12/02/20

Bienvenue à Korototoka, par Anne Østby

Bienvenue à KorototokaCinq copines du lycée se retrouvent sur une plantation de cacao aux îles Fidji. C'est Kat qui a lancé l'invitation pour bousculer le quotidien ronronnant de ces femmes rompues aux tâches ménagères, aux contraintes familiales, aux habitudes immuables, au quotidien sans saveur, aux lendemains désenchantés.
Toutes approchent de la retraite et n'ont pas connu une existence rocknroll, exception faite pour Kat l'aventurière. Toutes relèvent donc le défi pour plonger dans une expérience hors normes : exotisme, dépaysement, émotions et lâcher prise.
On souhaite donc lire une histoire de seconde chance menée tambour battant, mais on se retrouve avec une rétrospective d'actes manqués et de regrets. En gros le ton est plus strict et taciturne. Quarante ans ont passé pour Sina, Ingrid, Lisbeth, Maya et Kat. Aucun contact, juste des souvenirs.
Le roman fait le bilan des unes et des autres... ce qui apparaît finalement assez ordinaire (parfois cliché) et plat. Je n'ai pas ressenti d'effervescence, d'excitation ou de folie. Par contre j'avais envie de hurler pour que ça bouge un peu !

Et en plus, point de gourmandise à se mettre sous la dent. #frustration

Nil (2019) - Traduit par Hélène Hervieu

Magnifique couverture, qui reflète la promesse d'une lecture lumineuse (hélas non garantie) !

 

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03/02/20

Un point d’interrogation est un demi-cœur, de Sofia Lundberg

Un point d’interrogation est un demi-cœurSentiment partagé envers cette lecture : ça aurait pu me toucher, ça avait tout lieu de me parler et puis ça a loupé de peu son but.

Une femme déboussolée et traumatisée par son passé n'a jamais permis à ses proches d'entrevoir cette part sombre de sa personnalité. Au lieu de ça, ils pensent qu'elle est froide et indifférente. Il faudra donc venir à bout des 370 pages du roman pour dissiper le malaise. En attendant, c'est long, flou et confus. Nul dans cette histoire n'est remarquable : Elin se comporte étrangement, elle refuse tout dialogue et devient fuyante. Sa fille la harcèle et se montre autoritaire. Et le mari a jeté l'éponge.

J'ai longtemps ressenti de la rancune envers tous pour finalement lâcher du lest en lisant les derniers chapitres. Tout s'éclaire. Tout devient beaucoup plus attendrissant, plus concret et plus authentique. Enfin on s'attache, enfin on éprouve de la sympathie (malgré un déclic tardif et trop rapide). Cette lecture me laisse donc un gros goût d'à peu près... léger flottement à combler.

Calmann-Levy (2019) - traduit par Caroline Berg

Célèbre photographe, Elin a tout pour mener une vie heureuse. Malheureusement son couple bat de l'aile, ses absences répétées ont fini par lasser ses proches (qui lui reprochent aussi de ne penser qu'à son travail). Alors que sa fille quitte l'appartement pour suivre ses cours de danse à la Julliard School, son mari aussi cherche à la brusquer. Face à ses réactions inappropriées, l'homme désabusé décide à son tour de partir.
Anéantie, Elin trouve également injuste d'être condamnée pour son ambition, sa carrière et sa passion. Elle a néanmoins conscience qu'elle aussi se sent insatisfaite et qu'elle ne bosse plus par plaisir. Forcée d'admettre qu'elle souffre d'un profond mal-être, elle réalise que son passé est un poids mort dans son cœur et sa tête.
Jamais elle n'a évoqué son enfance sur l'île de Gotland, son père en prison, le manque d'argent, sa mère revêche, la liaison avec un fermier irascible, son amitié avec Fredrik et son départ en catastrophe après un drame dont elle porte la responsabilité. Pourquoi ?

⭐⭐⭐

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24/03/18

En attendant Monsieur Bellivier, de Britta Röstlund

En attendant monsieur Bellivier

Étonnant chassé-croisé dans les rues de Paris ! Boulevard des Batignolles, l'épicerie de Mancebo devient le nouveau point d'observation des faits et gestes de Ted Baker, un écrivain d'origine américaine, soupçonné d'infidélité par son épouse. Un jour, celle-ci propose à Mancebo de le surveiller durant ses absences et de lui transmettre ses rapports confidentiels dans un bocal d'olives. Notre homme accepte, mais signe pour un complet chahut de son existence tranquille - filatures loupées, migraines et intimidations. Plus Mancebo fouille la vie de l'écrivain, plus il s'interroge sur ceux qui l'entourent. Sa femme, son fils, son cousin et son épouse ne le reconnaissent plus, mais Mancebo doit taire son nouveau rôle de détective.
De son côté, Helena est journaliste, mais souffre de dépression et de surménage. Attablée dans un café, un inconnu l'aborde en lui demandant si elle attend Monsieur Bellivier. Elle répond oui, sans réfléchir. Puis l'accompagne dans une tour de La Défense, dans un bureau désert, et se poste seule face à un ordinateur. Elle doit ainsi transférer à M. Bellivier des mails indescriptibles. Ne pas adresser la parole aux autres employés. Et rentrer chez elle, avec un gros bouquet de fleurs. Intriguée par cette étrange mission, Helena suit pourtant les consignes à la lettre mais finit par prendre les fleurs en grippe. Elle cherche donc à s'en débarrasser et les dépose dans un cimetière juif... au grand mécontentement d'un vieux monsieur qui la sermonne avant de s'effondrer sous ses yeux.
J'ai été agréablement surprise par ce roman, qui raconte deux histoires assez farfelues, dont on attend longtemps l'impact ou le lien invisible, même si ce n'est finalement qu'un détail car on s'embarque dans leurs aventures avec un ahurissement permanent. C'est tout en finesse, en élégance et avec humour aussi que Mancebo et Helena évoluent, alimentant la lecture de leurs anecdotes truculentes. Parfois le rythme pêche un peu, le roman perd de sa fraîcheur et s'encroûte légèrement, pour finalement se ressaisir avec panache et livrer un dénouement tout aussi cocasse. J'ai alterné les émotions, entre curiosité et attendrissement, perplexité et étonnement, mais j'ai globalement ressenti beaucoup d'attachement à accompagner les personnages dans cette lecture aux épisodes improbables. Le roman aussi nous plonge dans les rues de Paris avec une authenticité rayonnante, et c'est tout à l'honneur de son auteur, Britta Röstlund, une suédoise résidant en France depuis 17 ans. Son regard est empreint d'admiration et d'amour, et cela se ressent. Très jolie rencontre !

JC Lattès, 2018 - traduit par Esther Sermage & Isabelle Piette

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« Mancebo secoue la tête. Il fait chaud, mais des glaçons dans le pastis, il ne faut pas exagérer. »

 

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15/02/18

Une histoire des abeilles, de Maja Lunde

Totalement sous le charme de la couverture, j'ai découvert avec ravissement une lecture pleine de sensibilité et étonnamment captivante !

Une histoire des abeilles

L'histoire se déroule sur trois époques et trois continents, à travers trois personnages et leur vie familiale.
En Angleterre, au milieu du XIXe siècle, William file un mauvais coton et cherche un nouveau sens à sa vie, trouvant son confort domestique étouffant, loin de ses aspirations de jeunesse et de naturaliste passionné. Un jour, il tombe sur un livre abandonné par son fils Edmund dans son bureau et pense que celui-ci lui adresse un message caché. William plonge alors à la découverte de l'apiculture et décide de concevoir une ruche révolutionnaire pour l'impressionner. 
En Amérique, courant 2007, George se sent trahi lorsque son fils Tom, parti à l'université, lui annonce finalement qu'il ne reprendra pas le flambeau de la ferme car il se sent une vocation d'écrivain. Brisé moralement, l'homme perd goût à son travail, mais relève avec inquiétude les premiers signes de disparition des abeilles, chez ses voisins et sur ses propres colonies. 
Et enfin, direction la Chine de 2098, une perspective futuriste glaçante, car la planète n'est plus que l'ombre d'elle-même. La classe ouvrière est désormais employée à “polliniser la nature à la main” suite au Colony Collapse Disorder - le Grand Effondrement ayant entraîné l'extinction des abeilles. Profitant de son seul jour de congé, Tao part en famille pique-niquer dans la forêt... mais la sortie vire au drame, quand elle trouve son fils agonisant sur le sol et transporté d'urgence à l'hôpital. Placé en soins intensifs, le cas de l'enfant suscite une attention abusive des plus grands chercheurs du pays, tandis que sa mère est tenue à l'écart, folle de douleur. C'est en lisant de vieux ouvrages que Tao prendra conscience du bouleversement passé et du changement à venir, avant de comprendre le rôle de son garçon dans ce cataclysme.

Parce que l'écriture est belle, l'histoire romanesque et fascinante, on se surprend à tourner les pages du livre sans réaliser que le temps passe et que c'est déjà le point final. C'est ce qui m'est un peu arrivé. Car il faut dire aussi que ce n'est pas uniquement une histoire des abeilles - même s'il y a urgence à les protéger et qu'il n'est jamais vain de le rappeler - c'est surtout une histoire de transmission qui ressort de la lecture. Les trois histoires ont en effet en commun de présenter des relations filiales qui ne sont pas simples. Chez William, par exemple, l'homme déploie une énergie incommensurable pour épater son garçon, mais ne voit plus sa fille sous son propre nez, pourtant douce et attentive à son travail. Inversement, les liens distendus entre Tom et son père vont peu à peu se ressouder à travers les épreuves. Quant à Tao, c'est un grand cri d'amour et de dévouement qui s'étale sous nos yeux, dans l'adversité et à travers son combat. En bref, c'est un roman remarquable, qui tente de symboliser l'espoir et réveiller les consciences écologiques, tout en évoquant l'amour filial avec tendresse et sincérité. En fermant ce livre, je me sentais imprégnée de poésie et de lumière ! C'était bon. ☺  

Presses de la Cité, 2017 / Traduction du norvégien par Loup-Maëlle Besançon
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20/12/17

Lumikko, de Pasi Ilmari Jääskeläinen

LumikkoCe roman est tout simplement hors du commun ! J'ignorais tout de son contenu, si ce n'est que la couverture fort séduisante me faisait de l'œil et m'invitait à m'y pencher. C'est maintenant chose faite, et j'avoue n'avoir pas été déçue du voyage.
Direction un petit village finlandais, à Jäniksenselkä, où Ella Milana découvre, en corrigeant ses copies, que l'exemplaire de Crime et Châtiment, emprunté par un élève à la bibliothèque, est truffé d'erreurs. Elle se rend sur place pour rencontrer la responsable, Ingrid Kissala, qui balaie le problème d'une main désinvolte, avant de confiner l'exemplaire dans une pièce à part. Ella Milana ne renonce toutefois pas à comprendre cette incongruité et va s'embarquer dans une traque insensée pour percer, entre autres, la personnalité de Laura Lumikko, célèbre auteur de romans pour la jeunesse, également connue pour avoir créé une Société littéraire dont l'entrée est verrouillée. Chance incroyable, Ella est conviée à devenir le dixième membre... Mais au cours de la cérémonie de son intronisation, une effroyable tempête de neige ravage tout sur son passage et fait disparaître la maîtresse des lieux. Ella est alors à la croisée des chemins et a la sensation d'avoir été assise sur un strapontin. Qu'importe, elle décide de poursuivre son enquête et s'applique à suivre les règles tordues du Jeu - qui consiste à se faufiler chez les autres sociétaires et les obliger à “déverser”, en usant parfois de méthodes douteuses. Les dés sont lancés, la partie de “strip-tease psychique” peut commencer. Ella Milana va ainsi pénétrer dans les coulisses d'une société secrète avec des écrivains dont les révélations vont faire chavirer la barque ! 
Au final c'est drôlement vicieux, assez étrange et malgré tout fascinant. J'admets avoir été parfois paumée ou mal à l'aise, mais pas du tout rebutée par ce que je lisais. Au contraire, en dépit des excentricités et autres divagations, j'avais toujours envie de découvrir la suite ! Car cela reste une expérience de lecture peu banale, et plutôt enthousiasmante. Il y a pas mal de charme, de mystère et de “réalisme magique” au menu. Une ambiance singulière et des personnages pas du tout attachants. Mais c'est ce mélange qui rend l'aventure incroyable, puisqu'on s'égare volontiers dans les méandres de cette histoire où se mêlent le processus d'écriture, la création littéraire, la mythologie, les spectres et les croyances. Cela foisonne en toute allégresse. Résultat, la lecture est à la fois tendre, ironique, subtile et troublante. Elle procure une immersion originale et marquante ! ☺

“Les détectives amateurs dont regorge la littérature l'avaient toujours agacée par leur manque de crédibilité. Elle n'avait aucune intention de devenir une petite fouineuse du dimanche façon Miss Marple ou une version bon marché de l'homme de Baker Street, et elle n'avait pas la moindre envie de finir dans les gros titres des journaux à sensation. Ce n'était pas ainsi qu'on bâtissait une carrière universitaire. Elle ne voulait pas être le bras de la justice, elle voulait simplement écrire une bonne étude littéraire et gagner sa vie.”   

10x18 (2017) - Trad. Martin Carayol

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27/09/17

L'armoire des robes oubliées, Par Riikka Pulkkinen

L'armoire des robes oubliées

Apprenant que sa grand-mère Elsa est atteinte d'un cancer foudroyant, Anna court à son chevet pour y recueillir ses derniers souvenirs. C'est en trouvant une robe oubliée dans une armoire qu'elle va ainsi mettre à jour une vieille histoire de famille. En effet, des années plus tôt, son grand-père aurait entretenu une liaison avec la gouvernante de leur fille ! Outre le poids des révélations, il y a le choc d'apprendre que l'image idyllique de ses proches n'est qu'une leurre. Il y a aussi l'impact émotionnel face à ce passé qui n'en finit plus d'affleurer et qui continue d'éclabousser chaque membre de la famille. Trois femmes, trois générations, convoquent ainsi les fantômes d'hier pour composer ce récit d'une rare puissance passionnelle. Et pourtant, tout s'inscrit avec pudeur et délicatesse. Secrets et non-dits viennent révéler les failles du couple qu'on croyait immortel, ou tentent de colmater les plaies d'une relation mère-fille qui ne fonctionne plus. Finalement, dans ce roman, on assiste à une opération de survie qui touche toute une famille. On partage les douleurs, les frustrations, les blessures. Et en même temps, on ressent un débordement d'amour et de vie. C'est entier, c'est vibrant. Cela rejaillit sur nous, sans même s'y attendre. C'est bouleversant de sincérité, de tendresse et de fougue. Le style aussi est efficace, dans le genre poétique et évocateur. J'ignore pourquoi je m'attendais, au début, à une ambiance proche du roman de Katharina HagenaLe Goût des pépins de pomme, alors que cela n'a strictement rien à voir. Mais la rencontre a également été riche en promesses et belle à partager ! 

La lectrice, Nathalie Spitzer, est tout simplement extraordinaire. Sa douceur et son élégance rendent son interprétation poignante et authentique. C'est un mélange subtil de mesure et de grâce, un ton posé et néanmoins captivant. Voilà qui participe aussi au plaisir d'écoute ! 

 

>> Ce livre audio est proposé en exclusivité par Audible et est uniquement disponible en téléchargement.

©2010 / 2012 Riikka Pulkkinen and Otava Publishing Company Ltd / Éditions Albin Michel. Traduit du finnois par Claire Saint-Germain

Texte lu par Nathalie Spitzer. Durée : 10h36 (P)2017 Audible Studios

Également disponible en Livre de Poche (2013)

L'Armoire des robes oubliées Ldp

 

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19/09/17

Quand le destin s'emmêle, d'Anna Jansson

QUAND LE DESTIN S’EMMÊLEAngelika n'est pas seulement coiffeuse, à Visby, petite ville pittoresque de l'île de Gotland. Elle se sert aussi de son salon pour sonder sa clientèle et composer des couples potentiels en provoquant des rencontres. 
Veuve depuis plusieurs années, Angelika compense son vide affectif par la réalisation du bonheur des autres. Et cela lui réussit bien ! Avec son jeune assistant Ricky, elle ne chôme pas pour recruter des âmes esseulées, en quête d'amour etc., et oublie de penser à son bien-être personnel.
C'est en croisant un individu, déguisé sous le profil d'Arsène Lupin, que son cœur va faire boum. Ce bel inconnu lui fait tourner les sens et l'entraîne dans un périple nocturne complètement abracadabrant. Seulement, quelques jours plus tard, c'est la douche froide. Ce gentleman-cambrioleur n'aurait-il pas abusé de son charme pour usurper son titre de propriété ? Car en rentrant chez elle, Angelika surprend avec horreur un inconnu dans son lit. Ce même loustic prétend être le nouveau propriétaire de sa maison !
Un vent de panique souffle sur la paisible communauté de Visby et frappe de plein fouet notre entremetteuse qui ne sait plus à quel saint se vouer. S'ensuit une course folle pour retrouver le bellâtre masqué, tout en maintenant le statu quo dans son salon. Le quotidien d'Angelika se résume à courir après les clients, sauver sa maison, rembourser son crédit auprès de ses sœurs et venger l'honneur de toutes les victimes d'une escroquerie à la chaîne !

Ce rendez-vous ne manque ni de pep's, ni de légèreté, pour qui attend une histoire guillerette et distrayante à souhait. J'ai beaucoup aimé l'ambiance générale, les personnages fantasques, la bonne humeur contagieuse, le tourbillon émotionnel et les petits arrangements faciles, pas forcément prévisibles, avec la vérité. Même le dénouement est bluffant, malgré quelques longueurs pour y parvenir, j'ai au final été grisée par cette invitation généreuse, pleine de fraîcheur et d'allégresse, qui permet de passer un vrai bon moment.
Encore une découverte éclatante au cœur de mon été - une lecture parfaite pour se changer les idées. ☺

POCKET - 2017

Traduit du suédois par Anne Karila

 

 

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09/05/17

Vieux, râleur et suicidaire - La vie selon Ove, de Fredrik Backman

Vieux, râleur et suicidaire La vie selon OveOve veut en finir avec la vie car il ne se remet pas de la mort de sa femme et ressasse avec amertume la perte de son boulot. Toute une carrière exemplaire balayée dans les orties... C'est inadmissible pour notre vieux monsieur, qui passe désormais son temps à faire le gendarme dans son lotissement, pour mieux cultiver sa réputation de grincheux, tout en préparant minutieusement son prochain suicide. Sa tyrannie va pourtant être mise à mal par l'arrivée de nouveaux voisins, lesquels contreviennent à toutes les règles dès leur installation. Ove voit rouge et rouspète, mais se laisse envahir par cette famille décomplexée en embarquant, bon gré mal gré, dans leurs aventures rocambolesques. J'ai immédiatement ressenti un élan d'amour pour le personnage d'Ove, en apparence bourru et maniaque, alors qu'on se doute que c'est un monsieur fondamentalement bon, généreux, attentif aux autres, dévoué et compatissant. Or, notre homme s'en défend car il a longtemps connu un parcours fait d'injustices, de bêtises et de malhonnêtetés. De quoi le rendre bien méfiant et aigri au fil du temps. Sa rencontre avec la lumineuse Sonja aura suffi à lui mettre du baume au cœur... jusqu'à ce que le destin en décide autrement. Encore et toujours. Certes, on soupire, on sourit, on essuie aussi une petite larme au coin de l'œil mais on plonge dans une histoire bougrement passionnante. J'ai adoré partager un bout de chemin avec Ove, à écouter son histoire, à comprendre ses motivations, à cerner ses zones d'ombre. Car Ove est un être entier, qu'on apprend à découvrir chapitre après chapitre, et qui dépasse de loin la caricature. J'ai également été émue, sincèrement touchée par des passages, où je retenais mon souffle, j'avais la gorge nouée, je refusais toute éventualité d'une fin prématurée. Pour plusieurs raisons, la lecture est remarquable, notamment pour sa grande intensité émotionnelle, et parce qu'elle fait énormément sourire en même temps. L'histoire donne en plus l'aperçu d'une vie autrement plus forte, plus authentique et plus poignante, rien qu'en s'ouvrant aux autres et en lâchant prise. De bonnes ondes positives qui font un bien fou ! L'interprétation de Bernard Gabay pour Audible Studios fait humblement preuve d'une grande justesse et d'une grande sensibilité, comme c'est souvent le cas avec ce lecteur, cf. Ma grand-mère vous passe le bonjour qui avait déjà su me séduire, me parler, me toucher. Une formidable prouesse, une très belle réussite & une lecture aux mille couleurs. ♥

>> Une exclusivité Audible Studios (durée : 10h 12) uniquement disponible en téléchargement sur le site.

©2014 Presses de la Cité. Traduit du suédois par Laurence Mennerich (P)2015 Audible FR

Vieux, râleur et suicidaire | Livre audio

 

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11/10/16

Octosong, de Levi Henriksen

Octosong

C'est d'abord l'histoire d'une couverture, affolante de psychédélisme et aux couleurs pop acidulées des 70s. Et plus on y regarde de près, plus on découvre une folle épopée musicale avec des personnages fabuleux et attachants. 
Jim Gystard est réalisateur artistique dans une maison de disques, producteur usé et désabusé par son métier, par le manque de création, l'absence de renouvellement, la daube formatée et sirupeuse du milieu. Notre homme n'en peut plus et ne souhaite plus contribuer au délabrement du paysage musical. Un lendemain de gueule de bois, lors du baptême de son neveu, notre brave ami a le choc de sa vie en entendant les voix divines du trio Thorsen, un frère et deux sœurs accusant les quatre-vingt ans, qui ont aussi à leur actif une carrière inimaginable, avec des disques et une tournée en Amérique, et qui vivent désormais reclus dans leur maison d'enfance en bordure d'une gravière. 
En entendant Maria, Tamar et Timoteus élever leurs voix avec cette pureté jamais égalée, Jim reçoit un coup au cœur et vient de trouver sa nouvelle raison de vivre. Convaincre la fratrie Thorsen d'enregistrer le disque ultime. Mais en abordant les artistes, Jim découvre aussi trois excentriques déterminés à ne pas reprendre le collier. Lui : « Je crois que je n'avais encore jamais eu une telle chair de poule en entendant quelqu'un chanter. » Timoteus : « Espérons que vous n'êtes pas une poule mouillée. » Et de regagner la Old Kapitän de 1956 de sa frangine Maria en se traînant sur son déambulateur.
Cette lecture est ainsi touchante de fraîcheur et réserve un étonnement perpétuel à découvrir le parcours de chanteurs bohèmes, portés par leur foi et leur candeur, sur des chemins improbables du blues et du rock-n-roll. C'est follement grisant. Et drôle aussi. Car cette aventure insolite est aussi celle d'un affamé, qui n'imaginait plus ressentir une telle fringale et qui se lance dans une quête obsessionnelle pour décrocher son enregistrement. Jim plaque tout pour s'installer à la campagne et s'inscruster dans la routine des Thorsen. Commence un apprivoisement long, lent, difficile et en douceur. Les sœurs, en premier, sont moins farouches et livrent avec naturel une partie de leur incroyable trajectoire. Reste ensuite à amadouer Timoteus... coriace et caustique, hermétique aux appels des sirènes, sourd aux supplications et insensible aux louanges prodigués avec ferveur. Il va falloir louvoyer pour percer la carapace du joueur de mandoline ! 
Rien que pour le plaisir de lire une histoire qui s'écoule sur un rythme limpide, pimpant et joyeux, cette lecture est une invitation à ne pas refuser. On a aussi droit à un bon cadrage sur la musique, une promenade bucolique et une réflexion sur les choix de vie et la destinée à saisir. Car c'est aussi un roman extrêmement émouvant, simple, poétique et attachant. Un vrai chant d'amour, beau et attendrissant.

Traduit du norvégien par Loup-Maëlle Besançon, pour les éditions Presses de la Cité - Octobre 2016

Titre Original : Harpesang

20/09/16

Le jour où Anita envoya tout balader, de Katarina Bivald

Le jour où Anita envoya tout balader

En pleine déprime depuis le départ de sa fille pour l'université, Anita Grankvist fait le bilan de sa vie. À trente-huit ans, mère célibataire, employée au supermarché de la petite ville de Skogahammar qu'elle n'a jamais quittée, son horizon lui semble soudain brumeux et désolant. Aussi, décide-t-elle de se ressaisir en remplissant ses journées de façon pêle-mêle : elle prend des leçons de moto, rejoint le comité d'organisation de la Journée de la Ville et passe du temps avec sa mère sénile. Ses copines la poussent également à renouer avec les hommes et l'encouragent à draguer son jeune moniteur ! La vie pour Anita prend rapidement des couleurs chatoyantes, des allures cocasses, des séquences émouvantes et vraies. Bien évidemment, j'ai tout de suite accroché à ce petit bout de femme, à ses choix de vie, à son rôle de maman entière et complice, à son statut de fille sous la coupe d'une mère sévère et réservée (et qu'elle tente aujourd'hui de comprendre). Je me sentais en phase avec ses émotions, ses questions et ses doutes. C'est simple, sûr. Mais cette lecture est aussi un bon début pour mettre le pied à l’étrier et accompagner au petit trot le cheminement d'Anita dans sa reconquête d'elle-même. D'abord, dépoussièrer ses rêves d'ado, puis envisager de changer de vie. Un parcours clairvoyant et une héroïne remarquablement attachante pour une histoire pleine de sensibilité et d'humour.

Roman lu avec beaucoup de délicatesse, de tendresse et de badinerie par Marie Bouvier. Très agréable à écouter.

Texte lu par Marie Bouvier pour Audiolib (durée : 12h 56) - Juillet 2016

Traduit par Marianne Ségol-Samoy pour les éditions Denoël