Une main encombrante, de Henning Mankell
Proche de la retraite, Wallander cherche un point d'attache pour couler des jours tranquilles. Alors qu'il visite une maison à la campagne, le commissaire trébuche sur une main surgie de nulle part. Ses instincts sont aux aguets. Il requiert son équipe d'experts de fouiller le jardin et découvre les ossements d'un couple enfoui là depuis cinquante ans. Même si on ne lui octroie ni les moyens ni le temps pour ce dossier, Wallander continue de fouiller dans le passé de la maison et de ses propriétaires pour rendre justice aux deux victimes.
L'histoire est à l'image du héros, las, usé et désabusé. Donc, c'est lent et pointilleux, mais intéressant à lire. Wallander ne supporte plus les vicissitudes de la bureaucratie. Ses relations avec sa fille sont à couteaux tirés. Il a fait le tour de son métier et envisage de tirer sa révérence. Mankell a d'ailleurs annoncé qu'il n'écrirait plus sur Wallander après l'épisode suivant, L'homme inquiet. Point final. Il explique en fin d'ouvrage sa relation ténue avec son personnage fétiche, non sans un zeste de fierté.
Le texte lu par Marc-Henri Boisse figure bien les caractéristiques de Kurt, en lui collant cette intonation bougonne et abattue qu'on juge indissociable. Après quoi, l'histoire n'est ni surprenante, ni haletante. Elle ne dure que 3 heures, ou 182 pages. À grignoter comme une friandise ou une mise en bouche pour les lecteurs désormais orphelins de leur commissaire suédois, définitivement au bout du rouleau.
Sixtrid / mars 2015 ♦ Interprété par Marc-Henri Boisse (durée : 3h 12)
Traduit par Anna Gibson pour les éditions du Seuil
Les Chiens de Riga, par Henning Mankell
Je reprends la série des Kurt Wallander, après l'avoir croisé dans La lionne blanche en tant qu'aventurier sortant de ses gonds. Un rôle assez inattendu, et déconcertant. Cette fois j'ai été pleinement séduite par l'enquête qui débute sur une plage en Suède avant de s'exiler vers la Lettonie. Un canot pneumatique échoué révèle deux corps à son bord. Ces deux individus sont sans identité, mais la police fait rapidement le rapprochement avec des mafieux originaires des pays de l'ancien bloc soviétique. Un major est envoyé sur place, un type secret mais attachant, il renseigne les suédois avant de rentrer chez lui, où il sera assassiné dans la foulée.
Cette nouvelle accable l'inspecteur Wallander, qui s'était senti proche de l'homme affable. Il décide alors de se rendre à Riga et, sous le charme de la jolie veuve, va se lancer dans une vendetta secrète, solitaire et délirante pour démêler une affaire véreuse et qui sent le soufre. L'ambiance est de mise, froide et cinglante. Les personnages filent un mauvais coton, le décor est dévasté, le pays en plein chaos politique, aucune confiance à accorder, les services de police sont en perte de vitesse, la surveillance acharnée, les menaces prodiguées et les règlements de compte pleuvent à tout-va.
Bref, l'intrigue nous plonge dans les méandres profonds et cafardeux d'un roman d'espionnage. C'est gris, voire blafard et déprimant. Les livres de Mankell figurent parmi les précurseurs de la vague des polars nordiques qui ont envahi notre marché (pour mon plus grand bonheur). Et j'ai beau épluché tous les spécimens existants, je reviens toujours vers ce cher Wallander, l'archétype du héros désabusé, mais qui a à cœur de venger la veuve et l'orphelin avec une conscience toute professionnelle. Le livre a été lu par une froide soirée d'hiver. La symbiose était totale. :-)
Points Policier, février 2004 pour la présente édition ♦ traduit par Anna Gibson (Hundarna i Riga)
Les Chaussures italiennes, par Henning Mankell
Fredrik Welin vit reclus sur une île de la Baltique. Chirurgien à la retraite, il ne reçoit aucune visite, sauf celle du facteur hypocondriaque. Le reste du temps, il s'occupe de ses animaux et se baigne quotidiennement dans un trou de glace. Un jour, un grand chamboulement se présente à lui avec l'arrivée impromptue de son ancien amour de jeunesse, Harriet, qu'il avait abandonnée quarante ans plus tôt, sans donner d'explication ni la moindre nouvelle. La femme se déplace maintenant avec un déambulateur et est gravement malade.
Que signifient ces retrouvailles ? Que représentent-elles pour Fredrik ? L'homme a passé sa vie en fuyant ses responsabilités, même sa carrière professionnelle s'est soldée sur un fiasco. Lui qui chérissait tant sa solitude va brusquement en être extirpé pour suivre un périple qui va bousculer sa petite tranquillité et ses acquis. Mais si l'idée de départ semblait séduisante, la suite de l'aventure va hélas s'avérer en demi-teinte.
Car j'ai été frustrée par le portrait insolite des personnages féminins que l'auteur va glisser dans son histoire : Harriet, Louise, Agnes ou Sima... Cette dernière était de trop ! Jusqu'alors j'acceptais d'être enlisée dans des descriptions mélancoliques d'une vie gâchée, du constat sur la vieillesse, la maladie, la rédemption etc. Mais toutes ces femmes m'ennuyaient ! Fredrik aussi a fini par me désoler. Je me sentais de plus en plus embourbée dans une histoire devenue trop lente et sordide.
Mis à part le caractère irascible des personnages, j'ai aimé : la description des paysages, l'analyse subtile des sentiments et des émotions, en vrai certains passages sont fascinants !
Points - coll. points d'or ♦ novembre 2013 ♦ traduit par Anna Gibson