Apolline et le fantôme de l'école ~ Chris Riddell
Voici un livre 5 décrété par mademoiselle ma fille (et elle a bon goût !) :
Les plus fidèles lecteurs reconnaissent le deuxième livre de Chris Riddell, seul aux commandes, après une rouge introduction portant le titre d' Apolline et le chat masqué (publié en mai l'an dernier).
Quoi de neuf chez cette jolie blondinette qui vit seule dans l'appartement 243 de la tour P.W. Huffledinck, que tout le monde surnomme le Poivrier ? La routine, bien sûr. Des parents en déplacement, emportés par leur passion de la collection d'objets insolites. Une batterie de services en tous genres pour subvenir aux besoins de l'enfant, du repas à domicile aux changeurs d'ampoules, en passant par les techniciens rapetasseurs d'oreillers et tireurs de rideaux. Et heureusement, le plus fidèle compagnon et ami : M. Munroe (de Norvège).
Lors d'une promenade dans le jardin ornemental, Apolline fait la rencontre de Cécilie Forbes-Laurence, troisième du nom, et Bredouille, son poney de Patagonie. Cette fille est étonnante, elle a sans cesse des histoires extraordinaires à raconter, Apolline s'attache et décide de devenir son amie. Mais les festivités touchent à leur fin, car Cécilie doit retourner à l'école. L'endroit a tout pour plaire et fasciner Apolline : l'Ecole Alice B. Dupont a été créée pour aider chacun à découvrir son don spécial. Notre héroïne écrit aussitôt à ses parents pour en faire partie !
L'ambiance dans cette école est épatante, totalement hors du commun, le décor est celui d'un manoir sur le sommet d'une colline, on y vient en bus et un majordome vous accueille. L'emploi du temps privilégie des activités réjouissantes, comme l'étude de rires, la rêverie appliquée ou les compétences inutiles. Cerise sur le gâteau, Cécilie est fière de rapporter les vieilles histoires qui hantent la maison, les légendes avec des fantômes ou le conte à dormir debout du cheval des Hammerstein qui revient la nuit pour se venger... Ses camarades sont transis de peur, mais Apolline n'est pas dupe. Même M. Munroe, isolé dans l'aile est, a pris l'initiative de mener sa petite enquête.
Cette série est une vraie réussite, par son humour et son intelligence d'une part, par le talent de l'auteur et illustrateur Chris Riddell bien entendu, et d'autre part par l'imagination, par la création et par l'originalité dans le produit. Couverture cartonnée, reliure dorée, à l'intérieur les teintes utilisées sont exclusivement en noir et bleu. Les personnages sont amoureusement peignés, on ressent même un élan d'amitié pour M. Munroe, injustement délaissé par Apolline, mais ce n'est pas méchant, juste tout nouveau pour elle (avoir une amie de son âge, aller pour la première fois à l'école). Il y a des scènes hilarantes, comme l'invitation au pique-nique des ours, et un décalage sans cesse renouvellé dans l'atmosphère, entre le rire, les frissons, le suspense, le rétro. Je reconnais, je n'ai absolument pas honte de chiper ces livres à ma fille !!!
Peut être lu dès 7-8 ans. La lecture peut paraître ambitieuse avec ses 175 pages, mais il y a très peu de texte et beaucoup d'illustrations (où il faut retrouver tous les fantômes de l'école !). Ludique, en plus, c'est génial ! J'avais beaucoup aimé le premier livre, mais j'ai adoré celui-ci. Encore mieux, est-ce possible !?!
Milan jeunesse, 2009 - 175 pages - 11€
traduit de l'anglais par Amélie Sarn
Le Bon Gros Géant ~ Roald Dahl
Adaptée fidèlement du roman de Roald Dahl, cette pièce de théâtre mise en scène par David Wood est aussi un guide pertinent pour les lecteurs qui souhaiteraient passer du rêve aux planches. D'excellentes indications sont données, en guise de décors, de personnages, d'accessoires, de bruitages et d'éclairage.
Plusieurs scènes sont ensuite proposées, qui reprennent l'intrigue principale du Bon Gros Géant, et qui se découpent comme suit : L'enlèvement de Sophie ; Sophie au pays des géants ; Schnockombre et Frambouille ; La pêche aux rêves et le spectacle des rêves ; Sophie et la reine ; Petit déjeuner au palais de Buckingham ; L'enlèvement des géants.
L'histoire ne change pas : Sophie, une orpheline, est enlevée par le BGG. Heureusement pour elle, ce géant, contrairement à ses acolytes, ne mange pas les mouflets. Toutefois, il est préférable de cacher la fillette car dans le pays des géants la menace est partout.
Le BGG est aussi un attrapeur de rêves, il s'en ressert ensuite pour les distribuer grâce à sa trompette. Autre particularité : notre BGG est un poème à lui tout seul, son langage n'appartient qu'à lui, c'est un baragouinage permanent, Sophie, qui ne s'y trompe pas, « trouve qu'il parle magnifiquement », le lecteur, lui, est totalement béat.
« Pour moi, les mots c'est un problème horripilateur. Je sais exactement les mots que je vais dire, mais ils finissent toujours pas s'entortillembrouiller à la sortie. »
Un peu d'action vient saupoudrer cette belle amitié entre un géant et la fillette, des rencontres royales aussi vont survenir, telles des petites notes saugrenues mais pourvues d'un humour rafraîchissant.
On sort de cette lecture (une sorte de raccourci au roman, j'avoue) en se sentant l'âme « fantastoc et faramidable » !
Folio junior, 2008 - 150 pages - 5,50€
Adaptation de David Wood
Traduction de l'anglais de Jean Esch
Illustrations de Jane Walmsley
L'anglais Andi... Watson
J'ai découvert ce monsieur grâce à la lecture de Ruptures, un roman graphique au charme épuré, qui avait su m'emballer sur le champ. Lectrice enthousiaste, me voilà aussitôt partie dans mes clics frénétiques pour en avoir plus et m'offrir quelques ouvrages de cet auteur.
Commençons par ce qui fâche, parce qu'il déçoit : Paris (slg publishing, 2007 - en collaboration avec Simon Gane pour les illustrations).
L'histoire se passe dans la capitale française des années 50, du temps où artistes et aspirants se donnaient du coude pour percer dans le milieu. Parmi ces grands rêveurs, se trouve Juliet, qui arrive de New-York. Elle est sans le sou, partage une chambre sous les toits avec Paulette, une nana au physique de vamp qui a des idées révolutionnaires. Contre quelques leçons de dessin, Juliet accepte de croquer le portrait de riches héritières. Ce compromis n'est pas pour l'enchanter, comme elle l'explique à son grand ami Gerard, mais elle s'y applique en espérant des jours meilleurs.
Peut-être le destin sonne à sa porte le jour de sa rencontre avec Deborah, une riche anglaise qui réside à Paris chez une tante revêche. Le déclic entre les deux filles est immédiat, et on comprend qu'il s'agit plus qu'une simple connivence affective, c'est un réel coup de foudre, deux âmes soeur qui se trouvent, en subissant le poids des convenances. Outre cet aspect d'une relation étouffée sous peine de passer pour des dépravées, l'histoire est une peinture pleine de charme d'un Paris bohème et chatoyant, qui s'éveille aux premières notes de jazz dans les clubs de Saint-Germain-des-Prés, en totale opposion avec les cérémonies guindées des hôtels particuliers.
Oui mais voilà, malgré tous les chaleureux arguments, ce livre n'a pas su m'enchanter au-delà de la juste mesure. C'est sympathique, mais cela ne me renverse pas. J'ai peu goûté aux dialogues, je n'ai pas compris le baragouinage de l'auteur qui manipule très mal le franglais. C'est quasiment incompréhensible quand il s'y met, truffé de fautes, bref pas très crédible.
Avec Clubbing, j'ai aussitôt retrouvé le sourire et mon fidèle optimisme ! (Minx, 2007 - illustré par Josh Howard)
C'est l'histoire d'une jeune anglaise, Charlotte 'Lottie' Brook, qui vit à Londres, fréquente les lieux les plus branchés, voue une grande passion pour le gothique et mène à la baguette ses parents. Mais un jour, la demoiselle est arrêtée avec une fausse carte d'identité, reconduite par des policiers, bref c'est la punition assurée quand son père et sa mère l'envoient en rase campagne, chez ses grand-parents, gérants d'un club de golf. Ce qui s'annonçait mortel et ennuyeux devient petit à petit épique et étonnant, car un crime est commis sur le parcours de golf. La jeune fille, assez lasse de ses promenades en solitaire sous une pluie battante, va mener son enquête, aidée d'Howard, seul individu de moins de 60 ans dans la région, pour détourner les soupçons qui pèsent sur son grand-père. Howard est un pêcheur et un joueur de golf émérites, certes, mais il est aussi sexy et bigrement intelligent. Notre rebelle est vite mouchée par ce garçon qui ne se gêne pas pour la secouer sans mettre de gants.
Alors bizarrement, moi j'ai beaucoup aimé ce livre qui s'avoue le moins convaincant aux yeux des fans de Watson ! Ce qui dérange, c'est le mélange des genres : une comédie acide, une romance pour ados et une intrigue à la whodunit. Selon eux (les fans), Watson brasse trop large et ne creuse pas suffisamment pour donner de l'épaisseur à son histoire. Peut-être... la fin est elle-même assez surprenante et fantaisiste, je concède quelques froncements de sourcils. (Mais elle est également ouverte à une suite prochaine, enfin tout le laisse à penser !)
Ce livre est une balade au coeur de la campagne anglaise, plus précisément dans la région des Lacs, avec moults références à Coleridge et son célébrissime Kubla Kahn (qui s'intègre même dans l'intrigue romanesque !). A guetter, donc. Personnellement, j'ai bien aimé.
En lisant ce livre, j'ai cependant rencontré un gros souci technique : les pages se décollaient ! Quelle horreur d'avoir un livre neuf entre les mains et de ne pouvoir le manipuler à sa guise car il est épouvantablement fragile ! Haro sur la maison d'édition qui ne fait pas du bon boulot ! (Minx, pour ne pas la citer !)
A suivre (prochainement) : Slow News Day.
Apolline et le chat masqué - Chris Riddell
“Apolline Brun” est une petite fille blonde, qui vit au vingt-quatrième étage de l'immeuble Poivrier (en réalité, cet immeuble s'appelle la tour P.W. Huffledinck, mais il ressemble à un poivrier, du coup, tout le monde le surnomme le Poivrier). Ses parents sont de grands explorateurs, qui parcourent le globe à la recherche de raretés pour peaufiner leurs nombreuses collections. Trop jeune, la demoiselle doit rester à la maison, en compagnie de son fidèle Monsieur Munroe, une petite créature poilue venue de Norvège, qui craint la pluie et déteste se coiffer. Apolline adore patauger dans les flaques, coiffer Monsieur Munroe et résoudre des problèmes compliqués. Et ça tombe bien, car Monsieur Munroe attire l'attention de sa meilleure amie sur une affichette découverte au cours de leur promenade. Des avis de recherche de chiens d'appartement pleuvent dans la presse, très souvent suivis par des constats aberrants de vols à répétition. Cette situation tordue ne peut qu'intriguer notre enquêtrice en herbe. Grâce à la complicité de Monsieur Munroe, ils vont remonter une piste alléchante, concevoir un plan habile, grâce à leur expertise en déguisement, et révéler le pot aux roses !
Apolline et le chat masqué est le premier livre d'une série qui devrait plaire à tous les jeunes lecteurs, qui débutent. Le style est un enchantement, c'est drôle, truffé de dessins hyper rigolos, avec des personnages craquants, sur un scénario rondement bien pensé. Le dénouement n'est pas spectaculaire, toutefois on mord avec plaisir dans cette enquête. C'est aussi le portrait d'une petite fille exceptionnelle, qui vit seule dans un grand appartement. Elle reçoit des cartes postales de ses parents, nourrit une passion étonnante pour les chaussures orphelines et accueille très régulièrement une armée de services à domicile pour subvenir à tous ses besoins. Et puis, Apolline n'est pas seule puisque son compagnon Monsieur Munroe est le plus loyal des amis, peu bavard mais toujours à l'affût des bons tuyaux.
L'univers de Chris Riddell est atypique, surfant sur une ambiance surannée avec des illustrations en noir & blanc, dans un décor chic, british et joliment désuet. Il y a énormément d'espièglerie dans ses dessins, des détails microscopiques qui ne peuvent que vous faire sourire. J'ai été totalement charmée par ce livre qui a déjà un look à lui tout seul (couverture cartonnée, reliure dorée). Comment résister ?
Editions Milan, 2008 - 175 pages - 11€
Traduit de l'anglais par Amélie Sarn. Titre vo : Ottoline and the yellow cat.
NB : Pourrait-on m'expliquer pourquoi l'anglaise Ottoline a été rebaptisée en Apolline sur notre sol français ? ! C'est tout de même dommage, je trouve...