Demain n'est pas un autre jour, de Robyn Schneider
Lane avait déjà bâti son avenir selon un plan parfait - avec ses résultats brillants et sa motivation gonflée à bloc, le garçon visait une entrée en grandes pompes à Stanford. Au lieu de ça, c'est à Latham House qu'il pose ses valises avec un profond sentiment d'échec. Latham est un sanatorium pour jeunes malades atteints de tuberculose. Récemment diagnostiqué, Lane est contraint au confinement et au repos. Sur place, le garçon retrouve une ancienne camarade de colo, Sadie, qui s'est entourée d'une bande de potes turbulents, aimant flirter avec les limites du raisonnable. Lassé de son rôle de garçon modèle, au parcours irréprochable, Lane tente de les approcher mais se heurte à une Sadie hargneuse et rancunière.
C'est parce que j'avais beaucoup apprécié le premier roman de Robyn Schneider, Cœurs brisés, têtes coupées, que j'ai décidé de me plonger dans celui-ci. Car un livre traitant de maladie et d'amour n'a généralement pas mes faveurs... L'autre aspect positif du roman, c'est son ambiance en vase clos, où des jeunes gens patientent et luttent contre une fin programmée, mais choisissent de profiter pleinement plutôt que de s'avachir dans leur coin en tremblant de peur. Ce sont des résistants, des guerriers, des héros. J'ai aimé suivre leurs transgressions dans les bois ou à la bibliothèque. Leurs échanges aussi sont pleins d'autodérision. Et sous leurs airs bravaches, forcément, on devine leurs failles, leurs trouilles, leurs espoirs... C'est très bon, merveilleusement écrit, avec certes un sujet réchauffé, mais le roman possède le même charme que Auprès de moi toujours de K. Ishiguro, autre lecture empreinte de nostalgie, de beauté et de poésie. Si vous aimez John Green, vous ne pouvez louper Robyn Schneider !
Gallimard Jeunesse, 2017 - Trad. Nathalie Peronny [Extraordinary Means]
« Jamais je n'ai eu autant envie de faire partie d'une bande qu'à cet instant précis. Ils détonnaient avec le reste de Latham, mais pas comme moi. Ils se comportaient comme dans un pensionnat strict à l'ancienne où on défiait l'autorité et où on enfreignait les règles en cachette. Je les trouvais plus combatifs que les autres. Moins enclins à pleurnicher sur leur sort et à passer leurs journées au lit. Ils n'étaient pas en vacances, ils vivaient une aventure. »
Les Puissants #1 : Esclaves, de Vic James
Nouvelle série repérée sur le phénomène Wattpad et promise à enflammer l'imaginaire du lecteur. Nathan mise sur Vic James et nous projette dans une Angleterre alternative bien codifiée. Penchons-nous sur le sujet.
Peu après l'anniversaire de la plus jeune de la fratrie, la famille Hadley s'engage auprès des puissants Jardine pour honorer leur contrat qui implique de donner dix ans de leur vie en esclavage à l'élite. Les Jardine occupent une position dominante dans la hiérarchie du pays qu'ils gouvernent selon des lois ancestrales, même si celles-ci ne cessent d'accroître les inégalités sociales.
De toute manière, les privilégiés, aussi nommés les Égaux, détiennent des Dons rares et précieux qui confortent leur suprématie. Après quoi, la caste ouvrière se plie à leurs exigences, souvent parquée dans la cité de Millmoor, où les conditions de vie sont rudes et implacables.
Au moment de prendre leur fonction, la famille Hadley a ainsi la désagréable surprise d'apprendre qu'un des leurs ne rejoindra pas le domaine de Kyneston. Une séparation injustifiée et annonciatrice d'une première onde de choc. Car la suite de l'histoire va propulser Abi, son frère Luke, leur petite sœur Daisy et leurs parents dans un maelström de conflits et de complots qui vont profondément chambouler la donne.
À Kyneston, la vie royale n'est pas exempte d'antagonismes larvés entre les frères - l'Héritier Gavar, Jenner et Silyen - et de nombreuses rivalités germent sous couvert d'ambitions dévorantes et parfois dévastatrices. Tandis qu'à Milmoor, les habitants s'organisent pour revendiquer leurs droits et entrent en rébellion contre les Égaux, le Chancelier Winterbourne Zelston fait sensation en voulant voter un acte contre l'esclavage !
La présentation peut sembler globalement fastidieuse, si ce n'est qu'elle ouvre les portes d'un univers riche, complexe et extrêmement élaboré. C'est tout un ensemble dense, aux ramifications multiples et rigoureuses, avec aussi un large éventail d'individus, qu'il faut donc appréhender. J'ai été particulièrement séduite et intriguée par ce monde assez original, qui se déploie au fil des chapitres. Certes, tout reste perfectible car je n'ai pas été sensible aux personnages, j'ai trouvé les interactions gauches et les rares sursauts romantiques assez vains. Par contre, j'ai aimé la trame politique, ses ressorts et ses arcanes. C'est beaucoup plus sombre, poignant et palpitant car l'histoire révèle aussi de nombreuses duperies, manipulations et autres trahisons chez les uns et les autres. L'ensemble m'a finalement bien plu, malgré certaines maladresses qui s'effaceront - j'espère - par la suite, car il faut élaguer cette sensation de fouillis...
Ce titre est également proposé en exclusivité par Audible Studios
avec pour lecteur le formidable Julien Allouf (durée : 10h 24).
©2017 Nathan. Traduit de l'anglais (Royaume-Uni) par Julie Lopez (P)2017 Audible Studios
L'Épreuve #1 : Le Labyrinthe, de James Dashner & lu par Adrien Larmande
Thomas se réveille dans un endroit inconnu, entouré d'une bande d'adolescents le dévisageant avec hostilité. L'esprit confus, le garçon saisit des bribes d'informations sur sa situation : ses camarades et lui sont tous piégés dans un Bloc, entourés de murs et de portes, qui se ferment chaque soir pour les protéger de l'extérieur, car derrière l'enceinte se trouvent une jungle, un Labyrinthe et des Griffeurs (des créatures immondes qui piquent leurs victimes rendues fous de douleur). Toute leur ancienne vie a été effacée, de sorte qu'ils n'ont plus aucun souvenir du passé. Hébété, Thomas refuse néanmoins de rentrer dans le rang et de perpétuer leur mode de survie. Au contraire, il a envie de comprendre, de trouver des solutions, de bousculer le destin. Il a une sensation de déjà vu qu'il n'arrive pas à s'expliquer, et ce n'est pas avec l'arrivée de Theresa - une fille ! - que la situation va se détendre. Les garçons sont à cran et perçoivent un changement imminent. Ils reportent leur frustration sur Thomas en le traitant sans ménagement, convaincus qu'il est un pion entre les mains des Créatures du Bloc.
J'avais déjà lu ce roman à sa sortie, en 2012, et avais apprécié le suspense et l'action de l'intrigue, mais en regrettant la platitude de l'ensemble. J'ai donc voulu l'écouter en livre audio pour lui donner une seconde chance. Une totale réussite. C'est la voix française qui double l'acteur Dylan O’Brien dans le film qui a pris le chemin du studio. Adrien Larmande, en l'occurrence, s'approprie à la perfection le bouquin et livre une interprétation vivante, palpitante et réjouissante, du coup j'ai trouvé cette version beaucoup plus entraînante et suis sortie de mes 9 heures d'écoute pleine d'enthousiasme ! La suite paraîtra en juin chez Audiolib - il me tarde déjà d'y être !
©2009 / 2012 James Dashner / Pocket Jeunesse, Univers Poche - Traduit par Guillaume Fournier (P)2017 Audiolib
Texte lu par Adrien Larmande (8h 59)
Un peu plus que des amis, de Michael Kun & Susan Mullen
Youhou... Voilà un roman totalement surprenant, qui nous embarque pour un petit voyage dans le passé, direction les années 80, et plus précisément 1982. Cath et Scott ont dix-huit ans. Ils sont voisins, amis d'enfance et ont grandi ensemble. Pour la première fois, cependant, leurs chemins vont se séparer. Cath part à l'université, tandis que Scott a loupé ses examens et doit travailler dans le magasin de prêt-à-porter de son père. Qu'importe, ces deux-là vont s'envoyer de longues lettres. Comme au bon vieux temps. Des lettres écrites à la main, sur du papier à en-tête, pour prolonger le lien et échanger leurs espoirs et leurs désillusions. Cath découvre à la fac une vie autrement plus intense, avec de nouveaux camarades, des cours stimulants et du travail harassant. Elle partage sa chambre avec une fille qui aime les pizzas nauséabondes et qui colle sur son mur un poster clamant “tiens bon”. De son côté, Scott tourne en rond dans leur petite ville et se sent dévalorisé d'être le seul à ne pas continuer ses études. Il va alors dépenser son énergie en créant son propre groupe de rock et en écrivant des chansons. À Wake Forest, Cath l'encourage de son mieux mais tombe au fond du trou en apprenant que ses parents se séparent. Scott va la soutenir, admonester son père de tous les noms, se rendre sur place et rendre la situation encore plus compliquée... car Scott a mis la tête et le cœur de sa coloc à l'envers ! Et ça continue de chipoter, de se plaindre, de se réconcilier, de décrire tout ce qui va ou ne va pas. Leur correspondance dessine ainsi une véritable relation de confiance et d'amitié, très profonde et d'une grande sensibilité. L'histoire est attachante et ordinaire, mais contient surtout un doux parfum de nostalgie qui donne envie de sourire. Les courriers de Scott et Cath parfois se croisent, créent des malentendus, les jours passent avant d'obtenir une réponse. C'était une époque moins centrée sur l'instantané, et plus tournée vers l'autre. Même pour écouter de la musique, on s'échangeait des cassettes ou on enregistrait ses morceaux préférés avec les moyens du bord (fond sonore souvent insolite). Cath et Scott s'enthousiasment pour Thriller de M. Jackson, découvrent Kate Bush ou Prince. En somme, c'est vintage, charmant et adorable. Un roman épistolaire sensible et émouvant, qui aborde des sujets toujours d'actualité, mais dont le dénouement hâtif laisse un peu sur la faim. Une lecture très sympa, néanmoins.☺
Casterman, 2017 - Trad. Hélène Borraz [We Are Still Tornadoes]
Flora Banks, de Emily Barr
Flora a dix-sept ans et souffre d'une amnésie antérograde. À l'âge de dix ans, Flora a été soignée pour une tumeur au cerveau, ayant aussi entraîné une altération de sa mémoire. Depuis, Flora n'est plus capable d'enregistrer ses nouveaux acquis. Tout s'efface au bout de deux heures. Pour ne pas perdre pied, Flora note tout dans son carnet de bord, colle des pense-bêtes partout dans la maison, écrit sur sa peau ce qu'elle doit se souvenir dans l'immédiat. Sa vie défile ainsi dans un brouillard qui ne se dissipe jamais, mais ses parents cherchent au mieux à la protéger. Seulement, le jour où ils apprennent que Jacob, son frère, est gravement malade à Paris, ils plient aussitôt bagage pour le retrouver, confiant leur fille aux bons soins de sa meilleure amie Paige, mais ignorent que les filles viennent de se fâcher à cause d'un garçon, et qu'ils abandonnent Flora à son triste sort. Seule, désœuvrée, paumée. Et pourtant, Flora est regonflée à bloc. Pour la première fois de sa vie, la jeune fille a enfin un souvenir - celui de son baiser échangé avec Drake, le petit copain de Paige, d'où la dispute. Et parce qu'elle n'envisage pas d'être loin de lui, Flora décide de le rejoindre au Spitzberg, une île isolée au large de la Norvège, où le garçon suit un programme d'études et se languit d'elle par mail. C'est aussi à ce moment de l'histoire que j'ai complètement décroché. Jusqu'alors, je me sentais en très bonne disposition - curieuse, émue, intriguée par les mimiques de Flora, à la découverte de son monde, évoluant dans sa bulle, farouchement décidée à avancer, prête à briser sa coquille et parcourir le monde. Quelle prouesse, quelle volonté chez une si jeune personne, soudain propulsée hors de son univers familier. C'en serait presque impressionnant, si ce n'était aussi peu vraisemblable. Et c'est justement cette absence de probabilité qui m'a rendue sceptique, entre le départ précipité des parents, le flou autour du frère, le fait de laisser Flora sur le carreau, j'ai été sincèrement choquée. Flora Banks est toutefois une héroïne attachante, on ressent au plus près ses émotions et sa détresse, on partage ses doutes et ses espoirs, on compatit aussi en découvrant toute son histoire. Son parcours est certes bouleversant et perturbant, mais débordant de sensibilité et de tendresse... Au-delà du vaste embrouillamini incohérent, la lecture est malgré tout poétique et charmante. Plaisante à découvrir.
Casterman, 2017 -Trad. Julie Sibony {The One Memory of Flora Banks}
Stabat Murder, de Sylvie Allouche
Mia, Matthis, Sacha et Valentin sont de jeunes pianistes virtuoses, étudiants au Conservatoire de Paris, où ils préparent avec assiduité le même concours susceptible de bouleverser leur avenir. Aussi, nul ne comprend pourquoi tous les quatre ont mystérieusement disparu quelques jours avant la date fatidique. Les familles paniquées défilent au commissariat du coin, rencontrant Clara Di Lazio, une enquêtrice réputée pour sa pugnacité et son zèle à tout crin. L'histoire a ceci de formidable qu'elle nous propose une construction habilement tressée autour de l'investigation conduite par Clara et ses collègues, tout en glissant des indices sur le calvaire vécu par les adolescents. On découvre en effet ces derniers cloîtrés dans un cube, plongés dans le noir, à la merci de leur geôlier dont on ignore l'identité et la motivation. La mise en scène est simple, mais redoutable. On se surprend alors à avaler les pages du livre à une vitesse folle tant le rythme est insoutenable, et notre besoin de savoir également attisé. J'ai trouvé la recette très bonne, très efficace. Ce sont ainsi 300 pages qui s'envolent et nous électrisent selon un tempo qui va crescendo. Suspense, rebondissements, non-dits, passion et drames intimes alimentent copieusement cette intrigue rondement ficelée. Haletant !
Syros, 2017
J'étais là, de Gayle Forman
Sous le choc du suicide de sa meilleure amie, Cody accepte de rendre service à ses parents en se rendant près de Seattle, où leur fille menait sa vie d'étudiante, pour y rassembler ses affaires et quelques indices. Rien n'indiquait que Meg était au bord du précipice. Pour Cody, pointe aussi la douleur de l'incompréhension et du rejet. Les deux amies avaient certes emprunté des chemins différents, mais avaient pour elles des années d'une complicité indiscutable. Le choix de Meg a pris tout le monde au dépourvu, en plus de renvoyer chacun à une prise de conscience.
Sur place, à Tacoma, Meg se glisse dans la vie de Meg, rencontre ses colocataires, découvre une facette de son amie qu'elle ne soupçonnait pas, croise aussi le garçon qui lui aurait brisé le cœur. Cody épingle ce Ben McAllister sans détour, il est responsable de la mort de Meg, il s'est servi d'elle, c'est un pauvre type, etc. Mais Ben se défend et rétorque qu'elle ignorait totalement qui était Meg. À force de fouiller sur une piste de plus en plus froide, Cody parvient à rassembler des faits nouveaux, mais glaçants et déstabilisants. En même temps, elle réalise combien sa propre vie est elle aussi insipide et gâchée par son manque d'ambition ou sa vieille trouille d'affronter l'inconnu.
Un roman solennel, qui aborde le suicide avec justesse et sans pathos, tout en s'attachant à tirer le portrait d'adolescentes secrètes et brisées. Gayle Forman réserve un traitement sensible et pudique au marasme émotionnel que vit l'entourage de la personne disparue, entre le traumatisme, le sentiment de trahison et l'éternelle incompréhension qui foudroie les parents, les amis... C'est une lecture hyper touchante, assez triste et obsédante. Car le chemin du deuil et du contrecoup est long, compliqué et pénible. Un livre à aborder dans les écoles, en famille, entre amis, pour ne plus diaboliser ce sujet préoccupant et pour mieux l'envisager sous toutes les coutures.
Livre de Poche Jeunesse - Trad. Luc Rigoureau pour Hachette éditions - 2016
Atlantia, d'Ally Condie
Sœurs jumelles, Rio et Bay vivent dans la cité sous-marine d'Atlantia, créée exprès pour préserver l'espèce humaine de l'air pollué à la surface de la terre. Chaque année, une cérémonie invite les jeunes gens à prêter allégeance ou exprimer leur désir de rejoindre le monde d'En Haut. Une envie qui n'a jamais quitté Rio, qui se sent à l'étroit à Atlantia, mais qui a promis à sa sœur de n'en rien faire pour ne pas l'abandonner. C'est pourquoi le choc est grand à l'annonce du départ de celle-ci. Ne comprenant pas pourquoi Bay a agi dans le secret, Rio entreprend de mener son enquête, tout en cherchant le moyen de partir à son tour. Mais Rio doit veiller à préserver son identité de sirène - sa vie serait en danger - et ne se résout pas à contacter sa tante Sea, seule sirène officielle, pour obtenir des réponses à ses nombreuses questions. Car, peut-on réellement lui faire confiance ? Rio la suspecte d'être responsable de la mort de sa mère, alors ministre d'Atlantia, dont on a retrouvé le corps sans vie, dans des circonstances douteuses. Les filles ont fait profil bas par prudence, mais vraisemblablement leur famille avait le culte du non-dit, car Rio va aller de surprise en surprise, à sa plus grande déconvenue.
J'ai beaucoup aimé la mise en place de l'histoire, l'ambiance et le décor aquatique, la mythologie des sirènes, les enjeux d'une vie en autarcie, ses limites et ses dangers. Ce sont globalement les mêmes grandes lignes propres aux romans dystopiques, mais avec toute la délicatesse dont sait faire preuve Ally Condie (cf. sa série Promise). L'auteur parvient à créer une atmosphère unique, pleine de charme et de mystère, avec une trame romanesque délicate, qui inspire une certaine évanescence. C'est écrit avec tact, intelligence et sensibilité. On embarque sans difficulté dans l'histoire de Rio pour vivre en sa compagnie une aventure fabuleuse et surprenante. Autre point appréciable, c'est un livre autonome, qui déroule son fil en 400 pages, sans point de suspension. On prend, on goûte et on est pleinement rassasié ! Un livre qui se suffit à lui-même, pour une lecture agréable et riche en évasion.
Gallimard Jeunesse - Coll. Pôle Fiction - Trad. Vanessa Rubio-Barreau - 2016
Indésirable, de Sophie Jordan
Davy Hamilton avait tout pour être heureuse - une famille aimante, des amis formidables, un petit copain merveilleux, des études brillantes et un avenir tout tracé. Mais cette vie de rêve a basculé le jour où son test ADN a révélé qu'elle était porteuse du STM (le gène du tueur). Son monde s'est alors effondré. Sa famille, héberluée, assiste avec impuissance à sa disgrâce et au conditionnement de la jeune fille dans un programme strict et rigoureux tenu par l'Agence Wainwright. Fichée, privée de ses libertés, Davy a beaucoup de mal à accepter son triste sort. Ses amis lui ont tous tourné le dos, son père la considère comme une pestiférée. Déboussolée, Davy prend conscience qu'elle doit apprendre à se débrouiller et à s'appuyer sur elle-même. Étre porteuse du STM, c'est aussi se résigner à une existence de solitude et de défiance.
Suite à de nouvelles mesures gouvernementales, Davy est envoyée dans un camp d'entraînement afin d'adapter son statut de proscrite à un avenir meilleur. Forte de cette promesse, la jeune fille débarque à Mount Haven où elle retrouve Gil et Sean, ses camarades de la Cage (une classe pour les asociaux supervisée par un prof pervers). La désillusion, de nouveau, est grande quand elle réalise la discipline militaire et les exercices brutaux auxquels elle est confrontée. Contre toute attente, Sean risque souvent sa peau pour la protéger - une attitude inattendue de la part de ce bad boy qui lui tenait jusqu'alors des discours de mise en garde et de distance émotionnelle.
L'histoire ne va pourtant jamais s'attarder à romancer tout rapprochement entre les jeunes gens. Elle effleure juste l'idée d'un trouble sentimental, ce qui est d'ailleurs assez étonnant de la part de Sophie Jordan, coutumière des flambées sensuelles et autres séquences qui procurent quelques papillons dans le ventre (cf. sa série Lueur de Feu). Cela démontre aussi l'étendue de son talent, sa capacité à nous embarquer dans son monde et à raconter une histoire qui joue sur de nouvelles sensations. C'est tout aussi efficace ! Car je n'ai clairement pas vu le temps passer et j'ai enfilé les pages à une vitesse éclair. J'étais totalement imprégnée du mystère et du suspense qui entourent l'héroïne. Son parcours est tâtonnant, ponctué de déceptions, de mauvaises surprises et de doutes. On partage aisément ses malheurs, on ressent les mêmes confusions et on subit les mêmes déconvenues.
La lecture est donc passionnante et riche en rebondissements. L'histoire nous abandonne d'ailleurs en pleine chute libre, l'héroïne est à la croisée des chemins, l'horizon aussi vaste et nébuleux qu'on l'imagine ! Heureusement, la suite (et fin) est déjà disponible : Déchaînée.
AdA Éditions - Trad. Karine Gaudette-Prud'Homme [Uninvited] - 2016
“Depuis que tout cela m'est arrivé il est le seul à avoir été là pour moi. Celui qui me donne l'impression d'être une personne. Pas un paria. Pas un monstre dans le noir. Il ne m'a jamais dit ce que j'étais. Il m'a juste assurée que je ne suis pas la personne que je ne veux pas être.”
Le baiser de la déesse, d'Aprilynne Pike
Unique survivante d'un accident d'avion, dans lequel elle a perdu ses parents, Tavia vit désormais chez son oncle Jay et sa tante Reese, qu'elle n'avait jamais rencontrés jusqu'à présent. Fragile et déboussolée, Tavia consulte régulièrement une psy pour évacuer ses cauchemars et son traumatisme. C'est en quittant l'une de ses séances que la jeune fille croise sur sa route un beau jeune homme, portant un gilet, une longue veste et un haut-de-forme comme au 18e siècle. Tavia est ensorcelée et a l'étrange sensation de l'avoir déjà vu. Cette nuit-là, incapable de dormir, elle le retrouve dans le jardin de son oncle, désireux d'entrer en contact avec elle.
Entre nous, c'est carrément flippant... mais Tavia ne réfléchit plus et suit son instinct en allant au-devant de cet inconnu. Le type prétend s'appeler Avery Quinn et lui donne rendez-vous à Camden si elle souhaite en savoir plus sur son compte. Brrr... Comme c'est bizarre et impensable ! Heureusement, Tavia met dans la confidence son meilleur pote, Benson, qui décide de la soutenir et de l'accompagner dans ses recherches pour percer la vérité, car c'est tout un pan caché de son histoire, de son enfance et de son identité qu'elle va découvrir. Comme comprendre pourquoi elle est obsédée par le Labello, notamment. ^-^
L'histoire ne nous épargne donc pas les détails incongrus et l'amoncellement de clichés trop courus dans ce type de livres (le garçon à la beauté rayonnante, le coup de foudre instantané, l'ami de longue date qui avoue son béguin caché, les secrets de famille, et j'en passe). Sur le coup, j'ai fait la grimace. Trop, trop, trop. Le fond n'est pourtant pas si mal et propose un judicieux cocktail de mystère, d'action et d'émotion. Dommage que cela pêche en maturité et en rigueur. Une lecture globalement distrayante et légère, mais trop sommaire pour intriguer un amateur du genre.
PKJ - Trad. Cécile Chartres [Earthbound] - 2017