Et Ellie vécut heureuse, de Harriet Evans
Eleanor Bee a toujours rêvé de décrocher un métier dans l'édition, ou en rapport avec les livres (la lecture est sa plus grande passion !). La chance lui sourit lorsqu'elle débarque dans une petite maison indépendante, au sein d'une équipe familiale, où règne une ambiance bon enfant. Très vite, Ellie craque pour Rory, le fils de sa chef, mais doit cacher leur liaison pour ne pas semer la zizanie au travail.
Aussi, quand les soucis économiques frappent à la porte, c'est le branle-bas de combat. Ellie se sent trahie et déchirée. Hélas, dans la vie, ce sont les erreurs qui font avancer. Et Ellie n'est plus l'héroïne candide et juvénile du début, elle est devenue terriblement froide et peu attachante. Je ne l'ai jamais aimée, de toute façon. Elle s'est révélée hyper décevante, assez snob et hypocrite sur toute la ligne. Même sa vie amoureuse est une calamité, pas follement excitante.
Tout ça fait que ce livre aura été une belle déception ! Moi qui m'attendais à de la chick lit enjouée et délirante, j'ai réalisé à regret que j'avais tout faux. C'est juste une histoire banale, pas distrayante pour deux sous (mais qui laisse entrevoir le petit monde de l'édition sous ses aspects les plus nobles... et les plus crasses). Sans quoi, totale désillusion.
Presses de la Cité, février 2013 ♦ traduit par Sophie Pertus (Happily ever after)
Profanation : La deuxième enquête du département V
Nous retrouvons notre inspecteur Carl Morck et son assistant Assad en train de dépouiller un dossier déposé par une main anonyme sur leur bureau, au sujet d'une histoire qui aurait déjà trouvé son dénouement. Il y a vingt ans, un frère et une sœur ont été sauvagement assassinés dans une maison de campagne, le coupable a reconnu les faits, permettant d'innocenter une bande de jeunes gens très riches et snobs, accessoirement coupables d'assouvir leurs instincts les plus vils en pratiquant des parties de chasse aux trophées douteux.
Donc, ce petit club élitiste n'a jamais été inquiété et a prospéré, formant aujourd'hui les nouvelles puissances montantes et influentes. Carl, lui, est intrigué mais pas réellement motivé. C'est seulement lorsque ses supérieurs tenteront de le mettre au frais qu'il va sérieusement s'investir dans cette affaire crapuleuse. Il a notamment remarqué que la seule femme du groupe, complice de leurs vices, a disparu de la circulation et serait réapparue en tant que SDF aux alentours de la gare. Il missionne Assad pour la contacter, toutefois ils ne sont pas les seuls sur la piste, car ses anciens acolytes sont déterminés à mettre la main sur cette Kimmie. La clef de l'énigme ?
Autant j'ai apprécié retrouver les personnages, le département V, tous les petits secrets des uns et des autres, suivre les histoires qui se déploient dans l'ombre, autant j'ai été moyennement emballée par l'intrigue criminelle en elle-même. Trop glauque, polluée par des détails sordides, distillant un suspense éventé, jouant avec notre corde sensible, bref l'enquête n'est pas particulièrement palpitante. De plus, l'auteur a exagérément noirci le portrait des hommes à abattre, ce qui accentue la sensation de malaise. Donc, bémol sur l'intrigue et ses entournures, mais j'espère que le troisième tome va reprendre du poil de la bête.
Profanation : La deuxième enquête du département V, par Jussi Adler Olsen
Albin Michel, 2012 - traduit par Caroline Berg
- Parution du premier tome, Miséricorde, en Livre de Poche.
Elle est à tout le monde, la mer ! Tout le monde... A nous aussi, y a pas de raison !
- Oui, on va aller à la mer, déclare-t-elle d'un ton absolument résolu. La vraie mer, celle qui est à 503 km, qui a des vagues, qui porte les bateaux, celle qui va loin, loin, jusqu'en Amérique...
- Celle qui est salée ! crie Johnny.
- Celle qui a des crabes ! crie Noah.
- Des pirates ! Des requins ! hurle Noah.
- Des baleines ! Des sirènes ! ajoute la maman en riant.
- Et du saumon fumé, dit Johnny pour voir ce que ça fait de mettre de la poésie dans la conversation.
Et il va ajouter : « Et des beignets. Au chocolat, même, des fois. »
Johnny n'est pas un élève brillant, certaines choses le dépassent, comme la poésie ou les livres à la bibliothèque. Il aime bien y aller toutes les semaines, avec sa classe, mais ce qu'il préfère ce sont les voyages en bus, sa place derrière le chauffeur, pour bien voir la route.
A la maison, la famille ne sort pas beaucoup et ne peut pas se payer des vacances non plus. Est-ce que ça le chagrine, Johnny ? Non, pas vraiment. C'est sa maman qui a soudain le blues et qui décrète qu'ils iront, eux aussi, cet été à la mer, la mer qui se trouve à 503 km.
Voilà un roman pétillant, optimiste, jovial et léger comme une bulle. C'est un petit texte à l'effet magique, qui évoque les rêves et la poésie, avec pour héros un garçon très attachant, gentil, simple et attendrissant. Je ne vous raconte pas le bonheur que cette lecture procure... A découvrir, tout bonnement !
Je veux aller à la mer (Où l'on apprend que la mer est à 503 km) par Jo Hoestlandt, illustré par Jean-Pierre Blanpain
Oskar éditeur, coll. Trimestre, 2012
lectures de vacances #2
Quel roman ! Je l'avais à peine ouvert qu'il m'a ensuite été impossible de le lâcher. Il se lit en une goulée, tant il nous captive à suivre la descente en enfer de son héroïne. Amanda, une architecte new-yorkaise d'une trentaine d'années, mène une vie heureuse et comblée... jusqu'au jour où un rêve étrange la surprend en train d'être embrassée par une autre femme, très belle et irrésistible. Dans les jours, puis les semaines qui vont suivre, rien ne sera plus pareil dans son existence. Petit à petit, le doute s'immisce. Des bruits venus de nulle part résonnent dans son loft. La tension s'installe même au sein de son couple. Amanda ne se reconnaît plus ! Elle agit autrement, répond à des besoins et des pulsions qui ne lui sont pas propres, elle semble étrangère à son corps, ne contrôle plus rien et refuse d'accepter l'évidence : elle est possédée par un démon.
Oui, c'est terrifiant, obsédant, cela nous place en position dérangeante, curieux que nous sommes d'assister à cette dualité, de découvrir les agissements troubles de la jeune femme, son combat intérieur, ses questions et ses tentatives de guérison. La chute est dure, lente, douloureuse... et c'est horriblement fascinant. Sara Gran a su cercler son héroïne et son lecteur dans la même valse étourdissante, impossible d'en sortir, d'ailleurs je ne suis pas sûre d'en avoir eu envie.
Viens plus près - Sara Gran
Points, coll. Roman noir, 2011
Dave a un petit souci avec les filles. Il collectionne les rencontres et les relations, mais se sent incapable de garder contact avec elles ou de prendre des nouvelles, même à titre sporadique. Et tout le problème vient de là, se rendre compte qu'à l'heure des technologies modernes, le silence et la solitude s'installent de plus en plus. Au risque de tourner au(x) drame(s). C'est ainsi que plusieurs anciennes petites amies de Dave sont retrouvées assassinées, chez elles. Mortes de faim et de soif, ligotées pieds et mains dans le dos. Comment se peut-il qu'on laisse quelqu'un s'éteindre dans son coin, au fil des semaines, sans alerter l'entourage ? Tout simplement parce que le tortionnaire a su manipuler tout le monde en envoyant de faux SMS.
Mais à force de circonstances malencontreuses, Dave devient le principal suspect de l'enquête et doit fuir pour échapper à la police. Il entend prouver son innocence et aussi sauver une amie, qui est désignée comme étant la prochaine victime. Eh oui, quel imbroglio ! Au départ, on ne voit rien venir, on suit le rythme imposé par l'auteur, on digère, on s'interroge, on croit avoir tout deviné dès la page 250, mais on se met le doigt dans l'œil. L'histoire est sinistre, machiavélique et laisse un goût amer, mais qu'est-ce que c'est bon ! Cela vous laisse une impression de coup reçu dans l'estomac, une brutalité tout à fait consentie, même si ça gratouille aussi ci et là.
Ceux qu'on aime - Steve Mosby
Points, coll. Thriller, 2010
Au premier coup d'oeil, la couverture et le résumé peuvent laisser dubitatifs. Et pourtant, ce roman noir, plus que noir, est divinement impitoyable, juste et captivant. C'est l'histoire, d'un côté, d'un lieutenant et de son adjoint, deux bras cassés confinés au service des suicidés, et qui commencent à relever plusieurs cas suspects sans véritablement mettre un nom à ce malaise. C'est ainsi qu'ils font la connaissance d'un trappeur franco-américain, appelé à la rescousse pour régler les formalités administratives suite au décès de son ami, un fakir qui s'est vidé de son sang alors qu'il était en représentation. Une mort douteuse, donc. John commence à fourrer son nez dans les affaires louches de son pote, aidé de loin par le lieutenant Guérin, lui-même hanté par ses propres démons liés à une guerre des barbouzes.
C'est tout simplement bluffant, ça se lit tout seul, le désespoir des uns faisant presque le bonheur des autres, parce qu'il ne faut pas se voiler la face, l'auteur dresse un portrait attachant de ses personnages, alors même qu'ils ne sont pas parfaits mais tout cabossés, avec des bleus partout. Ce n'est pas joli-joli, c'est au contraire insolite, sombre mais ça le fait. Cela coule tout seul, la fin est terrible mais parfaitement réussie, à sa façon l'auteur a su tirer son épingle du jeu. J'ai presque davantage apprécié la forme au fond de l'intrigue.
Fakirs - Antonin Varenne
Points, coll. Policier, 2010
Teaser Tuesday #8
C'était un soir de neige comme on n'en avait pas vu depuis longtemps. Londres frissonnait, étourdie par la tempête, et les traces des passants, à peine dessinées sur les trottoirs, s'effaçaient tels les mots d'un poème d'enfant. Jamais l'hiver n'avait paru aussi cruel, et jamais aussi délectable, pour le jeune garçon, la perspective de demeurer cette nuit dans sa chambre sous les toits avec une histoire pour seule compagnie.
Les étranges soeurs Wilcox : Les masques de sang - Fabrice Colin
Papa a dit une seule valise par personne. Je respecte les consignes. De toute façon, la mienne est à moitié vide. Qu'est-ce que j'aurais pu mettre de plus ? Pas besoin d'emporter une tonne d'habits, il paraît qu'il y a un lave-linge sur place. Il y a tout ce qu'il faut, il paraît. Il y a même un grand jardin. Papa a dit que ça devrait me plaire.
Hier, il est rentré avec un gros paquet-cadeau. Quand je l'ai vu, j'ai cru que c'était mon télescope que j'avais commandé pour Noël. Le cadeau, c'est pour Juju. C'est une poupée qui parle. On peut lui faire prendre le bain et on peut la coiffer aussi. Justine va adorer. Papa a dit que ce serait moi qui lui offrirais si ça me faisait plaisir. Je ne suis pas jaloux. Je sais que j'ai beaucoup de chance de ne pas être malade. Je sais que la santé, c'est le plus beau de tous les cadeaux. Pas besoin de me le répéter. Noël, c'est dans moins de deux mois, je peux bien attendre.
Mon vaisseau te mènera jeudi sur un nuage - Marcus Malte
C'est toujours impressionnant de pénétrer pour la première fois dans une taverne de sinistre réputation. Mais il y a cela de bien chez Papa Guillotin qu'on n'a pas besoin de pousser la porte pour entrer : il n'y en a pas. Pour pisser, il y a les quatre coins. Et quand on veut manger, on nettoie la table d'un revers de manche.
Ce soir-là, l'ambiance était à la rigolade. Les clients, qui savaient que le pâté de lapin était en fait du pâté de chat, faisaient miaou quand la serveuse posait l'assiette devant eux.
Malo de Lange, fils de Personne - Marie Aude Murail
Je suis une astronaute surfant sur une vague, dans l'océan de la Tranquillité. J'ai roulé trop vite sur la route de la Tristesse, dérivé trop longtemps sur l'épave du navire Stress, et failli perdre la tête sur le TGV de l'Oubli. Mais voilà que je glisse avec grâce dans une direction positive. Ce ne sera pas un trajet éclair. Il va me falloir être patiente, suivre le flux cosmique. Je me rapproche des côtes, où m'attend la plage de la Décontraction.
C'est le genre de délires dans lesquels Blake est capable de partir. Blake vient de Nouvelle-Zélande, et porte des tongs même par temps pluvieux. Il lui arrive de sortir des trucs tellement ringards que j'éclate de rire même lorsque je me sens triste. C'est plus fort que moi.
Lottie Biggs n'est presque pas désespérée - Hayley Long
Immobile sur la grève, mes longs cheveux noirs flottant au vent du large, je regarde la marée monter lentement au rythme des vagues et des courants, et je songe à ce que je suis devenue. Je ne sais trop à quel moment la chance m'a abandonnée, mais il y a, c'est évident, un certain temps déjà que cela s'est produit...
Filles de Lune : Naïla de Brume - Elisabeth Tremblay