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Chez Clarabel
16 septembre 2008

Remember me - Claire Delannoy

C'est l'histoire d'une femme qui ne sait plus qui elle est, ni ce qu'elle cherche. Elle est de retour à Paris, avec en poche des adresses et quelques noms. Un soir, elle rencontre en boîte de nuit - au Remember - Vincent, un photographe qui craque pour elle. Une autre fois, elle se lie d'amitié avec Myriam au cours de la promenade de son chien. Elle croise des silhouettes qui ne lui disent rien, mais elle n'a qu'un instinct : fuir, toujours.

Elle s'envole au Québec et s'installe dans un chalet, près d'un lac. Elle y vit aux côtés d'Henry, autre ami commun de sa copine Carla, qui s'est évaporée. L'homme est prévenant, attentif et lui éclaircit ses souvenirs brumeux. Elle le suit pour un voyage à San Francisco, est submergée par les vagues du passé qui reviennent dans un va-et-vient étourdissant. Elle s'appelle Ana, elle a parcouru le monde, elle a aimé un homme - Marco - et sa vie a été en danger, d'où son traumatisme. Aujourd'hui c'est Vincent qui la recherche en publiant une annonce géante en première page du New York Times.

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Du charme, du mystère, de la séduction, des pointillés, des ombres, des grands discours, un cri d'amour, une âme perdue et désespérée... que dire encore ? Au début, le roman fait passablement maniéré et diffus. En choisissant de ne pas lire la quatrième de couverture, on ne devine pas tout de suite quel est le problème de l'héroïne. Ana paraît fragile, elle relève juste de maladie mais on n'en sait pas plus. C'est progressivement que la petite musique se met en marche et cela fonctionne plutôt bien.

Par chapitres courts, d'une plume évanescente et lumineuse, l'histoire s'écrit en s'envolant. Les pages défilent à vitesse folle, on n'a qu'une envie : connaître le secret d'Ana, découvrir son passé, comprendre les raisons de son amnésie. Le résultat est curieux, presque inexplicable. C'est subtil, et j'ai beaucoup aimé. 

Editions Léo Scheer, septembre 2008 - 173 pages - 16€

 

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15 septembre 2008

Les graffitis de Chambord - Olivia Elkaim

Hector est le petit-fils d'Isaac Rosenwicz, libraire parisien, installé dans un appartement des Feuillantines avec sa femme Miriam et leurs deux fils, Aron et Simon. Avec l'entrée en guerre, Isaac choisit de quitter sa famille pour suivre sa maîtresse, Dora, chargée d'une cargaison de tableaux d'art qu'elle va cacher à Chambord. Un réseau se crée, avec d'autres juifs résistants.

Nous sommes en 2006 et Hector vient de recevoir une enveloppe d'un vieux conservateur juif qui prétend avoir connu son père, Simon. Ce dernier avait publié neuf romans tous les six ans avant de cesser d'écrire après la mort de sa femme, Sarah. Pour Hector, son père est resté un mystère, une ombre fuyante. Il partait souvent, sans raison apparente. Le garçon restait seul avec sa mère, qui n'était pas très bavarde non plus. C'était une famille réservée et crispée par les ravages causés par le passé. Les Rosenwicz ont connu la guerre, l'amour, la perte et en ont gardé les cicatrices.

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Par cette histoire, pleine de charme et de secret, Olivia Elkaim nous livre un roman-chorale sur trois générations et parle ainsi de la mémoire et de l'oubli avec pudeur et émotion, mais sans commisération ni pathos. Il y a un judicieux assortiment entre les drames personnels et la réalité historique (Chambord et ses graffitis nous rappellent que les murs parlent). C'est important car on découvre l'histoire avec ce savant dosage d'énigmes à découdre, dans une ambiance empreinte de bouleversement et un décor baroque. On ne résiste pas à tourner les pages pour soulever les dessous de ce drame familial, connaître un peu qui sont les protagonistes, leurs rôles et les incidences.

Voici un extrait qui me touche et qui donne une idée d'ensemble de cette lecture :

"Le groupe Chambord s'est formé ainsi, un peu par hasard, un peu par affinités, par maladies, par épaules déboîtées, par exils successifs, par insomnies incurables, par jalousies et par amour, par peur de la solitude et des bruits de la guerre". 

Les graffitis de Chambord

Grasset, août 2008 - 273 pages - 16,90€

14 septembre 2008

Faux-père - Philippe Vilain

 

 

Le narrateur est un homme qui s'ennuie. Il collectionne les conquêtes, trouve dans l'acte d'amour un trompe-l'oeil et voit filer le temps mollement, sans emballement. Sa rencontre avec la jolie italienne Stefania bouleverse sa léthargie, pimente son quotidien par des aller-retour entre Turin et Paris, bref il n'est pas follement amoureux de cette jeune femme mais il savoure le temps passé auprès d'elle. Quand la belle lui annonce être enceinte, c'est un coup de massue sur la tête. Jamais l'homme n'avait envisagé d'être père, et aussitôt il est saisi d'angoisses, de rejet et de réflexions mesquines envers cette grossesse subie.

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Dans ce livre, Philippe Vilain exprime le point de vue masculin d'un couple qui attend un enfant. Souvent ce sujet est abordé d'après la femme, Faux-Père apporte un regard différent, moins versé dans le sentiment. Cet homme refuse l'enfant à naître mais n'arrive pas à l'exprimer ni à évoquer l'avortement. En face de lui, Stefania s'épanouit, inconsciente et aveugle, naïve aussi. C'est dans son Journal que l'homme fait part de ses doutes et nombreuses questions. Il n'est pas tendre, emploie des termes virulents ("Cet enfant que Stefania attendait, qu'elle avait décidé seule de se faire faire, ne me concernait pas. Pouvais-je considérer ce viol comme une preuve d'amour ?"). Bref, il est embarqué dans une espèce de mascarade, il joue un rôle - selon lui - mais ne sait pas jusqu'où tout ceci va le conduire.

Philippe Vilain est un auteur que j'apprécie beaucoup (Paris, l'après-midi ; L'été à Dresde). Il aborde avec Faux-Père tout ce qui oppose l'homme et la femme dans leur désir d'enfant. Le sujet est glissant, le type goujat et la fille assez cruche, mais le classicisme de la situation pourra opérer son attrait.

Faux-père

Grasset, septembre 2008 - 112 pages - 11,90€

Lire le début 

 

 

L'été, le critique littéraire est plus que jamais à la peine. Pas moyen de s'abandonner aux délices de ses voisins de piscine ou de serviette de plage. Au lieu de se plonger comme tout le monde dans Millenium ou le dernier Fred Vargas, il doit se coltiner un des 681 romans ( ou 652, je ne sais plus ) de la rentrée littéraire. Cette année, j'ai décidé de faire l'impasse: je suis moi-même très occupée à écrire. J'ai donc demandé à ma toujours pétulante complice Anne Eveillard de me donner, en avant-première, son coup de cœur de la rentrée. Dans un Saint-Germain des Prés transformé en désert par la précoce transhumance de tout le petit monde parisien de l'écriture vers l'île de Ré, la Corse et le Lubéron, on se retrouve dans la cour au charme provincial de L'Hôtel de l'Abbaye. Anne est si enthousiaste que je me laisse tranquillement envoûter par le charme étrange et cruel du « Faux-Père » de Philippe Vilain. Vendu ! Quand je quitterai mon ordi pour ma chaise longue, si je ne lis qu'un roman, cet été, ce sera celui-là...

http://www.irenefrain.com/blog_click.php?id=93

13 septembre 2008

Son absence - Justine Augier

J'ai peiné à lire ce roman, je crois même qu'il s'agit de ma première déception dans cette rentrée littéraire. L'histoire avait de quoi me plaire : un vieil homme né en 1933 à Vienne, devenu écrivain public, est chargé par les proches et la famille d'écrire la vie de l'absent, à partir de photos, journaux, carnets, cassettes, etc. Parmi ses dossiers, il a été happé par le cas d'Aria, une jeune fille portée disparue depuis trois ans. Son portrait ressemble à une peinture idéalisée tant l'écrivain porte aux nues cette femme mystérieuse. Et Aria apparaît alors telle une figure qui voudrait friser la perfection, même si au fond c'était une personne sans cesse sur la corde raide, fragile et sensible. Elle était tombée amoureuse de Raphaël, l'objet de ses désirs. A cherché à toujours remettre en question cette attirance, y travaillant sans cesse, avec soin et beaucoup d'angoisse. Cela a eu raison de sa vulnérabilité... (Je ne sais pas la fin. Mea culpa : j'ai abandonné à la moitié du roman.)

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J'ai vite été déstabilisée par ce récit, par l'écriture très stylisée et par l'image d'Aria qui reste cependant dans le flou. Son étude n'est qu'esthétique, guère profonde. On ne sait rien d'elle, juste de la surface, de la sensation et de l'émotion. C'est peu pour une histoire qui se présente comme l'écriture des restes de vie, cela n'a pas la même vocation. Aria n'est pas touchante, tout juste compliquée. Je n'ai pas su être embarquée par cette histoire, peut-être n'ai-je pas su déceler la beauté derrière cette grande sophistication qui se trouve chez Justine Augier. Cela reste du domaine de la perception personnelle, et là ça ne me parle pas. Ceci n'est que son premier roman, mais l'écrivain promet de peaufiner d'autres histoires pour mieux nous (me) convaincre.

Son absence

Stock, août 2008 - 170 pages - 16,50€

12 septembre 2008

Dessous, c'est l'enfer - Claire Castillon

L'homme est un âne. C'est ce que nous raconte l'héroïne de Claire Castillon. C'est une jeune femme écrivain, qui est agacée par celui qui partage sa vie. Souvent elle le méprise, lui trouve une tête de grenouille et prend sur elle de ne pas trop le repousser. Mais c'est plus fort qu'elle. Ses efforts sont contrebalancés par ses propres souvenirs d'enfance. Elle était une petite fille coincée entre la vieille et sa mère - une génération de femmes qui a mis à l'honneur de respecter l'homme aimé et de n'être que soumission. On a pourtant bien du mal à y croire, en replongeant dans la bassine des souvenirs de la demoiselle...

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Claire Castillon est folle, oui c'est une vérité entendue. Depuis son premier roman publié (Le Grenier) elle n'a jamais cessé de raconter des histoires tordues, avec des héroïnes amoureuses et fragiles, mais pleines de caractère aussi. C'est une « experte en contes cruels » selon Le Monde des livres ; elle seule est capable de créer un univers sur la corde raide, hanté de personnages proches de la psychopathie. Généralement je ne supporte pas ce qui touche à la démence et aux comportements déséquilibrés dans une histoire, mais Claire Castillon est bien l'une des rares romancières à ne pas m'inspirer ce dégoût.

Toutefois, j'ai eu du mal à entrer dans ce tableau familial acide et féroce : la vieille est grincheuse, le vieux vicieux, la mère égoïste et la petite mal embouchée. Adulte, elle est devenue une jeune femme difficile et pleine de sarcasmes, nourrie d'exemples ayant pour vocation d'humilier les hommes. Elle ne sait pas aimer, voilà tout son héritage ! Elle ne veut plus de l'âne et lui préfère l'homme à la pomme d'Adam, parce que "l'amour ça se fabrique tout entier, alors on choisit bien avant d'aimer le bon".

Derrière cette accumulation de petitesses et autres récriminations, Dessous, c'est l'enfer traite de l'incapacité d'aimer, de la vie de couple, de la maternité, des rapports intergénérationnels et de la vieillesse. C'est franchement hostile à toutes niaiseries, très moqueur aussi. On a du mal à adhérer à toute cette méchanceté, même si l'humour, en surface, sauve un peu les meubles. Est-ce assez ?

Fayard, août 2008 - 230 pages - 17€

Le site de l'auteur : http://www.clairecastillon.com/

d'autres liens à vous suggérer :

 

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11 septembre 2008

Le chemin des sortilèges - Nathalie Rheims

Ce roman a bien du mal à se résumer, tant il flirte avec l'étrange et les confins du genre fantastique. On connaît le penchant de Nathalie Rheims à peupler ses livres d'esprits et de fantômes, d'apparitions aussi mystiques que troublantes. Qu'on se le dise, son dixième roman est du même acabit et se découvre avec lenteur, perplexité mais de façon non dénuée de charme !

La narratrice s'invite chez Roland, une figure majeure de la psychanalyse qu'elle voyait tous les jeudis matin, à la sortie de l'école. C'est aussi l'homme qui l'a vu naître et qui a tout quitté, il y a dix ans. Abandonné par la mère de cette jeune femme, par son épouse et ses filles, Roland s'est réfugié dans la solitude et habite une maison avec "des vieilles dentelles blanches aux rideaux". Un soir, elle frappe à sa porte.

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Aucune discussion franche ne s'ouvre, l'homme et la femme se font face, avec leurs bagages bien bouclés et bourrés à craquer de secrets. Une méthode douce va être alors employée, pour débloquer ce discours de taiseux : la lecture de contes de fées. Tous les soirs, une main invisible glisse un nouveau livre près du lit de la narratrice (la Belle au bois dormant, Blanche Neige, le Petit Poucet, le Petit Chaperon rouge, etc.). Les passages lus réveillent des souvenirs endormis, car voilà où mène ce travail : accepter ce qu'elle avait occulté, à se réconcilier avec sa mémoire.

"Chaque histoire déposée dans ma chambre était une étape de ce voyage intérieur, chaque livre un caillou blanc semé dans la forêt de l'oubli. Il ne fallait pas chercher à remonter le temps, c'était inutile, mais il fallait avancer, jour après jour, conte après conte."

La fin de l'histoire est assez surprenante. Elle remet à plat les plus fastidieuses interprétations mais éclaire autrement notre vision du livre. Jusqu'alors, le roman avait pour cadre une maison un peu hantée, qui n'est pas sûre d'être réelle, avec un rapport entre la narratrice et ce Roland plutôt spectral. On ne cesse de baigner dans l'impression d'être au beau milieu d'un conte ou un rêve fantasmagorique, pour finalement conclure à suivre le parcours initiatique d'une femme fragile. Mais l'impression est fugace, voire éthérée. On retourne ce livre dans tous les sens, la confusion au bord des lèvres, mais gagné par un sentiment chaleureux et persuasif.

Editions Léo Scheer, août 2008 - 180 pages - 14€

Le site de l'auteur : http://www.nathalierheims.com/spip.php?article28

8 septembre 2008

L'obligation du sentiment - Philippe Honoré

Jeanne et Louis Maisne forment un couple uni et respecté. Elle gère plusieurs pharmacies, lui est avocat. Ils mènent une vie calme et tranquille, sans une ombre au tableau. Cela va peut-être changer...

Depuis dix ans, leur fils Martin a quitté le foyer sans donner de nouvelles. Aujourd'hui il leur adresse une lettre dans laquelle il propose une entretevue entre deux vols, dans un aéroport. Pourquoi ? Aussitôt Louis a des sueurs froides, c'est sûr, le rejeton tient sa revanche. Que s'est-il passé au moment de son départ, alors que Martin était un ado de quinze ans. Il revient en les accusant, ce n'est pas possible autrement.

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Ce que j'ai apprécié, dès l'ouverture de l'histoire, c'est l'atmosphère qui ressemble à une intrigue policière et qui a donc servi de traitement pour démêler le secret de cette famille. Le procédé est également intelligent, car plusieurs parties composent le récit et apportent ainsi un éclairage sans cesse différent, qui fait presque étendre la responsabilité. La portée du mystère est elle-même assez hallucinante, je n'en dévoile pas la nature mais vous noterez alors combien le titre prend un sens tout à fait percutant.

En somme, j'ai beaucoup aimé ce roman qui a su me captiver, me nouer l'estomac, me mettre k-o aussi. J'étais toute disposée à découvrir ce que cachait cette famille modèle, pour m'apercevoir aussi que les bourreaux et les victimes ont tous des rôles interchangeables. Cette lecture fait froid dans le dos, mais c'est appréciable malgré le malaise qui pointe.

L'obligation du sentiment

Arléa, septembre 2008 - 122 pages - 15€

 

7 septembre 2008

Le fiancé de la lune - Eric Genetet

On ne tombe pas de haut avec ce livre : il est court (124 pages), agrémenté de 40 chapitres aérés et d'une intrigue guère originale mais qui fera pleurer dans les chaumières. C'est l'histoire d'un amour, rapide, fulgurant, poignant et bref. Arno approche de la quarantaine, il a parcouru le monde entier pour son boulot, ne s'est jamais attaché à une femme jusqu'à sa rencontre avec Giannina, une jeune chanteuse de jazz. Cela s'approche du coup de foudre, mais nos deux prétendants ne vont pas se jeter dans les bras de l'autre tout de suite, car l'homme doit repartir, régler ses affaires et éprouver ce qu'il ressent pour cette femme. C'est tout nouveau et ça n'a pas de nom.

Quand tous deux se rendent compte du lien invisible qui s'est tissé entre eux, à l'épreuve du temps et de la distance, c'est sûr que ça rappelle fatalement la grosse histoire d'amour. On s'aime, on ne se quitte plus, on partage le même toit et on fait un enfant. Cette fusion fait peur aussi et Arno n'est jamais sûr de lui. Mais le destin va lui sonner les cloches pour lui rappeler l'amour éphémère, la préciosité de l'instant présent et l'injonction qu'il faut toujours aller au bout de ses rêves.

Laissez-vous emporter entre deux mélodies - La chanson des vieux amants et la voix d'Ella Fitzgerald qui hante les pages de ce roman. L'histoire, un peu lyrique dans son écriture, saura vous toucher par sa simplicité et sa fatalité. C'est beau, émouvant, inexorable. Je vous invite à tenter l'aventure et encourager ce premier roman à la jolie couverture.

Editions Héloïse d'Ormesson, août 2008 - 124 pages - 15€

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6 septembre 2008

Pourquoi pas le silence - Blanche de Richemont

Paul a quinze ans, c'est un garçon doué, intelligent, qui aime la philosophie et la poésie. Il est beau, avec des boucles blondes, affublé d'un physique athlétique. C'est un adolescent qui se sait exceptionnel et qui cherche à atteindre la perfection, confortée par une famille - à ses yeux - sensationnelle. Paul a tout pour être heureux, mais ce n'est pas le cas. Trop conscient de sa différence, il traîne un spleen rasoir pour son meilleur ami Florent et casse-pieds selon sa soeur, Lou. Tous deux l'encouragent à déclarer sa flamme à Camille, la plus jolie fille de l'école, qui est raide dingue de lui et n'attend qu'un signe de sa part.

Mais le garçon ne veut pas, il ne peut pas. Il refuse la banalité et ne se suffit pas à lui-même. Le combat intérieur que Paul se livre est cruel, très paradoxal, il est tantôt partagé entre le don de sa personne et effrayé par la facilité avec laquelle on tombe dans la généralité. Ses sentiments pour Camille sont ambigus, il est touché par sa beauté, ému par les sensations qu'elle fait naître en lui mais dégoûté par sa propre mascarade.

"On est simple quand on aime. Je ne sais pas aimer. Je prends trop de place en moi. Je ne la quitte pas, mais je suis déjà parti. Elle ne me retient pas, c'est pour ça que je reste."

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Paul est un adolescent compliqué, rempli d'états d'âme. Peut-être. Mais son histoire nous fait plutôt réfléchir sur la délicate fonction que représente l'adolescence, passage obligatoire avant de devenir adulte. Le roman nous demande un peu de considérer ce cap difficile où il faut à la fois appréhender son corps, son rapport avec les autres, son bon vouloir, son désir d'être accepté pour ce qu'on est, son refus de rentrer dans le rang. A quinze ans, on est lâche et on se plie trop facilement à l'attente des autres, on veut de l'amour mais on a du mal à l'exprimer, le contenir. Parfois ça déborde et ce trop-plein nous submerge.

Mais qu'arrive-t-il dans la tête d'un garçon qui, malgré tous ses efforts, n'arrive pas à faire semblant, à être comme les autres et qui se sent continuellement un étranger ? La plume délicate de Blanche de Richemont nous livre cette torture mentale, cet état de désespoir et d'espérance sans cesse en conflit. Au début c'est grinçant, limite agaçant. Ne serait-ce point du caprice qu'on perçoit chez Paul ? Hélas non. Même si le roman n'est pas bien épais (122 pages), il évolue facilement et fait comprendre ce que vit l'adolescent, son mal-être et le drame personnel qu'il s'inflige (son cousin Max, qui avait tout pour lui, est mort à l'âge de 30 ans, au sommet de sa gloire).

Par ce livre, je découvre un auteur - Blanche de Richemont - à travers une histoire sensible et quasi universelle (on a tous eu quinze ans et connu son lot d'atermoiements !). J'ai été profondément touchée, réceptive au désarroi de ce garçon et perturbée par la fin (inéluctable ?). Il s'agit d'un premier roman, je vous le conseille.      

 

 

 

Pourquoi Pas le Silence

Robert Laffont, août 2008 - 122 pages - 14€

5 septembre 2008

A Mélie, sans mélo - Barbara Constantine

 

C'est l'été. Mélie, soixante-douze ans, se fait une joie d'accueillir sa petite-fille Clara, dix ans. Elle n'a cure de ses résultats d'analyse et dévie la conversation téléphonique de son médecin, Gérard, sur le plaquage d'Odile, son épouse qui batifole dans les bras d'un bel Hidalgo. C'est Fanette, la fille de Mélie, qui rigole de cette déconfiture (on devine alors qu'elle fut le cinq-à-sept de Gérard) et ne tarde pas à mettre son grain de sel, mais d'une manière qu'on découvrira plus tard...

Deux mois s'annoncent, peut-être teintés d'ennui. Clara a fichu en l'air sa Playstation, la barbe. Et puis pas moyen d'utiliser la voiture, toujours en panne - Marcel, le garagiste en retraite, peste et rage contre l'entêtement de Mélie qui veut réparer cette vieille guimbarde au lieu d'acheter un nouveau véhicule. En attendant, pour tout déplacement, ce sera donc vélomoteur et bicyclette, de bon matin et sur les chemins escarpés. Très vite, Clara y prend goût, s'adonne à quelques rituels (le pipi dans les buissons). Qui a parlé d'ennui, déjà ? Ah oui, sa mère : en fait, Fanette déprime un peu. Elle a cru rencontrer un nouvel amoureux, mais cette liaison a pris l'eau. Comme c'est souvent le cas.

Du haut de ses dix ans, Clara écoute, fait sa philosophe ou sa conseillère des coeurs brisés, c'est une fillette étonnante. Elle-même a un chéri - Antoine, qui lui écrit de longues lettres et se languit chez ses grand-parents, où il s'ennuie comme un rat mort. Peut-être Mélie pourrait l'accueillir pour un temps ? C'est vrai que chez Mélie on se sent bien, c'est un refuge des âmes seules, des sentiments qu'on croyait fanés et qui reprennent de la couleur, c'est aussi chez Mélie qu'on sent son coeur rebattre à cent à l'heure. L'amour, toujours et encore...

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Il n'y a pas de mélo chez Mélie, ni chez Barbara Constantine. Les lecteurs ayant apprécié son premier roman, Allumer le chat, vont retrouver strictement la même recette avec son deuxième livre. Par contre, ne croyez pas que ce soit du copier-coller non plus. On retrouve la verve savoureuse, la peinture truculente de destinées qui se mêlent et s'emmêlent pour notre plus grand plaisir, et cette passion de croquer des personnages attachants. On pourrait presque inventer le terme et parler de touche Constantine !

Certes, Allumer le chat avait bénéficié de l'effet de surprise. A Mélie, sans mélo est un roman qui nous étonne moins, mais il nous sert la même facétie, sans le côté pétillant qui nous faisait nous pourlécher dans le premier cas. Cela reste une lecture agréable, enjouée (presque une lecture d'été, d'ailleurs !) et qui pourrait booster tout moral en berne !

A Mélie, sans mélo

Calmann Lévy, août 2008 - 245 pages - 14,90€

L'avis de Cathulu

entretien vidéo avec Michel Field, sur Bibliosurf

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