11/12/17

13 reasons why ►, de Jay Asher - lu par Florine Orphelin & Gauthier Battoue

« J'espère que vous êtes prêts, parce que je vais vous raconter l'histoire de ma vie. Ou plus exactement, la raison pour laquelle elle s'est arrêtée. Et si vous êtes en train d'écouter ces cassettes, c'est que vous êtes l'une de ces raisons. » 

Thirteen reasons why

Hannah Baker a mis fin à ses jours, mais avant de commettre son suicide, elle a tenu à raconter son histoire en s'enregistrant sur des cassettes qu'elle adresse aux différents maillons d'une même chaîne - ils sont donc treize - treize désignés coupables, lesquels par un mot de trop, un geste déplacé, une parole malheureuse, un jugement, un mensonge ou un colportage, ont entraîné le drame que l'on sait. Clay Jensen figure sur cette liste, sauf qu'il ne comprend pas pourquoi. Élève discret, sans histoire, il était fou amoureux de Hannah mais se sentait trop timide pour lui avouer. Peur du regard des autres ou de la déception ? Aujourd'hui, le garçon n'est plus qu'un paquet de larmes et de regrets. C'est donc armé de son walk-man, le casque vissé aux oreilles, qu'il chemine dans la ville, tout en sombrant dans l'amertume, à l'écoute de la confession de la jeune fille. Confession émouvante, injuste et révoltante... mais qui soulève aussi des questions. Et c'est toute la force du roman qui réussit à nous fasciner en nous entraînant dans les dédales de son histoire - cela se lit comme un roman à suspense. La construction est judicieuse, l'intrigue est alimentée sans cesse pour lancer de nouvelles pistes ou créer du mystère. Et pourtant, le malaise aussi nous ronge et prend de l'ampleur à mesure qu'on découvre la spirale infernale, le point de non-retour, la détresse incurable. On se vautre dans la saveur amère du gâchis, et on ressent un profond malaise. La boucle est bouclée. Hannah Baker a gagné son pari de nous hanter.

J'avais déjà lu le roman à sa sortie, en 2010, pour découvrir aujourd'hui qu'il a inspiré une série netflix. Très bonne appréciation, et blablabla. En optant cette fois pour le format audio, je ne pouvais qu'être au plus près de Clay Jensen, en train d'écouter une voix d'outre-tombe, vaincue et dégoûtée par l'emballement frénétique de l'ostracisme adolescent. C'est franchement moche, très dérangeant. Même l'initiative de Hannah Baker me pose un problème de conscience, ce qui est sans doute voulu par l'auteur. Au final, on ressort de cette expérience audio en ressentant un vrai soulagement. On salue la performance des deux lecteurs - Florine Orphelin et Gauthier Battoue - également les voix françaises dans la série. Et on réfléchit à la vie, si précieuse et si fragile... 

©2007 "Thirteen Reasons Why", première publication. Traduction française : Éditions Albin Michel (P)2017 Audiolib, texte lu par Florine Orphelin & Gauthier Battoue (durée : 6h 25)


22/06/12

“Why does it say she has three hundred and twenty friends?" Josh asks. "Who has that many friends?”

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Ce livre m'a un bref instant fait penser à celui de Sarah Mlynowski, Parle-moi !, dont l'idée générale est assez proche : avoir la possibilité de prendre le contrôle de son avenir. Serait-ce vraiment une aubaine ? Cette histoire semble prouver le contraire. Nous sommes à la fin des années 90. Emma vient de recevoir un CD-Rom pour installer internet sur son nouvel ordinateur. Et là, surprise, elle découvre un site du nom de Facebook qui s'ouvre pile sur la page d'une personne qui s'appelle comme elle, Emma Nelson Jones, avec quinze ans de plus. Eh oui, elle a sous les yeux son propre futur !

Elle met aussitôt dans la confidence son meilleur ami Josh et ensemble ils commencent à bidouiller leur avenir pour s'éviter la perspective d'une vie peu folichonne, sauf qu'ils tombent rapidement dans le piège du « toujours plus » et en font une fixation. Résultat, ils en perdent leur spontanéité, leur libre-arbitre, ne prennent plus les bons choix et mettent leur amitié en péril. De plus, Josh et Emma se plaisent follement mais n'osent pas se l'avouer car ils ont peur des incidences sur le futur. Ils sont tombés dans le piège (garder le contrôle de leur vie) mais ont perdu innocence et fraîcheur.

J'ai vraiment beaucoup apprécié cette lecture, qui m'a fait sourire rien que par le gouffre générationnel : dans les années 90, on ne connaissait certes pas Glee, ni Harry Potter, et encore moins les SMS ou les blogs. Mais on ne vendait pas son âme aux réseaux sociaux, en étalant sa vie privée à la face du monde. Ce n'est toutefois pas un livre sur la nostalgie et l'idée que « c'était mieux avant ». Simplement une manière de rappeler qu'il faut se protéger (délivrez-vous des griffes de Facebook !), vivre l'instant présent et apprécier les petits détails d'une vie, certes pas toujours parfaite. La lecture est vraiment sympathique, mais pas idéalisée par cette couverture... tendance has-been. 

Profil, par Jay Asher & Carolyn Mackler
Milan jeunesse, coll. Macadam, 2012 - traduit de l'américain par Guillaume Fournier 

Posté par clarabel76 à 08:30:00 - - Commentaires [7] - Permalien [#]
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01/03/10

"Je suis désolée." Tels sont ces mots.

Et chaque fois que j'entendrai quelqu'un dire qu'il est désolé, je ne pourrai m'empêcher de penser à elle.

Voilà un très, très bon roman que je vous conseille vivement de découvrir. Il vous donnera le sentiment de plonger en apnée, de lire jusqu'à n'en plus pouvoir pour arriver aux dernières pages et connaître tous les secrets d'Hannah Baker.
Avant de se donner la mort, cette demoiselle a enregistré son histoire sur 7 cassettes, destinées à 13 personnes. Toutes sont liées au drame d'Hannah, "elle est morte pour 13 raisons, tu es l'une d'elles" dit la couverture.  Et c'est parfaitement bien résumé. Clay Jensen, le narrateur, figure sur la liste. Il ne sait pas encore pourquoi, il était fou amoureux d'Hannah, et puis...
La lecture vous absorbe immédiatement, vous place au début dans la délicate position du voyeur, avec ce méchant sentiment de ne pas comprendre, de trouver le principe tordu et dérangeant. Qu'importe les motivations... celles-ci nous apparaissent évidentes au fil des pages. Ce n'est plus du malaise qu'on éprouve, mais de l'empathie, du chagrin, de la révolte, de l'impuissance aussi. Fatalement. C'est ce qui est admirablement exprimé, à travers la lecture croisée de Clay en train d'écouter via un walk-man la confession de celle qu'il aimait secrètement. Un sentiment, donc, de date dépassée, d'arrivée tardive et, en sus, un gros et pesant poids qui vous tombe dans le ventre.
Du gâchis aussi.
C'est ce que je me disais, en ne quittant pas des yeux ce livre, en tournant les pages avec fébrilité et en pestant contre ce qu'on nomme banalement l'effet boule de neige.
Hannah Baker a emménagé dans une nouvelle ville, a fait son entrée dans un nouveau lycée et a été la cible des rumeurs les plus folles. On n'imagine pas à quel point un petit bout de ceci ajouté à un morceau de cela peut prendre une proportion infernale, jusqu'à ce que la machine se mette en branle et actionne un processus de démolition. Ce n'est jamais la faute de personne, mais l'histoire d'Hannah prouve qu'on porte tous une petite responsabilité quelque part.
Ce livre est vraiment poignant et déclenche mille émotions. Ce n'est pas une façon détournée d'accuser, après tout Hannah assume aussi ses propres erreurs, c'est un constat juste et sans appel qui renvoie chacun dans ses petits papiers. Après cela, vous ne vous sentirez plus de la même façon.
Bon pour un coeur gros et la tête sonnée.
Vous n'imaginez pas à quel point... 

« Treize Raisons est un mystère, une apologie, une cérémonie. Je sais que, dans les années à venir, je reviendrai souvent à ce livre. »
Sherman Alexie, auteur du Premier qui pleure a perdu.

*

Traduction française de Nathalie Peronny

Treize Raisons / Jay Asher

Albin Michel, coll. Wiz, Mars 2010

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Posté par clarabel76 à 09:45:00 - - Commentaires [51] - Permalien [#]
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