23/07/14

La Planète des singes, de Pierre Boulle

La Planète des singes

Un jeune couple, en croisière dans l'espace, trouve une bouteille contenant un manuscrit. L'histoire qu'il renferme raconte comment deux scientifiques et un journaliste ont atterri sur une planète inconnue, peuplée par des singes civilisés et des hommes réduits à l'état sauvage.
Le narrateur, Ulysse Mérou, livre alors un témoignage stupéfiant, rendant compte de l'intelligence exponentielle des primates, au détriment de la race humaine. Ses compagnons d'infortune sont, au mieux, des animaux de compagnie ou de foire, sinon des cobayes en laboratoire ou du simple gibier de chasse.
Quel cauchemar ! Ulysse est horrifié, mais ne trouve aucune explication à une telle dégénérescence de ses semblables. Pris au piège, il doit lui aussi se livrer à des simagrées et calquer son comportement à celui de son espèce (entièrement nu, il doit gesticuler et pousser des cris comme une bête). Car, pour sa survie, il doit absolument préserver ses capacités intellectuelles et en dévoiler le moins possible.
Le roman de Pierre Boulle est un grand classique, qui date de 1963, rendu célèbre au cinéma par Franklin J. Schaffner (1968) puis, plus récemment, par Tim Burton (2001), Rupert Wyatt (2011) et Matt Reeves (2014). J'ai vu toutes les adaptations en question, mais n'avais jamais lu le livre jusqu'à présent. Une lacune enfin réparée ! Et force a été de reconnaître que l'œuvre n'est nullement vieillissante, poussiéreuse ou datée... Bien au contraire. Elle apparaît résolument moderne, surprenante et prodigieuse.
Même si l'intrigue n'avait pour moi aucun secret, j'étais tout de même captivée par la lecture proposée par Bernard Gabay, habitué à doubler des acteurs au cinéma (Robert Downey Jr, Andy Garcia, Viggo Mortensen ou Daniel Day-Lewis), il a su insuffler puissance, angoisse et oppression à ce récit bluffant, “où les hommes sont confrontés à la barbarie de ces primates qui les ont pris pour modèles”.
Bref, c'est un texte court, mais de grande qualité, avec une intensité dramatique poignante... Et naturellement c'est à lire ou relire, destiné à tous les âges, son propos saisissant est aussi sujet à une réflexion pertinente et (éventuellement) une étude en classe pour les nombreuses interprétations qu'il recèle. INDISPENSABLE !!

Audiolib, juillet 2014 ♦ texte intégral lu par Bernard Gabay (durée d'écoute : 6h 01)

À noter : « La Planète des singes –L’Affrontement » sortira dans les salles de cinéma en France, le 30 Juillet ! Il s’agit de la suite de « La Planète des singes – Les origines », réalisée par Matt Reeves. Bien que le personnage de James Franco ne soit pas repris dans ce volet, c’est toujours Andy Serkis (Gollum) qui interprète le rôle de César.  

BANDE-ANNONCE  ici

 

La Planète des singes L’Affrontement

 

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14/10/13

Charly 9 (Audiolib) lu par Emmanuel Dekoninck

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Le roi Charles IX est tristement célèbre pour avoir proclamé le massacre de la Saint-Barthélemy.
Dans cette histoire, nous le découvrons jeune, peu sûr de lui, hésitant. Ses proches lui mettent la pression pour faire un peu de ménage, à l'occasion du mariage de sa soeur Marguerite, censé célébrer la réconciliation des catholiques et des protestants, donc sa mère (Catherine de Médicis) menace de rentrer chez elle, son jeune frère est animé d'une ambition dévorante et assomme son aîné de réflexions méprisantes, ses conseillers mettent sur le tapis un complot ourdi par les protestants visant à éliminer la famille royale.
Il n'est guère temps de tergiverser, il faut agir !
Mais cet acte sera lourd de conséquences, car le jeune Charles IX va être complètement traumatisé par cette nuit cauchemardesque. On la découvre simplement au lendemain, avec les rues baignant dans le sang, via aussi des scènes de corps déchiquetés exposés au public, de corps bouffis flottant dans la Seine...
La description du désastre est assez saisissante de réalisme et de détails horribles.
Les mois ainsi vont passer et Charles IX va sombrer dans une douce folie. Entre hallucinations, mauvais rêves, prise de conscience d'avoir été manipulé, le roi n'est plus que l'ombre de lui-même.
Ce triste spectacle nous est livré sans fausse pudeur, mais la verve de l'auteur rend finalement la lecture plus aisée à encaisser. Certes, l'histoire n'en demeure pas moins sordide et amère mais le ton pittoresque permet aussi une distance appréciable, et bénéfique. Il faut aussi opter pour la version Audiolib, qui est truculente et vivifiante à souhait. Emmanuel Dekoninck conte avec brio les violences d'un XVIe siècle déchiré par le fanatisme et les ambitions. La mise en scène est parfaite, absolument bluffante et quasi dépaysante.
Ce roman nous dévoile aussi les mœurs de l'époque, les origines du muguet offert au 1er mai, les plaisanteries du 1er avril, le jour de l'An fixé au 1er janvier. On croise aussi des figures insolites, comme le poète Ronsard, la reine Margot ou le futur Henri IV, présenté ici avec son fort accent béarnais et une odeur corporelle à faire tourner de l'œil !
De sympathiques détails qui permettent d'oublier un bref instant le portrait affligeant de ce roi victime de son destin.

Audiolib, avril 2011 - texte intégral lu par Emmanuel Dekoninck, durée : 4 h 32

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03/06/13

♫♪♫♪♪♫ (Un refrain sur les murs)

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Au cours de l'été 1987, Isabelle, fraîchement divorcée, envoie ses deux enfants chez leur père. A elle, maintenant, quatre semaines d'un vide intersidéral qu'il faut remplir pour garder la tête hors de l'eau... C'est ainsi qu'elle fait la connaissance d'un dénommé So What, qui joue du hautbois dans la rue. Contre le gîte et le couvert, il propose de repeindre la chambre de sa fille Romane en un orange pétant, symbole du bonheur.

Bizarrement, Isabelle accepte le deal. En effet, la jeune femme n'est pas du style à sortir des sentiers battus. Sa vie, elle la veut droite, bardée de barrières, à ne surtout pas dépasser. On lui a souvent reprocher son petit côté sage, très prévisible, son aspect froid et imperméable, comme si elle n'était pas douée pour le bonheur ou donner de l'amour en retour (d'où son échec conjugal). Mais elle n'y peut rien, Isabelle, elle est de la trempe de ces femmes transparentes, mais heureuses de leur petit bonheur sans nuages.

Par contre, sa fille Romane va grandir dans la rage et la révolte de cette vie passive et trop ordonnée. Dès que l'occasion se présentera, elle prendra la poudre d'escampette et brûlera la chandelle par les deux bouts. D'ailleurs, elle finira clouée sur un lit d'hôpital, brûlée vive, alors que sa mère livrera son dernier combat contre un cancer. Les deux femmes n'auront jamais trouvé le temps ni de se comprendre, ni de se pardonner.

Bref, c'est un petit roman absolument bouleversant, dont l'émotion et la justesse m'ont saisi à la gorge sans que je m'y attende. J'ai surtout aimé l'histoire d'Isabelle, une femme solitaire, incomprise, prisonnière de sa cage dorée, qui a conscience du regard et du jugement des autres, mais sans trouver l'énergie pour s'en échapper. Elle ploie, en silence. Elle subit, même si elle aimerait parfois taper du poing sur la table. Qu'on cesse de la trouver ennuyeuse, insipide, elle aime la physique mais déteste l'enseigner à des enfants bêtes à manger du foin, elle se conforte dans une mécanique laborieuse, rassurante, elle a des désirs, mais réprime ses élans.

C'est tout ça, une femme simple et honnête. Avec ses secrets, ses mensonges et ses tours de passe-passe. Le dernier chapitre de l'histoire m'a, par exemple, totalement bluffée et donnée envie de sourire. Il n'y a, finalement, que le portrait de Romane, cette jeune folle volage et impétueuse, qui m'a fait pousser des soupirs d'ennui. Heureusement, ses incursions étaient parcimonieuses et ne faisaient office que de faire-valoir pour percer la carapace d'Isabelle... Un doux et beau roman, donc, à découvrir le cœur vaillant. ;)

Un refrain sur les murs, par Murielle Magellan
édition Pocket, 2013  (préalablement paru aux éditions Julliard en 2011)
illustration de couverture : Marion Tigréat

14/09/09

Markus presque mort ~ Valérie Sigward

Julliard, 2009 - 102 pages - 15€

markus_presque_mortLe talent de Valérie Sigward se trouve dans la brièveté : comment raconter une histoire avec une économie de moyens, un style rien qu'à elle, une langue épurée et des mots qui touchent et vous retournent, une fois la dernière page tournée, le lecteur n'a rien gagné en certitude, si ce n'est d'avoir lu quelque chose d'unique et de très fort.
Ce nouveau roman, Markus presque mort, ne fait pas exception à la règle, en 100 pages la plongée est fraîche, vivifiante, pour devenir de plus en plus glaciale.
Markus et Franck sont deux meilleurs amis, inséparables. Ils roulent à deux sur la mob de Markus, Franck à l'arrière sur le porte-bagage, tous deux le casque collés aux oreilles, ils filent sans but. Un soir, le long du chemin du halage, Markus et Franck sont heurtés par un autre cyclo qui les expédie dans le décor. La facture sera lourde : Franck a les jambes en compote, Markus est plongé dans le coma. Le temps passe, Franck se reconstruit une vie et il n'ose plus rendre visite à son meilleur ami, toujours collé dans un lit à l'hôpital. Que s'est-il passé ce soir-là ? Le père de Markus veut comprendre, il dessine dans un cahier vert pour tuer le temps et pour donner libre cours à son chagrin et son impuissance. Franck a connaissance de ce cahier, et ça lui retourne le ventre, ça lui donne un profond sentiment de malaise, et il cause, il cause, il a besoin de vider son sac... jusqu'aux dernières pages, jusqu'au tout dernier mot du récit, qui vous scotche. Paf. Un dénouement qui nous laisse passablement médusé. Ni plus, ni moins.

du même auteur, Immobile va prochainement sortir en poche (pocket, début novembre 2009).

à lire, aussi : la fugue et loin, chez personne (julliard, 2006 et 2007).

 

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11/01/09

Le soir autour des maisons - Murielle Levraud

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L'histoire s'ouvre sur un paquet de café, de bon matin, la figure enfarinée, et l'attitude outrée. Il y a le couple Solange - Paulet, elle est toute discrétion, il a un balai coincé dans le postérieur. Elle ne vit que pour lui, s'efface mais s'étiole. Heureusement son amitié pour Brune-Olive la tire de son quotidien terriblement ordinaire. Elles sont régulièrement aperçues toutes deux bras dessus bras dessous dans la forêt, elles pouffent comme deux gamines, Solange est heureuse. Son amie est une femme forte, au tempérament bien trempé. Elle est mariée à Roland, un ancien taulard, désormais passionné de pêche.

La petite vie à La Garde, tranquille bourgade, est un cocon pour ses habitants, on y croise aussi le couple Diane et Josefa, autres figures emblématiques. L'une est un peu siphonnée, suite au passage de la remorque et de la comète et des deux "m". Elle a été prise sous l'aile de sa voisine d'en face, au grand dam de l'époux qui piaffe, car le temps passant, la voisine refuse que l'épouse regagne son foyer, sous prétexte qu'elle est toujours fragile...

Cela grince joliment dans ce roman, quand arrive le drame. Brune-Olive apprend une douloureuse nouvelle, elle a peu de temps pour agir et écrit deux cartons de lettres à envoyer pour faire semblant, pour après, comme si la vie allait continuer de couler paisible. 

C'est un très joli roman, pas long, qui est tendre et attendrissant. Jamais il ne se prend au sérieux, il met en scène des personnages colorés et attachants, le tout sur une note pleine de verve.

Vous obtenez ainsi une histoire délicieusement déjantée, mais pas loufoque. Cela ressemble davantage à une comédie vaudevillesque, pas trop lourde et bien digeste. On se régale, c'est parfait pour la détente et puis ça change des ambiances moroses. De la douceur, de la légèreté, c'est bien aussi.

Julliard, 2009 - 148 pages - 17€

 

L'éditeur le dit très bien : On ne s'ennuie jamais avec Murielle Levraud. Dans cette comédie farfelue, elle multiplie pour notre plus grand plaisir les situations invraisemblables, les quiproquos surréalistes et les coups de théâtre réjouissants. De son écriture enjouée qui regorge d'ingénieuses trouvailles, Murielle Levraud compose un univers naïf (au sens pictural du terme), ludique, enfantin et léger (même lorsqu'il s'agit d'y dépeindre des sujets graves) qui n'appartient qu'à elle.

Pour moi, cela ressemble à du Barbara Constantine.

Du même auteur, son premier roman est disponible en poche (pocket, 2007) : N'allez pas croire qu'ailleurs l'herbe soit plus verte... : Elle est plus loin et puis c'est tout

Précommandez : Le Soir Autour des Maisons

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