Envie de đ: L'ennui cui-cui, de Susie Morgenstern / Maou et Monsieur Poussin, de Clothilde Delacroix
Hector est champion du monde de l'ennui. Le garçon ne parvient pas Ă fixer son attention, Ă rester attentif, mĂȘme en classe. Son esprit s'Ă©vade, ses envies s'Ă©vaporent. Le garçon est ailleurs, dans sa tĂȘte. Ses parents s'en inquiĂštent et dĂ©cident de l'inscrire au foot et de suivre des leçons de violon. Pas trĂšs douĂ©, mais attentif Ă ne pas dĂ©cevoir sa famille, Hector fait des efforts.
Et puis, bizarrement, la machine s'emballe. Hector se retrouve pris dans un tourbillon d'activitĂ©s... entraĂźnement, rĂ©pĂ©titions, concours de ping-pong, dĂ©lĂ©guĂ© de classe, dog-sitting, on ne l'arrĂȘte plus. Malheureusement Hector est vite dĂ©bordĂ©. Trop, c'est trop. L'enfant craque.
« Je rĂȘve d'avoir plus de temps pour rĂȘver !
Je rĂȘve de prendre mon temps ou d'en avoir davantage pour faire encore plus de choses.
- On n'a qu'une seule vie pour respirer, pour rĂȘver, pour ne rien faire aussi. »
Un petit roman par la grande Susie Morgenstern : trĂšs, trĂšs drĂŽle.
L'histoire nous rappelle que l'ennui est un art qui se cultive mais qu'il ne faut pas en abuser. Mais il ne faut pas remplir le vide à tout prix non plus. Tout est affaire de juste équilibre. Notre ami Hector va en faire l'expérience et on se marre. Les illustrations de Clothilde Delacroix viennent aussi enfoncer le clou. On se régale à suivre sa spirale infernale, sa montée en pression, son burn-out ! Et on retient la leçon : le corps est fragile, il réclame sa pitance mais il crie stop en cas de satiété. Cessons de stimuler les mÎmes à outrance, de calquer sur eux nos propres envies ou autres passions : laissons les enfants grandir en paix. Ne rien faire, aussi, ça s'apprend. Trouver du temps pour l'ennui, mine de rien, c'est précieux. Oh yeah.
« cette vie... une seule fois... vie qui est unique... on ne vit quâune seule fois. »
L'ennui cui-cui, de Susie Morgenstern & illustré par Clothilde Delacroix
Mouche de l'école des Loisirs, 2018
********************
Un soir, alors qu'elle est plongĂ©e dans un profond sommeil, Maou est soudainement rĂ©veillĂ©e par un bruit bizarre. Le temps de descendre l'escalier, elle s'imagine un scĂ©nario de film d'horreur. Au lieu de quoi, elle trouve sur son paillasson un petit poussin. Seul, perdu, abandonnĂ©. Elle dĂ©cide de lui offrir Ă manger, de lui prĂȘter un bout de sa couette, puis mĂšne son enquĂȘte pour retrouver sa famille. Elle passe des petites annonces, sait-on jamais.
Les jours, les semaines vont passer. Que va devenir Monsieur Poussin ?
Texte simple et trÚs accessible pour les lecteurs débutants : on dit banco. C'est aussi largement illustré, aéré et joyeux. On bondit de page en page pour connaßtre la fin de l'histoire. C'est tout mignon, vraiment.
Maou et Monsieur Poussin, de Clothilde Delacroix
Moucheron de l'école des loisirs, 2020
********************
Tonio vit sur une Ăźle mais trouve son existence petite et restreinte. Lui rĂȘve de folles aventures, avec des pirates ou des baleines qui viendraient prendre leur caillou d'assaut. Ses parents trouvent que le garçon est trop tĂȘte en l'air et qu'il devrait faire plus attention, Ă ses affaires par exemple (il dĂ©chire ses pantalons ou perd son matĂ©riel sur la plage).
Un matin, leur maßtresse annonce qu'une classe du continent vient leur rendre visite pour la journée. Fou d'impatience, Tino sent l'espoir renaßtre. Enfin un peu d'action ! Mais ce jour-là , Tino rencontre Antonia. Dans sa salopette violette, la fillette affiche une mine bravache. Elle sait un tas de choses, elle pose des questions, elle trouve les cheveux de Tino renversants, elle préfÚre l'école buissonniÚre et elle est incollable sur la nature, les poissons, les adultes, les mensonges etc.
« Tandis qu'ils se dirigent vers les gros rochers Ă l'arriĂšre du phare, les semelles de leurs chaussures claquent comme des baisers sur les galets. Tino apprĂ©cie ce bruit. Il pense qu'Antonia aime la mĂȘme chose, car elle tente de marcher Ă la mĂȘme cadence que lui. Clac, clac.
C'est une jolie musique pleine de sécurité. Leurs deux pas ensemble sur les cailloux. »
Cette lecture nous fait dĂ©couvrir la vie solitaire d'un garçon sur son Ăźle, oĂč il n'y trouve plus le bien-ĂȘtre de son enfance. Il a envie de voir plus grand, ou il ne sait plus ce dont il a envie. Car sa rencontre avec Antonia lui fait revoir sa chance. C'est une douce histoire d'amitiĂ© et de partage qui se dessine, plantĂ©e dans un dĂ©cor idyllique. On respire l'air marin, les embruns, les algues, les bigorneaux, le vent, les marĂ©es... tout ça invite Ă l'Ă©vasion. Et c'est tout simplement formidable ! TrĂšs, trĂšs belle lecture Ă lire ou Ă donner Ă lire.
Un caillou dans la poche, de Marie Chartres
illustrations de Jean-Luc Englebert
Neuf de l'école des loisirs, 2018
********************
En avant pour : Ămile et les mĂ©chants - L'Ours et le Sipetit - L'anorak rouge - Horizon
Ămile et les mĂ©chants, par Vincent Cuvellier & Ronan Badel
Dans cette nouvelle histoire, Ămile est super bien planquĂ©, raide comme un piquet, ne bougeant ni une patte ni une oreille, chut, il piste un mĂ©chant... vraiment, vraiment mĂ©chant.
Avec ses flĂšches, ses pistolets, sa mitraillette et son Ă©pĂ©e, il est armĂ© pour surprendre l'horrible individu. N'y tenant plus, Ămile bondit sur sa proie, et puis : bam bam ! paf paf ! han han ! Le mĂ©chant est mis k-o. Ămile lui coupe la tĂȘte, lui coupe les jambes, lui transperce le ventre avec sa lame. Ămile ne lĂąche rien, mais le monstre non plus ! Le voilĂ qui crache du feu et se transforme en dragon tueur d'enfants ! Ouhlala. Aux abris, vite !
Cette sĂ©rie fait rire les enfants - et les mamans pas sages - car c'est plein d'humour et d'imagination, avec en hĂ©ros un garnement Ă la mine sĂ©vĂšre, qui ne sourit jamais, non, car le danger rĂŽde partout, tout le temps, mieux vaut demeurer sur ses gardes. Bravo Ămile.
==========================
L'Ours et le Sipetit, par Chloé Alméras
L'Ours et le Sipetit menaient chacun une petite vie tranquille dans leur coin : l'un au pied de la montagne, l'autre dans un village sur les collines. Un jour d'expédition, le Sipetit dégringole en chemin et tombe dans la Maison de l'Ours. Pas trÚs rassuré, il le supplie de ne pas le cuisiner avec des petits oignons. Au contraire, l'Ours lui propose de partager ensemble un bon repas mitonné aux petits oignons !
Et ainsi, l'Ours et le Sipetit passent une paisible soirĂ©e, Ă bavarder et Ă lire, puis les jours passent, ils poursuivent leur discussion, se promĂšnent dans la campagne et font la cueillette des plantes qu'ils boivent en infusion. La complicitĂ© entre les deux amis est profonde et sincĂšre. Aussi, le jour du dĂ©part de Sipetit, le cĆur du vieil Ours se brise. Il s'Ă©tait habituĂ© Ă avoir de la compagnie et ne supporte plus sa solitude.
Qu'on se rassure, la fin de l'histoire apportera du rĂ©confort Ă notre gros nounours fatiguĂ© - aprĂšs tout, les Ăąmes sĆurs sont insĂ©parables ! C'est avec beaucoup de tendresse et d'Ă©merveillement qu'on lit cet album, aux illustrations si dĂ©licates et raffinĂ©es qu'elle nous touche, nous interpelle, nous charme. C'est fin, trĂšs Ă©lĂ©gant, trĂšs joli.
==========================
Horizon, par Carolina Celas
Voilà un album 100% fascinant, avec son grand format, sa lumiÚre et sa poésie... Par contre, trÚs peu de texte pour interpréter les images mais les couleurs sont si éclatantes qu'elles expriment un méli-mélo d'émotions. L'effet est envoûtant.
Horizon, tu es lĂ tous les jours.
Parfois si loin, parfois si proche.
Aujourd'hui tu m'échappes.
Demain, c'est moi qui t'inventerai.
Ici, lĂ -bas. Ă l'infini. Peut-ĂȘtre aussi tout au fond de moi.
L'horizon est partout et guide nos pas. On la retrouve dans notre quotidien, notre jardin ou notre ville, dans le ciel ou Ă la mer, derriĂšre ses volets ou chez son voisin, elle trace aussi des frontiĂšres ou invite aux voyages, elle se glisse mĂȘme sur les terrains de tennis ou dans le reflet du miroir... TrĂšs, trĂšs belle lecture qui fait rĂ©flĂ©chir et rĂȘver. Sans prise de tĂȘte. C'est un album lumineux, qui donne envie de se poser et de prendre le temps d'avancer sur cette ligne invisible, Ă son rythme.
==========================
L'anorak rouge : La fĂȘte de l'Ă©cole, par Jean-Luc Englebert
On termine notre tour de piste avec ce nouveau tome dans la sĂ©rie de l'Anorak Rouge. On ne prĂ©sente plus Lucien et Francette, on se rappelle juste qu'ils ont dĂ©cidĂ© d'Ă©crire et d'illustrer ensemble une histoire de poney magique. Leur temps est comptĂ© car ils doivent prĂ©senter leur projet pour la fĂȘte de l'Ă©cole (avec dĂ©dicace en bonus). Mais les vacances isolent nos gĂ©nies en herbe : Francette part sur une Ăźle en famille, pour bouquiner et manger des araignĂ©es (!), tandis que Lucien reste Ă la maison, profite de la bibliothĂšque et des sorties en vĂ©lo pour trouver l'inspiration.
Ces petites sĂ©quences, pleines d'humour, donnent le ton : un peu de dĂ©rision, de dĂ©calage, de facĂ©tie... C'est particuliĂšrement rĂ©jouissant. En plus, le duo fonctionne trĂšs bien. Si la demoiselle mĂšne la danse, le garçon a l'esprit vif (et les cheveux rebelles). Ăa « oufti » pas mal Ă chaque coin de page ! En somme, c'est pile poil le genre de petites lectures exubĂ©rantes qui me plaĂźt. Il y a forcĂ©ment un passage, une expression, un dessin pour susciter un soupçon de sourire ou pour donner envie d'y revenir. C'est une trĂšs chouette dĂ©couverte... si ce n'est pas dĂ©jĂ fait !
==========================
PĂȘle-mĂȘle : L'Ă©tĂ© de l'indien - Comment ranger sa chambre en 7 jours seulement - La mouette et le goĂ©land - Francisco
Pendant que leurs parents partent faire des courses, six enfants sur une Ăźle promettent d'attendre sagement leur retour. Mais la faim se fait rapidement sentir. Allons pĂȘcher ! s'exclame Maxime le chef indien. Le garçon connaĂźt le meilleur coin pour attraper des poissons... sauf que la patience encore une fois n'est pas l'apanage de nos bambins.
Maxime se fĂąche et part bouder dans son coin. AllongĂ© dans l'herbe, contemplant les nuages, sous une brise fraĂźche, c'est le cadre idĂ©al pour piquer un petit roupillon. BientĂŽt sa marmaille se joint Ă lui... la nuit tombe et les Ă©toiles s'amusent dans le ciel. La Grande Ourse fait des crĂȘpes pour Petite Ourse ! Quel spectacle... Cela leur rappelle qu'il est l'heure de rentrer car les parents sont Ă la maison.
Une douce ambiance, un air vivifiant, un appel au large et une envie de prendre l'air pour rĂȘvasser... voilĂ ce que cet album nous rĂ©serve ! Du charme du charme et encore du charme. C'est merveilleux.
L'été de l'indien, par Jean-Luc Englebert
Pastel de l'Ăcole des Loisirs, 2019
=======================================
Colette et Mo ont du pain sur la planche : leur chambre est sens dessus dessous Ă cause des jouets Ă©parpillĂ©s. Mais le petit robot de rangement n'est pas content et donne l'ordre de tout ranger. Sans barguigner. Alors, une semaine pour atteindre cet objectif, ça donne... lundi on trie, mardi on se bagarre, mercredi on rĂ©trĂ©cit, jeudi tout passe par la fenĂȘtre, vendredi on aspire, samedi on s'ennuie... Et dimanche ? On mange des crĂȘpes !
Cet album est joyeux, fabuleux, rigolo, brouillon, coloré, pétillant. Vraiment, on s'amuse tout du long à découvrir les nouvelles idées de Colette et Mo pour échapper à la corvée du rangement. Les petits lecteurs vont adorer cette complicité et l'éventail de leur imagination ! Une lecture AU TOP.
Comment ranger sa chambre en 7 jours seulement, par Audrey Poussier
l'école des loisirs, 2019
=======================================
Francisco est un chat sauvage, vivant seul dans la vallĂ©e dĂ©serte et apprĂ©ciant fortement sa solitude. Il tient une station-essence et croise parfois quelques clients sans jamais entrer dans la discussion. Jusqu'au jour oĂč la famille Lapin cale sous son nez. Tous sont bien embĂȘtĂ©s. Francisco les trouve importuns, Madame Lapin le juge grossier. Ăa part en clash et les portes claquent.
Tombe la nuit, Francisco rumine dans sa tanniĂšre, la famille Lapin grelotte dans la voiture. Bon. AprĂšs tout, on peut effacer les vieilles rancunes et ouvrir la porte de la caverne d'Ali Baba. Les enfants Lapin vont ĂȘtre enchantĂ©s de leur soirĂ©e ! Oui, oui. Francisco va se rĂ©vĂ©ler un hĂŽte exceptionnel.
On sourit à la lecture de ce chat sauvage et bougon, dont la tranquillité est bousculée par une famille encombrante. Une cohabitation forcée va finalement rappeler les rÚgles de la sociabilité... et ainsi offrir à cette chÚre solitude de bonnes vacances bien méritées ! C'est trÚs drÎle et inattendu. Un chouette album plein de bonnes ondes positives.
Francisco, par Perceval Barrier
l'école des loisirs, 2019
=======================================
Le poĂšme de Goethe nâa cessĂ© dâinspirer dâautres artistes : Paul Dukas pour une musique, Walt Disney pour un dessin animĂ©, Tomi Ungerer et aujourdâhui Gerda Muller pour un livre illustrĂ© auquel elle offre sa minutie et son humanisme.
Un album d'un classicisme rare et élégant.
L'apprenti sorcier, par Gerda Muller
l'école des loisirs, 2019
=======================================
Une mouette et un goéland ont rendez-vous sur la plage pour jouer à cache-cache. Qui se planque derriÚre les rochers ? dans le chùteau de sable ? sous la serviette ? derriÚre le parasol ? dans la glaciÚre ? Ah-ah. La partie est corsée et réserve de bonnes trouvailles (a-t-on déjà vu un phoque qui téléphone ? eh bien... venez voir !).
Cette partie de plaisir se boucle par un tour de roue en train de croquer un cornichon loin des regards indiscrets. C'est trÚs sympa comme petite lecture et ça fait déjà penser aux vacances...
La mouette et le goéland, par Jeanne Boyer
loulou & cie chez l'école des loisirs, 2019
=======================================
On retrouve le duo impayable de Claude (le squelette) et son ami Morino (le taureau) pour une journée mémorable ! J'ai ri, mais j'ai ri tout du long. Cette série me ravit pour son humour et son audace. On se marre franchement.
C'est donc l'anniversaire de Morino (tarte aux fraises Ă l'horizon). DĂšs le rĂ©veil, nos deux amis se livrent Ă leur traditionnelle compĂšte au bord de la mer... Sauf que cette fois, la situation leur Ă©chappe et le pied de Claude est avalĂ© par un gros poisson. Vite, direction le port de pĂȘche pour dĂ©panner notre crĂ©ature verte. L'aventure s'annonce mouvementĂ©e. Au passage, ils devront affronter une horde de nudistes pas commodes, marchander avec une mĂ©mĂ© sorciĂšre et dĂ©couvrir qu'un abri Ă balais peut servir d'antichambre vers le royaume des morts ! Oh oui, que de surprises.
C'est ingĂ©nieux, farfelu et tellement drĂŽle. J'attends d'autres Ă©pisodes aussi fous et dĂ©jantĂ©s. Merci Adrien Albert. â„
Claude & Morino : Joyeux Anniversaire ! par Adrien Albert
l'école des Loisirs, 2019
=======================================
PĂȘle-mĂȘle : L'anorak rouge - Les enfants qui volent - Ămile a la grosse patate - La princesse CamĂ©lĂ©on - Un chien formidable
Depuis que Lucien a enfilĂ© son petit anorak rouge, il se sent investi d'une mission. Ăcrire une histoire de zombis ! Ses premiers essais ne rencontrent pas le succĂšs espĂ©rĂ© mais qu'Ă cela ne tienne ! Lucien dĂ©tient le scĂ©nario de sa vie en racontant le pĂ©riple d'une feuille sauvage devenue mutante zombie et qu'une fillette rousse Ă lunettes va dompter avec ses super pouvoirs. En fait, il s'agit de Francette. Elle adore la poĂ©sie ET Ă©crire des histoires. Ăa tombe bien, entre Lucien et elle, c'est une belle aventure qui commence. Certes, la demoiselle a une prĂ©fĂ©rence pour les poneys magiques et n'entend rien aux zombis. Lui, Lucien, ne veut pas la blesser et fait croire que... En vrai, une bourrasque a avalĂ© le manuscrit de mille pages (mais chut !).
C'est une lecture super drÎle. Une véritable ode à l'imagination et à la fantaisie. Avis aux adeptes du ton décalé et cocasse ! J'adore aussi ce format court et percutant, construit comme une bande dessinée, avec trÚs peu de texte mais des illustrations qui font mouche. Les anecdotes filent à toute allure et donnent franchement le sourire. Jean-Luc Englebert a réussi là un coup de maßtre : c'est canon ! Encore.
L'anoral rouge : Le vaste monde (tome 1) & Le petit poney magique (tome 2) par Jean-Luc Englebert
Gallimard Jeunesse Giboulées, 2019
=================================
Dans une ville trop calme, oĂč vivent des enfants beaucoup trop calmes, le ciel soudain est obscuri par des enfants qui volent ! Oui, qui volent. Je ne vous raconte pas la pagaille : ça crie, ça rit, ça pleure (de rire). Ă tel point que des flaques se forment, des flaques dans lesquelles on peut sauter et salir ses vĂȘtements. Il y a aussi du vent qui vient dĂ©coiffer les tĂȘtes et arracher les nattes. Et il y a des parents qui poussent des Oh ! et des Ah ! d'incomprĂ©hension. Dans le ciel, les enfants continuent de voler et de rendre ce monde un peu plus fou !
C'est tellement bien Ă©crit, merci Vincent Cuvellier, avec cette histoire c'est aussi un acte pour la dĂ©sobĂ©issance et l'extravagance. Faire un rototo, c'est bĂȘte mais c'est rigolo. AprĂšs cette volĂ©e d'oiseaux - pardon, d'enfants qui volent - les bambins de cette ville insipide auront plaisir Ă tirer la langue et sautiller de bon cĆur dans le dos des adultes. Et toc ! Ăa fait du bien de lire un album aussi farfelu. Les illustrations d'Aurore Callias sont du mĂȘme tonneau : en toute libertĂ© ! Une chouette lecture dĂ©bordante de folie douce. J'aime beaucoup.
Les enfants qui volent, de Vincent Cuvellier & Aurore Callias
Gallimard Jeunesse Giboulées, 2018
=================================
Non, Ămile n'a pas mangĂ© de lion. Il a juste la grosse patate. Enfin, ça c'est la version officielle. Car OUI Ămile a bien mangĂ© du lion ET du dentiste. Ăa lui apprendra, Ă sa maman, de prendre rendez-vous les jours oĂč il a la grosse patate. VoilĂ voilĂ .
Vous ne connaissez pas Ămile ? Filez donc. Filez vite. Achetez tout le rayon en librairie. On en reparle aprĂšs.
Ămile a la grosse patate, par Vincent Cuvellier & Ronan Badel
Gallimard Jeunesse Giboulées, 2018
=================================
CĆur sur toi, Princesse CamĂ©lia, hĂ©roĂŻne de cet album formidable et tellement drĂŽle ! â„
Tout commence par une rencontre : un roi tombe fou amoureux d'une bergĂšre. Il l'Ă©pouse. Elle grossit mais rouspĂšte. Pour la consoler, son mari l'entraĂźne sur l'Ăźle de Madagascar oĂč la faune locale lui redonne le sourire. Sans doute, trop. Car quelques mois aprĂšs, la dame accouche d'un bĂ©bĂ© Ă la peau verte et Ă la langue fine comme un camĂ©lĂ©on. C'est tout vu. La cour est estomaquĂ©e. La reine est Ă©plorĂ©e. Le roi condamne tout le monde Ă se taire. Et l'enfant est cachĂ© dans les tourelles. La princesse CamĂ©lia doit Ă©galement apprendre Ă tenir sa langue et Ă se plier Ă ses devoirs royaux. Lors de son bal de dĂ©butante, tous les prĂ©tendants sont fascinĂ©s par sa beautĂ© et son intelligence. On s'amuse follement Ă se lancer des dĂ©fis, comme toucher son coude avec sa langue. Essayez pour voir... vous m'en direz des nouvelles !
HĂ©las, CamĂ©lia a grillĂ© sa couverture et file de honte se planquer dans la forĂȘt. Son amoureux transi tombe en dĂ©pression. Sa famille boude. Le temps passe. Et les tourments broient toujours les pauvres Ăąmes en dĂ©tresse. Pourtant, « l'amour est une chose qui paraĂźt trĂšs compliquĂ©e et qui est trĂšs simple, en vĂ©ritĂ© ». Et tout le charme d'une histoire se cache dans les dĂ©tails. Vrai de vrai. Je ne vous dis pas la finesse de ce conte moitiĂ© romantique, moitiĂ© comique. C'est franchement diffĂ©rent de ce qu'on peut lire habituellement, diffĂ©rent de ce qu'on attendre. Et c'est tellement bon. Marianne Renoir Ă©crit trĂšs bien : sa plume jubile Ă partir dans des dĂ©lires. Ne lĂąchez rien ! J'ai trouvĂ© ça extra et tellement drĂŽle. C'Ă©tait gĂ©nial.
La princesse Caméléon, par Marianne Renoir & Karine Bernadou
Gallimard Jeunesse Giboulées, 2019
=================================
Un pÚre et son fiston font le tour de la galerie ornée des tableaux de leur illustre famille. Le papa s'enorgueillit d'un tel patrimoine et s'extasie sur leur destinée époustouflante : policier, pompier, peintre, astronaute... L'enfant trépigne. Lui aussi voudrait accomplir quelque chose de grand et de fort. Qui suscite l'admiration. Le pÚre n'en doute pas, persuadé qu'il deviendra lui aussi un chien formidable et magnifique.
Ceci dit, il ne faut pas se fier aux apparences. Les plus grandes histoires ont aussi un calque, un voile, un dessous caché. Car il y a une double lecture dans cet album. Un cÎté pile et face. Et certaines révélations sont surprenantes ! En tout cas, cela ne manque pas de tendresse. C'est un album adorable, à manipuler avec précaution en raison des pages qui se plient et se déplient en toute anarchie, mais l'effet kiss cool est fabuleux. TrÚs sympa.
Un chien formidable, par Davide Cali & Miguel Tanco
Gallimard Jeunesse Giboulées, 2019
=================================
La Poule qui avait pondu un boeuf, de Christian Oster & illustré par Jean-Luc Englebert
Branle-bas de combat Ă la ferme ! Denise la poule vient de pondre un bĆuf. Oui, un bĆuf. Gros, gras, imposant. Passablement niais et interloquĂ©. On croit rĂȘver. Denise fait aussitĂŽt appel Ă son amie Marge, qui a une thĂ©orie Ă ce propos. Denise a probablement avalĂ© un B avant de pondre un bĆuf, car tout le monde sait que le B devant l'Ćuf donne un bĆuf. Voyons, voyons... Aurait-elle avalĂ© une banane ou un bouillon ? De la brioche, de la betterave, du beurre, de la biscotte, des bigorneaux ? Non. Juste du blĂ©. C'est dĂ©jĂ une piste ! Tous les trois partent ainsi Ă travers la campagne pour mener leur enquĂȘte. En chemin, rien d'anormal... jusqu'Ă ce qu'ils croisent un fermier en train de s'Ă©poumonner Hue ! hue ! devant son attelage inexistant. Son histoire rĂ©serve encore de belles surprises Ă nos enquĂȘteurs en herbe et peut-ĂȘtre aussi la solution Ă tous leurs problĂšmes. Cette lecture revisitĂ©e et Ă l'humour farfelu, dont Christian Oster se fait le spĂ©cialiste, se lit avec des yeux ronds comme des billes et un sourire jusqu'aux oreilles. C'est certes invraisemblable et tirĂ© par les cheveux, mais ce zeste de fantaisie interpelle Ă juste titre les plus jeunes, qui dĂ©butent en lecture, et qui vont se triturer les mĂ©ninges avec cette leçon de B qui rend un Ćuf bĆuf (et inversement) ! TrĂšs drĂŽle, simple, efficace, avec des illustrations de Jean-Luc Englebert aussi cocasses et tendres pour accompagner cette promenade bucolique. Une valeur sĂ»re, toujours.
Mouche de L'ÂĂcole des Loisirs, mai 2016
C'est papy qui choisit, de Jean Leroy & Jean-Luc Englebert
Papy est un type extra, mĂȘme s'il a du mal Ă prendre des dĂ©cisions ou Ă sortir des sentiers battus. Chaque mercredi, quand il reçoit son petit-fils, c'est un peu toujours la mĂȘme rengaine... et Ă force, ça finit par ennuyer le garçon. Alors pourquoi ne pas chambouler les rĂšgles ? Pourquoi ne pas suggĂ©rer Ă papy de choisir pour de bon ? Et de fil en aiguille, on les retrouve dans le jardin avec un ballon de foot, puis au bistrot en train d'avaler un croque-monsieur pour le goĂ»ter, et pour finir une sortie au zoo... Franchement, quelle belle complicitĂ© !
Cette histoire traite avec tendresse de la relation exceptionnelle qui se tisse entre deux générations et qui, forcément, parlera beaucoup aux jeunes enfants. Il y a aussi une grande part de maladresse, mais traitée avec humour, si bien qu'on succombe à tous les ùges pour cet album attachant et adorable.
Pastel / Septembre 2014
Un Ours à l'école, de Jean-Luc Englebert
L'hiver approche. Tandis que sa maman s'affaire Ă prĂ©parer leur retraite et leur sommeil de saison, Petit Ours se promĂšne dans la forĂȘt. Il dĂ©couvre d'abord un joli bonnet, puis s'aventure un peu plus loin pour remarquer le spectacle des enfants jouant dans une cour d'Ă©cole. L'ours note qu'ils ont tous le mĂȘme bonnet sur la tĂȘte. Ce sont, forcĂ©ment, des copains. Il tente alors une timide approche.
Et les enfants l'entourent de leur curiositĂ© insatiable, ils le bombardent de questions, ils s'interrogent sur son accoutrement, puis lui tendent la main et l'entraĂźnent sans hĂ©siter avec eux, dans la classe, oĂč la maĂźtresse rĂ©alise avec un temps de retard que son nouvel Ă©lĂšve est aussi adorable qu'Ă©tonnant.
Au risque de me répéter, cette histoire d'ours vaut franchement son pesant de fraises, framboises, bleuets et autres champignons à déguster, pour toute la douceur et toute la tendresse qu'elle contient ! Les illustrations sont magiques. Et l'histoire d'une simplicité enfantine... mais tellement touchante.
Tout n'est qu'innocence et bienveillance, et ça fait toujours chaud au cĆur de lire des livres aussi rĂ©confortants. Une lecture Ă (re)dĂ©couvrir pour l'hiver qui s'annonce.
Pastel / Août 2015
Donne-moi une histoire, de Jean-Luc Englebert
Dis, Papa, donne-moi une histoire ...
... de chevaliÚre qui part à la guerre avec ses soldats, et qui n'en peut plus de trouver son aventure, alors elle décide de jeter l'éponge et s'attire les foudres de sa troupe de mécontents ...
... elle est punie, dans un cachot au fond de la forĂȘt, et attend d'ĂȘtre dĂ©livrĂ©e, non par un prince, que nenni !
Car rien ne vaut un bon vieux papa à l'imagination débordante.
Cette lecture est un clin d'Ćil aux histoires du soir que parents et enfants se partagent avant d'Ă©teindre la lumiĂšre pour faire un gros dodo. Il y a les livres qu'on lit Ă voix haute et les histoire qu'on invente pour briller aux yeux de sa progĂ©niture (croyez-moi, nous avons une grande expĂ©rience en la matiĂšre, ma fille appelait ça le rituel « des histoires avec la bouche » ...).
L'album de J-L. Englebert est une jolie rĂ©ussite, qui nous fait dĂ©couvrir une histoire facĂ©tieuse et riche en rebondissements, avec une hĂ©roĂŻne dĂ©lurĂ©e qui en a soupĂ© des dĂ©lires de princesse rose et rĂ©clame dĂ©sormais une Ă©quipĂ©e sauvage et dangereuse. Tout plutĂŽt que d'ĂȘtre prise pour une nouille. Et nous, on adore les hĂ©roĂŻnes avec autant de caractĂšre ! ;-)
L'histoire fait aussi la part belle Ă l'imaginaire et Ă la complicitĂ© entre le papa et sa fistonne. C'est adorable, cocasse et Ă©tonnant. MĂȘme la fin est cĂąline et prĂ©pare les enfants vers le sommeil rĂ©parateur. En bref, c'est une trĂšs bonne pioche Ă glisser dans sa bibliothĂšque.
Pastel, mars 2015
L'histoire du soir #5 : Dans la tempĂȘte, de Gwendoline Raisson & Jean-Luc Englebert
Au large des cĂŽtes de Chine, un bateau quitte la grande ville de ShangaĂŻ pour se rendre plus au sud. Il a Ă son bord un capitaine, deux marchands, une comtesse, un cuisinier, une famille nombreuse, un matelot et une petite servante.
Naviguant en pleine mer, le bateau ne peut Ă©chapper Ă la tempĂȘte qui s'abat sur lui. Les vagues se soulĂšvent, le vent souffle et l'embarcation est malmenĂ©e. A son bord, tout le monde tremble de peur. Seule la petite servante se met Ă Ă©coper l'eau Ă l'aide de sa minuscule tasse de thĂ©.
C'est ridicule, voyons. Le bateau va couler ! Mais elle continue à écoper.
C'est, hélas, trop tard. Et le drame se produit.
Tout ce petit monde est en détresse, s'accroche du mieux qu'il peut à l'épave du bateau. Encore une fois, la petite servante agit en silence et attrape les restes du bateau qui flottent autour d'elle. Enfin, on se réveille et décide de suivre son exemple. Un radeau de fortune voit ainsi le jour.
En s'y mettant à plusieurs, on peut espérer une issue favorable. La petite servante, elle, ne dit jamais un mot de trop. On comprend mieux pourquoi à la derniÚre page de l'histoire.
Alors, forcĂ©ment on ne peut s'empĂȘcher d'avoir le coeur qui bat un peu plus fort Ă ce moment prĂ©cis.
Cette histoire a été inspirée d'une légende amérindienne, celle du colibri. On a beau se sentir tout petit et impuissant face à une épreuve, on a en nous une faculté à réagir qui nous est propre, on peut paniquer, on peut pleurnicher, on peut demander de l'aide, ou on peut se retrousser les manches et chercher une solution. AprÚs tout, « chacun fait sa part. »
Ce qui est particuliĂšrement fascinant, aussi, dans cet album, ce sont les illustrations de la tempĂȘte. Elles paraissent tellement rĂ©alistes, qu'on ressent les frissons de l'angoisse et de l'oppression, comme si on subissait aussi cette tempĂȘte. C'est vraiment bluffant !
Dans la tempĂȘte, par Gwendoline Raisson - illustrations de Jean-Luc Englebert (Pastel, 2012)
-) extrait du blog de Gwendoline Raisson,