Oh Happy Day, de Anne-Laure Bondoux & Jean-Claude Mourlevat
J'avais beaucoup d'espoir (mais surtout beaucoup de crainte) au moment de découvrir cette lecture. Quatre ans ont passé pour Pierre-Marie et Adeline. En fait, j'avais oublié que le couple était sur le point de se rencontrer à la fin de Et je danse, aussi mais se réservait cet instant à l'abri de notre regard inquisiteur. Verdict : un total échec dont la grande responsabilité revient à Pierre-Marie. Médaille d'or de la goujaterie.
Donc quatre ans plus tard, ce monsieur a l'outrecuidance d'écrire à Adeline. Il aimerait retrouver un petit carnet pour relancer la muse endormie. La dame ne moufte pas mais aiguise ses lames. Elle est désormais mariée et heureuse en ménage. Elle s'apprête d'ailleurs à quitter le pays pour s'installer à Toronto. Elle est à deux doigts de glisser une fin de non-recevoir. C'est comme ça que leur correspondance renaît de ses cendres. Elle reprend d'abord sur le bout des lèvres, puis délivrée des vieilles rancœurs. Car les anciens amis ont beaucoup à partager. Actes manqués et regrets amers... on nage en plein dedans.
L'aventure canadienne va également prendre un tour inattendu, à la fois burlesque et dramatique. Bof bof. De toute façon c'était foutu depuis le départ. Quand j'ai compris que les sautes d'humeur de l'un avaient brisé le cœur de l'autre, pour moi la magie dans Et je danse, aussi venait de voler en éclats. Je n'ai pas aimé cette suite (inutile... encombrante... minable...). Oui je mets des pointillés, exprès ! Mais cette histoire n'a ni queue ni tête. C'était comme si j'avais usurpé mes souvenirs (ça se passait comment dans Et je danse, aussi ?). Cette fois, point de lumière, point d'étincelle. Les personnages ont fait leur temps. Je préfère mille fois le mystère à un rendez-vous foiré qui vous laisse un goût aigre en bouche... pouah.
Terrible déception ! Vraiment.
©2015 Fleuve Éditions, département d'Univers Poche (P)2020 Lizzie
- Lu par : Marcha Van Boven, Robert Guilmard, Frédéric Meaux
- Durée : 8 h 45
Le livre audio se boucle sur un entretien avec les auteurs, qui expliquent le pourquoi du comment etc. (J'en viens à regretter le refus initial de JC Mourlevat à écrire une suite... mais pourquoi !?!!). Bref. Tous deux commentent également la version audio et avouent un certain malaise à l'écoute d'une voix étrangère se glisser dans la peau de leur personnage. JC Mourlevat a davantage d'embarras envers l'exercice (ce qui ne signifie pas qu'il juge le travail mal exécuté... bien au contraire).
Personnellement, les voix des comédiens m'ont paru très agréables à suivre et m'ont permis d'embarquer à bord de cette histoire avec beaucoup d'insouciance. C'était distrayant et réconfortant. Sur ce plan, aucun souci. Dommage de n'avoir pas trouvé mon bonheur dans le contenu de l'histoire... car vraiment c'est une suite qui n'avait pas lieu d'être.
⭐⭐⭐
Du 20 avril au 3 mai 2020, l'éditeur Lizzie vous offre un livre audio. Il vous suffit de télécharger l'application Lizzie pour profiter de cette offre.
Entre ciel et Lou, de Lorraine Fouchet
La mort de Lou a mis sa famille k-o. Sa santé vacillante, ses pertes de mémoire ont finalement conduit son époux Jo à la placer dans une maison spécialisée, à seulement cinquante-huit ans. Trop jeune pour être écartée, trop jeune pour s'éclipser. Leurs enfants, Cyrian et Sarah, n'ont jamais compris le choix de leur père et lui en tiennent rigueur.
La lecture du testament va conforter leur acrimonie, lorsque le notaire énonce à voix haute que Jo aurait “trahi” Lou, selon les dires de celle-ci. La suite du document est cependant confidentielle, les enfants sont priés de quitter l'office, non sans une certaine amertume. Très déçus par leur père, ils imaginent une tromperie impardonnable et repartent le cœur lourd.
Seulement, Lou a confié à son mari la délicate tâche de rendre leurs enfants heureux. Elle le sait, elle a été une épouse comblée, une mère épanouie, mais hélas Cyrian et Sarah n'ont pas hérité leur droit au bonheur. C'est au tour de Jo de rectifier le tir, en toute discrétion.
Cette mission n'enchante pas notre veuf éploré, depuis longtemps ses enfants et lui ont vécu des vies parallèles. Cyrian mène une existence bourgeoise, complètement éteinte, et se tient à distance de Groix, où il prétend ne pas y trouver sa place. Le jour où son corps a lâché l'affaire (handicap, corps bancal, risques génétiques etc.), Sarah a vu son fiancé lui tourner le dos et a depuis renoncé à l'amour en ne s'attachant à personne.
Comment consoler cette famille cabossée par les aléas de la vie, la réconcilier avec la notion de famille, synonyme de valeur sûre et d'entraide, quand il n'y en a jamais été question, ou seulement pour sauver les apparences, et pour soutenir la mater familias ? Vas-y Jo ! Vas-y fonce. ^-^
J'avais hésité avant de me lancer dans cette lecture, craignant un roman trop sirupeux ou larmoyant - sans vouloir dénoncer A. Ledig ou A. Martin-Lugand dans le genre - mais là pas du tout. J'ai été agréablement surprise par cette belle histoire d'une famille qui va droit dans le mur, complètement paralysée par ses émotions, et qui a trop l'habitude de conserver pour elle ses vérités, en contenant aussi ses élans affectifs. Ooooh, comme ça me parle, dis donc !
Et puis il y a aussi le cadre de l'île de Groix, véritable pivot de l'intrigue, et surtout un appel du pied pour y déposer ses bagages. C'est un cocon hors du temps, un refuge bienveillant, avec des personnages attachants (Maëlle, sa petite Pomme, les copains de banquet, où l'on se rappelle entre rires et larmes que Lou était une piètre cuisinière...). Soudain les chagrins et les peines vous semblent moins lourds, moins insurmontables. On guérit de tout, à Groix ! Il faut croire.
Bref. Cette bulle a su m'envelopper tout naturellement, et je m'y suis sentie très bien. Parfaitement à mon aise. J'étais prête pour écouter l'histoire de Jo, face au nouveau challenge de sa vie, un défi pour le forcer à ne pas couler à pic non plus, car notre homme est vraiment très, très triste d'avoir perdu son alter ego.
Pour s'accrocher à la vie, il se tourne vers ses enfants qu'il ne comprend plus. Au départ, il est un peu pataud dans ses tentatives de “colmatage”, et puis au fil du temps ses stratagèmes vont prendre forme et approcher le rêve inaccessible. Youhou.
C'est vraiment une chouette lecture, qui envoie de bonnes ondes et qui fait se sentir #heureux. Le choix des quatre comédiens (Audiolib) apporte une touche affective et donne une perspective réjouissante à l'épanouissement de cette intrigue simple, charmante et riche d'émotions. Chaque voix tient son rôle, idéal pour une immersion totale. À renouveler !
Texte lu par Maia Baran, Patrick Descamps, Frédéric Meaux & Colette Sodoyez pour Audiolib
Durée : 9h 09 - Août 2016
L'ombre du vent, de Carlos Ruiz Zafon
Daniel a seulement dix ans lorsqu'il est pour la première fois introduit dans le cimetière des livres oubliés, sous la houlette de son père. La tradition veut qu'il sauve un livre au hasard pour le ramener chez lui et l'adopter. Son choix se porte sur un petit ouvrage, intitulé L'ombre du vent, d'un obscur écrivain (Julian Carax). Une rencontre décisive, puisqu'elle va sceller sa destinée ! Le garçon va en effet se lancer sur les traces de l'auteur, dont la vie mystérieuse va exciter sa curiosité, mais aussi son imaginaire, puisqu'il semblerait que leurs deux vies se renvoient souvent la même image. Mais que de patience pour parvenir au bout de toutes les zones d'ombre du récit, démêler le vrai du faux, fouiller le passé et revenir au présent, jouer de rencontres fortuites ou malheureuses, alimenter son existence en drames et autres atermoiements sentimentaux... C'est un véritable labyrinthe ou un immense puzzle à reconstituer avec une extrême minutie. Le roman-fleuve par excellence ! Certes, c'est romanesque et énigmatique à souhait, mais un poil trop long. En dépit des efforts réunis pour enflammer l'intérêt du lecteur et rassasier un roman épique aux ambitions gargantuesques, on flanche et on s'ennuie à mi-parcours. Les personnages se révèlent aussi peu attachants. (Daniel, Julian ou Fumero... un trio grotesque et caricatural !) :/
Durée d'écoute du livre audio : 17 h 30 ! Une entreprise colossale, à se réserver le temps des vacances... mais brillante interprétation de Frédéric Meaux.
Merci Bladelor pour le prêt.
Audiolib, juillet 2012 ♦ texte intégral lu par Frédéric Meaux (durée d'écoute : 17h 30) ♦ traduit par François Maspero pour les éditions Grasset
“ Avez-vous une idée de la raison pour laquelle quelqu'un voulait brûler tous les livres de Julian Carax ?
- Pourquoi brûle-t-on les livres ? Par stupidité, par ignorance, par haine... allez savoir.
- Mais vous, que croyez-vous ?
- Julian vivait dans ses romans. Ce corps qui a fini à la morgue n'était qu'une partie de lui. Son âme est dans ses histoires. Une fois, je lui ai demandé de qui il s'inspirait pour créer ses personnages, et il m'a répondu : de personne. Tous ses personnages étaient lui.
- Donc, si quelqu'un voulait le détruire, il devait détruire ces histoires et ces personnages, c'est cela ?
- Vous me rappelez Julian. Avant qu'il ne perde la foi.
- La foi en quoi ?
- En tout. ”
Enfant 44, de Tom Rob Smith
L'histoire se passe dans la Russie de Staline, en 1953, les agents du MGB traquent les dissidents et les font disparaître sans rencontrer la moindre riposte. Le peuple se tait, se camoufle, range sa rancœur au fond de la poche. Leo Stepanovitch Demidov est un agent haut placé, ancien héros de guerre, officier zélé et convaincu d'œuvrer pour le bien du parti. Lorsqu'il se rend chez un vieil ami en plein deuil, il rassure la famille en expliquant que leur fils n'a pas été assassiné, mais tué accidentellement.
Il rentre à Moscou sur les traces d'un vétérinaire, aux idées réactionnaires, qui s'est fait la malle, Leo lui sauve la vie en le repêchant dans un lac gelé, tombe malade. Au sortir de sa convalescence, il est convoqué pour une nouvelle arrestation : celle de son épouse, Raïssa dont la grande beauté fait décidément bien des jaloux... Terrible cas de conscience pour notre agent, qui risque de perdre ses privilèges en subissant un exil forcé dans un coin perdu de l'Oural.
De nouveau, des crimes inexpliqués, des corps éviscérés de jeunes garçons ou jeunes filles retrouvés dans la forêt, des interrogations en pagaille, mais aussi un acharnement manifeste à ne pas générer d'enquête plus aboutie, plus fouillée. On suit les grandes lignes du parti, ou on subit son courroux. Leo fait face aux failles du système, avec une connaissance accrue des drames qui se jouent en coulisses.
L'histoire est rondement menée pendant les 3/4 du roman, ambiance terriblement glaciale du régime stalinien, qui fait découvrir le revers de la médaille, avec les corruptions, ambitions personnelles, bourrages de crâne, drames conjugaux, petits et grands mensonges... Le roman tient ses promesses et est franchement prenant. Par contre, l'intrigue policière fait doucement glousser dès lors qu'on bascule vers la perspective d'un dénouement grossier et aberrant. Autant dire que j'ai trouvé ça frustrant, niais, passablement décevant.
Toutefois je lirai sans hésiter la suite, avec dans l'ordre : Kolyma et Agent 6, car j'ai été agréablement surprise par la vitesse avec laquelle j'ai parcouru cette lecture !
Audiolib, avril 2009 ♦ texte intégral lu par Frédéric Meaux (durée : 12h 20) ♦ traduit par France Camus-Pichon pour les éditions Belfond ♦ disponible en format poche chez Pocket, janvier 2010