Teaser Tuesday #12
Notre père, Nils Swedenborg, est si gentil. Toujours prêt à rendre service, attentionné presque à l'excès, d'une inébranlable tendresse. Il est aussi travailleur, et fort doué de ses mains. On ne connaît pas de meilleur charpentier. Non seulement il est habile et minutieux, mais malgré ses cinquante-deux ans il a conservé une belle énergie et soulève une poutre de frêne comme si elle était faite de carton.
Ce n'est pas non plus un mauvais cuisinier ; il lui arrive souvent de réussir d'excellents ragoûts, et de merveilleux gâteaux.
Sa fidélité est celle d'un chien de berger. Il n'a qu'une parole. Je ne l'ai jamais entendu mentir.
Il est bel homme, autant qu'une fille puisse juger l'apparence de son père.
Quel que soit le temps, quoi qu'il arrive, il est gai. Un vrai pinson, toujours à siffler ou à chanter.
Oui, vraiment, que de qualités.
Si seulement il n'était pas aussi bête.
Cela lui aurait évité d'épouser une sorcière.
Les sorcières de Skelleftestad - Jean François Chabas
C'était un mercredi. Le jour de la semaine où on a l'impression que vendredi ne viendra jamais. Et il faisait froid. Pas assez pour qu'il neige, mais un froid d'automne, lumineux et mordant, avec un vent glacé qui annonçait l'hiver. Bref, un jour à ne pas mettre le nez dehors. Un jour à rester bien au chaud, roulée en boule sur le canapé avec une tasse de chocolat fumant.
Belladonna Johnson parle avec les morts - Helen Stringer
Il paraît qu'au début, juste après le Retour, le parc d'attractions est quand même resté ouvert. Ils disaient que ça leur rappelait le temps d'avant. Le temps où ils n'étaient pas obligés d'ériger des clôtures, des murs et des barrières pour se protéger contre les masses de Mudos qui sont dans une quête perpétuelle de chair humaine. Le temps où les vivants n'étaient pas traqués à chaque instant.
Ils disaient que ça leur donnait l'impression que tout était normal.
Rivage Mortel - Carrie Ryan
Now that I've found the way to fly, which direction should I go into the night ? My wings aren't white or feathered ; they're green, made of green silk, which shudders in the wind and bends when I move - first in a circle, then in a line, finally in a shape of my own invention. The black behind me doesn't worry me ; neither do the stars ahead.
I smile at myself, at the foolishness of my imagination. People cannot fly, though before the Society, there were myths about those who could. I saw a painting of them once. White wings, blue sky, gold circles above their heads, eyes turned up in surprise as though they couldn't believe what the artist had painted them doing, couldn't believe that their feet didn't touch the ground.
Those stories weren't true. I know that. But tonight, it's easy to forget.
Matched - Ally Condie
La Forêt des Mains et des Dents. Et moi ! Brrr.
Quelle angoisse, ce roman !
Mais qu'est-ce que c'était bon. Au début, cela me paraissait assez lent, mystérieux aussi, baignant dans une ambiance post-apocalyptique et vraiment flippante. Un village forme une enclave où se nichent des humains, en protection de la forêt. Celle-ci est habitée par des Damnés, qui gémissent en se collant à la clôture, guettant la moindre brèche, espérant envahir le village pour mordre et se repaître du sang humain. Très vite, on comprend qu'une infection entraîne une Mutation, et ainsi s'explique cette épidémie de Damnés, contre laquelle la poignée de survivants se bat avec la force du désespoir.
Dans le village où vit Mary, la narratrice de l'histoire, la Congrégation des Soeurs a largement pris en charge les solutions de survie, les règles du quotidien, les leçons dans les écoles, selon la parole du Livre Sacré. Soeur Tabitha, la mère supérieure, est intransigeante et n'a aucune pitié avec les contestataires. Seule Mary oppose aujourd'hui une résistance, avec ses questions, ses doutes, son manque de foi et sa rebellion. Elle parle d'un monde au-delà de la Forêt, elle rêve de voir l'océan, mais ce sont des histoires racontées par sa mère. Toutefois, Mary s'y accroche. Elle n'a pas le choix. Elle voit son horizon restreint et étouffant. Soit elle embrasse la vie de la Congrégation, soit elle accepte de s'unir à Harry, son ami d'enfance. Or, Mary est amoureuse de Travis, son frère, qui a choisi de se fiancer avec Cass, sa meilleure amie.
L'histoire, ensuite, se laisse découvrir ! C'est sombre, envoûtant, vraiment bien écrit, dans une langue généreuse et élégante. L'atmosphère est aussi admirablement dépeinte, je craignais, avec raison, ce monde des Damnés, et finalement ce n'est pas si gore ou horripilant. Enfin, disons que c'est tout ce qu'il faut pour donner la chair de poule, cela représente une menace permanente et épuisante. Je ne vous raconte pas la deuxième partie du roman, là j'avais les nerfs en pelote ! Je dévorais les pages, j'avais l'estomac noué, je n'en pouvais plus de savoir, j'étais inquiète et terrifiée, j'hallucinais et je me retenais de hurler.
En attendant, le début est lent. Accrochez-vous, car la suite vaut le détour. Avec le recul, cependant, j'ai trouvé que c'était une mise en place idéale, mettant en scène le lieu, le contexte et les personnages, plus la dose de suspense, avec les secrets que seule Mary découvre, en plus du climat inquiétant, de la tension qui monte, qui monte. Voilà de quoi bien vous ferrer ! Seul point sur lequel j'ai du mal à me prononcer, c'est la narratrice - Mary. C'est une vraie héroïne qui nous donne des bouffées de rage et de frustration, tant elle est splendide dans ses qualités et ses défauts : Mary est égoïste, curieuse, inconstante, amoureuse, jalouse, têtue et obstinée. On suit ses états d'âme et ses réflexions plus ou moins pertinentes, on partage ses doutes et on aspire comme elle au bonheur et à l'espoir. Rarement une héroïne a su autant m'irriter et me toucher !
Près de 400 pages plus tard, je vous conseille vivement cette lecture ! J'en suis sortie sonnée, folle d'angoisse et impatiente d'en (s)avoir plus. Un prochain livre sort aux USA en mars 2010, sous le titre de The Dead-Tossed Waves, mais ce n'est pas une suite, plus un "companion book".
La Forêt des Damnés ~ Carrie Ryan
titre vo : The Forest of Hands and Teeth
traduit de l'anglais (USA) par Alice Marchand
Gallimard jeunesse, 2010 - 380 pages - 15,50€
Cette bande-annonce pour vous plonger dans la tourmente :
the dark side challenge - 4