08/10/06

La Solution Esquimau - Pascal Garnier

La_solution_esquimauC'est l'histoire d'un roman où Louis, le personnage central, décide de tuer sa mère pour récupérer l'héritage. Puis, il décide d'accomplir le même acte de "bon débarras" pour les parents de ses amis. Hop, ni vu ni connu. Il adopte là la Solution Esquimau : "il tue les parents comme les Esquimaux abandonnent leurs vieux sur un morceau de banquise, parce que c'est naturel, écologique, bien plus humain et beaucoup plus économique que de prolonger leur interminable corvée dans des mouroirs sinistres". C'est également l'histoire de l'auteur de ce roman, un certain Pierre (le mensonge n'est pas loin...). Il est réfugié dans une maison sur la côte normande, reçoit la visite d'une petite amie, d'une adolescente fugueuse, de voisins privés de télévision, et d'un meilleur ami qui est passé à l'acte. Comme Louis !

"La Solution Esquimau" est paru pour la première fois en 1966 aux éditions Fleuve Noir. C'est une excellente idée de la part de Zulma de remettre à l'honneur ce titre franchement hilarant, décapant, immoral et sombre. Humour noir garanti, c'est vrai. Les épisodes entre Louis et son auteur s'adressent quelques messages en écho, mais leur point commun au final est cette désolation permanente : deux paumés, deux déchets célibataires, vie sociale égale zéro. Le roman piétine, l'écrivain tente de puiser l'inspiration dans l'expérience sinistre de son meilleur ami, mais l'entreprise salvatrice de ce dernier inquiète son campagnon. "Je ne suis pas un héro d'un de tes bouquins", lui dit-il. Comment se sortir de ce guépier ?.. Comment rattraper le Louis du roman dans le roman ? La Solution n'est pas si évidente. A ceci, s'ajoute l'impression de flou, de confusion permanente, où fiction et création s'emmêlent les filets. Parfaitement déconcertant, donc forcément intéressant, le roman de Pascal Garnier mérite une révision en toute innocence, le sourire au coin des lèvres...

Zulma

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Index des auteurs du blog

Ici vous trouverez la liste des auteurs présents sur ce blog. J'essaie de maintenir cette liste à jour !  Mea Culpa, la chose ne tient plus depuis de longs mois ! ... L'index accuse des oublis, des manques. Tentez votre chance avec le moteur de recherche ou les tags ! :))

  1. Rafael ABALOS
  2. Milena AGUS
  3. Louisa May ALCOTT
  4. Cookie ALLEZ
  5. Paul AUSTER
  6. Jean Baptiste BARONIAN
  7. Vaikom M. BASHEER
  8. Germaine BEAUMONT
  9. Frank BEDDOR
  10. Dorine BERTRAND
  11. Véronique BEUCLER
  12. Evelyne BLOCH-DANO
  13. Jean Philippe BLONDEL
  14. Paul BOURGET
  15. Sylvie BRIEN
  16. Geneviève BRISAC / 52 ou la seconde vie
  17. Frédéric BRUN
  18. Hervé BRUNETIERE
  19. Truman CAPOTE
  20. Natalie CARTER
  21. Claire CASTILLON
  22. Arnaud CATHRINE
  23. Sorj CHALANDON
  24. Jean Yves CHAPERON
  25. Pierre CHRISTIN
  26. Gabrielle CIAM
  27. Eoin COLFER
  28. Laurie COLWIN
  29. Dominic COOPER
  30. Laurence COSSE
  31. Delphine COULIN
  32. Delphine COULIN - Les traces
  33. Mark CRICK
  34. Frank DARCEL
  35. Marie DARRIEUSSECQ
  36. Kavita DASWANI
  37. Maurice DEKOBRA
  38. Joseph DELANEY
  39. Philippe DELERM  * La tranchée d'Aranberg *
  40. Christian DE METTER
  41. Constance DELAUNAY
  42. Regis DESCOTT
  43. DIASTEME
  44. Chitra B. DIVAKARUNI
  45. Hélène DORION
  46. Renate DORRESTEIN
  47. Christophe DUFOSSE
  48. Courtney ELDRIDGE
  49. JM ERRE
  50. Amanda EYRE WARD
  51. Marie FERRAN
  52. Bernard FOGLINO
  53. Timothée de FOMBELLE
  54. David FONTAINE
  55. Karine FOUGERAY
  56. Gisèle FOURNIER
  57. René FREGNI
  58. Esther FREUD
  59. Charles GANCEL
  60. Pascal GARNIER
  61. Romain GARY
  62. Hélène GAUDY
  63. Vanessa GAULT
  64. Danièle GEORGET
  65. Brigitte GIRAUD / l'amour est très surestimé
  66. Frank GIROUD
  67. Julia GLASS
  68. Anne GOSCINNY
  69. Kerry GREENWOOD * Cocaine et tralalaTrafic de haut vol *
  70. Jens Christian GRONDAHL
  71. Lola GRUBER
  72. Arnaud GUILLON  * Hit-parade *
  73. Sophie GUILLOU
  74. Kirsty GUNN
  75. Hubert HADDAD
  76. Michèle HALBERSTADT
  77. Béatrice HAMMER
  78. Tobia HILL
  79. Alice HOFFMAN
  80. Arnaldur INDRIDASON / La femme en vert / La voix
  81. Sophie JABES
  82. Fabienne JACOB
  83. Isabelle JARRY / millefeuille de onze ans
  84. Hervé JUBERT
  85. Maylis de KERANGAL  *Dans les rapides* / La vie voyageuse
  86. Carolyn KEENE (t1 : nancy drew)
  87. Pablo KRANTZ
  88. Nicole KRAUSS
  89. KRESSMANN TAYLOR
  90. Margaret LAURENCE
  91. Olivier LARIZZA
  92. Leena LEHTOLAINEN
  93. Michèle LESBRE
  94. Hervé LE TELLIER
  95. Claudine LE TOURNEUR D'IZON
  96. Marie Magdeleine LESSANA
  97. Sue LIMB
  98. Catherine LOCANDRO
  99. Erlend LOE
  100. Benoît LUCIANI
  101. Alison LURIE
  102. M.I. McALLISTER
  103. Ian McEWAN
  104. Cécile MAINARDI
  105. MAITENA
  106. Laurent MARECHAUX
  107. Javier MARIAS
  108. Héléna MARIENSKE
  109. Danielle MARTINIGOL  (t1 : les abîmes d'autremer) * t2 : L'envol de l'Abîme * t3 : L'appel des Abîmes
  110. Bénédicte MARTIN
  111. Xavier MAUMEJEAN
  112. Katarina MAZETTI
  113. Maria MERCE ROCA
  114. Renaud MEYER
  115. Vincent MEYER
  116. Bertrand MEYER-STABLEY
  117. Arthur MILLER
  118. Isabelle MINIERE romans / La première marche
  119. Max MONNEHAY
  120. Cyril MONTANA
  121. Richard MONTANARI
  122. Rosa MONTERO  (La fille du cannibale)
  123. Rosa MONTERO - La folle du logis
  124. Christopher MOORE  (Le lézard lubrique de Melancholy Cove)
  125. Christopher MOORE (Le sot de l'ange)
  126. Ulysse MOORE
  127. Brian MORTON
  128. Kate MOSES
  129. Jean Claude MOURLEVAT
  130. Sophie de MULLENHEIM
  131. Catel MULLER
  132. Marie NDIAYE
  133. Tove NILSEN
  134. Gaelle NOHANT
  135. Jean-Pierre OHL
  136. Véronique OLMI
  137. Emmanuelle PAGANO
  138. Thomas PARIS
  139. Emmanuelle PESLERBE
  140. Cypora PETITJEAN-CERF * Le musée de la sirène * / Le corps de Liane
  141. Anne PERRY * La disparue de Noël * Le voyageur de Noël *
  142. Zoyâ PIRZAD
  143. Arnauld PONTIER
  144. Guillaume PREVOST
  145. Michel QUINT
  146. Pascale QUIVIGER
  147. Lucy Daniel RABY
  148. Murielle RENAULT
  149. Nicolas RICHARD
  150. Jorn RIEL
  151. Céline ROBINET
  152. Nicolle ROSEN
  153. Tatiana de ROSNAY
  154. Anna ROZEN (encore) / Vieilles peaux
  155. André François RUAUD
  156. SAKI
  157. Constance de SALM
  158. Michel SCHNEIDER
  159. Philippe SEGUR
  160. Danzy SENNA
  161. Caroline SERS
  162. Diane SETTERFIELD
  163. Dani SHAPIRO
  164. Valérie SIGWARD
  165. Sarah SINGLETON
  166. Isabelle SOJFER
  167. Gunnar STAALESEN
  168. Frank TURNER HOLLON
  169. Jean Louis UGHETTO
  170. Emmanuelle URIEN
  171. Fred VARGAS * L'homme aux cercles bleus * L'homme à l'envers * Debout les morts *
  172. Grazia VERASANI
  173. Enrique VILA-MATAS
  174. Philippe VILAIN
  175. Mélanie VINCELETTE
  176. Ornela VORPSI
  177. Winifred WATSON
  178. Anne WIAZEMSKY  /  Jeune fille
  179. Béatrice WILMOS
  180. Claire WOLNIEWICZ
  181. Virginia WOOLF

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07/10/06

Le cryptographe - Tobias Hill

cryptographeL'histoire se passe à Londres en 2021, mais c'est une très légère supposition d'un roman d'anticipation. Anna Moore est inspectrice des impôts, c'est une jeune femme de 36 ans, célibataire, encore attachée à son ancien amant et mentor, Lawrence. Celui-ci, désormais à la retraite, tente de la mettre en garde contre le nouveau dossier dont elle est en charge : celui de John Law, autrement dit le Cryptographe, l'ingénieur de la nouvelle monnaie virtuelle (c'est là le point avant-gardiste !). Mais le dilemme entre le Fisc et John Law se règle instantanément, sans rechigner. La rencontre entre Anna et John fait des étincelles, l'homme est auréolé des fantasmes que sa situation de multimilliardaire entretient et la jeune femme est impressionnée. Elle cherchera à le revoir et leurs entretiens se passeront à chaque fois avec cette électricité dans l'air. Anna s'introduira dans le bunker familial et rencontrera Anneli, l'épouse de John, et leur fils Nathan. Les secrets sont perceptibles, mais Anna est autrement intriguée.
Quelques mois plus tard, la presse annonce que le système monétaire de John Law est en banqueroute, un virus est en passe de tout raser de la planète. Le monde est en crise, mais John Law a mystérieusement disparu. La police considére Anna comme impliquée dans l'affaire et lui demande de collaborer et de retrouver Law.

Ce roman est étrangement séduisant.. Mais pour moi, le seul aspect qui pêche est l'implication d'une nouvelle économie et d'une monnaie virtuelle, soit le Soft Gold, système paré de longues tentatives d'explications (auxquelles je n'ai pas été sensible, ni réceptive), de la cryptographie, de la corruption du code, des processus transactionnels, du mécanisme du portail, etc. Je n'ai pas tout compris clairement, mais ce n'est pas le plus important car j'ai trouvé que le roman avait d'autres qualités à défendre. Cela repose sur cette étrange fascination exercée par la famille Law sur Anna Moore, sur la relation naissante et balbutiante entre la jeune femme et le cryptographe. "C'est un simple désir, pas comme de l'amour, rien d'aussi compliqué que ça. Ou bien c'est comme un premier amour. Comme une obsession." Le couple de John et Anneli représente la grâce, la beauté, la richesse et le mystère. C'est là qu'intervient la comparaison à Gatsby de Fitzgerald : un microcosme élégant mais trompeur, un certain statisme dans les rapports, la séduction ambivalente... Le roman est assez lent, même si l'histoire se passe en deux ans. On n'a pas l'impression du temps qui passe, mais il règne un indescriptible pouvoir d'ensorcellement, un petit côté rétro dans les personnages alors que l'histoire est en 2021 ! Rien de futuriste, non pas du tout. Ce roman de Tobias Hill est plus une pénétration de l'âme humaine, secrète et pernicieuse, de l'art de duper, de paraître et de cultiver son jardin. Le tout sur un fond d'intrigues financières et de chasse à l'homme. Etonnant, vraiment.

Rivages

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Une fenêtre sur l'Hudson - Brian Morton

fenetre_sur_l_hudsonNora, une jeune nouvelliste de trente-cinq ans, a cessé d'écrire. Ses textes, inspirés des expériences de ses proches, lui ont valu de se brouiller avec eux. Pourtant, elle ne peut se résoudre à renoncer à sa vocation. Un soir d'insomnie, elle appelle le seul être qui puisse la comprendre : Isaac, l'homme qu'elle a quitté cinq ans auparavant. Ce dernier, photographe, traverse lui aussi une crise : il a perdu l'inspiration.

Brian Morton vient de signer un roman à la fois simple et prenant. C'est une histoire de sentiments, de rapprochements entre deux êtres qui pensaient être faits l'un pour l'autre. Les obstacles pour leur belle idylle sont d'ordre artistique, ils sont tous deux au pied du mur et l'essor de Nora fait vaciller le statu-quo d'Isaac. Ils sont complices, se croyaient invicibles, et pourtant... une nouvelle peut tout ruiner. S'ajoute aussi la maladie de Billie, la tante de Nora, le dernier pilier de la jeune femme. La perte de celle-ci fait tout voler en éclats, Nora et Isaac se retrouvant soudainement face à face, pour de vrai. Pas facile, même s'ils pensaient bien se connaître, avec le temps. Ce roman est magnifiquement écrit, il y a peu d'élans, beaucoup d'introspection, et une mine d'anecdotes littéraires pour chaque circonstance. Une petite pépite !

Belfond

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Brooklyn Follies - Paul Auster

brooklyn_folliesL'histoire de Brooklyn Follies est faite de rencontres, d'amitiés et de rêves utopistes. Trois hommes vont fantasmer sur un Hôtel Existence, dans la verte campagne de New York, alors que ces trois-là sont d'indécrottables citadins. Les femmes font aussi pâles figures, des espèces d'icônes frelatées, qui tiennent compagnie quelques pages, vont et viennent en guise de décorum. Mais ce qui m'a fort chiffonnée, en fin de compte, c'est l'impression d'une fin hâtive, d'un arrangement à l'amiable, d'une combinaison parfaite pour que tout finisse bien dans le meilleur des mondes. Sans doute le spectre de septembre 2001 a influencé cette donne, histoire de penser que l'Amérique fait encore rêver, qui sait ? La dernière phrase du roman le suppose.
Bref, "Brooklyn Follies" est une assez bonne histoire, loin de "Moon Palace" ou de la Trilogie NY. Mais j'ai particulièrement aimé quand l'auteur inocule des tartines sur les histoires des grands écrivains, comme Edgar Allan Poe et Nathaniel Hawthorne. Pour le reste, il y a des hauts et des bas (comme le passage dans le Vermont ou les épisodes "Aurora"). Je pense que ce sentiment d'amertume ne sera que passager, et dans quelques temps j'aurai plus le souvenir d'avoir lu un roman foisonnant et terriblement "austérien".

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La traversée de l'été - Truman Capote

traversee_de_l_eteL'héroïne de "La traversée de l'été" s'appelle Grady McNeil, elle a 17 ans et vit dans un appartement qui surplombe Central Park. Ses parents partent en croisière pour l'Europe mais Grady a décidé de passer l'été caniculaire à New York. Ce qu'elle ne mentionne pas c'est son béguin pour Clyde Manzer, un gardien de parking à Broadway, qu'elle fréquente depuis le mois d'avril en cachette. Avec lui, Grady vit des sensations jamais explorées jusqu'alors. Cependant, le garçon se découvre peu, se dévoile difficilement, sa famille, ses amis, ses amours figurent parmi son jardin secret qu'il n'ouvre pas à sa dulcinée. Or, il y a également Peter Bell, le meilleur ami de Grady, puis une mystérieuse Anne et une encombrante Rebecca...

Eté incendiaire, ainsi aurait pu se nommer ce roman "inédit" de Truman Capote. On connaît son histoire : le manuscrit a été retrouvé dans les affaires d'un concierge, remarqué par Sotheby's avant d'être mis aux enchères. "Summer Crossing" (titre original) figure en fait comme l'un des premiers romans écrit par l'auteur, à un très jeune âge (il avait commencé son histoire vers 19 ans). C'est un projet qui a plus ou moins évolué et été entretenu pendant dix ans, pour finalement ne jamais voir le jour. Le manuscrit n'est d'ailleurs pas fini, mais les nombreuses notes de Capote ont permis de porter sa touche finale. Résultat ? C'est une histoire fraîche, pinçante et mesquine, ce n'est pas une oeuvre étourdissante de talent, elle révèle des défauts mineurs en partie à cause de la jeunesse de son auteur. Toutefois, elle annonce déjà des qualités à mûrir, les prémices de "Breakfast at Tiffany's", un esprit pointilleux et rebelle, une volonté de chiffonner les données de la société de convenance, et aussi de parler de New York. Le personnage central, Grady McNeil, n'a pas l'étoffe d'une Holly Golightly, mais c'est également une héroïne en souffrance, un être fragile, secret et désespéré. Elle est fascinante, en un sens. Et cela aurait été fort intéressant que l'auteur travaille davantage sur ce projet, mais s'il y a renoncé c'est sans doute pour une raison ?

Grasset

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L'histoire de l'amour - Nicole Krauss

histoire_de_l_amourAu début, l'histoire est simple, c'est celle de Leo Gursky, vieil homme de 80 ans et qui attend sa mort mais fait tout ce qu'il peut pour qu'on ne l'oublie pas et qu'il évite de trouver la mort dans la solitude. C'est un réfugié polonais qui a migré à New York après avoir réussi à se cacher des nazis durant la guerre. S'il a rejoint les Etats-Unis, c'est aussi pour retrouver son amour de jeunesse, la belle Alma.
Autre histoire dans le roman : une jeune adolescente de quatorze ans, prénommée Alma, découvre qu'elle tient son prénom des héroïnes d'un roman intitulé "L'histoire de l'amour". Ce livre était un cadeau d'amour de son père à sa mère, celui-ci étant mort la mère d'Alma vit recluse et reste fidèle au souvenir de son amour. La jeune Alma est étonnée de découvrir qu'un anonyme a écrit à sa mère pour qu'elle traduise ce roman écrit en espagnol, car le roman semble également beaucoup compter pour cet homme, qui se nomme Jacob Marcus.

A partir de là, les destinées ne vont pas cesser de se croiser, se rencontrer et de dessiner L'Histoire de l'amour. C'est, dans le fond, l'histoire du roman dans le roman. Et Nicole Krauss emprunte la voie labyrinthique pour traverser les mémoires et les histoires d'amour. Oui, c'est un roman qui parle d'amour, assez fou d'ailleurs. Cela convient à ce vieillard qui est tombé amoureux et c'est là toute sa vie, ou à cette jeune veuve détruite par la mort de son compagnon et qui se noie à petites doses, à un père pour son fils qu'il n'a jamais connu, à une adolescente qui veut redonner le sourire à sa maman et qui creuse des tranchées et qui cherche mais sans savoir exactement quoi... C'est un livre entier sur le sentiment amoureux, sur le droit à la mémoire, à la fidélité au-delà de la mort, au respect de la création littéraire. Ce roman de la new-yorkaise Nicole Krauss fait couler beaucoup d'encre dans les articles de cette rentrée littéraire et c'est totalement justifié ! D'abord il est écrit avec une maîtrise étourdissante, puis il est dense, foisonnant, respectueux et d'une très grande élégance. C'est un roman puissant et intelligent, qui ne perd jamais le fil de son histoire et qui repêche son lecteur en toute simplicité. Et hop qu'il nous emmène du côté de la Shoah, à New-York, en Israël ou au Chili, dans le coeur d'une adolescente ou d'un vieillard, et surtout au coeur d'un roman dont l'histoire nourrit L'Histoire de l'amour du début à la fin. Cela paraît brouillon à lire comme ça, mais c'est un roman 5 étoiles et qui est, en toute honnêteté, EPATANT !

Gallimard

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Une divine plaisanterie - Margaret Laurence

une_divine_plaisanterie

  • « Une divine plaisanterie » est un roman drôle et pince-sans-rire autour d'une héroïne de 34 ans, institutrice célibataire et vivant toujours avec sa mère malade dans la petite ville de Manawaka (ville imaginaire de Manitoba au Canada). Rachel Cameron est une cruche attendrissante, gauche et complexée, et qui bien souvent agit le contraire de ce qu'elle pense ! Elle rêve de s'échapper de sa vie étriquée, et pourtant elle y demeure attachée ou paralysée de faire le grand saut. Pendant ses vacances d'été, elle fait la rencontre d'un type qui la séduit et nourrit ses fantasmes d'évasion (se marier, avoir des enfants etc.). Rachel se lance dans cette aventure à corps perdu, ivre de cet amour naissant et, pour elle, porteur de tous ses espoirs cachés.

    « Une divine plaisanterie » figure dans un cycle de cinq romans autour de la petite ville de Manawaka. Margaret Laurence a décidé de donner la parole à une femme seule et dépitée, sans toutefois rendre son récit pitoyable ou malheureux. C'est tout le contraire : le roman est enlevé, rythmé par le grotesque et la dérision. Rachel elle-même se moque de ce qu'elle est, consciente d'être double, triple, quadruple etc. Elle n'assume pas ce qui la ronge, ce qu'elle désire clamer ardemment sur tous les toits. Intérieurement, c'est une femme passionnée et brûlante, mais en vrai elle est timorée, contracte son corps dès qu'on la touche et se mine du qu'en-dira-t'on et des adolescents sûrs d'eux. Ses rapports avec son amie Calla, son directeur Willard, sa mère et son petit ami nourrissent des chapitres d'humour bien souvent involontaire. C'est un régal ! Ce roman n'a pas pris une ride (il est paru en 1966) et c'est à souhaiter que les éditions Joelle Losfeld publient très rapidement la suite de l'oeuvre de Margaret Laurence (auteur décédé en 1987).

extrait : « Les strates de rêves sont si nombreuses, il y a tant de membranes trompeuses qui enveloppent l'esprit que j'ignore leur existence, jusqu'à ce qu'une réalité coupante ne les tranche, et je vois alors les créations de mon imaginaire pour ce qu'elles sont, déformées, bizarres, grotesques, une plaisanterie insupportable si on la regarde de l'extérieur. »

Belfond

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Le dernier train - Maria Mercé Roca

dernier_trainUn couple fait le bilan de sa vie commune, d'abord la femme Teresa est assez agacée et lasse de l'inertie de son époux. Lui, Andreu, est davantage désespéré et paralysé de lui annoncer sa Grande Nouvelle. Car, en effet, le couple au cours de ses vingt-six ans de mariage n'a pas su accorder ses violons, n'a pas su se comprendre et a même loupé l'éducation de leur fille Clara, qui a préféré claqué la porte du foyer pour vivre sa propre vie. Le roman est décomposé en trois parties, dans lesquelles chacun se justifie, plaide sa cause, expose des faits. L'ambiance est teintée d'acrimonie, d'irritation et de fébrilité. A plusieurs occasions, sur des passages presque communs, le lecteur s'aperçoit que le couple n'était jamais en phase, tant sur le plan professionnel et émotionnel, même leur rupture (annoncée) prend un mauvais goût de bâclé et de dialogue de sourds. "On avait l'air d'un couple heureux" dit la femme, "tu me regardais, tendre et ému, plein de gratitude, de confiance envers moi, et tu me faisais de la peine". Lui répond : "entre toi et moi, il n'y a jamais eu de cri ni de disputes, on ne s'est jamais manqué de respect, on ne s'est pas rendu la vie impossible. C'est pour ça que les gens qui nous connaissent ne vont pas comprendre et diront que c'est inconcevable. On a plutôt formé un joli couple toutes ces années : toi plus sérieuse, moi plus distrait, mais toujours ensemble. Tu as toujours tiré ton épingle du jeu. Moi, je me suis souvent planté." - Et le couple n'en finit pas d'analyser leur parcours conjugal, franchement bancal et décalé. C'est un portrait plutôt réaliste et déchanté, la radiographie des couples de cinquantenaires, habitués l'un à l'autre, ennuyés et blasés, mais bon... Ce roman est tantôt cruel mais il est désespéremment actuel.

Métailié

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Symptomatique - Danzy Senna

symptomatique"Avez-vous jamais vu la fin d'une histoire avant même qu'elle commence ?" - C'est la question que se pose la narratrice de "Symptomatique", roman âpre et semi-latent d'une violence liée à la solitude et l'amertume de la mixité. La jeune new-yorkaise fraîchement débarquée de sa Californie natale commence un stage dans un magazine, un peu contre les principes new-age de ses parents baba cool. Elle rencontre Andrew mais leur aventure capote, un peu abruptement. Prise de court, la jeune femme recherche un appartement et c'est une collègue de bureau, Greta Hicks, qui lui trouve la solution. Suite à cela, cette femme de 43 ans va soudainement empiéter doucement dans la vie de la jeune femme. Toutes deux ont en commun d'avoir un père noir et une mère blanche, Greta pense qu'elles constituent à elles deux "une race à part". Car insidieusement Greta s'impose dans la vie de sa jeune camarade, laquelle subit de plus en plus cette "amitié". Le sentiment d'étouffement prend le pas, succède l'égarement combiné à la solitude. Les pas de la narratrice mènent la danse, guident le lecteur dans un New-York plombé par le froid hivernal. C'est la sinistrose, une lente plongée dans des profondeurs abyssales. Et avec ça, il y a une prise de conscience de la haine raciale, de la couleur de peau qui délimite les affinités dans cette Amérique bien tranchée. Ce deuxième roman de la new-yorkaise Danzy Senna est, pour le tout, bien captivant et flippant !

Métailié

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