phraates. Ramin porte le déguisement d'un adolescent de 14-15 ans et masque sa véritable identité de fille - Mitra - pour subvenir aux besoins de son petit frère. Ce dernier est fragile, mais révèle un don extraordinaire : les rêves prophétiques.

Pensant que cela permettra aux enfants de sortir de leur misère, Ramin accepte de négocier avec Zoya, une vieille commère qui vit également en paria, les capacités de Babak. Mais très vite la jeune fille réalise son erreur et comprend que son frère est prisonnier de sa condition, qu'il est même menacé et qu'il leur faut fuir pour éviter que les Yeux et les Oreilles du roi surprennent ce jeune prodige.

Alors Ramin et Babak rejoignent la caravane du mage Melchior, mais de nouveau le jeune garçon est sollicité pour décrire ses rêves. Babak a parlé d'étoiles, et l'attention du mage a semblé atteindre un intérêt vif et acéré. Le temps sera trop court pour en apprendre davantage, qu'aussitôt Ramin décide de suivre une nouvelle piste pour retrouver son frère aîné Suren, qui a disparu sans laisser de traces. Car le but dans la vie de Ramin - Mitra - est de parvenir à atteindre Palmyre où elle pense retrouver sa famille qui vit là depuis la tentative de renversement du roi orchestrée par leur père.

L'histoire est passionnante, absolument époustouflante, riche en rebondissements, exaltante et dépaysante. L'épopée de Ramin et Babak nous entraîne dans le désert, à une époque lointaine, sur les traces des rois mages - tels qu'on ne les imagine pas un instant ! On est très loin du contexte biblique, ici le roman est brûlant. Il nous raconte le parcours initiatique de deux enfants, plus particulièrement à travers le courage d'une jeune fille qui se déguise en garçon pour passer inaperçue. Tout au long du roman, Mitra n'aura de cesse de douter, de prendre des décisions qui ne sont pas toujours les meilleures. Et en chemin, elle connaîtra aussi ses premiers sentiments amoureux !

Incroyablement surprenant, ce roman de Susan Fletcher se lit d'une traite, guidé par un style entraînant. L'histoire a tout du conte, le lecteur est envoûté du début à la fin. Et pas un instant il ne regrettera le temps passé entre ses pages !

Folio junior - 456 pages. Traduit de l'anglais par Philippe Morgaut. Titre vo : Alphabet of dreams. 7,50 € 

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17 décembre 2007

C'est pas que pour les enfants !

La bonne confiture du jour, c'est un mélange de lectures publiées sous l'étiquette jeunesse mais, comme je m'escrime à le dire, ce n'est pas réservé qu'aux enfants ! ... Tout adulte pourra y passer un bel instant, savourant la générosité et la facétie des styles divers.

Alizé apprend un jour par sa mère que son père, qui avait besoin de souffler un peu, était sorti prendre l'air. La petite fille en conclut alors que son père n'est autre que le Vent. Au cours de vacances au bord de la mer, elle tombe amoureuse du moniteur de windsurf et pense ainsi que son destin s'accomplit : la fille du Vent ne peut s'unir qu'à un sublime sportif qui ne manque pas d'air.

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C'est MA découverte et un enchantement profond. Audren aime butiner la planète, découvrir des lieux, comparer des cultures, voyager. Elle aime rompre le train-train quotidien en chantant et en écrivant des romans, des poèmes, des chansons. On l'apprécie pour son univers si particulier, son humour décapant et ses personnages peu ordinaires.
Une bombe terroriste dans un hôtel, une maladie éprouvante, la mort et le danger l’ont quelquefois frôlée. Depuis, elle vit chaque instant comme un bonus de bonheur.  (présentation de l'éditeur l'Ecole des Loisirs)

Son site : http://audrenofficialweb.free.fr/

Dans ce livre, j'ai été enthousiasmée par la petite narratrice de 9 ans qui souffre de l'absence de son papa courant d'air. L'expression est jolie, mais l'enfant a opté de la prendre au pied de la lettre. Peu avant sa naissance, le géniteur a pris la poudre d'escampette, et c'est devenu ainsi Papa Le Vent. Alizé est la fille d'un courant d'air. La fille du vent. C'est ce qu'a dit sa maman. Pour mieux communiquer avec lui, Alizé est convaincue de sentir sa caresse dans le souffle d'une brise, ou de subir sa colère à chaque bourrasque ou rafale de vent.

L'histoire joue  beaucoup sur les images, la poésie et les expressions et donnent lieu à des chapitres savoureux. Il y a aussi énormément de tendresse, de l'humour et il me semble impossible de ne pas s'attacher à cette Alizé, qui se décrit volontairement comme « poète et super-chieuse. A défaut d'être encore la fille du vent, je restais la fille d'avant. »

Extrait :  « Il avait dit à Maman qu'il sortait prendre l'air et qu'il avait besoin de souffler. Ce qui, venant du vent, ne m'étonnait guère. Depuis ce départ, Maman craignait exagérément les courants d'air. Elle se plaignait d'avoir froid à la moindre brise et refusait d'aérer la maison dès que les feuilles des marronniers de notre avenue frémissaient, trahissant ainsi quelques doux zéphyrs. Une épaisse couche de laque fixait en permanence ses cheveux mi-longs, car aucune bourrasque ne devait avoir emprise sur elle. »

Collection Neuf - 53 pages - 7,50 €   * Illustration de couverture : Soledad Bravi *

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Etienne a toujours detesté lire. Mais voilà que ses parents divorcent. Le soir de l'annonce, seul, perdu, enfermé dans le bureau de sa mère, Etienne attrape un livre. Un recueil de nouvelles de Salinger. Etienne plonge dans l'histoire. Il se distrait de la sienne. Il devient curieux des livres, au point d'avoir envie d'en écrire un.

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La narration est étonnante puisqu'elle implique que c'est l'adolescent de 16 ans qui livre son manuscrit entre les mains du lecteur. Se présente alors un mélange d'histoire à raconter et d'apartés à livrer sur la complexité d'écrire un livre, d'inventer et de délivrer des pans de sa vie personnelle.

Le garçon qui ne pouvait pas voir les livres en peinture a une réputation à tenir : celui d'être non lecteur, de détester les livres.  « Que tous ceux qui rabâchent que, pour faire aimer la lecture aux enfants, il suffit de les faire vivre entourés de livres, arrêtent de se raconter des histoires. Moi, j'ai toujours baigné dedans, au point qu'ils ont fini par me noyer. » C'est un peu la faute de son père, lecteur assidu de Dumas qu'il aime à lire et relire une à deux fois par an, et qui a harcelé le garçon pour s'y mettre un jour ou l'autre. Viendra ensuite le divorce de ses parents, et sans relation aucune, la rencontre avec Salinger (puis avec une certaine Cindy).

« J'ai eu envie de lire. Le titre m'avait tiré un sourire : c'était peut-être ma façon de lui être reconnaissant. A la cinquième ligne, il y avait le mot sexe, c'est aussi une raison que je peux avancer pour tenter d'expliquer mon soudain intérêt. »

J'hésite à parler de miraculé de la lecture car ce livre n'en fait pas systématiquement l'apologie. Lisez des livres, vous sauverez votre peau ! Non, c'est une parenthèse ouverte dans la vie d'un adolescent de 16 ans, fils de parents divorcés, qui connaît un réel défoulement dans l'écriture et les mots (petit étalage d'auteurs et de lectures pour dessiner ce parcours du combattant, on y croise aussi bien Dan Brown, Christine Angot, Jane Austen et Shakespeare). Ces observations servent aussi à tracer de balbutiants rapports amoureux, la relation sexuelle et c'est franchement drôle !

Jamais pathétique, ce portrait d'un adolescent d'aujourd'hui est tout sauf celui de l'étendard au nom d'une génération. C'est fin, bien déduit et captivant. On passe joyeusement de la réflexion de l'apprenti écrivain au lecteur malgré lui, au fils manipulé et à l'amoureux dupé. Ce portrait est une bouffée d'oxygène, servi par une écriture originale et qui ne pourra que plaire aux jeunes lecteurs !

Collection Medium - 94 pages - 8 €.   

A lire : l'article de Blandine Longre

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Madeleine Delande est le seul écrivain au monde qui n’écrit qu’avec des gants. Elle enfile une paire de gants en dentelle, de golf, avec un trou, rouges et très longs, et les mots, comme par enchantement, surgissent, grondent, s’emportent, n’en font qu’à leur tête.
Sur ses mains, l’habit fait l’histoire.Il suffit qu’elle porte des gants en dentelle et la jeune Annaig, apprentie dentellière sur son île bretonne au début du xxe siècle, apparaît à sa table d’écriture. Si elle décide d’habiller ses doigts de mitaines en cuir, la passion se déchaîne et un étrange visiteur susurre des phrases brûlantes d’amour à une belle Emma. D’où viennent les mots de cet écrivain ? Quel est son « truc » pour inventer la vie des autres ? Pourquoi les langoustines sont-elles la clé de cette énigme ?
Ce qui est certain, c’est que les costumes de Madeleine n’ont de cesse de la conduire de plus en plus loin...

autobiographie_d_un_fantome

Autour de Madeleine Delande, l'écrivain qui porte des gants, s'inscrivent des histoires toutes plus différentes les unes des autres, et qui prennent leur essence dans la nature du gant ; que ce soit de cuir, en dentelle, de soie ou en nylon, la paire de gants est génératrice d'une magie surprenante. Parfois, l'opération est caduque - mais en règle générale, la productivité est charmante, voir même intriguante.

Ce livre peut se considérer tel un recueil de nouvelles. C'est un ensemble, un filet de courses où on croise des histoires d'amour, l'élixir d'eau sauvage et tout le mystère sur sa fragance incomparable, la lettre de René sur l'exercice de  « que des mots en e, é, è, ê », la pomme de terre d'Irlande et la dentelle qui arrive en Bretagne grâce à Mlle Arabella Hand, la disparition d'Antonio qui désappointe Mlle Zita, et de l'entre-deux au sujet des gants dans l'existence de Madeleine Delande.

« Depuis quelque temps, je n'écris qu'avec des gants ou des mitaines, j'ai inventé un personnage d'écrivain comme ça (pour Autobiographie d'un fantôme), puis ça m'est resté, je choisis les gants qui vont avec l'humeur du moment, je mets aussi des bagues, des bracelets, achetés pour quelques euros, jamais d'or, pas de diamants, mais j'aime que la bague cogne sur la souris, la grosse souris sans fil "Time", ce temps à pile, ou bien ma petite souris qui s'illumine de 7 couleurs sur la mezzanine quand j'écris devant la grande fenêtre. »  sur http://almassyeva.blogspot.com/

Ce livre pourra très facilement séduire les plus grands lecteurs, ceux et celles qui picorent les bons mots, les histoires étranges, le trouble des recueils aux allures chics et folles d'élégance. Ce petit monde d'Eva Almassy a un goût d'extraordinaire, qui casse le lisse et l'attendu, et où se croisent la fantaisie et l'humour. A adopter !  « Adam, gant... et Eve, dentelle. »

Collection Medium - 107 pages - 8,50 €

A lire : l'article d'Angèle Paoli

16 décembre 2007

Sous la pluie ~ Olivier Adam

"Sous la pluie" est un condensé d'émotions, comme les gouttes de pluie qui dégoulinent sur les vitres ou sur Antoine et sa maman, partis se promener en pleine nuit ... "Sous la pluie" c'est le petit-dernier d'Olivier Adam, publié pour la jeunesse. On ne présente plus l'auteur, c'est mon chouchou. Dans ce livre maigrichon, il met en scène un garçon pas comme les autres. C'est Antoine. Il vit avec ses parents dans un lotissement où les murs sont tout blancs. Antoine a une maman atypique, étrange, qu'on peut trouver folle, paumée ou déconnectée. Mais Antoine, comme son père, pense que sa maman c'est la plus belle personne sur la planète, la plus extraordinaire. Antoine va s'en rendre compte quand il va se perdre dans la forêt avec une maman hagarde, prête à tomber de fatigue sur le côté de la route. Pourtant, dans la vie d'Antoine, il y a aussi son copain Cédric, son prof monsieur Desbois, son émission radio avec les chansons dédicacées, les parties en vélo et cette fille hors du commun, la plus jolie, la plus bête des fois : Chloé. Et l'action de "Sous la pluie" se passe en une semaine et quand elle se termine "ça tient du miracle !" selon lui.
Bref, un texte sympathique qui s'adresse aux plus jeunes, ce coup-ci. Non plus aux ados comme "La messe anniversaire". Pour moi, "Sous la pluie" apporte beaucoup de fraîcheur, de gentillesse, d'humour et d'innocence.

décembre 2004

15 décembre 2007

Avez-vous vu Zachary Beaver ? ~ Kimberly Willis Holt

Quand on a presque quatorze ans, qu'on habite une petite ville du Texas, à Antler, où il ne s'y passe jamais rien, la fascination pour la caravane du plus gros garçon du monde harponne Toby et son meilleur ami Cal. Ils vont y rencontrer Zachary Beaver qui vit cloîtré dans sa caravane à parcourir le pays et être observé telle une bête monstrueuse, une bête de foire. Laissé à l'abandon pendant plus d'une semaine, le jeune garçon va se laisser approcher par les deux amis. Toby et Cal vont lui apporter de la nourriture, le sortir au cinéma plein-air et lui proposer d'être baptisé. Entre-temps, Toby n'est pas à cours d'émotions : sa mère a quitté la maison pour un concours de chanteuse de country qui s'éternise, le frère de son meilleur ami leur écrit du Vietnam (l'histoire se passe en 1971) au coeur du bourbier qui n'en finit plus, et son coeur ne cesse de palpiter pour la belle Scarlett Stalling... Bref, la vie à Antler n'est finalement pas un long fleuve tranquille et le climat poussiéreux et orageux va très vite s'abattre sur la petite ville et ses habitants. Au centre du récit, Toby raconte combien les silences et les mensonges cimentent leur petite existence à tous, combien chacun va devoir se surpasser pour faire face aux tempêtes, mettre de côté de vieilles passions pour formenter une solide amitié. Un roman excellent, très bien écrit, qui convient à tous les niveaux. "Avez-vous vu Zachary Beaver?" a remporté plusieurs prix de littérature jeunesse.

décembre 2004

15 décembre 2007

Georgie, la suite (et fin !)

Voici enfin un aperçu des trois derniers volumes de la série Georgie !

 

 

georgie_volume_3Donc, Georgie est à Londres, elle a rejoint Lowell Grey et veut croire en ses chances de bonheur avec lui, malgré l'annonce des fiançailles avec Elise, la demoiselle de haut rang, qui refuse d'être concurrencée par la jeune australienne.

Dans ce tome, Georgie entraperçoit le climat familial chez les Grey - particulièrement exécrable - et doit faire face au tempérament volcanique de la fiancée officielle. Lowell affirme vouloir affronter la planète entière pour vivre son amour avec Georgie.

A tout ceci, vient s'ajouter la venue d'Abel qui parcourt les rues de Londres pour retrouver la jeune fille. Et c'est tout un flot de souvenirs, de nostalgie et d'émotions controversées qui submerge Georgie face à lui. Sa proposition pourra-t-elle faire fléchir l'amour qu'elle porte à Lowell ? Ce dernier sera-t-il assez fort pour supporter le poids des convenances ?

Après un début cucul-la-praline, l'histoire ne peut s'empêcher de collectionner les soubresauts, les éclats passionnels et les points d'intrigue à venir. C'est attrayant ! La distribution des rôles demeure toutefois conflictuel, pour l'heure le personnage d'Abel réunit tous les suffrages - sexy, malheureux et prévenant. Et pourtant, les lecteurs de l'époque (1982) ont préféré Lowell Grey (ce qui me rappelle le cruel dilemme de Candy, entre Terry et le prince des collines, alias Albert ! Pouah !)

Comme toujours, ce volume se termine sur une note de suspense insoutenable !

 

georgie_volume_4

Vive action pour pénétrer dans cet avant-dernier épisode : Abel pense détenir un indice sur la présence de son frère Arthur à Londres. Est-ce lui, le mystérieux Cain, l'objet des tentatives d'assassinat par deux hommes qui sont à la solde du duc de Dangering ? ... Ce dernier a aussi décrété la mise à mort de Georgie - pas moins ! Poussé par sa protégée, Elise la fiancée bafouée, le duc est enragé d'apprendre que Lowell a pris la fuite avec l'australienne, damant le pion à ses projets de mariage convenu.

Parti se cacher en pleine campagne, le couple a bien du mal à joindre les deux bouts. Et Lowell va mal, très mal. Ses jours sont comptés et amènent Georgie à prendre une décision irrémédiable.

Pour soulager la tension dramatique, le scénario s'étoffe de personnages secondaires très caricaturaux, peu crédibles pour incarner la réalité de leur situation, mais qu'importe. L'essentiel est qu'on rigole bien, rien qu'à les croiser ! (Je pense au couple Emma et Dick, ou à Catherine et sa mère dans le volume 3.)

Pour le reste, l'histoire s'assombrit sur le plan sentimental. L'introduction du personnage de Cain donne davantage de confusion dans la répartition des cartes, tout est totalement noueux et accablant. Par ailleurs, la quête des origines de Georgie connaît un sursaut d'intérêt, une piste émerge et augure quelques instants d'artifices poignants (mais tout à fait légitimes) !

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georgie_volume_5Mon premier sentiment, en lisant ce cinquième et dernier volume, est une impression de précipitations, de solutions vite trouvées, de combinaisons miraculeuses à des intrigues brodées depuis le tout début ! C'est un peu fort, peu vraisemblable, mais cela ne va pas entacher le bonheur de lecture ressenti.

Il s'agit donc de la fin pour Georgie : Lowell est parti en Italie, Arthur est prisonnier de la folie d'un homme, Abel n'hésitera pas à se sacrifier pour sauver celle qu'il aime ... Georgie vit dans un tourbillon d'émotions nouvelles, elle se sépare d'un amour pour s'ouvrir à une autre histoire, belle et inespérée. Digne aussi de s'inscrire parmi les passions les plus dévastatrices et dramatiques !

Peut-être que deux tomes supplémentaires auraient été appréciables pour mieux gérer le trop-plein d'action et d'émotion de ce dernier volume. Cela donne un patchwork de chamboulements, un crescendo de sensations. D'un autre côté, la puissance est indiscutable, ces excès conditionnent le lecteur, et les larmes sont au rendez-vous !

Remarquable série, très romanesque et mirobolante ! Le charme des personnages, leur charisme et leur destin maudit sont autant de points extraordinaires. J'ai pris un immense plaisir à me replonger dans ce bain de jouvence, ce fut un vrai régal !

Editeur : Tonkam, Paris - Scénario : Man Izawa - Illustrations : Yumiko Igarashi - en noir & blanc - 5,95 € le volume.

14 décembre 2007

La détective de Noël - Anne Perry

la_detective_de_noelPrésentation de l'éditeur
Pour Mariah Ellison, la grand-mère acariâtre et austère de Charlotte Pitt, ces fêtes de Noël s'annoncent comme un véritable cauchemar ! Être exilée contre son gré chez son ancienne belle-fille, au bord de la Manche, avait déjà mis ses nerfs à rude épreuve, la voilà maintenant obligée de supporter l'arrivée d'une invitée de dernière minute, Maude Barrington. Cette aventurière a passé sa vie à parcourir le monde et, selon Mariah, l'existence même de cette personne est une insulte aux convenances victoriennes. Mais elle ne pourra s'empêcher d'être touchée par sa joie de vivre. Lorsqu'elle découvre un matin son corps sans vie, son sang ne fait qu'un tour. Le médecin conclut à une mort naturelle, mais, pour Mariah Ellison, cela ne fait aucun doute, Maude a été empoisonnée. Dans le plus grand secret, elle décide d'enquêter sur-le-champ et se rend dans la famille de la victime...

C'est devenu le traditionnel conte de Noël, écrit par Anne Perry. Il s'agit du troisième opus, ne mettant plus en scène lady Vespasia en son jeune temps, mais Mariah Ellison, la grand-mère de Charlotte Pitt. Les plus avertis connaissent la recette, un souffle d'Angleterre victorienne, des personnages corsetés dans leurs principes d'éducation, des dialogues ampoulés et une mort mystérieuse, trop belle pour être honnête...
Les ingrédients du succès se trouvent dans la pochette (emballage, époque, affinités envers les protaganistes), mais le propos de ce Grand Détective réside davantage dans les considérations que dans l'action. L'enquête est lente, la grand-mère Ellison fait sa Miss Marple en cette veillée de Noël. Sans quoi, rien de neuf sous le sapin !
Très lisse, plutôt classique, ce genre du whodunit est savoureux et pète-sec. C'est le rendez-vous de fin d'année, et à nouveau j'y retournerai l'an prochain !
Pour expliquer le prix coûteux de cette édition (de 4 € supplémentaires), c'est parce que la couverture est cartonnée, en format poche cependant.

10 - 18 / coll. Grands Détectives - 168 pages. Traduit de l'anglais par Pascale Haas (titre vo : A Christmas guest). 10,00 €

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