Ulysse Wincoop, Tome 1 : Le Dernier des Sioux, de Marion Festraëts & Benjamin Bachelier
crédit photo : B. Bachelier
Bébé rescapé du massacre de Wounded Knee, survenu le 29 décembre 1890, Ulysse est confié à un couple de blancs, les Wincoop, par un soldat déserteur qui disparaît de la circulation sans plus donner d'explication. L'enfant grandit parmi les colons du Wyoming, heureux et insouciant, ne se doutant pas du secret de ses origines, malgré les nombreuses brimades de ses camarades. Après tout, sa maman est d'origine italienne... [sic] Mais notre soldat brisé est de retour chez les siens, dans un état pitoyable. Alcoolique, belliqueux, traumatisé par ses crimes, il entraîne les Wincoop dans un drame familial qui va briser la bulle de confort du jeune papoose...
Cette bande dessinée est une excellente introduction d'une série qui s'annonce palpitante, et qui traite d'un chapitre de l'histoire américaine peu glorieuse (la conquête de l'ouest, les guerres indiennes, l'extermination des tribus, le parquage des survivants dans des réserves où règnent la misère, la faim et la maladie). L'histoire ici s'attache au parcours d'un jeune garçon, divisé par deux cultures, au sein desquelles il tente de trouver sa place, tout en subissant constamment du rejet. Il y a des passages poignants, mais habilement racontés, si bien que la lecture est captivante et ne nous lâche plus avant la fin. Il me tarde - évidemment - de lire la suite !
Gallimard, coll. Bayou / Août 2015
Bienvenue, volume 3 - de Marguerite Abouet et Singeon
Dernier rendez-vous avec Bienvenue !
Le ton est hâtif, il vous presse comme un citron, nous sommes dans la dernière ligne droite et ça donne le tournis. Bienvenue commence à saturer de sa vie actuelle, elle aime ses amis et ses voisins, mais elle absorbe trop leurs problèmes et n'a plus une minute à elle. Aussi, quand elle se retrouve déconfite et en quête d'une oreille attentive, Bienvenue est vexée de n'avoir personne sur qui compter !
C'est donc avec excitation (et soulagement) qu'elle accepte d'accompagner Octave et Alice à la campagne. Cette famille aussi a besoin de ressouder les liens. Ce bon bol d'air va être profitable à tous - Bienvenue se métamorphose, plus reposée et épanouie que jamais. Le père des enfants se révèle d'une compagnie enchanteresse... bref, ça continue de tourner dans la tête de notre héroïne !
À Paris, les laissés-pour-compte se sentent désemparés par la désertion de Bienvenue et vont apprendre à se dépatouiller eux-mêmes, comme des grands. Et un à un, les morceaux du puzzle vont regagner leur place pour former un tableau génial, un peu bancal, mais resplendissant de couleurs et d'optimisme. Tout notre petit monde est en bonne voie de guérison !
Et c'est joyeux, bouillonnant de vie, avec ses envies, ses rires et ses larmes. Le temps est venu de faire des choix, en amour, en amitié, en famille ou pour son boulot. D'assumer sa féminité. D'avoir un père imparfait. De cumuler trop de petites choses, au lieu de construire une structure plus imposante. De rappeler aux autres qu'on existe aussi.
Bienvenue revient plus forte, plus sûre d'elle. Elle sait ce qu'elle veut et va faire du tri dans sa vie ! Haut les cœurs, les marmitons ! Jusqu'à la dernière page, le suspense demeurera entier. Et c'est avec un petit pincement qu'on referme ce livre, qu'on quitte cette série pleine de tendresse et dont la simplicité avait su tant nous séduire... C'était si proche de la vraie vie, dans l'esprit d'un roman à la « Ensemble, c'est tout ». Oui, c'était tellement bien.
Gallimard, coll. Bayou, octobre 2014
J'ai pas volé Pétain (mais presque...), de Bruno Heitz
Troisième rendez-vous avec notre cher Jean-Paul, grand amateur de combines foireuses et toujours au cœur de situations délicieusement louches. Comme on se marre bien, on ferme les yeux sur ses petites escroqueries aux méthodes peu orthodoxes. Cette fois, notre bougre hérite de sa vieille tante lorraine une série de garages, dont la location lui rapporte un beau petit pactole. Et puis, un box se libère, son pote Gérard, l'ancien flic, lui présente un riche client, un avocat, qui a juste besoin de stocker des meubles. De fil en aiguille, notre Jean-Paul fait la causette avec sa secrétaire, la très gironde Jacotte, et le voilà embarqué dans une véritable fumisterie : déterrer le cercueil de Pétain, où il repose dans un cimetière de l'île d'Yeu, pour le ramener à Verdun, au milieu des Poilus. Mais quelle embrouille ! Il s'agit pourtant d'un fait-divers véridique, peu connu, que Bruno Heitz a exhumé avec panache et qui fait sourire de consternation. L'histoire se laisse lire sans déplaisir et fait état d'une arnaque incroyable, racontée avec humour et ironie. Ce sont surtout les personnages qui valent leur pesant de cacahuètes, grotesques, bêtes, acharnés, malhonnêtes, animés par la rage, la folie, le désespoir... bref, c'est décidément une péripétie ébouriffante, qui s'inscrit comme un épisode attachant dans la biographie de notre Jean-Paul, l'anti-héros par excellence.
Gallimard ♦ coll. Bayou ♦ mai 2014
Un thé pour Yumiko, par Fumio Obata
Yumiko vit à Londres depuis dix ans et mène une carrière de graphiste avec succès. Même sa vie sentimentale est au beau fixe, puisqu'elle vient de se fiancer avec Mark. Le passé se rappelle douloureusement à elle lorsqu'elle apprend la mort de son père. Yumiko rentre alors au Japon pour assister à la traditionnelle cérémonie des obsèques.
D'abord groggy par le décalage horaire, Yumiko procède aux routines d'usage par automatisme, en se surprenant aussi de ne ressentir aucune émotion. Rien, absolument rien ne filtre. Certes, elle avait quitté son père et son pays en désaccord, elle était ambitieuse et voulait découvrir le monde tandis que son père espérait pour elle un avenir plus traditionaliste.
Ce retour aux sources finit par la déstabiliser, ça et sa vision obsédante d'un acteur du théâtre nô, qui la poursuit et cherche à lui faire passer un message. Yumiko n'est plus sûre de ses choix, ni de ses attentes. Elle a besoin de prendre le large, d'en discuter avec sa mère, une intellectuelle qui a toujours assumé son indépendance, bref ce voyage s'annonce plus perturbant qu'elle n'aurait pu l'imaginer.
C'est une très belle histoire, très touchante, qui nous interpelle sur nos rapports avec nos origines, la famille, les traditions, la perte et le deuil. On retrouve d'ailleurs beaucoup de finesse et de pudeur dans le dessin de Fumio Obata. L'ensemble est harmonieux et communique une grâce infinie, qui inspire respect et retenue. En somme, c'est une lecture pleine de subtilité, poignante et délicate, qui berce et séduit le lecteur en toute simplicité.
Gallimard, collection Bayou, mars 2014
“La jeunesse s'en va sans jamais revenir. Ainsi va la vie.” (Mélo Pop)
Mélo Pop raconte l'épatante épopée d'un groupe de rock, inconnu du grand public, qui vient de décrocher un contrat pour jouer sur une croisière dans les Caraïbes. Nos quatre lascars envisagent de se la couler douce, tandis que leur manager a vite repéré la présence d'un producteur très célèbre, en vacances avec son épouse. Celle-ci est, par pure coïncidence, l'ancienne maîtresse du bassiste. Mais le mari voit rouge, sitôt que ces deux-là tentent de parler du bon vieux temps. Et pourtant, la jeune femme s'offrirait bien une échappée belle. Elle commence même à considérer son avenir d'un tout nouvel œil !
La vie à bord du paquebot est un condensé d'aventures cocasses et piquantes autour des relations amoureuses qui se tissent entre les uns et les autres : entre le guitariste beau gosse, qui fait tomber toutes les filles, la groupie qui se désespère dans son coin car plus personne ne fait attention à elle, le batteur bègue qui est dingue d'elle et qui n'arrive pas à se faire comprendre, le pianiste hypocondriaque qui se découvre une folle passion pour le capitaine, et j'en passe ... C'est un peu comme se rappeler la très kitchissime série, [[La Croisière s'amuse]], et en apprécier l'humour, la fraîcheur et le mélo à deux balles.
En somme, c'est encore un rendez-vous délirant et divertissant, avec des personnages pathétiques mais très attachants. J'aime beaucoup le style de Lucie Durbiano, faussement candide, mais avec toujours le petit détail insolite qui nous fait tirer le sourire jusqu'aux oreilles.
Mélo Pop, par Lucie Durbiano (Gallimard, coll. Bayou, 2013)
Bienvenue, volume 2
Cela fait deux ans que j'attendais la suite des aventures de Bienvenue, une jeune Parisienne qui porte un prénom pour le moins hors du commun. Nous la retrouvons comme si nous l'avions quittée la veille, après son rendez-vous amoureux. N'espérez pas en découvrir davantage, le scénario est peaufiné pour maintenir le doute en permanence. Bon, ce qui ne change pas, c'est que la vie de Bienvenue ressemble à un immeuse capharnaüm. Comme si ses voisins ou ses proches s'étaient mis d'accord pour l'impliquer, bien malgré elle, dans leurs joies et leurs peines.
On commence avec le couple d'indiens qui ne peut pas avoir d'enfants, Jojo qui noie son chagrin d'amour dans l'alcool, Lola et son amant vampire qui ne la lâche plus, sa cousine Olga qui est amoureuse de son cousin, ou son père qui tente de renouer avec elle, alors qu'elle ne se sent pas prête, sans oublier les petits boulots et les rencontres bizarroïdes qu'elle cumule (cette dame avec ses chiens qui a besoin d'un peu de lecture et de compagnie, ou Octave et Alice, les deux bouts de chou, dont le père tient à surprotéger en se réfugiant derrière des décisions hâtives suggérées par une psy...), mais aussi ses cours à la fac et son projet en arts plastiques sous l'oeil intransigeant de son prof pas commode.
Toutes ces anecdotes mises bout à bout remplissent considérablement les vingt-quatre heures d'une journée de Bienvenue, qui donne tellement de temps et d'énergie aux autres qu'il ne faudrait pas non plus oublier qu'elle aussi a besoin d'une épaule sur laquelle compter. (Heureusement, ça se décante sur la fin !) Cette suite est donc une totale réussite, on reprend ses marques avec facilité, on se passionne pour le quotidien ordinaire et sordide, mais attachant malgré tout, de Bienvenue. On est curieux, captivé, on s'intéresse à la vie des uns et des autres, on s'interroge, parfois on s'inquiète un peu, parce qu'on a vraiment à coeur tout ce qu'on lit et découvre. C'est ça que j'aime dans cette bande dessinée, sa simplicité, sa tendresse, son honnêteté à vouloir partager des petites choses banales. Comme dit Cioran, Il n'est pas d'art vrai sans une forte dose de banalité.
Bienvenue (tome 2) par Marguerite Abouet & Singeon
Gallimard, coll. Bayou, 2012
A la rencontre de Tranche-Trognes & Akissi
Déjà le retour d'Akissi (alors que je désespère après celui de Bienvenue...), ne nous privons pas d'un tel plaisir ! Akissi est une fillette rigolote et intrépide, à qui il arrive toujours de folles aventures. Cette fois, elle part en vacances avec son frère chez leurs grands-parents. Connaissant le tempérament hardi de l'héroïne, il faut s'attendre à une série de péripéties tumultueuses : ça commence d'ailleurs par un vol plané de mouton (le car transportant les vacanciers roule à toute berzingue et finit par crever un pneu, le mouton sur le toit est expédié dans la nature), et ça continue dans un cadre de vie charmant, à la campagne, mais où il n'y a pas de toilettes privées. Pour se soulager, il faut courir dans la nature, creuser un petit trou pour y déposer ses besoins... et éviter les sangliers qui raffolent de la bonne sauce graine de mémé.
Ce sont en tout sept histoires pétillantes et survitaminées, au cours desquelles mémé va tomber dans les pommes par la faute d'une coco et la cousine Fernande va récolter d'un cheveu flamboyant (Akissi, tu es trop petite pour jouer avec les bougies !). Akissi par ci, Akissi par là... ce sont des vacances qui promettent monts et merveilles pour l'entourage de la fillette (et aussi pour le lecteur, nous on rigole même si on plaint la famille devant l'ampleur des catastrophes). La lecture est toujours aussi amusante, les personnages sont sympathiques, les situations sont savoureuses et ne manquent pas de nous surprendre. Et parce qu'elle est la championne des bêtises, Akissi est une héroïne envers laquelle les jeunes lecteurs s'identifient facilement!
Akissi, tome 3 : Vacances dangereuses, par Marguerite Abouet et Mathieu Sapin
Gallimard, coll. Bayou, 2012
Autre nouveauté, particulièrement rigolote :
L'arrivée du nouveau bourreau ne bouleverse pas les foules au village (on le confond au départ avec le nouveau bouffon !), mais Tranche-Trognes a de l'ambition à revendre ... en plus d'un manque de jugeotte évident. Dès sa première mission, il tombe sous le charme de la sorcière Abigaëlle (cette dernière lui a jeté un sort et s'amuse désormais à allumer la flamme de l'espoir en chantant les louanges de l'amour courtois). Pauvre Tranche-Trognes, avec un nom pareil il était voué à son destin, et c'est finalement celui-là même qui lui joue des mauvais tours. Bourreau aveuglé par l'amour, il ne comprend pas que sa dulcinée interfère dans ses mandats pour sauver la peau des condamnés ou sauver la mise de ses soeurs les sorcières (la chasse est ouverte !). Tranche-Trognes est également assisté par son neveu, Crépin, troubadour de son état, au grand dam de la famille, d'où un petit séjour chez le tonton pour lui mettre du plomb dans la cervelle...
J'avais déjà apprécié le tandem Christian Jolibois - Joëlle Passeron via sa série Lucy poids plume, je retrouve leur ton humoristique et déjanté à travers cette comédie burlesque, qui offre une incursion fantaisiste dans le folklore du Moyen-Âge. C'est une lecture tendrement décalée, mais vraiment divertissante. Je suis partante pour la suite !
Tranche-Trognes, tome 1 : Artisant bourreau par Christian Jolibois et Joëlle Passeron
Gallimard, coll. Bayou, 2012
-) les 10 histoires ont été prépubliées dans le magazine Moi je lis !
Les Satellites
Ça y est, j’ai compris le secret des jeunes ! … Les jeunes sont des petits satellites qui tournent dans l'espace, en faisant des ronds... C'est pas plus compliqué !
Aurélien est un jeune homme dont l'existence bourgeoise et confortable tend à le gonfler un petit peu, il a besoin de changer d'air. Il décide de trouver une mère adoptive, et pourtant il n'est ni orphelin ni fils endeuillé. Il va donc rencontrer Olivia, la quarantaine, jolie, élégante et exubérante, via une petite annonce dans le journal. Aurélien se fond dans son existence comme un poisson dans l'eau, il est heureux et toujours aussi nonchalant. Sa soeur Nicole manifeste cependant des signes de jalousie, elle découvre alors l'existence d'un autre fils qu'Olivia aurait voulu adopter quelques mois plus tôt. En l'apprenant, Aurélien devient obsédé par ce Michael et se considère soudain comme un second choix qui ne fait rêver personne.
Cette histoire est tout à fait surprenante et raconte l'extraordinaire oisiveté de deux jeunes gens de bonne famille, qui vivent une relation fusionnelle de frère et soeur, et qui se cherchent des buts ou des envies dans la vie, à défaut d'autres choses. Qu'ils cherchent à quitter le cocon familial ou à accepter une demande en mariage sans amour, ils sont la parfaite démonstration d'une jeunesse désabusée et désoeuvrée. Le tableau n'est pas flatteur, et pourtant il ne manque pas de charme. Les illustrations de Claire de Gastold apportent aussi une touche déterminante dans la description du cadre (les détails de leur habitation montrent un lieu baroque et très chargé, mais de toute beauté !). Bref, on suit l'errance du couple avec la sensation fugace d'être dans un film de la Nouvelle Vague. On y découvre l'instantané d'une époque où la jeunesse est en quête d'elle-même. Il y a aussi toute une galerie de personnages secondaires fort attachants!
Les Satellites, par Alexandre Franc & Claire de Gastold
Gallimard, coll. Bayou, 2012
C'est pas du Van Gogh (mais ça aurait pu...)
Encore une BD dévorée avec bonheur, j'en lis beaucoup en ce moment, ça et puis des histoires sur les zombies... j'y reviens toujours ! Bref, je ne pouvais louper ce titre de Bruno Heitz, un auteur qui me fait à chaque fois éclater de rire. (Ma fille est fan de sa série Louisette la taupe.)
C'est pas du Van Gogh, mais ça aurait pu... reprend l'histoire de Jean-Paul, déjà croisé dans J'ai pas tué De Gaulle. Il est en planque chez sa tante Ninine lorsque celle-ci lui parle d'un secret de famille qui pousse notre bonhomme à partir sur les routes de France à bicyclette. Direction : Arles. Jean-Paul doit tenter de comprendre ce qu'aurait pu découvrir son oncle défunt en se rendant sur la tombe de sa mère. L'enquête piétine, notre héros est mauvais et goguenard, il méprise tous ceux qu'il rencontre... jusqu'à ce qu'il mette les pieds dans le plat et se retrouve dans de sales draps. En vrac, on trouve des hollandais, une mère supérieure, un professeur qui écrit des livres, un héritage mirobolant, une nymphomane, une lettre mystérieuse, un marché de dupes... pfiou !
C'est une aventure cocasse dans un décor de la France des années 50, avec pour personnage central, l'ombre de Van Gogh, mais surtout le très débonnaire Jean-Paul. Quelle farce, celui-là ! Certes, le scénario est farfelu et simple, mais il tient la route, on est tenu en haleine, on sourit, on mord à l'hameçon, on s'interroge... Bruno Heitz affiche une vraie tendresse pour l'époque, les anti-héros et les séries policières à la Maigret. Une belle réussite !
C'est pas du Van Gogh, mais ça aurait pu... par Bruno Heitz (Gallimard, coll. Bayou, 2011)
pour feuilleter : clic
Post Mortem
Les zombies sont en train d'envahir ma vie, je ne sais pas ce qu'il se passe, mais ils sont partout ! Post Mortem de Pierre Maurel en est l'exemple (un parmi tant d'autres, on y reviendra plus tard...). Dans cette histoire, le gouvernement a développé un moyen pour prolonger la vie des morts afin de les utiliser comme main d'oeuvre gratuite, sauf que le climat social est à la grogne et de plus en plus d'opposants aux morts-vivants manifestent contre cette concurrence déloyale.
Jérémy est un pauvre type déboussolé, qui vient de perdre son boulot et qui en a un peu sa claque du système. Or, un soir, il est renversé par une voiture et tombe dans le coma. Sa mère accepte le protocope du post-mortem et les ennuis commencent. Car dans le même temps, la colère devient plus forte, des petits groupes passent à tabac les zombies, la ville est en état de siège. Heureusement Jérémy a deux amis sur lesquels il peut compter, même si sa nouvelle vie ne ressemble plus à rien, il est dégoûté de lui-même et veut en finir pour de vrai. C'est comme ça qu'il rencontre Hélène et son père, un couple en cavale.
Tous les cinq prennent la fuite, se heurtent au chaos en ville, n'y comprennent plus rien et découvrent ce que le gouvernement tente de cacher derrière une guérilla urbaine. Bref, l'histoire n'est pas facile à présenter mais elle est rapidement captivante à lire. L'atmosphère est morose, un peu dégoûtante parce que les zombies sont affreux et bavent tout le temps, sans quoi ce sont bien eux les victimes et les opprimés. L'histoire dénonce, à travers une histoire fantastique, les dérives de la politique et de l'économie, puis la colère populaire et la tendance à vouloir fustiger de faux coupables, au lieu de chercher plus loin la cause du conflit. Ici les humains sont contre les zombies qu'ils accusent de leur voler leur boulot, on assiste à des scènes de haine, jusqu'à la décision de concentrer tout ce petit monde dans des baraquements. Ni vu, ni connu. Cela ne vous rappelle rien ?
Même histoire, même combat. Il s'agit une nouvelle fois de politique-fiction, et c'est terriblement réaliste. Cela se lit d'une traite, ça marque, c'est fort et ça fait réfléchir. La fin est ouverte, je ne pense pas qu'il y aura une suite, peut-être est-ce frustrant... mais l'issue paraît logique, si on y réfléchit bien.
Pierre Maurel, pour moi, une découverte : à suivre !
Post Mortem, par Pierre Maurel (Gallimard, coll. Bayou, 2012)
feuilleter l'ouvrage : http://www.bd.gallimard.fr/ouvrage-A63855-post_mortem.html