L'attentat de Lancaster Gate, d'Anne Perry
Une bombe vient d'exploser dans une maison de Lancaster Gate, faisant cinq victimes parmi les rangs de la police. Les premiers soupçons de l'enquête se focalisent sur les anarchistes, mais Thomas Pitt, commandant de la Special Branch, découvre au gré des témoignages que les agents auraient été piégés et envoyés dans un guet-apens. Un suspect sort rapidement du lot, seulement son identité doit demeurer secrète pour ne pas compromettre les négociations en cours entre le gouvernement et la Chine. Autre cas de conscience pour Thomas Pitt, il doit convaincre son ancien sergent, Tellman, de fouiller dans les archives de ses confrères pour vérifier si une possible erreur judiciaire, avec corruption passive, est à déplorer.
Ambiance tendue et délétère dans ce 31ème épisode ! Les copains d'hier font grise mine et sont contraints à une posture désobligeante. De son côté, Anne Perry avance à pas mesurés pour déployer les ficelles de son intrigue (minutieuse) où l'on constate que les personnages sont tous mis à mal et pataugent dans un contexte particulièrement difficile. C'est une lecture qui ne manque ni de charme ni de raffinement. J'ai ainsi pris plaisir à retrouver Charlotte, sa sœur Emily, leur tante Vespasia ou Gracie Phipps autour d'un feu de cheminée, d'une tassé de thé ou dans un salon cossu. Cela pantoufle pas mal aussi mais il faut dire que tous les couples sont casés, plus besoin de s'attendre à de grands chamboulements, encore moins depuis que l'auteur a franchi le cap des 30 épisodes. En fait, Anne Perry ne me surprend plus mais bichonne tendrement ma fibre nostalgique (j'ai tellement vibré au rythme des premières enquêtes de Thomas et sa suffragette d'épouse). Désormais ses romans deviennent trop longs, avec des enquêtes qui se bouclent sans esbroufe, et se perdent parfois dans des atermoiements ronflants. Dans cet épisode, j'ai apprécié le procès final, sa mise en scène et ses révélations retentissantes. Ce dénouement a su me tirer de ma torpeur et me tenir en haleine jusqu'au tout dernier point ! Rien que pour ça, c'est déjà pas mal.
On reste dans une lecture audio impeccable, orchestrée par les éditions Thélème et lue par Frédérique Dufour. C'est lisse, sans chichis inutiles et d'une très grande sobriété. Je reste cependant sceptique quand au choix de proposer les derniers titres de la série. À quand le tout premier tome, L'Étrangleur de Cater Street ? Un peu d'ordre, maintenant !
©2017 Éditions 10/18, département Univers Poche. Traduction de Forence Bertrand
(P)2018 Éditions Thélème. Durée : 9h 53
#moisanglais_2018
Un traître à Kensington Palace, d'Anne Perry
J'aime beaucoup Anne Perry - dont je lis sans déroger toutes les parutions spéciales pour les fêtes de Noël - par contre j'ai accusé beaucoup de retard dans sa célèbre série du couple Charlotte et Thomas Pitt, dont voici le 32ème volume ! Ahem. Je tiens donc à saluer l'initiative des éditions Thélème qui proposent la version audio du titre. Pourquoi celui-ci, et pas le tout premier - L'étrangleur de Cater Street ? J'avoue que cela m'échappe, mais je n'ai pourtant pas boudé mon plaisir. Si je peux enfin recoller les wagons éparpillés et suivre cette série par livre audio, ce serait pour moi une formidable aubaine ! Un autre titre est d'ailleurs annoncé pour avril 2018, soit L'attentat de Lancaster Gate (n°31), qui confirme le choix de publier la série à rebours. Un détail discutable, malgré tout.
La vie de Thomas Pitt a grandement évolué depuis ses débuts dans L'étrangleur de Cater Street, et près de vingt ans ont passé quand on le retrouve dans Un traître à Kensington Palace ! Marquée par son veuvage et la vieillesse, la Reine Victoria convoque Thomas dans ses appartements privés pour évoquer la mort de son ami John Halbert, dont le corps a été repêché dans la Serpentine. Si l'enquête policière a conclu à une noyade accidentelle, la Reine souhaite en avoir le cœur net et demande à Pitt de dissiper ses soupçons. Ses rapports avec son fils Edouard ne sont pas au beau fixe, le Prince semblant s'attirer des amitiés à controverse, il revient à Thomas d'enquêter en toute discrétion pour éviter l'incident diplomatique. La mission est tendue, car Thomas est livré à lui-même et ne peut se confier à personne. Son épouse Charlotte ressent toute sa frustration mais va parvenir, avec sa vivacité légendaire et la complicité de sa sœur Emily, à aiguiller habilement les démarches de son mari.
L'intrigue policière est basique, on suit un Thomas Pitt confronté à sa conscience et forcé d'éprouver les limites de sa loyauté, d'où ce sentiment d'un homme tiraillé tout au long de son affaire, mais l'évasion historique est irréprochable (l'époque victorienne et son tableau sociétal). C'est la grande force de la série, en plus des personnages et de la satisfaction de les retrouver, livre après livre. La lecture audio faite par Frédérique Dufour pour les éd. Thélème est sobre et épurée (sans réalisation sonore). Cela peut déconcerter au début - le texte est livré dans son jus, sans artifice. La simplicité a du bon aussi !
10/18 Collection Grands Détectives (2017) / traduit par Florence Bertrand
(P)2016 Éditions Thélème. Lu par Frédérique Dufour. Durée : 9h env. -- Téléchargeable sur Audible
Le mot de l'auteur
La série Pitt démarre en 1879 – le décor idéal d’un roman policier. Entre faste et misère, optimisme et désespoir, rien n’est plus romanesque que ces somptueux costumes, l’éclairage au gaz, les fiacres ou des empreintes dans la brume… Et puis, l’envie, la crainte, l’espérance, la disgrâce et l’avidité restent entièrement semblables hier ou aujourd’hui. Comme, malheureusement, les maux de cette société victorienne. Avec la famille Pitt nous explorons autant la pittoresque histoire de Londres que les vies singulières, les liens, ou encore les triomphes et les désastres de ses membres.
ANNE PERRY