Endgame, Tome 1 : L'appel, de James Frey & Nils Johnson-Shelton
Extraordinaire ! Vraiment. Mis de côté à sa sortie (à cause de son volume, oups), ce roman s'est miraculeusement rappelé à moi et s'est imposé en deux nuits blanches. Yep. À tous ceux qui aimeraient lire un roman type Hunger Games, je vous le dis, foncez.
Endgame, c'est un Jeu impitoyable qui vise la fin du Monde. Douze candidats, issus de peuples anciens, sont destinés à se défier. Leur but : décrocher trois Clefs et résoudre la Grande Énigme. Ils ont grandi dans l'attente de cet Appel. Armés d'une détermination farouche, ils disposent aussi de leur lourd héritage pour remporter la victoire (et assurer la survie de leur Lignée). Ils ne possèdent aucun pouvoir magique. Ils ne sont pas immortels. Seules les alliances pourraient les guider à déjouer les pièges... les alliances mais aussi les trahisons car dans Endgame tous les coups sont permis. Qui sera, sera.
Les auteurs nous mettent très vite dans l'ambiance : sans concession et d'une violence implacable. On fait un rapide tour d'horizon pour connaître les Candidats, dont Sarah (l'américaine à la vie ordinaire), Chiyoko (l'étrange japonaise qui ne parle pas), Jago (le mafioso péruvien), Baitsakhan (un môme psychotique), Maccabee (le millionnaire aguerri) ou Shari (une jeune femme pensive et réservée). Un casting assez riche et varié auquel on s'attache, on s'interroge, on doute. On n'a pas fini d'en voir de toutes les couleurs.
Car le rythme imposé est vif et ardent, du coup il faut mémoriser vite et bien les noms pour se lancer à fond dans le jeu. La lecture n'en est que plus intense et passionnante ! Ça cogne, ça explose, ça tranche... les joueurs se pourchassent et parcourent le globe à la recherche des indices. Ils piratent les réseaux, détournent des avions, espionnent et scellent des pactes qui seront brûlés sans état d'âme. Palsembleu ! ça dépote.
Moi j'ai tout gobé, tourné les pages comme une timbrée, tout lu avec des yeux hallucinés, eu mon petit cœur brisé à la fin et pesté contre la vie qui m'impose de dormir ou d'honorer une vie sociale (m'écarter de la suite... bouh quel déchirement !). Oui j'en suis là.
Accro, carrément.
Gallimard (2014) - Traduit par Jean Esch
Au-delà d'une lecture intense, ce livre cache dans ses pages une super-énigme composée de codes et indices imaginés par de grands cryptographes. Menez votre propre quête en tentant de la résoudre. Déchiffrez, décodez et interprétez. Le premier d'entre vous qui y parviendra gagnera une véritable fortune en pièces d'or.
> Pour participer sur https://keplerfuturistics.com/
> Lire les règles de la chasse au trésor Endgame sur www.endgamerules.com
En parallèle de cette quête, un jeu mobile novateur conçu par le laboratoire Niantic de Google permet de jouer à Endgame dans le monde réel, en choisissant une lignée et en affrontant d'autres joueurs.
⭐⭐⭐⭐.5
Sleeping Beauties, de Stephen King & Owen King
Embarquement immédiat pour Dooling, petite ville des Appalaches, où les habitants ne sont ni plus ni moins des êtres ordinaires. En apparence. Dans la prison pour femmes, une nouvelle prévenue vient semer la zizanie : Evie Black est inquiétante et mystérieuse. Avec son aura puissante, elle envoûte ses comparses, sous l'œil goguenard du personnel impuissant. Commence alors un étrange phénomène : les femmes s'endorment et ne se réveillent plus. À la place, leur corps est recouvert par un cocon qu'il est déconseillé de transgresser (sous peine de voir les endormies se métamorphoser en folles furieuses). Bientôt, le syndrome Aurora frappe toute la communauté féminine de Dooling et d'ailleurs.
Comme souvent dans les romans de Stephen King, on se focalise sur un monde en vase clos, on scrute les comportements humains en situation désespérée et on laisse l'auteur s'en donner à cœur joie pour dépeindre des vies banales fouettées par un vent de panique. Ce faisant, il épingle sans vergogne toutes les bassesses possibles et inimaginables et gratine, non sans humour, ses congénères dans cette vision d'une société qui les priverait de compagnie féminine (devinez quoi ! ... les WC seraient d'une crasse monumentale). Bref. Vous gloussez bien derrière votre bouquin à les imaginer se dépatouiller sans vous.
Maintenant, parlons technique, car ce livre audio est le prolongement d'un roman de 830 pages, soit près de 28 heures d'écoute. Oui, tout ça. Un vrai marathon de lecture qui semble interminable... et pourtant je suis bon public. Seulement, mon ami, j'ai jugé qu'il y avait trop de tours et de détours pour toucher au but. Et à force de tourner autour du pot, on trépigne d'impatience, on geint et on a l'impression de s'abrutir. Ceci dit, je ferme les yeux (loin de moi le syndrome Aurora) car j'ai été littéralement hypnotisée par l'ambiance sordide de Dooling et par le caractère étrange et fantastique de l'intrigue. Cette histoire écrite à quatre mains (père et fils) se voudrait un hommage à nous les femmes, nous le charme (pauvres diables que sont les hommes). Un brin caustique et déjanté.
Bravo à la fabuleuse Marie Bouvier qui a lu ce texte avec patience et dévotion : j'ai totalement adhéré à ses interprétations car elle multiplie sans relâche les voix selon les personnages (et ils sont nombreux) ou leurs personnalités. On peut plus facilement se repérer et avancer dans l'histoire avec aisance. Une véritable prouesse.
© 2018 Éditions Albin Michel. Traduit par Jean Esch (P)2018 Audiolib
- Lu par : Marie Bouvier
- Durée : 28 h env.
La fille d'avant, de J.P. Delaney
Traumatisée suite à un cambriolage d'une rare violence, Emma cherche une nouvelle location et trouve en la maison du One Folgate Street la réponse à tous ses problèmes. Jane, meurtrie par la perte de son bébé, repart également à zéro et s'installe dans une nouvelle vie, dans la même maison. Quelques années séparent les deux femmes, mais leurs histoires sont racontées en parallèle tant leurs parcours sont similaires. En effet, ce bijou d'architecture, élaboré par Edouard Monkford, est aussi une contrainte de chaque instant. Pour décrocher le Graal, il faut notamment répondre à un niveau d'exigence difficilement supportable et se plier à des règles de vie draconiennes. Malgré tout, Emma, puis Jane, acceptent toutes les concessions et tombent fatalement sous le charme du propriétaire. Edouard Monkford ? Le mâle alpha dans toute sa puissance. Un spécimen arrogant, froid et calculateur. Mais le type aurait plusieurs cadavres dans son placard - son épouse décédée, mais aussi sa jeune et jolie locataire... Emma. Prise d'un doute, Jane choisit de mener son enquête.
J'avoue avoir cédé aux chants des sirènes en me plongeant dans cette lecture - elles ont pour nom Olivia de Lamberterie, Alix Girod de l'Ain et Tatiana de Rosnay - même si j'ai également appris à me méfier des concerts de louanges. Et cela n'a pas loupé, non, je ne ferai pas chorus. D'accord, j'ai trouvé ce roman correct, agréable à suivre, avec du suspense et des rebondissements qui incitent à aller toujours plus loin. Les chapitres sont courts, les voix entremêlées, c'est imparable pour saucissonner le lecteur dans la combine. Par contre, j'ai eu une vague sensation de fourre-tout en avançant dans ce livre. On a de la bonne tension psychologique, une enquête minutieuse, des portraits flous, toujours plus flous, pour mieux brouiller les pistes et fragiliser les repères. Et là, au milieu de ça, je n'ai pas compris cette vague inspiration de Christian Grey - le contrat, l'amant tyrannique, le sex-appeal rabougri (bah oui, Monkford est tout sauf séduisant). Cela m'est apparu grotesque. Et mon enthousiasme en a été douché. Sans quoi, c'est un roman ordinaire, une lecture facile et distrayante, mais un buzz littéraire surestimé.
Techniquement, j'ai apprécié la lecture faite par Ingrid Donnadieu et Floriane Muller - le choix d'une interprétation à double voix s'ajuste pertinemment aux deux voix des héroïnes du roman, l'une pour Jane, l'autre pour Emma. C'est tout à fait concordant. Les récits se croisent ou se complètent. Les deux comédiennes se donnent la réplique et brouillent volontairement les pistes. En bref, cette orchestration sied admirablement au livre. Car, malgré mes réserves, le dénouement bancal et l'impression d'une intrigue qui s'essouffle, j'ai maintenu le cap jusqu'au bout pour assouvir ma trop grande curiosité.
©2017 Titre original : "The Girl Before" / Mazarine et Librairie Arthème Fayard pour la traduction française
(P)2017 Audiolib - Texte lu par Durée : 9 h 21
Le Cadavre dans la Rolls, de Michael Connelly (Harry Bosch #5)
Suite à son coup de déprime, cf. Le dernier coyote, Harry Bosch vient tout juste de retrouver sa place au sein de la brigade criminelle, avec une promotion à la clef en tant que chef de son équipe comprenant Jerry Edgar et Kizmin Rider (nouvelle venue). Pour célébrer la fin du weekend du Labor Day, un concert du Philharmonique est donné en plein air, alors que Bosch est appelé, non loin, pour enquêter sur l'assassinat d'un producteur de cinéma, Tony Aliso, tué d'une balle dans la tête, le corps retrouvé dans le coffre de sa Rolls. Une exécution sommaire, qui semble porter la signature du crime mafieux. Mais Bosch n'est pas du style à se satisfaire des apparences et entend chercher plus loin. Il rencontre la veuve, glisse ses pas dans ceux de la victime, se rend à Vegas, négocie avec la police urbaine, se mouille avec la pègre locale et se coltine une fois encore les affaires internes. Une triste habitude pour notre inspecteur précédé de sa réputation d'empêcheur de tourner en rond. Au-delà de toutes ces tractations et magouilles politiques et judiciaires, Harry va également se confronter à un fantôme de son passé - l'inoubliable Eleanor Wish, croisée dans Les égouts de Los Angeles - avec laquelle il a très, très envie de faire un bout de chemin. Et plus encore.
Ce tome recense l'aspect le plus bling-bling de la ville des anges et sa jumelle racoleuse - Vegas et ses casinos, ses clubs, ses hôtels, son argent sale, sa mafia et ses blondes fatales... Par certains aspects, on aurait presque pu s'imaginer dans un polar des années 50, à la Raymond Chandler (Veronica Aliso est un cliché du genre). Harry est cependant très éloigné de Philip Marlowe et choisit de nous surprendre avec ses idylles qui lui donnent des ailes et le font accomplir des merveilles ! Whooo... Ce tome m'inspire donc plusieurs sentiments et oscille entre le pur roman noir, l'épisode indissociable d'une série qui ne cesse de s'enrichir et la lecture de pure distraction avec des rebondissements à la clef, un coupable insaisissable et des fausses pistes lâchées exprès pour étourdir le quidam. Un rendez-vous indiscutable.
Points, coll. Policiers, thrilles & romans noirs ♦ Juin 2014 pour la présente édition
Traduit de l’anglais par Jean Esch (Trunk Music) pour les éditions du Seuil
Le Poète, de Michael Connelly
Je n'ai pas abandonné Harry Bosch, seulement je tente de suivre au plus près l'ordre chronologique des livres de Connelly. Et donc... Le Poète. Classé parmi les meilleurs polars de tous les temps. Sans exagération. Voilà qui catalogue d'office cette lecture parmi les plus stressantes et attendues au tournant. Je ne vais pas vous faire languir et avouer de suite que le rendez-vous a été à la hauteur des espérances !
L'histoire concerne le journaliste Jack McEvoy, anéanti par le suicide de son frère, Sean, un policier qui ne supportait plus le stress de son boulot et l'échec de l'affaire Theresa Lofton (une jeune étudiante sauvagement assassinée). Voulant comprendre les raisons de son geste tragique, Jack reprend tout à zéro et remarque assez rapidement plusieurs cas de suicide à travers le pays concernant d'autres flics éreintés par une grosse enquête non aboutie. La coïncidence est troublante, mais n'en attire pas moins le FBI, en la personne de l'agent Rachel Walling, aussi belle que redoutable, et dont la première intervention est aussi sexy que musclée. Jack est sous le charme et négocie finement pour rester au cœur de l'action, au nom de son frère, mais aussi pour la primeur du scoop et rendre justice à des victimes incomprises (le serial killer a trop longuement sévi en toute impunité). La suite de ses investigations continuera de le traîner loin, très loin, notamment sur la piste d'Edgar Allan Poe (point commun avec Les Mots qui tuent de Martha Grimes), ainsi que sur des terrains vagues où Jack va s'embourber à plus d'un titre. Connelly use de nombreux subterfuges pour égarer les enquêteurs (et le lecteur) et nous assomme avec une succession de pistes et de fausses pistes - qui rendent cependant le rythme haletant et le dénouement inattendu et époustouflant. Son seul point faible, à mon goût, réside dans ses interludes romantiques, maladroits et encombrants, qui servent inutilement l'intrigue ou la pimentent de façon lourdaude. Mais je lui pardonne aisément car il me tarde de plonger à nouveau dans son univers de mec bourru, qui rend le tout pas mal addictif.
Calmann-Lévy / ROBERT PÉPIN PRÉSENTE ♦ Juin 2015
Traduit par Jean Esch pour les éditions du Seuil (The Poet, 1996)
Points / Mai 2013 pour la présente édition
Le Dernier coyote, de Michael Connelly
Harry Bosch, on le sait, est colérique, impulsif et sanguin, du genre à s'emporter en claquant les portes et en crachant les pires insultes. Sa manie de passer au-dessus des ordres et de franchir constamment la ligne jaune a fini par lasser sa hiérarchie, qui le contraint à suivre une thérapie avec le Dr Carmen Hinojos. Bosch est en pétard, mais prend peu à peu conscience du mal qui le ronge - le meurtre de sa mère, Marjorie Lowe, survenu trente ans plus tôt et jamais résolu. Il comprend alors qu'il est temps pour lui de s'y pencher, pour peut-être débloquer ce verrou tenace qui l'enserre depuis l'enfance. Toutefois, plonger dans le passé de call-girl de sa mère est extrêmement éprouvant pour Bosch. Bien que frappé d'interdiction d'enquêter (il a également rendu son badge), il se sert de l'identité de son supérieur, Harvey Pounds, pour mener ses investigations et pénétrer les hautes sphères de l'administration dans l'espoir d'éclairer les relations sulfureuses de Marjorie (elle entretenait une liaison avec un politicien en vogue). Mais cette manœuvre sera lourde de conséquences, pour Harry... qui va goûter à l'amertume de son insolence et conserver en bouche une aigreur persistante.
Cette lecture est étonnante de sensibilité et prend aux tripes dans son initiative de vouloir percer la carapace de notre inspecteur revêche et le délivrer de ses démons. Certes, Harry traverse une mauvaise passe et collectionne les coups durs (Sylvia l'a quitté et sa maison est à deux doigts de s'effrondrer depuis le tremblement de terre qui s'est produit près de Los Angeles en janvier 1994). Il n'aime pas s'épancher sur son triste sort, mais doit reconnaître qu'il a un mauvais karma à soigner. Et c'est décidément dans le rôle du sauveur des causes perdues qu'il est le plus fort, avec ce cas le plus personnel de sa carrière à appréhender. Le dénouement de l'intrigue ne manquera pas non plus de déstabiliser le lecteur... j'ai d'ailleurs pensé à la série Cold Case pour l'émotion, l'ambiance nostalgique, l'injustice et le suspense du contexte. De fait, c'est un roman sombre et poignant, mais qui ne transforme pas Harry Bosch en personnage mollasson et pétri de douleur pour autant. Loin de là ! L'épisode est très bon et constitue une partie d'un tout, je ne peux qu'enchaîner avec la suite... ;-)
Les éditions retrouvées / Mars 2015
Traduit par Jean Esch pour les éditions du Seuil (The Last Coyote, 1995)
Points / Septembre 2015 pour la présente édition
La Blonde en béton, de Michael Connelly
Quatre ans après avoir tué Norman Church, le principal suspect dans l'affaire du Dollmaker, Harry Bosch doit rendre des comptes devant les tribunaux, accusé par la famille du défunt de grave erreur policière. Notre inspecteur tient bon la barre, contre vents et marées, affrontant les foudres de l'avocate Money Chandler, dont la spécialité consiste à épingler les dérapages des forces de l'ordre. La position de Bosch reste inflexible, jusqu'au jour où ses collègues sont prévenus de la présence d'un corps, coulé dans le béton, qui porte toutes les traces du serial killer, alors que celui-ci avait déjà été tué. Cette nouvelle découverte ébranle les certitudes de notre super-flic, qui doit agir vite et bien, et ce dans la plus grande discrétion, pour ne pas alerter l'accusation ni la presse. Mais l'étau se resserre et la paranoïa gagne du terrain. Bosch pointe du doigt l'éventualité d'un copieur et l'existence d'autres corps. Son enquête vole en éclats par la faute d'une taupe au sein de son équipe. Harry se sent acculé mais tente de cerner au mieux la personnalité du criminel et multiplie les suspects. Le dénouement est ainsi une succession de rebondissements après maintes déductions et tentatives d'approcher le coupable. Et c'est super bien rendu. Le scénario, haletant et habile, nous cueille par le nez pour nous guider là où il faut, quand il faut.
Ce roman est aussi pour moi la conversion ultime à la série Harry Bosch dont les deux premiers tomes (Les égouts de Los Angeles et La Glace noire) n'avaient pas su me charmer au-delà du possible. Cette fois, l'alchimie a opéré et je suis fatalement conquise. Bosch est un flic teigneux, pas sympa, mais sa force et sa détermination sont aussi la dynamique de la lecture, qui jongle entre la procédure judiciaire et la quête du serial killer, deux directions fort palpitantes pour l'intrigue. J'ai entrepris de suivre la série par ordre chronologique et vais découvrir ça avec grand plaisir dorénavant !
Calmann Levy / Robert Pépin présente (Mai 2014)
Lire le premier chapitre de "La Blonde en béton"
Points Policier (Mai 2012) / Le Livre de Poche (Mai 2015)
Traduit par Jean Esch (The Concrete Blonde, 1994)
Les Égouts de Los Angeles, de Michael Connelly
Première apparition de l'inspecteur Harry Bosch, sous les traits d'un flic désabusé, ayant pas mal roulé sa bosse au sein du LAPD, mais mis au placard suite à une bavure policière. Il se cantonne désormais aux affaires de dealers, prostituées et délinquants de bas étage, mais n'en demeure pas moins un fin limier. Arrivé en premier sur les lieux d'un crime (un cadavre découvert dans une canalisation), il identifie aussitôt la victime comme s'agissant d'un vétéran du Vietnam, Billy Meadows. Réfutant les conclusions officielles - mort par overdose - il se charge lui-même de l'enquête, contre l'avis de son supérieur. On lui colle alors sur les bras un agent du FBI, Eleanor Wish, ainsi que deux mouchards, Lewis et Clarke, chargés de fliquer tous ses faits et gestes. Harry Bosch le rebelle entre en piste, se jouant de la hiérarchie et agissant selon ses envies. Son travail d'investigation n'en demeure pas moins irréprochable : le type suit son instinct, vaille que vaille, et cela porte ses fruits !
Par contre, ça cogne et vous ronge de l'intérieur. C'est un petit monde très dur et âpre, assez glauque et peu glamour. Même l'inspecteur Bosch est sérieux comme un pape, aigri et meurtri par les coups durs... Pour une première approche, j'avoue, c'est rude ! Le rythme se distingue par un ton laconique, au suspense tendu. Classique et brut. Ce titre date tout de même de 1992 et en affiche fièrement les codes et les couleurs. Il y a peu d'humour, mais de l'action virile et impitoyable. Le dénouement peut surprendre et j'ai plutôt apprécié, tout en espérant davantage pour la suite !
Calmann-lévy, octobre 2012 pour la présente édition ♦ traduit par Jean Esch (The Black Echo)
Dans la foulée, j'ai également lu le 2ème tome des enquêtes de Harry Bosch avec La Glace Noire.
Harry Bosch entend laver l'honneur d'un collègue flic et se lance (une fois encore) dans une enquête contre l'avis de ses supérieurs... L'histoire se passe dans le milieu de la drogue, dans les années 90, c'est toujours aussi désespérant, noir et amer. Il me manque le charme, la finesse et un peu de légèreté. Mais je n'abdique pas encore.
Points Policier, novembre 2012 pour la présente édition ♦ traduit par Jean Esch (The Black Ice)
Justice pour Louie Sam, par Elizabeth Stewart
« Lynché. C'est un mot brutal, plus violent que pendu. Pourtant, c'est bien ce qui s'est passé. »
Une maison brûle près des marécages, le corps d'un homme est retrouvé dans les décombres, son crâne a été fracassé. Témoin sur place, George Gillies, 15 ans, attend l'arrivée du shérif et participe à l'enquête en prêtant une oreille indiscrète. Un nom circule rapidement sur toutes les lèvres, Louie Sam, un jeune indien aperçu sur les lieux du crime, l'arme au poing. Son ami Pete l'a croisé dans les bois, alors qu'il cherchait à fuir, il avait « une lueur meurtrière dans le regard ».
Le doute n'est plus permis et tous les hommes réclament justice. Une nuit, ils organisent une expédition punitive, silhouettes masquées et visage barbouillé de charbon, pour confronter le criminel. La sentence ne se fait pas attendre, le garçon est pendu à un arbre, seul George est choqué par cette scène d'une rare violence. Les jours qui suivent le verront désemparé, car il a interdiction d'en parler à quiconque.
Pourtant, la rumeur gronde, les menaces affluent, les indiens sont mécontents et se rassemblent près du village, le gouvernement veut également faire le point sur la situation et réclame qu'on dénonce les « membres du groupe d'autodéfense ». L'ambiance à Nooksack est à couteaux tirés. Des clans se forment, font pression sur la famille Gillies, à qui on reproche une trop forte sympathie pour la cause indienne. George se débat de plus en plus avec sa conscience et pose des questions, pour s'enlever des doutes, puis pour découvrir la vérité.
À qui profitait le crime ? Le garçon est assailli de remords, les souvenirs de cette nuit terrifiante ne cessent de le hanter, George se sent coupable d'avoir suivi le troupeau en bêlant et veut se racheter. Le roman est ainsi construit comme une intrigue policière qu'on suit avec excitation, mais propose aussi une véritable réflexion sur le racisme, l'injustice et la rédemption. Tirée d'une histoire vraie, qui s'est déroulée au Canada en 1884, la lecture n'en est que plus passionnante et digne d'intérêt.
éditions Thierry Magnier, août 2014 ♦ traduit par Jean Esch (The Lynching of Louie Sam)
Plus qu'une vie, de Kate Kae Myers
La mort brutale de son frère jumeau, Jack, a conduit Jocelyn à regagner la ville de Watertown où ils ont séjourné, durant leur enfance, au foyer Seale House qui est désormais une ruine calcinée. Tant de mauvais souvenirs s'y trouvent encore ! En fait, Jocelyn a reçu un message crypté de son frère et pense qu'il est toujours en vie. Elle a donc décidé de se lancer sur sa piste avec l'aide de leur vieil ami Noah.
L'enquête s'annonce compliquée, dès lors que Jocelyn comprend qu'elle est suivie par un homme dangereux, prêt à tout pour s'emparer du secret qu'elle traque elle aussi. Que cachait donc son frère qu'il tient encore à préserver aussi scrupuleusement ? De plus, Jocelyn est déboussolée de devoir fouiller dans un passé qu'elle avait enterré, mais qui revient la hanter. Son retour à Seale House, par exemple, est une épreuve douloureuse, au cours de laquelle surviennent des incidents surnaturels.
Heureusement, Jocelyn peut s'appuyer sur l'amitié indéfectible de Noah, qui connaît les jumeaux depuis toujours, qui comprend ses traumatismes et le réveil de ses vieilles peurs. C'est un garçon formidable, impressionnant aussi, très beau, charmant et séducteur en puissance. Oui, oui, des sentiments enfouis vont également remonter à la surface, pour notre plus grand plaisir ! ^-^
En somme, voilà un roman ébouriffant, mené tambour battant, dans une ambiance insolite et mystérieuse. C'est passionnant ! On suit la folle course de Jocelyn, une jeune fille attachante, qui affronte ses angoisses et ses démons avec courage et par amour pour son frère. La vérité au bout du chemin n'est peut-être pas celle à laquelle on s'attendait, mais c'est bluffant, absolument épatant. La lecture s'est parfois révélée déroutante, mais à aucun moment on ne manifeste de l'ennui ou de la réprobation, c'est une intrigue bien tournée, palpitante et à recommander pour tous les amateurs de thriller !
éditions Thierry Magnier, septembre 2013, traduit par Jean Esch