Les nouvelles aventures du fakir au pays d'Ikea, de Romain Puértolas
Même si je n'avais jamais lu les premières aventures du fakir au pays d'Ikea, je n'ignorais pas non plus de quoi cela retournait mais craignais une lecture trop burlesque pour m'y hasarder. C'est finalement pour le rendez-vous mensuel du Club Audible que j'ai relevé le défi et suivi avec beaucoup d'étonnement les joyeuses péripéties de notre Ajatashatru Lavash Patel (acte 2) !
Le fakir escroc a depuis fait du chemin en devenant un homme riche après avoir écrit un roman à succès et se repose donc sur ses lauriers dans son appartement cossu à Paris. Son éditeur lui fait cependant comprendre que son nouveau manuscrit ne vaut pas tripette et qu'il ferait bien de repartir en vadrouille pour pimenter sa prose. Retour donc en Suède pour concrétiser son rêve ultime - s'acheter son fameux lit à clous et rencontrer le grand patron d'Ikea. En parallèle, on replonge dans ses souvenirs d'enfance alors qu'Ajat suivait son apprentissage de jeune fakir auprès d'une autre fripouille, ce sacré Baba Ohrom. Ajoutez des quiproquos, des chassés-croisés, des petits mots doux qui s'envolent, une dulcinée qui imagine son amour perdu et un chauffeur de taxi gitan qui écoute du Raphaël à longueur de journée... La bidonnade est assurée ET assumée. Cette suite a été pour moi une totale surprise - tant mieux - j'ai été épargnée de toute comparaison et mon enthousiasme n'en a été que plus débordant à l'écoute de cette histoire - fabuleusement lue par Dominique Pinon, au passage. Sa gouaille de vainqueur et l'humour pince-sans-rire qui découle de chaque page font évidemment mouche. Le fakir est un antihéros par excellence, toujours présent pour mettre les pieds dans le plat, amateur de jeux de mots débiles, confondant d'une niaserie abyssale et se couvrant souvent de ridicule, mais avec panache...
En somme, cela se lit comme une fable truculente et déjantée. On redécouvre le royaume des boulettes et des pains à la cannelle sous un autre jour, mais on voyage aussi entre l'Inde et la France, on évoque les flux migratoires et l'idée folle d'une Europe aux abois et condamnée à se réfugier en Afrique... Tiens donc, et si on inversait les rôles ? Ne serait-ce point les prémices d'une nouvelle aventure ? Pour l'heure, c'est drôle et savoureux. L'auteur a certes annoncé qu'il allait écrire un troisième épisode - entre autres lubies - mais gare à la surdose tout de même. En attendant je m'en vais écouter Tout un été sans Facebook !
©2018 Le dilettante (P)2018 Audiolib. Lu par : Dominique Pinon
Série : Le fakir, livre audio 2 (Durée : 6 h env.)
#Club_Audible MAI 2018
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Les Vacances d'un serial killer, de Nadine Monfils
Place à la comédie belge, portée par le fabuleux duo de Nadine Monfils et Dominique Pinon, qui livre à eux deux un festival comique de haute volée ! L'histoire nous entraîne aux côtés de la famille Destrooper, le père Alfonse, la mère Josette, les deux ados, Lourdes et Steven, sans oublier l'inénarrable Mémé Cornemuse dans sa caravane, en route pour la pension des Mouettes face à la mer du Nord. Mais le voyage cumule les déconvenues, d'abord Josette se fait voler son sac par un motard, puis la voiture largue son attelage et lâche la mémé en pleine nature. Celle-ci, ne manquant pas de ressource, fait de l'autostop et rencontre un bonhomme et sa fiancée... Autant glisser que cette dernière ne fera pas long feu ! Leurs vacances vont ainsi enchaîner les bévues et autres mésaventures qui font faire imploser la belle union familiale. Ah, ah ! C'est à mourir de rire. Les Destrooper ont cette délicate parenté avec les Tuche, dans le genre franchouillard un peu plouc, avec en tête de liste une Mémé Cornemuse hargneuse, voleuse, menteuse, obsédée et cupide. Plus mordante et manipulatrice que Tatie Danielle. C'est dire.
Quoi que prétende le titre, on ne verse pas dans la littérature policière, mais clairement dans la parodie vaudevillesque. L'histoire est loufoque et insensée, on adhère ou pas à l'humour belge, à son sens de la dérision et aux situations ubuesques. Pour ma part, j'ai souri tout du long ! Dominique Pinon est un comédien extraordinaire. Nadine Monfils, quant à elle, lit toutes les voix féminines. Leur duo fait des étincelles et fournit une prestation jubilatoire, qui donne du pep's au roman ! J'en veux encore.
Texte lu par Dominique Pinon et Nadine Monfils pour Audible, Juillet 2015 (durée : 4h 09)
>> En format papier chez Pocket (2012) ou Belfond (2011)
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Moi, Boy (Souvenirs d'enfance) de Roald Dahl
Récit autobiographique de Roald Dahl, “Moi, Boy” retrace les vingt premières années de l'auteur - depuis son enfance au Pays de Galles à son départ pour l'Afrique - et rassemble une flopée de souvenirs à la fois joyeux, insouciants et poignants (la mort de son père, le cœur brisé par la perte de sa fille aînée, sa douloureuse expérience des pensionnats anglais, l'éloignement, l'enseignement rigoureux et les châtiments corporels...). La lecture conserve néanmoins toute la fraîcheur et l'impertinence de la jeunesse, car c'est avec son légendaire sens de l'humour et une bonne dose de tendresse que Roald Dahl se livre à cet exercice réjouissant.
Tout commence par l'installation de son père, venu de Norvège, à Cardiff où il fait fortune. Roald grandit au sein d'une famille nombreuse et unie, malgré les coups durs et les aléas de la vie. Il raconte ainsi les vacances en Norvège, les promenades en voiture, sans besoin de passer le permis, les petites bêtises pour se venger de l'épicière revêche (en glissant une souris morte dans un bocal à bonbons), ou comment s'interdire de manger des bâtonnets de réglisse pour ne pas attraper la maladie du rat, se payer la tête du petit copain de la frangine et lui donner du tabac de chèvre à fumer, trembler devant un professeur rouquin, à la grosse moustache, ou passer des heures à bouquiner aux WC pour réchauffer la cuvette...
À travers le récit de ses aventures, on découvre un jeune Roald Dahl qui ressemble étonnamment aux héros de ses livres (lire son chapitre sur le Chocolat, qui a tout lieu d'être la genèse de Charlie). C'est donc un formidable pèlerinage en enfance, au pays des souvenirs, également un voyage dans le temps (l'époque des années 20) à travers une composition intime et pleine de délicatesse. L'acteur Dominique Pinon a réussi à nuancer les émotions et se glisse dans la peau du môme Roald Dahl avec une verve savoureuse.
Gallimard Jeunesse / Collection: Écoutez lire (Texte intégral. Durée : 3h 40) ♦ Novembre 2015
Traduit par Janine Hérisson / Illustrateur de couv. : Quentin Blake
Roald Dahl, 8 ans
Le liseur du 6 h 27, de Jean-Paul Didierlaurent
Ce petit roman a su tracer sa route l'an dernier et a connu un joli succès, en se révélant attachant, simple, mais pas insignifiant, riche d'une histoire qui possède les mêmes accents poétiques et farfelus qu'un film comme Amélie Poulain ou Les émotifs anonymes.
On y découvre le portrait d'un homme qui déteste son patronyme, Guylain Vignolles, et qui n'aime pas non plus la vie qu'il mène. Célibataire, il partage son appartement avec un poisson rouge, Rouget de l'Isle, cinquième du nom. Il travaille pour une société de recyclage qui broie les livres invendus par tonnes de camion déversées dans la gorge de la monstrueuse machine, une Zestor 500, rebaptisée la Chose ou la Bête. Tous les matins, sur le chemin qui le mène à son boulot, Guylain a un rituel : il s'installe sur le même strapontin orange du RER de 6 h 27 et fait la lecture à voix haute. Sa routine bascule le jour où il trouve une clé USB sur son trajet, contenant une flopée de textes rédigés par la mystérieuse Julie, qui raconte sa pittoresque vie de dame pipi dans un centre commercial. Notre Guylain tombe sous le charme de l'inconnue et se laisse convaincre par son vieux pote Giuseppe de la retrouver.
On goûte avec bonheur toute la tendresse et la cocasserie de cette histoire plaisante et pleine de sensibilité, à laquelle Dominique Pinon apporte sa gouaille légendaire. Il nous plonge en toute bonhomie dans une ambiance décalée et chaleureuse (les étonnantes séances de lecture à voix haute à la maison de retraite, par exemple), d'où l'on ressort avec un sentiment bienheureux. Une chouette lecture, qui a réussi à me charmer sans crier gare. Belle surprise.
Disponible en poche chez Folio, août 2015
« Pour tous les voyageurs présents dans la rame, il était le liseur, ce type étrange qui, tous les jours de la semaine, parcourait à haute et intelligible voix les quelques pages tirées de sa serviette. Il s'agissait de fragments de livres sans aucun rapport les uns avec les autres. Un extrait de recette de cuisine pouvait côtoyer la page 48 du dernier Goncourt, un paragraphe de roman policier succéder à une page de livre d'histoire. Peu importait le fond pour Guylain. Seul l'acte de lire revêtait de l'importance à ses yeux. Il débitait les textes avec une même application acharnée. Et à chaque fois, la magie opérait. Les mots en quittant ses lèvres emportaient avec eux un peu de cet écœurement qui l'étouffait à l'approche de l'usine. »