« Ok, Lady Pas-De-Chance, tu vas te remettre en selle, et plus vite que ça. »
Jamais titre n'aura été plus mensonger, puisque de Marilyn, Elvis ou le prince William, il n'en est nullement question dans le roman ! Nous suivons, en fait, l'histoire de Gracie Flowers, la petite vingtaine, agent immobilier à Londres, avec une voix en or et l'incapacité de se produire en public pour chanter. Dix ans plus tôt, elle a perdu son papa, une vedette du chant et de la danse, depuis elle s'est fermée dans sa coquille et pense qu'en s'éloignant du micro elle évitera de s'effondrer à nouveau.
Gracie a un avenir tout programmé selon un Plan en 5 ans, mais celui-ci mord la poussière sitôt qu'elle loupe sa promotion au boulot. Les ennuis ne cessent de s'enchaîner : elle court dans toute la ville pour s'acheter la pilule du lendemain, vole au secours de sa mère, au bord de la banqueroute, veut sauver le lopin de terre où est enterré son père, loin des griffes de promoteurs avides, et cerise sur le gâteau, reçoit un coup de fil de sa belle-mère lui annonçant que son petit copain la quitte !
Pathétique, pensez-vous ? Heureusement Gracie Flowers ne manque pas de ressources et nous entraîne dans sa course folle avec une fraîcheur et un bonheur qui donnent des étoiles dans les yeux. Cette lecture m'est apparue tellement pétillante, tartinée de belles réflexions sur l'amour paternel et sur la musique, les chansons, l'amour aussi... C'est un régal à lire ! C'est aussi passablement abracadabresque, les frasques de Gracie ont parfois un goût de grotesque et de situations téléphonées, si je n'avais pas été sous le charme de l'histoire, j'aurais pu en rire jaune. Peu m'importe, finalement : j'ai passé un excellent moment entre les pages de ce livre, que je trouve parfait pour la détente.
Marilyn, Elvis, le prince William et moi, par Lucy-Anne Holmes
Plon, 2012 - traduit de l'anglais par Odile Carton
Les chansons. Ah, elles peuvent être tellement parfaites... Une chanson. Une simple chanson. Trois minutes et demie d'instruments et de voix, rien de plus en général. Et pourtant ces trois minutes et demie peuvent vous faire voir le monde, dans toute son horreur ou dans toute sa gloire ; elles peuvent vous émouvoir aux larmes ou bien vous faire danser en pantoufles dans votre cuisine. Elles peuvent exprimer une émotion que vous n'aviez pas conscience de ressentir, ou bien une aspiration profondément ancrée en vous. Je sais que j'ai l'air de me la jouer quand je parle de musique, mais j'ai passé trop d'heures à écouter en boucle la même chanson, les yeux écarquillés d'émerveillement, pour qu'il en soit autrement.
Chaque fin est aussi un nouveau début.
Katie Sutton est une adolescente anglaise à la vie ultra banale. Elle a deux meilleures copines, Hannah et Loops, avec qui elle traîne au parc en retrouvant des garçons de leur âge, mais Katie fantasme comme une folle sur le beau Ben Clayden, sans espoir de retour. Elle vit à Brindleton, une petite ville qui s'étend comme une étoile de mer, où tout le monde connaît tout le monde.
Cet été s'annonce donc particulier puisque la mère de Katie va tomber amoureuse d'un homme plus jeune, plus écolo et tellement plus insupportable en tout que Katie et sa soeur aînée ont juré de le faire tomber en disgrâce. Dans le même temps, Katie s'est déclarée experte sur le comportement des Adultes et rédige un guide d'utilisateur (comment gérer ses parents sans peine), sauf que tout va de travers, comme c'est souvent le cas dans ce genre d'ouvrage !
Rassurez-vous, la révolution n'aura pas lieu mais ça n'empêche pas de passer du bon temps entre les pages de ce livre, qui n'a nulle prétention sinon d'être déjanté et cocasse. Katie Sutton est une narratrice hors pair, avec un sens de l'auto-dérision qui suscite de grands sourires. Dans son genre, c'est un livre qui défend ses chances, le ton est léger et drôle, tendance sarcastique, à destiner surtout pour les jeunes lectrices (la narratrice a 13 ans).
Le journal de Katie Sutton (comment gérer ses parents sans peine) par Jenny Smith
Nathan, 2012 - traduit de l'anglais par Anne Delcourt
illustration de couverture : Diglee
"You never think it's gonna happen to you."
Londres, 2015. Le gouvernement a décidé de restreindre les dépenses énergétiques et impose à la population une carte avec un quota de 200 points. Au-delà, de sévères réprimandes vous tombent sur le museau, vous passez pour un écocitoyen irresponsable, vous pouvez ramper sous terre, votre cas fait mal aux yeux !
Pour Laura Brown, seize ans, cette restriction entraîne un éclatement familial auquel elle assiste avec effarement et ironie. Elle consigne tout dans son journal, jour après jour. Elle raconte aussi sa petite vie d'adolescente passionnée de musique, de lycéenne qui n'en fiche pas une, et de jeune fille amoureuse de son voisin mais qui semble totalement l'ignorer !
Si le roman cherche à éveiller les consciences concernant notre façon de vivre, notre incapacité à nous limiter et à réfléchir à nos véritables besoins, je trouve que l'intrigue a tapé juste. Par malchance, ce propos a tendance à se noyer parmi le blabla d'une adolescente qui relate son quotidien (se sortir de son lit chaque matin, se rendre à pied à l'école, marcher dans la neige, supporter les pannes d'électricité dans le métro, être plongée dans le noir, assister à la débâcle d'un système qui fout le camp...).
Enfin bref, si vous vous attendiez à un certain sensationnalisme, vous risqueriez d'être déçus ! Certes, on assiste à un début de chaos, certains quartiers sont dépouillés, les manifestations déchaînent les passions et les violences, la météo est détraquée, même la cousine de Laura qui vit aux USA assiste à un soudain revirement de situation qui paraît parfaitement risible. Je crois donc qu'il faut considérer cette lecture comme étant décalée et caustique, beaucoup moins comme un thriller.
Carbon diaries 2015, par Saci Lloyd
Pocket jeunesse, 2012 - traduction de Sylvie Denis
TrAquEUr !
J'ai entamé cette lecture par hasard, sans la moindre idée de ce qui m'attendait, et aussitôt les premiers chapitres avalés, aussitôt j'étais tenue en haleine. Je n'ai plus voulu refermer le livre avant la fin ! C'est l'histoire d'un adolescent de quinze ans, Jake, passionné de comics d'épouvante, qui mène une existence simple et ordinaire. Les parents du garçon travaillent à l'institut Hobarron où se tiennent des activités scientifiques subventionnées par le gouvernement, du moins c'est ce qu'il pense.
Il suffira d'une rencontre avec un type au teint blême, nommé Quilp, et de son familier, M. Pinch, pour comprendre qu'une terrible menace démoniaque pèse sur leurs vies. Jake va l'apprendre brutalement, ce qui ne fait qu'accentuer le rythme de l'histoire. Une course contre la montre vient de débuter, Jake doit décamper et se réfugier dans le Creux d'Hobarron, un village au milieu de la forêt, où plusieurs présages annonçant la Déferlante vont s'abattre. Et c'est le garçon qui serait à l'origine de tout, son père lui a demandé de pousser son enquête, de trouver des réponses pour empêcher la catastrophe, au risque de révéler certaines vérités pas bonnes à entendre.
Bien ficelée, l'histoire joue cartes sur table pour nous étourdir et nous emporter. La cadence est infernale. C'est aussi un vrai récit d'épouvante, avec des tentatives de meurtre, des malédictions, des vengeances et des sacrifices... On y croise des créatures qui font froid dans le dos, des démons, des sorciers, des jeunes gens paumés qui veulent sauver le monde, un chat obèse aussi ! Bref, cette lecture a plus d'un tour dans son sac, elle surprend, elle étonne, elle séduit et elle vous colle à votre fauteuil. Tous les amateurs de la série L'Epouvanteur de Joseph Delaney ne pourront qu'adorer !
Traqueur (tome 1) par William Hussey
Castelmore, 2012 - traduit de l'anglais par Nenad Savic
▶ Un an après
A l'issue d'une fête déguisée, quatre amis reprennent la route et ont un dramatique accident de voiture. Un an après, tous se souviennent et en conservent des cicatrices indélébiles. Cette tragédie a bouleversé des familles, des amitiés, les uns après les autres, ils racontent et expliquent l'inexplicable.
C'est donc un roman sur la douleur et sur le deuil, mais c'est aussi un roman qui évoque la culpabilité et les remords. Chacun tente d'avancer, ou pas. Les évènements restent marqués de façon indélébile. Certains veulent les effacer, pensent y arriver mais se leurrent. D'autres entretiennent le souvenir, alimentent la rancune, font des reproches, nourrissent leur colère, se rejettent la faute...
En gros, c'est une lecture poignante.
Le sujet n'a pas non plus été poussé ou creusé davantage, la lecture est rapide, en quelques 200 pages on a absorbé l'essentiel, et ça suffit. Je crois qu'à sa mesure, l'auteur a réussi à titiller les consciences, à imprimer un message de fatalité sans chercher à condamner.
C'est juste triste, bouleversant et ça laisse sa petite empreinte quelque part.
Ce ne sera pas une lecture mémorable, mais elle a tenté de me murmurer des choses et je les ai entendues, le coeur serré et la boule au ventre.
Cela restera une jolie rencontre.
Un an après, par Sue Mayfield
Bayard jeunesse, coll. Millézime, 2011 - traduit par Vanessa Rubio-Barreau
Daylight saving
La couverture vous inspire très certainement une sensation d'étrangeté et de malaise, et vous avez bien raison de vous y conforter. Car ce roman est très particulier, c'est l'histoire d'un père et son fils en vacances dans un centre de loisirs au cadre aseptisé (la piscine est sous bulle, par exemple). C'est un duo en perdition, la mère a mis les voiles quelques mois plus tôt, depuis le père noie son désarroi dans l'alcool et le garçon n'a aucun aplomb (il est en léger surpoids mais le vit comme une honte indélébile).
A Leisure World, Daniel rencontre Lexi, une adolescente fuyante et forcément mystérieuse. Daniel a envie de la connaître et gagne sa confiance, mais plus il découvre des facettes de sa personnalité, plus il réalise qu'il devient le témoin de faits troublants, comme des marques de torture physique sur son corps. Daniel est un peu paumé, nous aussi.
C'est fascinant comme ce petit roman parvient à capter notre intérêt en nous entraînant dans cette histoire au parfum étrange flirtant entre fantastique et psychologie. L'atmosphère est pesante, pour ne pas dire dérangeante. On sent venir à tout instant le basculement vers l'horreur ou le drame, tant la tension est palpable. J'avais un arrière-goût d'amertume dans la bouche, et pourtant je n'ai jamais cessé de tourner les pages du livre pour connaître le fin mot de l'histoire, j'étais prise dans l'engrenage, c'est tenace, pas désagréable finalement, car le rythme est vif et le dénouement foudroyant, vous avalant d'une traite avant de vous recracher pour vous permettre de respirer. Et c'est avec un grand soulagement que vous tournez la dernière page !
Une expérience de lecture mémorable, pas forcément originale, mais juste efficace parce qu'elle ne laisse pas dans l'indifférence.
La nuit de la 25e heure, par Edward Hogan
(Les Grandes Personnes), éd. 2012 - traduit de l'anglais par Valérie Le Plouhinec
illustration de couverture : Jean-François Martin
Un nuage de lait dans votre thé !
Sarah Trent vient de décrocher un poste de demoiselle de compagnie auprès d'une jeune héritière, Lucilla Hildred, actuellement hébergée chez sa grand-tante dans sa maison de campagne, notamment dans le but de lui changer les idées. Car Lucilla a perdu ses parents, a été retirée de son école et broie du noir parce qu'elle est victime de son imagination. Serait-elle vraiment folle, pense Sarah, qui trouve l'adolescente joyeuse et impertinente, ou tenterait-on réellement de la tuer pour s'emparer de son héritage ?
Des fantômes par ci, des accidents douteux par là... la question ne se pose plus et la tension monte d'un cran. Heureusement son meilleur ami Bertrand vient lui prêter secours, de même qu'un certain John Brown, une vague connaissance de la famille Hildred, qui se prétend entomologiste ou quelque chose comme ça. Son cas pose problème aux yeux de Sarah : serait-il beau parleur ou noble sauveur ? Que cache cet homme séduisant, qui lui fait un peu tourner la tête, alors que Sarah s'est jurée de ne jamais tomber amoureuse de personne ?
Entre secrets de famille et soucis d'héritage, l'intrigue nous offre du déjà-vu parfaitement bien troussé. L'héroïne, Sarah Trent, est une jeune femme moderne et dynamique, elle porte les cheveux courts et a la peau bronzée, elle aime la vitesse et les voitures de course, elle est aussi très indépendante. Sa façon de débusquer les mystères de la Maison Rouge est teintée de prudence, d'instinct féminin et de flegme britannique. On se laisse aisément porter par le rythme de l'intrigue, se surprenant même à ressentir des pics de frisson alors que le climat devient plus tendu, surtout la nuit, dans la petite chambre bleue.
Chaque roman de Patricia Wentworth procure la sensation de renouer avec une vieille camarade, qu'on retrouve avec grand plaisir, et qui ne changera décidément jamais ! La lecture se veut classique, délicieusement surannée, un peu guindée... mais finalement indémodable ! On ne s'en lasse pas.
Cache-cache avec le diable, par Patricia Wentworth
2012, Coll. Grands Détectives chez 10/18 - traduction de Delphine Rivet
C'est le cuisinier lui-même qui donne de la saveur à sa cuisine : son caractère, ses rêves, ses sourires, ses larmes.
La boutique de Madame Pamplemousse est unique. Niché dans un quartier de Paris, à l'abri des regards curieux, l'endroit fait davantage penser à l'antre du sorcier, avec ses articles aussi bizarres que du salami de Minotaure à la sauge et au thym sauvage, des queues de vélociraptor salées, du tigre à dents de sabre fumé et du roulé de langue de tyrannosaure, mais aussi des rognons de crocodile au vin de myrtilles, du piranha rôti au coulis de framboises, et j'en passe.
Il y a incontestablement un grain de folie dans ce roman, un zest de magie, une pincée de gourmandise, une cuillerée de bons sentiments, et beaucoup d'autres ingrédients savoureux ! Madame Pamplemousse est un personnage bien mystérieux, aux allures de sorcière, avec son chat au pelage blanc, répondant au nom de Camembert, et qui crache tout le temps des boules de poil dès qu'il se sent dérangé dans ses petites habitudes.
Ce chat cache lui aussi ses petits secrets.
Et c'est par hasard que la jeune Madeleine croise leur chemin, qu'elle découvre leur boutique en manquant tomber à la renverse parce que tout lui semble extraordinaire. Mais cette rencontre va aussi bouleverser sa vie et celle de son oncle, monsieur Lard, un grippe-sou tyrannique, propriétaire d'un restaurant sans attrait et sans âme, tout bonnement parce que son gros tonton autoritaire maltraite son personnel et sa cuisine.
Résultat, c'est gras, c'est lourd, c'est répugnant.
C'est alors que s'invitent les Fabuleux Délices de Madame Pamplemousse, et la Bête se transforme...
C'est indubitablement une lecture fantastique et enchanteresse. Déjà rien que la couverture donne envie d'avoir le livre entre les mains. Et croyez-moi les illustrations de Sue Hellard ne déçoivent pas un seul instant. Tout est beau dans ce roman, tout est délicieux et original. On a même le sentiment de plonger dans un Paris tout droit sorti d'un film coquet, ça fait très carte postale, mais c'est charmant.
L'histoire ressemble également à un conte merveilleux, avec une jeune héroïne au coeur d'or, exploitée par un malotru, qui va se découvrir un don exceptionnel. De plus, l'écriture fait preuve d'élégance et de beaucoup d'imagination (l'inventaire des recettes et des délices fait tourner de l'oeil par exemple !). C'est dire le bonheur qu'on a de plonger dans l'univers de Rupert Kingfisher, et on ne le regrette pas.
Je connaissais la série dans sa version originale, et je suis très heureuse de la découvrir sur le marché français, c'est une découverte exquise, dont l'esthétisme vintage exerce un réel attrait. C'est à déguster sans attendre ! Le deuxième tome va paraître au mois de mai.
Madame Pamplemousse et ses Fabuleux Délices, par Rupert Kingfisher
illustrations de Sue Hellard - traduction par Valérie Le Plouhinec
Albin Michel jeunesse, coll. Witty, 2012
Même les morts racontent une histoire.
Le père de Sig, Einar, vient de mourir de froid en tombant dans le lac gelé. Tandis que sa soeur et leur belle-mère se rendent en ville pour chercher de l'aide, le garçon veille sur le corps. Quelques instants après, un homme s'invite chez eux et réclame son or. Celui que Einar lui aurait volé dix ans plus tôt.
Nous sommes en 1910, dans un coin paumé en Suède, à Giron, près du cercle polaire. Wolff est une brute épaisse, qui n'a jamais cessé sa traque en réclamant justice, sauf que Sig ignore tout de cette magouille et défend farouchement l'existence d'or dans leur modeste bicoque. La famille n'a jamais eu le moindre sou, comme le prouvent les longues années de galère et d'errance, depuis Nome en Alaska.
Commence alors un tête-à-tête pesant et angoissant, entre le vieux baroudeur et le garçon qui sort tout juste de l'enfance. Celui-ci se sent dépassé par la situation, il est mort de trouille et songe de plus en plus à se faufiler dans le cellier pour récupérer le précieux Colt de son père.
Et c'est dans cette atmosphère étouffante, qui glace pourtant le sang, que le roman se construit, alternant les scènes antérieures aux évènements présents afin de mieux comprendre d'où sort ce Wolff et qu'aurait pu faire Einar pour l'agacer à ce point.
C'est habile, remarquable et bluffant. Pas moyen de reposer le livre avant la fin. Le suspense est tendu au cordeau, dans un cadre peu ordinaire, ce qui ajoute au charme du roman. L'auteur a su jouer avec nos nerfs, c'était tellement bon, terriblement stressant mais vraiment bon !
Revolver, par Marcus Sedgwick
éditions thierry magnier, 2012 - traduit par Valérie Dayre
illustration de couverture : Séverin Millet
Joe Millionnaire
Le père de Joe a fait fortune en créant un papier toilette révolutionnaire, mais ce n'est pas du goût de ses camarades de Saint-Cuthbert (une école privée, huppée, snobissime). Résultat, Joe n'a pas de copain, il se sent seul, plus seul que jamais. Il a beau être riche et pouvoir s'offrir tout ce qu'il désire, l'argent n'achète pas l'amitié. Il pense qu'en s'inscrivant au collège public, sous couvert d'anonymat, il aura plus de chance pour être apprécié pour ce qu'il est. Et c'est comme ça qu'il va rencontrer Bob.
Bob est un sacré numéro, c'est un bonhomme qui n'a pas de chance, il est grassouillet, pas méchant pour deux sous, ses camarades d'école se moquent de lui, c'est une bille au cross mais il tient à prouver qu'il n'est pas si nul que ça en redoublant d'efforts (tout, mais pas dernier à la course !). Et pourtant il n'hésite pas à échanger sa place avec Joe, au risque d'essuyer les moqueries des autres. Ceci étant, nos deux complices viennent de signer un pacte d'amitié, un vrai. C'est le début du bonheur.
C'est le deuxième titre que je lis de David Walliams, après Le jour où je me suis déguisé en fille, et quel régal! Attendez-vous à une lecture très drôle, qui s'appuie sur des aventures foldingues et des personnages attachants. Dans l'absolu, c'est très proche de l'humour de Roald Dahl.
C'est aussi une histoire touchante, susceptible de sensibiliser le lecteur sur les vraies nécessités dans la vie (on parle beaucoup d'argent et de possessions matérielles, sans oublier la solitude, la tromperie, les relations bidons, la convoitise et le manque de confiance). Certes l'ensemble se veut farfelu et excessif, mais il ne faut pas négliger la réflexion qu'elle suscite chez le lecteur.
Ou alors celui-ci se contentera d'admirer la typographie pas banale de l'ouvrage (avec des listes de tout et n'importe quoi, des recettes et des menus, des exclamations de rire, des freins qui crissent, des coups dans la porte, des gros mots, des questions qui font des vagues...), en plus de suivre cette belle histoire d'amitié, et même les illustrations de Tony Ross s'approprient sans effort les rouages de l'intrigue, en se fondant à merveille dans le décor.
Un bon moment à partager.
Joe Millionnaire, par David Walliams
Albin Michel jeunesse, coll. Witty, 2012 (nouvelle collection pour les 8-12 ans)
traduit de l'anglais par Valérie Le Plouhinec
- entretien avec Béatrice Vincent, directrice de collection, chez Gaëlle ICI