Teaser Tuesday #46
A découvrir !
Une compilation des dix imagiers bilingues de la collection «Signes»,
un ouvrage de référence qui crée un pont entre l'univers des entendants et celui des sourds autour d'un seul monde : le nôtre.
Chaque mot est écrit, traduit en Langue des Signes Françaises (L.S.F.) et illustré en images...
Ont participé à cette joyeuse parade : Alexios Tjoyas, Delphine Perret, Chamo, Regis Lejonc, Lili Scratchy, Olivier Latyk, Martin Jarrie, Olivier Ballez, Claire Franek et Claude Cachin.
Seul bémol, cette édition spéciale n'inclut pas de sommaire qui aurait pu permettre au lecteur de se guider plus facilement dans cet épais volume, riche d'un vocabulaire décliné en dix catégories (école, noël, gourmandise, maisons, indiens, voyage, émotions, mer, ABCD).
Les illustrations sont superbes !
Signes (l'intégrale), par Bénédicte Gourdon et Roger Rodriguez (éditions Thierry Magnier, 2013)
Silence, on irradie.
Ce n'est pas très gai, et pourtant il m'a été impossible de reposer le roman avant la fin. L'histoire est totalement hallucinante, elle se passe dans une contrée proche d'une centrale nucléaire, où la population est déjà fortement éprouvée par cette pollution, puis survient l'explosion. Tout disparaît de la surface de la Terre.
On suit alors trois rescapés, deux enfants, Sven et Siloé, le frère et la soeur, et Grégoras, un adolescent attardé. Ces trois-là sont sonnés et ne savent plus où aller, ils refusent néanmoins de suivre les hommes en blanc qui survolent la région à la recherche de survivants. Ils se terrent dans la forêt et rencontrent un militaire et une jeune femme - étrange hasard qui a voulu que ce couple se lance dans une aventure dont ils avaient sous-estimé l'ampleur. Loubia souhaitait se rendre sur le lieu de l'accident qui avait coûté la vie de sa soeur, une charmante institutrice qu'un médecin s'est également mis en tête de retrouver. Et tout ce petit monde se fait face dans ce paysage apocalyptique où, comme eux, on se sent complètement hagard.
Ce livre fait une petite centaine de pages, mais son impact est énorme. Absolument bouleversant ! Car ce n'est pas seulement une fiction, il n'y a qu'à voir l'actualité pour comprendre que les erreurs se répètent et que nous sommes toujours affreusement vulnérables face à la menace nucléaire. Dans le roman, on découvre une population martyre, des générations bancales, des corps de travers, mais aussi des éclats de rire, des baignades insouciantes, des parties de cache-cache. En fait, c'est aussi pour cette raison qu'on en a gros sur la patate au moment de tourner la dernière page. Il y a une réelle tendresse derrière la portée sinistre du récit. Les personnages sont attachants, ce qu'ils vivent et subissent nous fend le coeur. J'ai également beaucoup aimé le titre du roman, sorte de cri muet et de condamnation radicale qui vaut tous les discours.
Silence, on irradie - Christophe Léon
Editions Thierry Magnier (2009) - 110 pages - 10 euros
illustration de couverture : Claude Cachin
Sven s'inquiétait pour ses parents. Il les voyait vieillir chaque jour davantage. La Centrale les consumait à petit feu. Même sa mère, qui pourtant travaillait dans un bâtiment annexe, avait pris au fil des années cet aspect terreux et gris des gens maladifs. Elle marchait lentement, un poids invisible appuyait sur sa tête qu'elle tenait inclinée sur le côté. Elle s'endormait le soir dans son fauteuil, les aiguilles à tricoter croisées sur son ouvrage, une maille à l'endroit une maille à l'envers. Elle était sujette à des maux de tête fréquents qui la paralysaient. Et, surtout, elle perdait ses dents d'une manière étrange pour quelqu'un de son âge. La dernière, en croquant dans une pomme.
Treize ans aujourd'hui. Enfin ! C'est la fin de l'enfance.
Présenté comme étant le premier roman pour ados de Nancy Huston, ULTRAVIOLET est une fine galette de 80 pages, au contenu prenant et grisant, avec beaucoup de charme et une plume au style sûr et envoûtant.
Nous sommes dans l'Ouest canadien, poussiéreux et accablé par la canicule, en juillet 1936. Le pays connaît une grave crise économique, les paysans crèvent la faim et Lucy fête ses 13 ans. Elle reçoit un journal qui deviendra non seulement son confident mais avant tout le témoin de ce délicat passage qui existe entre l'enfance et l'adolescence.
La jeune fille est en effet curieuse, fonceuse mais timorée. Elle se pose mille questions qu'elle garde pour elle, elle se sent incomprise, remet en question la foi héritée par son éducation (son père est pasteur) et envisage l'avenir avec incertitude. Elle en a assez de vivre dans un trou perdu, aux ambitions étriquées, Lucy rêve d'un changement dans sa vie.
Il surviendra par la venue d'un jeune médecin, Bernard Beauchemin, dont le passé transpire l'odeur du scandale. Lucy est attirée, son corps aussi manifeste ses premiers émois, ce sont les premières palpitations et autres douleurs dans le bas-ventre, en somme la chenille est en train de quitter sa chrysalide.
Il règne une atmosphère lourde et électrique, où subsiste un semblant de torpeur, au centre de laquelle la jeune adolescente se trouve empruntée et plus trop à sa place. Sa confession se veut à la fois pudique et impertinente, drôle et spirituelle, parfois immature et capricieuse. C'est un vrai régal, hélas bien trop court !
Ultraviolet - Nancy Huston
Editions Thierry Magnier (2011) - 80 pages - 8€
illustration de couverture : Claude Cachin
Rien ne distrait la folie Qui l'entoure mais rien ne peut Détourner mon cœur épris *
Ce roman pour la jeunesse raconte l'histoire d'une jeune japonaise, fille de paysans, qui décide de suivre l'apprentissage de Maître Matsuo Seki, lequel exerce la profession d'écrivain public. Cette vocation révèlera chez la demoiselle une âme profonde, sensible à la poésie, et fera couler des poèmes d'une très grande beauté, qui feront sa réputation jusqu'à la cour royale.
Fleur-des-Neiges reste toutefois bouleversée de ne pas être aimée par l'élu de son coeur, Tadashi, par la faute de leurs différences sociales, pense-t-elle. Son coeur est meurtri, fermé à jamais de connaître d'autres élans. Le passage de l'ibis blanc, oiseau qu'elle achète avant de libérer près d'un bassin aux lotus pour faire envoler son chagrin, est très joli.
Ce texte, qui est aussi un conte classique et intemporel, raconte donc la destinée de Fleur-des-Neiges (en japonais, on dit Yukika) avec un sens du raffinement fort délectable. Les illustrations de Claude Cachin ajoutent du charme et une crédibilité à ce récit délicat. Une belle lecture à conseiller aux enfants, dès 9 ans.
Fleur des Neiges, texte de Pierre-Marie Beaude, illustré par Claude Cachin
Gallimard jeunesse, Folio Cadet - Septembre 2008, 52 pages - 5,30€
* Paroles d' Une lettre oubliée / Juliette